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13/10/2021 | FRANCE | N°19-23586

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 octobre 2021, 19-23586


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 octobre 2021

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 701 F-D

Pourvoi n° E 19-23.586

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 OCTOBRE 2021

La société Famille Michaud apiculteurs, exe

rçant sous l'enseigne Lune de Miel, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 19-23.586 contre l'arrêt rendu le 18...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 octobre 2021

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 701 F-D

Pourvoi n° E 19-23.586

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 OCTOBRE 2021

La société Famille Michaud apiculteurs, exerçant sous l'enseigne Lune de Miel, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 19-23.586 contre l'arrêt rendu le 18 juillet 2019 par la cour d'appel de Rouen (chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant :

1°/ au directeur général des douanes et droits indirects, domicilié [Adresse 1],

2°/ à la direction régionale des douanes et droits indirects du [Localité 2], dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Famille Michaud apiculteurs, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du directeur général des douanes et droits indirects et de la direction régionale des douanes et droits indirects du [Localité 2], après débats en l'audience publique du 6 juillet 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 18 juillet 2019) et les productions, la société Famille Michaud apiculteurs (la société) a déclaré, entre le 15 décembre 2011 et le 8 octobre 2012, l'importation de six lots de sirop d'agave. Le 19 novembre 2012, le commissionnaire en douane de la société, soutenant avoir commis une erreur dans la base de calcul des droits de douane, a saisi, aux fins de rectification des déclarations d'importation, l'administration des douanes, laquelle a, le 22 novembre 2012, édité des liquidations supplémentaires de droits. Le 18 décembre 2012, le commissionnaire en douane de la société, se prévalant d'une autre méthode de calcul des droits, a saisi l'administration des douanes d'une demande de remboursement.

2. Le 15 mars 2013, l'administration des douanes a informé la société de la reprise a posteriori de droits. Le 11 avril 2013, la société a adressé ses observations à l'administration des douanes, laquelle lui a répondu, le 29 avril 2013, qu'elle maintenait sa position et qu'elle la convoquait pour le 14 mai 2013 afin de l'entendre. Le 25 juin 2013, l'administration des douanes a émis un avis de mise en recouvrement (AMR).

3. Après rejet de sa contestation, la société a assigné l'administration en annulation de l'AMR et des décisions de rejet de ses demandes de remboursement et en décharge totale des droits supplémentaires réclamés.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de dire qu'elle est redevable de la somme de 59 144 euros au titre des droits de douanes suivant l'AMR du 25 juin 2013, alors « que toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations ; qu'en vertu de ces dispositions et du respect des droits de la défense, les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l'administration entend fonder sa décision ; qu'en l'espèce, aux termes d'une décision datée du 15 mars 2013, prise en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, l'administration des douanes a informé la société de la naissance d'une dette douanière d'un montant de 60 966,00 euros (57 134,00 euros de droits et 3 832,00 euros de TVA) ; que le 11 avril 2013, cette dette douanière a fait l'objet d'une contestation circonstanciée en fait et en droit de la société, notamment pour ce qui concerne la méthode de calcul à appliquer, de six pages ; que l'administration des douanes n'a jamais daigné répondre de manière précise aux observations qui lui avaient été adressées par le redevable ; que dans la lettre en réponse du 29 avril 2013, l'administration des douanes a répondu, de manière non motivée, qu'après étude des éléments lui ayant été communiqués, elle maintenait sa position et le montant de la dette douanière à hauteur de 60 966,00 euros sans aucune précision ; que le procès-verbal du 14 mai 2013 ne comportait pas d'explication sur la méthode de calcul retenue par l'administration des douanes ; que le 25 juin 2013, un avis de mise en recouvrement d'un montant de 60 966,00 euros était adressé à la société ; que l'ensemble de ces éléments font ressortir que la société n'a pas eu la possibilité au cours de la procédure administrative de faire prendre en considération, de manière utile et effective, ses explications et pièces justificatives, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes et le principe du respect des droits de la défense. »

Réponse de la Cour

5. Après avoir relevé que, par lettre du 15 mars 2013, l'administration des douanes avait informé la société de ce qu'elle entendait recalculer les droits s'élevant à la somme globale de 60 966 euros, dont 57 134 euros de droits de douane et 3 832 euros de TVA, en mentionnant les textes applicables et en informant la société de ce qu'elle disposait d'un délai de trente jours pour formuler des observations, droit dont celle-ci a usé le 11 avril 2013, l'arrêt retient que, le 29 avril 2013, l'administration des douanes a répondu à la société qu'elle maintenait sa position et l'a convoquée pour l'établissement d'un procès-verbal contradictoire et constate que ledit procès-verbal reprend les éléments sur lesquels l'administration s'est fondée pour calculer les droits dus et, par suite, émettre l'AMR le 25 juin 2013.

6. En l'état de ces constatations et appréciations, desquelles il ressort que l'administration a pris en compte les observations qui lui ont été transmises par la société, même si elle ne les a pas retenues, c'est sans méconnaître les dispositions des articles 67 A à 67 D du code des douanes, alors applicables, ni le principe du respect des droits de la défense que la cour d'appel a rejeté la demande d'annulation de la procédure présentée par cette société.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

7. La société fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis ; que pour retenir que la position de la société méconnaît les dispositions applicables, notamment l'article 42 paragraphe 2 et 4 du règlement (CE) n° 951/2006, la cour d'appel a relevé que s'agissant de la position tarifaire 1702 60 95, les droits s'établissent, selon la société, par la formule suivante : "0,4 €/100 kg/net par fractions de 1 % du poids de saccharose" ; qu'en statuant ainsi, quand il ressortait des conclusions de la société que cette formule n'était pas la sienne, puisque la formule qu'elle préconisait était "masse brute (en hecto kilogrammes) x taux de saccharose (en valeur algébrique) x 0,4 x 1 %", mais celle fixée par le règlement d'exécution (UE) n° 1006/2011 de la Commission du 27 septembre 2011 modifiant l'annexe I du règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil du 23 juillet 1987 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, la cour d'appel a dénaturé la portée des conclusions de la société et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ qu'il ne peut être procédé à une prise en compte a posteriori lorsque le montant des droits légalement dus n'a pas été pris en compte par suite d'une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane ; que par courrier du 19 novembre 2012, la société a demandé au bureau des douanes du [Localité 2] de rectifier six déclarations en douane en précisant : "nous avons commis une erreur de calcul sur la base de calcul des droits de douane DTN Z" ; que la société demandait à la douane d'examiner la situation, joignant la méthode de calcul selon elle applicable ; qu'après examen du bien-fondé de cette demande et validation du calcul proposé, l'administration des douanes a établi, le 22 novembre 2012, des avis de paiement rectificatifs ; que la société a clairement indiqué que ses demandes de rectification procédaient d'une nouvelle méthode de calcul, nécessairement examinées puis validées par la douane qui émettait les liquidations rectificatives, payées ensuite par la société ; qu'en dépit de cette prise de position formelle, écrite et opposable, la douane a contrôlé a posteriori la société et a considéré à rebours de sa position de 2012 qu'une autre méthode de calcul s'appliquait, générant un différentiel de droits entre ceux payés et ceux dus ; que si la dette douanière était fondée, elle résultait nécessairement d'une erreur de l'administration commise le 22 novembre 2012 lors de l'émission des six états de liquidation supplémentaires selon une nouvelle méthode de calcul et de nouveaux taux d'imposition ; que la confiance légitime résultait encore des réponses données par la direction générale des douanes à ses interrogations, notamment un courriel du 3 décembre 2012 où la douane communiquait à nouveau à la société sa position en lui donnant un exemple de déclaration d'importation où apparaissait la "bonne" méthode de calcul, qui s'avérera plus tard erronée et un courriel du 7 décembre 2012 où un agent des douanes a donné sa lecture de la réglementation ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que l'administration des douanes, dont l'erreur le 22 novembre 2012 n'était pas raisonnablement décelable par la société, a eu un comportement de nature à créer chez cette dernière une confiance légitime ; qu'en jugeant que les états émis le 22 novembre 2012 n'étaient pas de nature à fonder la confiance légitime de la société et que l'article 220, 2, b, du code des douanes communautaire, désormais repris à l'article 119 du code des douanes de l'Union, n'avait pas vocation à s'appliquer en l'espèce, la cour d'appel a violé ledit texte ;

3°/ que, s'il devait exister un doute sur l'interprétation, notamment du paragraphe 2 de l'article 42 du règlement (CE) 951/2006, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : "Le paragraphe 2 de l'article 42 du règlement (CE) n° 951/2006 indiquant une méthode de calcul de la teneur en saccharose, appliquée pour certains produits contenant moins de 85 % de saccharose, doit-il être interprété en ce sens que la teneur en sucre qui détermine les droits et taxes afférents à une position tarifaire suppose de multiplier la masse brute exprimée en hectokilogrammes des produits par le taux de saccharose exprimé en valeur algébrique multiplié par 0,4 € multiplié par 1 % ?" »

Réponse de la Cour

8. En premier lieu, après avoir énoncé que, selon l'article 42, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 951/2006 de la Commission du 30 juin 2006 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 318/2006 du Conseil du 20 février 2006 portant organisation commune des marchés dans le secteur du sucre, la teneur en saccharose, y compris la teneur en d'autres sucres calculés en saccharose, est déterminée, pour les produits contenant moins de 85 % de saccharose ou d'autres sucres calculés en saccharose, en retenant leur teneur en matière sèche, celle-ci étant déterminée d'après la densité de la solution diluée dans la proportion de poids de 1 à 1 et, pour les produits solides, par séchage, et calculée par multiplication avec le coefficient 1, l'arrêt retient que, pour déterminer le montant des droits dus, l'administration des douanes a pris en compte le brix, soit le pourcentage de matière sèche soluble, mentionné dans les certificats produits par la société le 19 novembre 2012 à l'appui de ses demandes de liquidations supplémentaires de droits, puis retient que la teneur en saccharose au sens fiscal correspond à la teneur en matière sèche x 1, soit en l'espèce 75 % x 1 = 75 %, et que, par application des règlements (UE) n° 861/2010 de la Commission du 5 octobre 2010 et (UE) n° 1006/2011 de la Commission du 27 septembre 2011, applicables aux marchandises litigieuses, les droits pour 100 kg de produits ayant une teneur en saccharose au sens fiscal de 1 % s'élèvent à 0,4 euro, ce montant s'appliquant à chaque fraction de 1 % de poids de saccharose, de sorte que, pour 100 kg de produits ayant une teneur en saccharose de 75 %, le droit s'élève à (0,4 x 75) 30 euros. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, c'est sans dénaturation ni méconnaissance de l'objet du litige que la cour d'appel a calculé les droits de douane dus par la société selon la formule 0,4 x masse nette en hectokilogrammes x brix, complétée avec les éléments déclarés pour chaque importation, et en a déduit qu'ils s'élevaient aux montants retenus par l'administration.

9. En second lieu, l'arrêt retient que les liquidations supplémentaires de droits, invoquées par la société pour fonder une confiance légitime, ont été éditées dans le délai de l'article 218, 3, du code des douanes communautaire, sur la base des déclarations de l'importateur, et n'ont donné lieu à aucune vérification de l'administration, laquelle conservait la possibilité d'exercer un contrôle sur les éléments déclarés dans un délai de trois ans, conformément à l'article 78 du même code. Il retient encore, s'agissant des courriels de l'administration des 3 et 7 décembre 2012, dont se prévaut aussi la société, que le premier n'est pas produit aux débats et que le second ne fait que reproduire les éléments réglementaires applicables. De ces seuls motifs, faisant ressortir l'absence d'erreur imputable à un comportement actif de l'administration des douanes, la cour d'appel a exactement déduit que les conditions d'application de l'article 220, 2, b, du code des douanes communautaire, prévoyant la non-prise en compte a posteriori des droits légalement dus par suite d'une erreur des autorités douanières elles-mêmes qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, n'étaient pas réunies, de sorte que l'administration pouvait poursuivre le recouvrement a posteriori des droits éludés.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

11. Et en l'absence de doute raisonnable quant à l'interprétation de l'article 42, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 951/2006, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle proposée par la société.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Famille Michaud apiculteurs aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Famille Michaud apiculteurs et la condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects et à la direction régionale des douanes et droits indirects du [Localité 2] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize octobre deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société Famille Michaud apiculteurs.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la société Famille Michaud Apiculteurs était redevable de la somme de 59 144 euros au titre des droits de douanes suivant l'avis de mise en recouvrement du 25 juin 2013,

Aux motifs que « comme le relève la DRDDI du [Localité 2], les prescriptions de l'article 67 A du code des douanes ont été respectées s'agissant de la communication de la décision envisagée, des motifs de cette décision et de l'invitation à faire toutes observations dans le délai de 30 jours ; que, par lettre en date du 11 avril 2013, la société Famille Michaud Apiculteurs a fait valoir ses observations qu'elle reprend pour l'essentiel dans ses conclusions devant la cour ; (?) qu'il est établi que par lettre du 15 mars 2013, la DRDDI du [Localité 2] a informé la société Famille Michaud Apiculteurs de ce qu'elle entendait recalculer les droits s'élevant à la somme globale de 60 966 euros dont 57 134 euros de droits de douane et 3832 euros de TVA, sa position étant explicitée par référence aux textes applicables, un délai de trente jours ayant été laissé à la société Famille Michaud Apiculteurs qui a formulé des observations le 11 avril 2013, de telle sorte qu'aucun manquement au principe du contradictoire n'est démontré ; que, par ailleurs, l'administration des douanes ayant fait savoir qu'elle entendait maintenir sa position, la société Famille Michaud Apiculteurs a été convoquée le 29 avril 2013 pour l'établissement d'un procès-verbal contradictoire qui reprend les éléments sur lesquels l'administration s'est fondée pour le calcul des droits d'un montant de 54.144 euros ayant donné lieu à l'émission le 25 juin 2013 d'un avis de mise en recouvrement (AMR) n° 0962/13/184 notifié à la société Famille Michaud Apiculteur, la notification comportant l'indication des voies de recours ; »

Alors que toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations ; qu'en vertu de ces dispositions et du respect des droits de la défense, les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue quant aux éléments sur lesquels l'administration entend fonder sa décision ; qu'en l'espèce, aux termes d'une décision datée du 15 mars 2013 (pièce n° 10), prise en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, la DRDDI du [Localité 2] a informé la société Famille Michaud Apiculteurs de la naissance d'une dette douanière d'un montant de 60 966,00 euros (57 134,00 euros de droits et 3 832,00 euros de TVA) ; que le 11 avril 2013, cette dette douanière a fait l'objet d'une contestation circonstanciée en fait et en droit de la société Famille Michaud Apiculteurs, notamment pour ce qui concerne la méthode de calcul à appliquer, de 6 pages (pièce n° 11) ; que l'administration des douanes n'a jamais daigné répondre de manière précise aux observations qui lui avaient été adressées par le redevable ; que dans la lettre en réponse du 29 avril 2013 (pièce n° 12), la DRDDI du [Localité 2] a répondu, de manière non motivée, qu'après étude des éléments lui ayant été communiqués, elle maintenait sa position et le montant de la dette douanière à hauteur de 60 966,00 euros sans aucune précision ; que le procès-verbal du 14 mai 2013 (pièce n° 14) ne comportait pas d'explication sur la méthode de calcul retenu par l'administration des douanes ; que le 25 juin 2013 (pièce n° 15), un avis de mise en recouvrement d'un montant de 60 966,00 euros était adressé à la société Famille Michaud Apiculteurs ; que l'ensemble de ces éléments font ressortir que la société Famille Michaud Apiculteurs n'a pas eu la possibilité au cours de la procédure administrative de faire prendre en considération, de manière utile et effective, ses explications et pièces justificatives, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes et le principe du respect des droits de la défense.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la société Famille Michaud Apiculteurs est redevable de la somme de 59 144 euros au titre des droits de douanes suivant l'avis de mise en recouvrement du 25 juin 2013,

Aux motifs qu' « entre décembre 2011 et octobre 2012, la société Famille Michaud Apiculteurs a importé 6 lots de sirop d'agave qui ont donné lieu aux déclarations d'importation qui suivent : la déclaration IMA n° 23668121 datée du 15 décembre 2011, la déclaration IMA n° 26938626 datée du 18 juin 2012, la déclaration IMA n° 27211775 datée du 2 juillet 2012 ; la déclaration IMA n° 27361214 datée du 9 juillet 2012 ; la déclaration IMA n° 27957095 datée du 9 août 2012 ; la déclaration IMA n° 28996634 datée du 8 octobre 2012 ; que néanmoins, le 22 novembre 2012, saisis par le commissionnaire en douane de la société Famille Michaud Apiculteurs, les services de la Direction Régionale des Douanes et Droits indirects du [Localité 2] ont édité une liquidation supplémentaire de droits ; que sur ce point, la DRDDI du [Localité 2] fait valoir que les avis de paiement établis en application de l'article 218.3 du code des douanes communautaire (CDC) permettent à l'administration, sans procéder à la révision des déclarations telles que prévues par l'article 78 du CDC de procéder aux liquidations supplémentaires demandées, de telle sorte que la société Famille Michaud Apiculteurs ne saurait se prévaloir des avis de mise en paiement émis au titre des déclarations d'importation susvisées ayant donné lieu de sa part au règlement de la somme de 1 658 euros de droits de douanes et 110 euros de TVA ; qu'en effet, ces documents établis sur la base des déclarations de l'importateur ne sont pas de nature à fonder la confiance légitime de la société Famille Michaud Apiculteurs qui est en outre mal fondée à se prévaloir des dispositions de l'article 220 § 2b du CDC désormais repris à l'article 119 du code des douanes de l'Union (CDU) qui vise à la non prise en compte des droits légalement dus par suite d'une erreur des autorités douanières qui ne pouvait être raisonnablement décelée par le redevable, ce texte n'ayant pas vocation à s'appliquer en l'espèce, les éléments litigieux résultant de propres déclarations de l'importateur dont l'expérience professionnelle est avérée, la société Famille Michaud Apiculteurs ne contestant pas avoir validé en France majoritairement auprès des bureaux de douanes de [Localité 1] et [Localité 3] plus de 900 déclarations d'importation, sous le régime 40 de mise en libre pratique au sein de l'Union européenne, de miels, sirops d'érable et sirop d'agave d'origines tierces (Argentine, Brésil, Canada, (?), Ukraine et Uruguay principalement) pour un montant de près de 60 millions d'euros ; que par lettre en date du 19 novembre 2012 adressée au bureau des douanes du port du [Localité 2], la société HTM, commissionnaire de transport, a sollicité pour sa cliente, la société Famille Michaud Apiculteurs, la rectification des droits applicables aux déclarations d'importation en vue de la liquidation de droits supplémentaires, relatives à chacune des déclarations d'importation, ce qui a donné lieu à l'établissement d'avis de paiement dès le 22 novembre 2012, dont la société Famille Michaud Apiculteurs entend se prévaloir ; que ces avis qui ont été émis dans le délai de l'article 218.3 du CDC n'ont donné lieu à aucune vérification de la part de l'administration des douanes qui a toujours la possibilité d'exercer un contrôle sur les éléments déclarés et ce dans un délai de trois ans conformément à l'article 78 du code des douanes communautaire qui dispose que les autorités douanières peuvent d'office ou à la demande du déclarant, après octroi de la mainlevée des marchandises, procéder à la révision de la déclaration ; qu'il ressort en outre de ce texte que lorsqu'il résulte de la révision de la déclaration ou des contrôles a posteriori que les dispositions qui régissent le régime douanier concerné ont été appliquées sur la base d'éléments inexacts ou incomplets, les autorités douanières prennent, dans le respect des dispositions éventuellement fixées, les mesures nécessaires pour rétablir la situation en tenant compte des nouveaux éléments dont elles disposent ; qu'en l'espèce, après avoir sollicité la liquidation de droits supplémentaires, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la société Famille Michaud Apiculteurs ayant payé à ce titre la somme de 1 768 euros dont 1 658 euros de droits de douane et 110 euros de TVA, l'importateur a adressé une nouvelle demande au bureau des douanes du [Localité 2] en vue du remboursement de droits pour un montant de 1 514 euros, soit 1 419 euros de droits de douanes et 95 euros de TVA, se fondant sur la réponse adressée par le bureau D2 de l'administration suivant courriel du 3 décembre 2012 non produit aux débats ; que, pour sa part, la DRDDI du [Localité 2] produit un courriel adressé le 7 décembre 2012 par Monsieur Y du bureau D2 de la direction générale des douanes qui ne fait que reproduire les éléments réglementaires dont il ressort que les produits importés (sirop d'agave) contenant moins de 85 % de saccharose, le calcul doit se faire sur la teneur en matière sèche laquelle doit être inscrite en case 44 de la déclaration en douane ; qu'à l'occasion de la demande de remboursement de la société Famille Michaud Apiculteurs, la DRDDI du [Localité 2] a repris l'ensemble des éléments et a notifié le 15 mars 2013 à la société Famille Michaud Apiculteurs le calcul des droits résultant du rapport d'essai n° 2013-138 du 20 février 2013 qui stipule que, le produit étant classé 17 02 60 95 00 par application du règlement (CE) n° 951/2006, le calcul de la teneur en saccharose du sirop est donné dans l'article 42-2 de ce règlement étant égale à la teneur en matière sèche multiplié par le coefficient 1 de telle sorte que le calcul opéré pour chacun des IMA a fait apparaître une dette douanière à la charge de la société Famille Michaud Apiculteurs d'un montant de 60 966 euros dont 57 134 euros de droits de douanes et 3 832 euros de TVA ; (?) ; que par lettre en date du 11 avril 2013, la société Famille Michaud Apiculteurs a fait valoir ses observations qu'elle reprend pour l'essentiel dans ses conclusions devant la cour ; qu'elle estime en effet que si les références textuelles communautaires utilisées par le service sont exactes, le taux du droit conventionnel est défini pour l'exercice 2012 par le règlement d'exécution (UE) n° 1006/2011 de la commission du 27 septembre 2011 modifiant l'annexe I du règlement (CEE) du conseil du 23 juillet 2658/87 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, identique à celle existant pour l'exercice 2011 ; que s'agissant de la position tarifaire 17 02 60 95, les droits s'établissent selon la société Famille Michaud Apiculteurs selon la formule suivante : « 0,4 €/ 100 kg/net par fractions de 1 % du poids de saccharose », alors que l'administration procède au calcul des droits comme suit : Masse brute x taux de saccharose x 0,4 € x 1 % ; que la position de la société Famille Michaud Apiculteurs méconnaît les dispositions applicables notamment l'article 42 paragraphe 2 et 4 du règlement (CE) n° 951/2006 dont il ressort que « la teneur en saccharose, y compris la teneur en d'autres sucres calculés en saccharose, est déterminée pour les produits contenant moins de 85 % de saccharose ou d'autres sucres calculés en saccharose, en constatant la teneur en matière sèche. La teneur en matière sèche est déterminée d'après la densité de la solution diluée dans la proportion de poids de 1 à 1, et pour les produits solides par séchage. La teneur en matière sèche est calculée par multiplication avec le coefficient 1. » ; que pour déterminer le montant des droits, la DRDDI du [Localité 2] a pris en compte les mentions figurant sur les certificats produits par la société Famille Michaud Apiculteurs le 19 novembre 2012 à l'appui de ses 6 demandes de liquidations complémentaires faisant figurer le « brix » qui correspond au pourcentage de matière sèche soluble ; qu'ainsi, la teneur en saccharose au sens fiscal correspond à la teneur en matière sèche X 1 soit en l'espèce 75 % x 1 = 75 % ; que par application des règlements (UE) 861/2010 et 1006/2011 applicables aux marchandises litigieuses 100 kg de produits ayant une teneur en saccharose en sens fiscal de 1 % s'élève à 0,4 euros, ce montant s'appliquant à chaque fraction de 1 % de poids de saccharose ; qu'ainsi, pour 100 kg de produits ayant une teneur en saccharose de 75 %, le droit de douanes s'élève à 0,4X 75= 30 euros ; que dès lors, eu égard eu éléments déclarés, les droits de douanes s'établissent comme suit : IMA n° 23668121 masse nette 38.640 kg brix 75 % (0,4X386,4X75) 11.592 €, IMA n° 26938626 masse nette 19.320 kg brix 75,2 % (0,4X193,2X75,2) 5.811€, IMA n° 27211775 masse nette 38.640 kg brix 75 % (0,4X386,4X75) 11.592€, IMA n° 27361214 masse nette 40.50 kg brix 76 % (0,4X405X76) 12.312€, IMA n° 27957095 masse nette 38.640kg brix 75 % (0,4X386,4X75) 11.592€, IMA n° 28996634 masse nette 20.542 kg brix 76 % (0,4X205,43X76) 6.245€, TOTAL 59.14 € »

Alors, en premier lieu, que les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis ; que pour retenir que la position de la société Famille Michaud Apiculteurs méconnaît les dispositions applicables notamment l'article 42 paragraphe 2 et 4 du règlement (CE) n° 951/2006, la cour d'appel a relevé que s'agissant de la position tarifaire 17 02 60 95, les droits s'établissent, selon la société Famille Michaud Apiculteurs, par la formule suivante : « 0,4 €/ 100 kg/net par fractions de 1 % du poids de saccharose » ; qu'en statuant ainsi quand il ressortait des conclusions de la société Famille Michaud Apiculteurs (concl. page 14) que cette formule n'était pas la sienne, puisque la formule qu'elle préconisait était « Masse brute (en hecto kilogrammes) x taux de saccharose (en valeur algébrique) x 0,4 x 1 % », mais celle fixée par le règlement d'exécution (UE) n° 1006/2011 de la Commission du 27 septembre 2011 modifiant l'annexe I du règlement (CEE) du Conseil du 23 juillet 2658/87 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, la cour d'appel a dénaturé la portée des conclusions de la société Famille Michaud Apiculteurs et violé l'article 4 du code de procédure civile.

Alors, en deuxième lieu, qu'il ne peut être procédé à une prise en compte a posteriori lorsque le montant des droits légalement dus n'a pas été pris en compte par suite d'une erreur des autorités douanières elles-mêmes, qui ne pouvait raisonnablement être décelée par le redevable, ce dernier ayant pour sa part agi de bonne foi et observé toutes les dispositions prévues par la réglementation en vigueur en ce qui concerne la déclaration en douane ; que par courrier du 19 novembre 2012, la société Famille Michaud Apiculteurs a demandé au bureau des douanes du [Localité 2] de rectifier six déclarations en douane en précisant : « nous avons commis une erreur de calcul sur la base de calcul des droits de douane DTN Z » (pièce n° 5) ; que la société Famille Michaud Apiculteurs demandait à la douane d'examiner la situation, joignant la méthode de calcul selon elle applicable ; qu'après examen du bien-fondé de cette demande et validation du calcul proposé, l'administration des douanes a établi, le 22 novembre 2012, des avis de paiement rectificatifs (pièce n° 6) ; que la société a clairement indiqué que ses demandes de rectification procédaient d'une nouvelle méthode de calcul, nécessairement examinées puis validées par la douane qui émettait les liquidations rectificatives, payées ensuite par la société ; qu'en dépit de cette prise de position formelle, écrite et opposable, la douane a contrôlé a posteriori la société Famille Michaud Apiculteurs et a considéré à rebours de sa position de 2012 qu'une autre méthode de calcul s'appliquait, générant un différentiel de droits entre ceux payés et ceux dus ; que si la dette douanière était fondée, elle résultait nécessairement d'une erreur de l'administration commise le 22 novembre 2012 lors de l'émission des six états de liquidation supplémentaires selon une nouvelle méthode de calcul et de nouveaux taux d'imposition ; que la confiance légitime résultait encore des réponses données par la Direction générale des douanes à ses interrogations, notamment un courriel du 3 décembre 2012 (pièce n° 7) où la douane communiquait à nouveau à la société sa position en lui donnant un exemple de déclaration d'importation où apparaissait la « bonne » méthode de calcul, qui s'avérera plus tard erronée et un courriel du 7 décembre 2012 (pièce n° 8) où un agent des douanes a donné sa lecture de la réglementation ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, faisant ressortir que l'administration des douanes, dont l'erreur le 22 novembre 2012 n'était pas raisonnablement décelable par la société Famille Michaud Apiculteurs, a eu un comportement de nature à créer chez cette dernière une confiance légitime ; qu'en jugeant que les états émis le 22 novembre 2012 n'étaient pas de nature à fonder la confiance légitime de la société Famille Michaud Apiculteurs et que l'article 220 § 2b du code des douanes communautaire désormais repris à l'article 119 du code des douanes de l'Union (CDU) n'avait pas vocation à s'appliquer en l'espèce, la cour d'appel a violé ledit texte.

Alors, en troisième lieu, que s'il devait exister un doute sur l'interprétation, notamment du paragraphe 2 de l'article 42 du Règlement (CE) 951/2006, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : « Le paragraphe 2 de l'article 42 du Règlement (CE) 951/2006 indiquant une méthode de calcul de la teneur en saccharose, appliquée pour certains produits contenant moins de 85 % de saccharose, doit-il être interprété en ce sens que la teneur en sucre qui détermine les droits et taxes afférents à une position tarifaire suppose de multiplier la masse brute exprimée en hecto kilogrammes des produits par le taux de saccharose exprimé en valeur algébrique multiplié par 0,4€ multiplié par 1 % ?. »


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-23586
Date de la décision : 13/10/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 18 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 oct. 2021, pourvoi n°19-23586


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SARL Cabinet Briard, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.23586
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