LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° C 20-86.907 F-D
N° 01009
CK
15 SEPTEMBRE 2021
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 SEPTEMBRE 2021
Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 1 de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 2e section, en date du 1er décembre 2020, qui, dans l'information suivie contre M. [U] [S] [Q] et autres, notamment des chefs de faux et usage, recel et complicité d'abus de biens sociaux, complicité de corruption active et passive, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance en date du 16 février 2021, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Des mémoires, en demande et en défense, et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Planchon, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [U] [S] [Q], et les conclusions de M. Salomon, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 7 novembre 2013, une information judiciaire a été ouverte des chefs de faux et usage de faux, abus de biens sociaux commis au préjudice des sociétés [K] technologies et [Y] [B] [K] fiduciaire ([Y]), blanchiment et recel de ces délits. Elle a été étendue ultérieurement, par plusieurs réquisitoires supplétifs, à des faits de faux et usage de faux, abus de biens sociaux, recel et blanchiment, notamment, de fraude fiscale.
3. Les investigations ont révélé que le produit des abus de biens sociaux avait été transféré, notamment, sur les comptes de M. [R] [C] [O], ressortissant brésilien représentant les intérêts du groupe [K] en Angola, ainsi que sur ceux des sociétés dont il est l'associé, sises au Brésil, via la société Montefiore Trading Corp, dirigée par lui et M. [A] [T] [W] [P].
4. Les 10 mars, 10 mai, 9 juin et 13 juin 2017, les autorités françaises ont adressé aux autorités judiciaires brésiliennes quatre commissions rogatoires internationales aux fins de solliciter la réalisation de perquisitions aux domiciles de MM. [C] [O] et [W] [P], de M. [S] [Q], assistant de ce dernier, et de M. Gerson [G] [H] [N], d'obtenir la remise immédiate, à l'issue des opérations, des documents et matériels informatiques saisis, et de faire remettre aux suspects contre émargement et à l'issue de leurs auditions une convocation pour première comparution et, dans le cas où ils seraient absents, de leur notifier, dés leur retour sur le territoire brésilien, une convocation pour première comparution.
5. MM. [S] [Q], [H] [N] et [C] [O] ont été interrogés à l'issue de ces investigations et se sont vus remettre une convocation pour un interrogatoire de première comparution à [Localité 1]. Absent de [Localité 2] au moment de l'exécution de ces demandes, M. [W] [P] ne pouvait être entendu et la convocation pour première comparution lui a été remise ultérieurement par les autorités brésiliennes.
6. Tous ont été mis en examen des chefs de faux et usage de faux, recel d'abus de biens sociaux, complicité d'abus de biens sociaux, corruption active d'agents publics étrangers et blanchiment d'abus de biens sociaux.
7. Par requête du 7 mars 2018, M. [S] [Q] a demandé à la chambre de l'instruction de prendre acte de la décision du Tribunal supérieur de justice (Superior Tribunal de Justiça) du 12 mai 2020 ayant annulé l'ensemble des actes réalisés au Brésil en exécution de la commission rogatoire internationale du 10 mars 2017 et de ses compléments adressés les 10 mai, 9 juin et 13 juin 2017 par les autorités françaises, de retirer du dossier l'ensemble des procès-verbaux relatifs aux actes accomplis au Brésil dans le cadre de la commission rogatoire internationale, de prononcer l'annulation de tous les actes intervenus ultérieurement qui en découlent et d'ordonner la restitution du cautionnement d'un montant de 6 000 000 euros remis par lui en raison de la mesure de contrôle judiciaire ainsi que des objets saisis au cours des perquisitions effectuées au Brésil.
Examen des moyens
Sur le moyen unique proposé par le procureur général près la cour d'appel de Paris
Enoncé du moyen
8. Le moyen est pris de la violation des articles 694, 380-4, 569, 591 et 593 du code de procédure pénale et des articles 1 à 3 de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République fédérative du Brésil signée le 28 mai 1996 et applicable au 1er avril 2000.
9. Sans contester que l'annulation, par une juridiction compétente de l'Etat requis, des actes d'exécution d'une commission rogatoire internationale prive ces actes de leur effet en France, Etat requérant, il critique l'arrêt en ce qu'il a déclaré la requête en annulation d'actes bien fondée et a ordonné le retrait de la procédure de diverses pièces et actes sur la base d'une décision rendue par une juridiction brésilienne annulant les actes d'exécution d'une commission rogatoire internationale, sans rechercher si cette décision présente, selon la législation de l'Etat requis, un caractère définitif ou exécutoire. Il critique l'arrêt en ce qu'il a déclaré la requête en annulation d'actes bien fondée et a ordonné le retrait de la procédure de diverses pièces et actes sur la base d'une décision rendue par une juridiction brésilienne annulant les actes d'exécution d'une commission rogatoire internationale, sans rechercher si cette décision présente, selon la législation de l'Etat requis, un caractère définitif ou exécutoire.
Réponse de la Cour
10. La Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la décision du Tribunal supérieur de justice (Superior Tribunal de Justiça) du 12 mai 2020 ayant annulé l'ensemble des actes réalisés au Brésil en exécution de la commission rogatoire internationale du 10 mars 2017 et de ses compléments adressés les 10 mai, 9 juin et 13 juin 2017 par les autorités françaises, est définitive et exécutoire.
11. En conséquence, le moyen est devenu sans objet.
12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze septembre deux mille vingt et un.