LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Z 20-85.110 F-D
N° 01027
CK
15 SEPTEMBRE 2021
REJET
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 SEPTEMBRE 2021
M. [Z] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 15 juillet 2020, qui, pour contravention douanière, l'a condamné à des amendes douanières et au paiement des droits fraudés.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [Z] [Z], les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 juin 2021 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 16 février 2017, la société Armorine, distributeur de produits pétroliers, a informé l'administration des douanes et des droits indirects de certaines irrégularités constatées lors de deux livraisons de carburants effectuées les 20 janvier et 6 février 2017 par la société Transports Mertz, transporteur, auprès d'une station-service exploitée par M. [Z] [Z].
3. Elle a indiqué que M. [Z] avait rejeté les lettres de change présentées pour paiement de ces deux livraisons au motif qu'il n'avait ni commandé, ni réceptionné ce carburant.
4. Les ordres de transport comportaient la signature et le cachet d'un « garage [C] [C] », qui s'est avéré ne plus exister.
5. A l'issue de l'enquête diligentée par l'administration des douanes, M. [Z] a été convoqué devant le tribunal correctionnel des chefs de faux et usage de faux pour avoir falsifié les ordres de transport.
6. Parallèlement, l'administration des douanes et des droits indirects a fait citer M. [Z] devant cette même juridiction d'une part pour ne pas avoir respecté l'obligation faite aux distributeurs de gazole sous condition d'emploi d'opérer la vérification physique du stock de ce gazole, faits susceptibles de constituer la contravention de première classe de défaut de respect des dispositions d'un texte que l'administration des douanes est chargée d'appliquer, sans incidence sur le recouvrement d'un droit ou d'une taxe, d'autre part pour n'avoir pas enregistré en comptabilité-matière les carburants livrés les 20 janvier et 6 février 2017, ni les sorties de stocks consécutives à la réception de ces produits pétroliers, faits susceptibles de constituer la contravention de deuxième classe d'accomplissement d'une manoeuvre tendant à faire bénéficier indûment son auteur d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite portant sur des produits énergétiques.
7. Le 28 février 2019, le tribunal correctionnel a relaxé M. [Z] des chefs de faux et usage, ainsi que du chef de manoeuvre tendant à bénéficier indûment d'une exonération, d'un dégrèvement ou d'une taxe réduite portant sur un produit énergétique et l'a condamné à 5 000 euros d'amende pour la seule contravention de première classe de défaut de respect des dispositions d'un texte que l'administration des douanes est chargée d'appliquer.
8. La société Armorine, distributeur du carburant, et la société de Transport Mertz qui s'étaient constituées parties civiles, ont été déboutées de leurs demandes.
9. L'administration des douanes et des droits indirects ainsi que les parties civiles ont formé appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur les deuxième et troisième moyens
10. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [Z] au paiement d'une amende douanière de 6 000 euros en réparation de la contravention douanière de 1re classe, après avoir constaté que la direction des douanes et des droits indirects s'est expressément désistée de son recours, s'agissant de la disposition du jugement ayant déclaré M. [Z] coupable des faits de non-respect des dispositions d'un texte que l'administration des douanes est chargée d'appliquer (absence d'incidence sur le recouvrement d'un droit ou d'une taxe), contravention douanière de 1re classe, commise entre le 20 janvier et le 6 février 2017 et jusqu'au 6 mars 2017, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article 509 du code de procédure pénale, l'affaire est dévolue à la cour d'appel, dans les limites fixées par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant ; qu'il résulte en l'espèce des éléments du dossier et des propres constatations de l'arrêt, que l'administration des douanes s'est expressément désistée de son recours s'agissant de la disposition du jugement ayant déclaré M. [Z] coupable des faits de non-respect des dispositions d'un texte que l'administration des douanes est chargée d'appliquer, contravention de 1re classe ; qu'en aggravant néanmoins l'amende prononcée par le premier juge et en condamnant M. [Z] au paiement d'une amende douanière de 6 000 euros en répression de la contravention de 1re classe, alors même que le tribunal avait prononcé une amende contraventionnelle de 5 000 euros, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2°/ que l'arrêt ne pouvait, sans se contredire, constater d'une part que l'administration des douanes a indiqué se désister de son recours s'agissant de la contravention douanière de première classe, et limiter son appel aux dispositions du jugement ayant relaxé M. [Z] de la contravention de 2e classe, et d'autre part considérer que rien ne justifie de réduire le montant des amendes fiscales encourues par M. [Z] et le condamner au paiement d'une amende douanière de 6 000 euros en répression de la contravention de 1re classe, méconnaissant ainsi les prescriptions de l'article 509 du code de procédure pénale, ensemble l'article 593 du même code. »
Réponse de la Cour
12. Il résulte des articles 502 et 509 du code de procédure pénale que l'administration des douanes et des droits indirects, lorsqu'elle exerce l'action pour l'application des sanctions fiscales, qui a le caractère d'une action publique, peut limiter son appel aux sanctions prononcées.
13. Pour juger que seule la déclaration de culpabilité au titre de la contravention de 1re classe est devenue définitive et porter le montant de l'amende prononcé en répression à 6 000 euros, l'arrêt attaqué relève que, lors de l'audience, l'administration des douanes a expressément indiqué limiter son appel aux dispositions du jugement ayant relaxé M. [Z] de la contravention de 2e classe, ayant statué sur les amendes douanières et l'ayant déboutée de ses demandes.
14. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas méconnu le texte visé au moyen, dès lors que, lors de l'audience, l'administration des douanes, qui avait formé appel de l'ensemble des dispositions douanières du jugement, s'est uniquement désistée de son recours s'agissant de la déclaration de culpabilité du prévenu au titre de la contravention douanière de 1re classe.
15. Ainsi, le moyen doit être écarté.
Sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné à M. [Z] à payer à la société Armorine, ainsi qu'à la société Transport Mertz la somme de 5 000 euros chacune au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale, après avoir débouté la société Mertz de toutes ses demandes indemnitaires, alors « qu'aux termes de l'article 475-1 du code de procédure pénale, le tribunal condamne l'auteur de l'infraction ou la personne condamnée civilement en application de l'article 470-1 à payer à la partie civile la somme qu'il détermine ; qu'en l'espèce, M. [Z] n'ayant été condamné ni pénalement, ni civilement à l'égard de la société Transports Mertz, c'est à tort et en violation du texte dont s'agit que la cour d'appel a condamné M. [Z] à payer 5 000 euros à cette société sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
17. Pour condamner le prévenu à verser à la société Transport Mertz 5 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale, la cour d'appel, saisie de la relaxe du prévenu par le seul appel des parties civiles, après avoir constaté l'existence d'une faute civile commise par le prévenu, démontrée à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite, relève d'une part que les sommes réclamées par la société Mertz, correspondant aux dépenses engagées dans le cadre de la procédure introduite devant le tribunal de commerce d'Évreux, ne sont pas la conséquence directe de la faute commise par M. [Z] mais résultent du choix procédural effectué par la société Mertz, d'autre par que celle-ci n'apporte pas la preuve du préjudice commercial qu'elle invoque.
18. Les juges ajoutent qu'il serait inéquitable de laisser à la charge de la partie civile les frais irrépétibles qu'elle a exposés pour assurer la défense de leurs intérêts en première instance et en appel.
19. En statuant ainsi et dès lors qu'elle a reçu la constitution de partie civile de la société Mertz, la cour d'appel a justifié sa décision, peu important qu'elle l'ai déboutée de ses demandes indemnitaires.
20. Ainsi, le moyen doit être écarté.
21. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze septembre deux mille vingt et un.