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09/09/2021 | FRANCE | N°20-14217

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 septembre 2021, 20-14217


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 802 F-D

Pourvoi n° S 20-14.217

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [C] [H],

2°/ M. [D] [H],

3°/ M. [E] [H],



tous trois domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° S 20-14.217 contre l'arrêt rendu le 13 novembre 2019 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 802 F-D

Pourvoi n° S 20-14.217

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 SEPTEMBRE 2021

1°/ M. [C] [H],

2°/ M. [D] [H],

3°/ M. [E] [H],

tous trois domiciliés [Adresse 1],

ont formé le pourvoi n° S 20-14.217 contre l'arrêt rendu le 13 novembre 2019 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige les opposant à M. [N] [I], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de MM. [C], [D] et [E] [H], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [I], et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 juin 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 13 novembre 2019), M. [I] est propriétaire d'une parcelle voisine de celle appartenant à M. [E] [H], M. [C] [H] et M. [D] [H] (les consorts [H]).

2. Reprochant à ses voisins diverses voies de fait, dont un empiétement sur sa propriété, il a saisi un juge des référés, qui, par une ordonnance du 23 janvier 2018, a condamné, sous astreinte, les consorts [H] à remettre en état sa parcelle et à réparer les deux bornes judiciaires détruites.

3. La cour d'appel a confirmé cette décision par un arrêt du 27 juin 2018.

4. Les consorts [H] ont saisi la cour d'appel d'une demande de rétractation de cet arrêt.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Les consorts [H] font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande en rétractation de l'arrêt du 27 juin 2018, alors :

« 1°/ que constitue une circonstance nouvelle au sens de l'article 488 alinéa 2 du code de procédure civile tout élément de fait ignoré du juge lorsqu'est intervenue la première décision de référé et susceptible d'avoir une influence sur son appréciation du bien-fondé des demandes présentées devant lui ; qu'en se fondant sur la circonstance que le classement sans suite de la plainte des consorts [H] n'était pas définitif et ne mettait pas un terme à la procédure pénale, pour rejeter la demande de modification de l'arrêt du 27 juin 2018, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

2°/ que constitue une circonstance nouvelle au sens de l'article 488 alinéa 2 du code de procédure civile tout élément de fait ignoré du juge lorsqu'est intervenue la première décision de référé et susceptible d'avoir une influence sur son appréciation du bien-fondé des demandes présentées devant lui ; qu'en l'espèce, le classement de la plainte déposée par les consorts [H], postérieur à la décision visée par la demande de modification, était justifié par la circonstance que les auteurs des dégradations causées aux bornes judiciaires délimitant les parcelles des consorts [I] et [H] n'avaient pu être identifiés ; qu'en estimant que ce classement sans suite était sans incidence dès lors que la plainte ne portait pas sur les autres voies de fait reprochées aux consorts [H], la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à exclure l'existence de circonstances nouvelles justifiant la modification de l'arrêt en ce qu'il avait ordonné la remise en état des bornes judiciaires et condamné les consorts [H] à verser à M. [N] [I] une provision, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de l'article 488, alinéa 2, du code de procédure civile qu'une ordonnance de référé, qui n'a pas au principal, l'autorité de la chose jugée, ne peut être rapportée en référé qu'en cas de circonstances nouvelles.

7. Ayant constaté, d'une part, que le classement sans suite de la plainte des consorts [H] pour destruction des bornes délimitant les parcelles litigieuses ne mettait pas fin à la procédure pénale qui pouvait être reprise à la faveur d'éléments nouveaux, d'autre part, que l'arrêt du 27 juin 2018 ne se limitait pas à la question de la destruction de ces bornes mais retenait également l'implantation de piquets métalliques pour séparer les parcelles, telles que revendiquées par les consorts [H], et le labourage d'une partie de la parcelle de M. [I] par ces derniers, qui s'étaient ainsi appropriés de fait pour partie le bien d'autrui, la cour d'appel en a exactement déduit qu'en l'absence d'éléments suffisants pour caractériser une circonstance nouvelle susceptible d'avoir une influence sur le litige, la demande de rétractation de l'ordonnance de référé devait être rejetée.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [C], [D] et [E] [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par MM. [C], [D] et [E] [H] et les condamne à payer à M. [I] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour MM. [C], [D] et [E] [H]

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté les consorts [H] de leur demande en rétractation de l'arrêt du 27 juin 2018 ;

Aux motifs que « selon l'article 488 du code de procédure civile : "l'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée. Elle ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu'en cas de circonstances nouvelles" ; que seules des circonstances nouvelles survenues postérieurement à l'ordonnance peuvent ouvrir la voie de l'article 488 du code de procédure civile ; que ne constituent pas des circonstances nouvelles au sens de l'article 488 du code de procédure civile permettant la modification ou la rétractation d'une ordonnance de référé, des faits antérieurs à la date de l'audience et connus du défendeur à qui il appartenait de les invoquer, ou ceux dont ils ne pouvaient ignorer l'existence ; qu'en l'absence de circonstances nouvelles, le juge est lié par la décision initiale et ne peut en méconnaître l'autorité de la chose jugée au provisoire ; qu'à cet égard, les consorts [H] estiment qu'ils n'ont été informés de la destruction des bornes que très tardivement alors que M. [I] l'a constaté dès août 2017 ; que les résultats de l'enquête n'étaient pas connus à la date de l'audience et ne pouvaient donc pas être invoqués à l'époque ; que le parquet a lui-même clôturé l'enquête le 21 septembre 2018 ; qu'ils n'ont reçu l'information que le 13 novembre 2018 après relance du ministère public ; que les consorts [H] estiment que le classement de l'enquête est constitutif d'un élément nouveau ; qu'en réponse, M. [I] fait valoir que les consorts [H] ont produit la copie partiellement tronquée d'une lettre du parquet d'Agen, que cette absence de loyauté justifie d'écarter la pièce des débats ; qu'en tout état de cause un classement sans suite ne peut faire l'objet d'une circonstance nouvelle, s'agissant d'une décision en opportunité ; qu'en l'espèce par arrêt du 27 juin 2018 faisant suite à l'audience qui s'était tenue le 31 mai précédent, la cour d'appel d'Agen, qui a débouté les consorts [H] de leur exception de nullité tirée de la nullité de l'assignation introductive d'instance et de la violation du principe du contradictoire, a jugé que les constatations telles que rapportées par procès-verbal d'huissier caractérisaient la voie de fait reprochée au consorts [H] et par suite étaient constitutifs d'un trouble manifestement illicite ; que les consorts [H] estiment que la clôture de l'information en date du septembre 2018, portée à leur connaissance le 13 novembre suivant, caractérise circonstance nouvelle tirée de l'article 488 du code de procédure civile ; qu'à cet égard, par courrier dont la date est illisible, le parquet du tribunal de grande instance d'Agen a informé le conseil des consorts [H] du classement sans suite le 21 septembre 2018 de la plainte concernant la procédure de destruction au motif "auteur inconnu" ; que la procédure n° 18-215-105 de la gendarmerie de [Localité 1] nous apprend qu'il s'agit de la question de la destruction des bornes délimitant les parcelles, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter une pièce dont il peut être compris le sens ; que s'il n'est pas contestable que le classement sans suite est intervenu postérieurement au prononcé de l'arrêt, pour autant comme le rappelle très justement M. [I] un avis de classement sans suite, ne met pas fin à la procédure pénale qui peut être reprise à la faveur d'éléments nouveaux ; que surtout l'arrêt du 27 juin 2018 ne se limite pas à la question de le destruction des bornes, mais retient comme étant constitutifs d'un trouble manifestement illicite, les faits d'implantation de piquets métalliques pour séparer les parcelles telles que revendiquées par les consorts [H], ainsi qu'au labourage de la parcelle [Cadastre 1] ([I]) plantée de soja, ce "sur 5,60 mètres côté route, 7,60 mètres côté parcelle [Cadastre 1] ce sur une longueur de 103,83 mètres" s'appropriant de fait pour partie le bien d'autrui ; qu'en conséquence, en l'absence d'éléments nouveaux suffisants postérieurs à la date où la cour a statué, les consorts [H] sont déboutés de leur requête en rétractation de référé, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner les demandes subséquentes » (arrêt, p. 2, pénult. § et s.) ;

Alors, d'une part, que constitue une circonstance nouvelle au sens de l'article 488 alinéa 2 du code de procédure civile tout élément de fait ignoré du juge lorsqu'est intervenue la première décision de référé et susceptible d'avoir une influence sur son appréciation du bien-fondé des demandes présentées devant lui ; qu'en se fondant sur la circonstance que le classement sans suite de la plainte des consorts [H] n'était pas définitif et ne mettait pas un terme à la procédure pénale, pour rejeter la demande de modification de l'arrêt du 27 juin 2018, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Alors, d'autre part, que constitue une circonstance nouvelle au sens de l'article 488 alinéa 2 du code de procédure civile tout élément de fait ignoré du juge lorsqu'est intervenue la première décision de référé et susceptible d'avoir une influence sur son appréciation du bien-fondé des demandes présentées devant lui ; qu'en l'espèce, le classement de la plainte déposée par les consorts [H], postérieur à la décision visée par la demande de modification, était justifié par la circonstance que les auteurs des dégradations causées aux bornes judiciaires délimitant les parcelles des consorts [I] et [H] n'avaient pu être identifiés ; qu'en estimant que ce classement sans suite était sans incidence dès lors que la plainte ne portait pas sur les autres voies de fait reprochées aux consorts [H], la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à exclure l'existence de circonstances nouvelles justifiant la modification de l'arrêt en ce qu'il avait ordonné la remise en état des bornes judiciaires et condamné les consorts [H] à verser à M. [N] [I] une provision, a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-14217
Date de la décision : 09/09/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Agen, 13 novembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 sep. 2021, pourvoi n°20-14217


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Delvolvé et Trichet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.14217
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