La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/09/2021 | FRANCE | N°20-13705

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 septembre 2021, 20-13705


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 816 FS-D

Pourvoi n° K 20-13.705

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 SEPTEMBRE 2021

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et

d'allocations familiales (URSSAF) de Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de l'URSSAF des Bouches-du-Rh...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 septembre 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 816 FS-D

Pourvoi n° K 20-13.705

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 SEPTEMBRE 2021

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de l'URSSAF des Bouches-du-Rhône, a formé le pourvoi n° K 20-13.705 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 4-8), dans le litige l'opposant à la société Les Beaux Arts, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. de Leiris, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur, de la SCP Spinosi, avocat de la société Les Beaux Arts, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 16 juin 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. de Leiris, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Kermina, Durin-Karsenty, Maunand, conseillers, Mmes Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mme Dumas, conseillers référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 décembre 2019), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2009 à 2011, l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF) a notifié à la société Les Beaux Arts (la société), le 29 octobre 2012, une lettre d'observations, suivie d'une mise en demeure.

2. La société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

4. L'URSSAF fait grief à l'arrêt de déclarer l'appel recevable, de réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er février 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône, statuant à nouveau, d'annuler le redressement notifié à la société appelante et mis en recouvrement par elle, de la débouter de sa demande formulée au titre des frais irrépétibles et de la condamner au paiement des dépens de l'instance, alors « que sauf lorsqu'elle est régularisée par une autre déclaration d'appel dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, la déclaration d'appel qui tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués prive l'appel d'effet dévolutif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la déclaration d'appel formée par la société le 22 mars 2018 indiquait que cet appel tendait « à l'annulation ou à tout le moins à la réformation de la décision déférée » sans expressément viser les chefs de jugement critiqués de sorte qu'à défaut de toute régularisation effectuée dans le délai imparti, la cour d'appel n'était saisie d'aucun moyen ; qu'en réformant en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches-du-Rhône et en annulant le redressement mis en recouvrement par l'URSSAF à l'encontre de la société, sans constater que la déclaration d'appel du 22 mars 2018 avait été régularisée dans le délai imparti, la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucun moyen, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 562 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

5. La société conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que celui-ci est nouveau et mélangé de fait et de droit.

6. Cependant, le moyen est de pur droit dès lors qu'à supposer exacte la règle de droit qu'il invoque, la cour d'appel, qui a constaté que la déclaration d'appel ne comportait pas l'indication des chefs de jugement expressément critiqués, n'aurait pu statuer sur l'appel sans constater la régularisation de cette déclaration d'appel avant la clôture des débats.

7. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

8. En application de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le droit à l'accès au juge implique que les parties soient mises en mesure effective d'accomplir les charges procédurales leur incombant. L'effectivité de ce droit impose, en particulier, d'avoir égard à l'obligation faite ou non aux parties de constituer un avocat pour les représenter.

9. Aux termes de l'article 933 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel :

« La déclaration comporte les mentions prescrites par l'article 58. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision. »

10. À la différence de l'article 901 du même code, qui régit la procédure avec représentation obligatoire par avocat, l'article 933, de même que l'ensemble des autres dispositions régissant la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d'appel, instaurent un formalisme allégé, destiné à mettre de façon effective les parties en mesure d'accomplir les actes de la procédure d'appel.

11. Il est déduit de l'article 562, alinéa 1er, figurant dans les dispositions communes de ce code et disposant que l'appel défère à la cour d'appel la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, que lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement qui sont critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas (2e Civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528, publié). De telles règles sont dépourvues d'ambiguïté pour des parties représentées par un professionnel du droit (2e Civ., 2 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.954, publié).

12. Toutefois, dans la procédure sans représentation obligatoire, un tel degré d'exigence dans les formalités à accomplir par l'appelant constituerait une charge procédurale excessive, dès lors que celui-ci n'est pas tenu d'être représenté par un professionnel du droit. La faculté de régularisation de la déclaration d'appel ne serait pas de nature à y remédier.

13. Il en résulte qu'en matière de procédure sans représentation obligatoire, la déclaration d'appel qui mentionne que l'appel tend à la réformation de la décision déférée à la cour d'appel, en omettant d'indiquer les chefs du jugement critiqués, doit s'entendre comme déférant à la connaissance de la cour d'appel l'ensemble des chefs de ce jugement.

14. Ayant relevé que la déclaration d'appel formée par la société indiquait que son appel tendait à l'annulation ou, à tout le moins, à la réformation de la décision déférée, sans mentionner les chefs du jugement critiqués, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a réformé le jugement déféré et statué à nouveau sur l'affaire.

15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen

16. L'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler le redressement, alors :

« 1°/ que l'avis que l'organisme de recouvrement doit envoyer avant d'effectuer un contrôle doit être adressé exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle ; qu'en retenant, pour juger que la société Les Beaux Arts devait être personnellement destinataire de l'avis de contrôle, qu'elle était individuellement tenue au paiement de ses propres cotisations et contributions, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la qualité « d'employeur tenu aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions » de la société contrôlée et violé l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-1107 du 3 décembre 2013, applicable au litige ;

2°/ que les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, le protocole TGE filiales qui prévoyait la mise en place d'un dispositif de versement en lieu unique (VLU) mentionnait avoir été conclu entre la société Hippo gestion et cie « représentée par M. [W] [K], gérant, et dénommée entreprise contractante » agissant « en qualité de mandataire des sociétés citées en annexe qui sont les sociétés mandantes » et l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) « agissant pour le compte des URSSAF et dont relèvent les établissements de l'entreprise contractante et des entreprises mandantes » ; que ce protocole prévoyait en page 3 « À compter du 1er janvier 2011, l'URSSAF de [Localité 2] est seule habilitée à engager une procédure de contrôle des entreprises mandantes. » et rappelait en termes généraux la procédure applicable en précisant « À réception de l'avis de contrôle, les entreprises contractantes confirment l'adresse de l'établissement où les pièces nécessaires au contrôle sont mises à la disposition de l'inspecteur » de sorte que la société Hippo gestion et cie, qui était la seule entreprise contractante désignée par le protocole, était bien mandatée pour réceptionner l'avis de contrôle et confirmer l'adresse des établissements susceptibles de détenir les pièces nécessaires à son déroulement ; qu'en affirmant, pour dire que la société Les Beaux Arts devait être personnellement destinataire de l'avis de contrôle, que dans le protocole il n'était pas indiqué que cette société avait donné mandat à la société SNC Hippo gestion et cie pour le recevoir en ses lieux et place, la cour d'appel a dénaturé le protocole signé entre les parties le 7 janvier 2011, en violation du principe susvisé ;

3°/ que les juges doivent répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions oralement soutenues à la barre, l'URSSAF expliquait qu'outre la précision du numéro de SIREN de la société concernée et l'identité d'adresse de siège social, l'ensemble des sociétés du groupe disposaient d'une gestion centralisée effectuée au même étage de la tour Manhattan à [Localité 1] et insistait sur le fait que les documents comptables administratifs et financiers de toutes les sociétés du groupe lui avaient été remis par des interlocuteurs uniques, en l'occurrence la responsable paie administration du personnel et la directrice des ressources humaines du Groupe Flo, si bien que toutes les sociétés du groupe et notamment la société Les Beaux Arts, dont le numéro de SIREN figurait dans l'avis de contrôle, avaient nécessairement été destinataires de cet avis ; qu'en retenant que la précision du numéro de SIREN et l'identité de siège social ne permettaient pas démontrer que la société Les Beaux Arts avait été avisée des opérations de contrôles qui étaient projetées à son encontre, sans répondre au moyen de l'URSSAF tiré de l'existence d'une gestion administrative financière et comptable commune pour toutes les sociétés du groupe, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

17. Selon l'article R. 243-59, alinéa 1, du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige, l'avis que l'organisme de recouvrement doit envoyer, avant d'effectuer un contrôle en application de l'article L. 243-7 du même code, doit être adressé exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle.

18. L'arrêt retient que l'avis de contrôle a été adressé le 7 mars 2012 à la société Hippo gestion et cie, que s'il ressort du protocole de versement en un lieu unique signé, le 7 janvier 2011, entre celle-ci et l'ACOSS qu'elle a agi en tant que mandataire de l'ensemble des sociétés visées en annexe du protocole, pour signer ce dernier, chacune des sociétés autorisées à verser leurs cotisations auprès de la seule URSSAF / CGSS de [Localité 2] a, cependant, conservé une entité juridique distincte et demeure tenue individuellement au paiement de ses propres cotisations et contributions, indépendamment de l'obligation incombant également à la société Hippo gestion et cie de verser les siennes en un lieu unique. Il ajoute qu'à aucun moment dans le protocole, il n'est indiqué que la société concernée a donné mandat à la société Hippo gestion et cie pour recevoir l'avis de contrôle en ses lieu et place et que la précision de son numéro SIREN dans l'avis et l'identité de l'adresse de son siège social et de celui de la société Hippo gestion et cie ne démontrent pas qu'elle a été effectivement avisée, en sa qualité d'employeur, des opérations de contrôle préalablement à celui-ci.

19. De ces constatations et énonciations, procédant de son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, dont elle a fait ressortir que l'avis de contrôle n'avait pas été adressé à la personne à laquelle incombait, en sa qualité d'employeur, le paiement des cotisations et contributions faisant l'objet du contrôle litigieux, la cour d'appel a, sans dénaturation, exactement déduit que la procédure de contrôle suivie par l'URSSAF était irrégulière.

20. Le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit, et comme tel irrecevable en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur et la condamne à payer à la société Les Beaux Arts la somme de 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du neuf septembre deux mille vingt et un, et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré l'appel recevable, d'avoir réformé en toutes ses dispositions le jugement rendu le 1er février 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale des bouches du Rhône, statuant à nouveau, d'avoir annulé le redressement de la société Les Beaux Arts opéré par l'Urssaf PACA et mis en recouvrement par mise en demeure du 31 janvier 2013, d'avoir débouté l'Urssaf PACA de sa demande formulée au titre des frais irrépétibles et de l'avoir condamnée au paiement des dépens de l'instance.

Aux motifs que « Sur la recevabilité de l'appel selon l'article 933 du code de procédure civile ‘la déclaration d'appel comporte les mentions prescrites par l'article 58. Elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs de jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible (?)' ; néanmoins il est constant que les irrégularités qui affectent les mentions de la déclaration d'appel constituent des vices de forme qui ne peuvent entraîner la nullité de l'acte que sur justification d'un grief ; en l'espèce, la déclaration d'appel formée par la SAS Les Beaux Arts le 22 mars 2018, indique que ‘cet appel tend à l'annulation ou à tout le moins, à la réformation de la décision déférée à la cour' sans expressément viser les chefs de jugement critiqués ; mais à défaut pour l'Urssaf Paca de justifier d'un quelconque grief alors qu'elle a été en mesure de débattre de tous les chefs du jugement critiqués, la déclaration d'appel n'est pas nulle et l'appel sera déclaré recevable » ;

1. Alors que la déclaration d'appel mentionne à peine de nullité les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la déclaration d'appel formée par la société Les Beaux Arts le 22 mars 2018 indiquait que cet appel tendait « à l'annulation ou à tout le moins à la réformation de la décision déférée » sans expressément viser les chefs de jugement critiqués ; qu'en jugeant cependant qu'à défaut, pour l'Urssaf, de justifier d'un quelconque grief, la déclaration d'appel n'était pas nulle, quand l'existence d'un grief n'est pas exigé, la cour d'appel a violé l'article 901 du code de procédure civile ;

2. Alors en tout état de cause que sauf lorsqu'elle est régularisée par une autre déclaration d'appel dans le délai imparti à l'appelant pour conclure au fond, la déclaration d'appel qui tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués prive l'appel d'effet dévolutif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la déclaration d'appel formée par la société Les Beaux Arts le 22 mars 2018 indiquait que cet appel tendait « à l'annulation ou à tout le moins à la réformation de la décision déférée » sans expressément viser les chefs de jugement critiqués de sorte qu'à défaut de toute régularisation effectuée dans le délai imparti, la cour d'appel n'était saisie d'aucun moyen ; qu'en réformant en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône et en annulant le redressement opéré et mis en recouvrement par l'Urssaf PACA à l'encontre de la société Les Beaux Arts, sans constater que la déclaration d'appel litigieuse avait été régularisée dans le délai imparti, la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucun moyen, a excédé ses pouvoirs et violé l'article 562 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir a déclaré l'appel recevable, d'avoir réformé en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale des Bouches du Rhône le 1er février 2018 et, statuant à nouveau, d'avoir annulé le redressement de la société Les Beaux Arts par l'Urssaf PACA et mis en recouvrement par mise en demeure du 31 janvier 2013 pour la somme de 4 720 euros, d'avoir débouté l'Urssaf PACA de sa demande formulée au titre des frais irrépétibles et de l'avoir condamnée au paiement des dépens de l'instance.

Aux motifs que « il résulte des dispositions de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-941 du 8 juillet 2016, applicable au litige que l'avis que l'organisme de recouvrement doit adresser, avant d'effectuer un contrôle en application de l'article L. 243-7 du même code, doit l'être exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes aux paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle ; en l'espèce, il n'est pas discuté que l'avis de contrôle a été adressé le 7 mars 2012 à la SNC Hippo Gestion Cie, alors que le contrôle a concerné l'application des législations de sécurité sociale, de l'assurance chômage et de la garantie des salaires AGS par la SAS Les Beaux Arts ; l'adresse du siège social de la SAS Les Beaux Arts n'est pas identique à celle de la SNC Hippo Gestion et Cie puisque son siège social est situé [Adresse 1] ; Néanmoins, sur les courriers adressés par la société à L'Urssaf, et sur son mémoire devant la commission de recours amiable, elle indique la même adresse que celle de la SNC Hippo Gestion et Cie de sorte que l'avis de contrôle de l'application des législations par la SAS Les Beaux Arts pouvait légitimement être adressé au [Adresse 3], comme l'a fait l'Urssaf ; mais la société destinataire de l'avis de contrôle devait être la SAS Les Beaux Arts et non la SNC Hippo Gestion et Cie, dès lors qu'elle est individuellement tenue au paiement de ses propres cotisations et contributions, en sa qualité d'employeur ; Or, il ressort de la lecture du protocole de versement en un lieu unique signé entre la société SNC Hippo Gestion et Cie et l'ACOSS, le 7 janvier 2011, que si la première a agi en tant que mandataire de l'ensemble des sociétés visées en annexe du protocole, dont la SAS Les Beaux Arts pour signer le protocole il n'en demeure pas moins que chacune des sociétés mandantes a conservé une entité juridique distincte et demeure tenue individuellement au paiement de ses propres cotisations et contributions ; en effet, il ressort du paragraphe 2° du protocole que toute les sociétés mandantes citées en annexe, dont SAS Les Beaux Arts ‘sont autorisées à verser la totalité des cotisations dont elles sont redevables à l'égard de l'ensemble des organismes de recouvrement dont relèvent leurs établissements auprès de la seule Urssaf/CGSS de [Localité 2]' ; cette autorisation est à distinguer de l'obligation pour la société contractante SNC Hippo Gestion et Cie de verser les cotisations dont elle est elle-même redevable à l'égard de l'ensemble des organismes de recouvrement dont relèvent leurs établissements dans un lieu unique dans le 1° du protocole ; il s'ensuit que la SAS Les Beaux Arts était bien tenue, en qualité d'employeur, à une obligation de payer ses propres cotisations et contributions, indépendamment de l'obligation qui incombe également à la SNC Hippo Gestion et Cie, pour recevoir l'avis de contrôle en ses lieux et place ; a aucun moment dans le protocole il n'est indiqué que la SAS Les Beaux Arts a donné mandat à la SNC Hippo Gestion et Cie, pour recevoir l'avis de contrôle en ses lieux et place ; la SAS Les Beaux Arts devait donc être personnellement destinataire de l'avis de contrôle ; la précision du numéro de SIREN de la société effectivement concernée par le contrôle dans l'avis et l'identité d'adresse du siège sociale de la société concernée par le contrôle et celui de la société à laquelle a été adressé l'avis de contrôle ne permettent pas de démontrer que la SAS Les Beaux Arts, en sa qualité d'employeur concerné par le contrôle, a effectivement été avisée des opérations de contrôle préalablement à celui-ci conformément aux dispositions de l'article R. 243-59 I du code de la sécurité sociale ; l'envoi d'un avis de contrôle à la personne contrôlée étant une formalité substantielle qui garantit le respect du principe du contradictoire, son défaut est sanctionné par la nullité du redressement subséquent ; ainsi le redressement mis en recouvrement par mise en demeure en date du 31 juin 2013 pour la somme de 4 720 euros sera annulé ; en conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande subsidiaire d'annulation des chefs de redressement n° 1 et 2 de la lettre d'observations ; sur les frais et dépens L'Urssaf PACA succombant à l'instance supportera les dépens de celle-ci, étant précisé que l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale a été abrogé par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale, dont l'article 17 III prévoit que les dispositions relatives à la procédure devant les juridictions sont applicable aux instances en cours ; l'équité commande de dire que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais irrépétibles » ;

1. Alors que l'avis que l'organisme de recouvrement doit envoyer avant d'effectuer un contrôle doit être adressé exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle ; qu'en retenant, pour juger que la société Les Beaux Arts devait être personnellement destinataire de l'avis de contrôle, qu'elle était individuellement tenue au paiement de ses propres cotisations et contributions, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la qualité « d'employeur tenu aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions » de la société contrôlée et violé l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2013-1107 du 3 décembre 2013, applicable au litige ;

2. Alors en tout état de cause que les juges ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, le protocole TGE filiales qui prévoyait la mise en place d'un dispositif de versement en lieu unique (VLU) mentionnait avoir été conclu entre la société Hippo gestion et Cie « représentée par M. [W] [K], gérant, et dénommée entreprise contractante » agissant « en qualité de mandataire des sociétés citées en annexe qui sont les sociétés mandantes » et l'Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (ACOSS) « agissant pour le compte des Urssaf et dont relèvent les établissements de l'entreprise contractante et des entreprises mandantes » ; que ce protocole prévoyait en page 3 (p.3§1) « A compter du 1er janvier 2011, l'Urssaf de [Localité 2] est seule habilitée à engager une procédure de contrôle des entreprises mandantes. » et rappelait en termes généraux la procédure applicable en précisant « A réception de l'avis de contrôle, les entreprises contractantes confirment l'adresse de l'établissement où les pièces nécessaires au contrôle sont mises à la disposition de l'inspecteur » (protocole TGE p.3§3) de sorte que la société Hippo gestion et Cie, qui était la seule entreprise contractante désignée par le protocole, était bien mandatée pour réceptionner l'avis de contrôle et confirmer l'adresse des établissements susceptibles de détenir les pièces nécessaires à son déroulement ; qu'en affirmant, pour dire que la société Les Beaux Arts devait être personnellement destinataire de l'avis de contrôle, que dans le protocole il n'était pas indiqué que cette société avait donné mandat à la société SNC Hippo Gestion et Cie pour le recevoir en ses lieux et place, la cour d'appel a dénaturé le protocole signé entre les parties le 7 janvier 2011, en violation du principe susvisé ;

3. Alors que les juges doivent répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions oralement soutenues à la barre, l'Urssaf expliquait qu'outre la précision du numéro de Siren de la société concernée et l'identité d'adresse de siège social, toutes les sociétés du groupe étaient soumises à une gestion centralisée effectuée au même étage de la tour Manhattan à [Localité 1] et insistait sur le fait que les documents comptables administratifs et financiers de toutes les sociétés du groupe lui avaient été remis par des interlocuteurs uniques, en l'occurrence la Responsable Paie Administration du Personnel et la Directrice des Ressources Humaine du Groupe Flo, si bien que toutes les sociétés du groupe et notamment la société Les Beaux Arts, dont le numéro de SIREN figurait dans l'avis de contrôle, avaient nécessairement été destinataires de cet avis ; qu'en retenant que la précision du numéro de SIREN et l'identité de siège social ne permettaient pas démontrer que la société Les Beaux Arts avait été avisée des opérations de contrôles qui étaient projetées à son encontre, sans répondre au moyen de l'Urssaf tiré de l'existence d'une gestion administrative financière et comptable commune pour toutes les sociétés du groupe, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-13705
Date de la décision : 09/09/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 20 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 sep. 2021, pourvoi n°20-13705


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.13705
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award