LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° W 21-81.753 F-D
N° 01044
15 JUILLET 2021
RB5
NON LIEU À RENVOI
IRRECEVABILITE
M. PERS conseiller doyen faisant fonction de président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 15 JUILLET 2021
Mme [M] [R] a présenté, par mémoire spécial reçu le 1er juin 2021, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par elle contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-3, en date du 4 mars 2021, qui, pour complicité de violation d'interdiction de sortie du territoire et financement d'entreprise terroriste, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [M] [R], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 juillet 2021 où étaient présents M. Pers, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L'article 421-2-2 du code pénal est-il conforme au principe de la légalité des délits et des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 et de l'article 16 de la Constitution de 1958, en ce qu'il ne comporte aucune définition ni de la notion d'« entreprise terroriste », ni de la notion de « financement » ? »
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question est irrecevable en ce qu'elle vise l'article 16 de la Constitution, qui n'énonce aucun principe constitutionnel et ne renferme l'expression d'aucun droit ni d'aucune liberté susceptible de se rapporter à la question posée.
4. La question, en ce qu'elle vise l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
5. La question posée ne présente pas un caractère sérieux pour les raisons suivantes.
6. En premier lieu, le texte critiqué précise que le fait de financer une entreprise terroriste consiste à fournir, réunir ou gérer des fonds, valeurs ou biens quelconques ou à donner des conseils à cette fin.
7. En deuxième lieu, il renvoie nécessairement, s'agissant de la notion d'entreprise terroriste, aux autres articles du même chapitre qui définissent de manière limitative les actes de terrorisme.
8. Enfin, il prévoit que les agissements qu'il définit ne sont punissables qu'à la condition d'être commis dans l'intention de voir ces fonds, valeurs ou biens utilisés ou en sachant qu'ils sont destinés à être utilisés, en tout ou partie, en vue de commettre l'un quelconque des actes de terrorisme prévus au chapitre qui leur est dédié, indépendamment de la survenance éventuelle d'un tel acte.
9. Ainsi, l'article 421-2-2 du code pénal est-il rédigé en des termes suffisamment clairs et précis pour que son interprétation, qui entre dans l'office du juge pénal, puisse se faire sans risque d'arbitraire.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
DECLARE IRRECEVABLE la question prioritaire de constitutionnalité en ce qu'elle allègue la violation de l'article 16 de la Constitution ;
DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité en ce qu'elle invoque la violation de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du quinze juillet deux mille vingt et un.