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30/06/2021 | FRANCE | N°19-23319;19-23566

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 juin 2021, 19-23319 et suivant


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 853 F-D

Pourvois n°
Q 19-23.319
G 19-23.566 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 JUIN 2021

I - M. [

L] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 19-23.319 contre l'arrêt rendu le 5 juillet 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre socia...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 30 juin 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 853 F-D

Pourvois n°
Q 19-23.319
G 19-23.566 JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 30 JUIN 2021

I - M. [L] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 19-23.319 contre l'arrêt rendu le 5 juillet 2019 par la cour d'appel de Bourges (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société SNCF Réseau, société anonyme, venant aux droits de l'EPIC SNCF Réseau, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 2]

2°/ à la société SNCF Voyageurs, société anonyme, venant aux droits de l'EPIC SNCF Mobilités, établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [Adresse 3]

défenderesses à la cassation.

II - la société SNCF Réseau, société anonyme, venant aux droits de L'EPIC SNCF Réseau, établissement public à caractère industriel et commercial, a formé le pourvoi n° G 19-23.566 contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant à M. [K], défendeur à la cassation.

Le demandeur au pourvoi n° Q 19-23.319 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi n° G 19-23.566 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SAS Cabinet Colin-Stoclet, avocat des sociétés SNCF Réseau et SNCF Voyageurs, de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. [K], après débats en l'audience publique du 19 mai 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Q 19-23.319 et G 19-23.566 sont joints.

Désistement partiel

2. Il est donné acte à M. [K] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société SNCF Voyageurs, venant aux droits de l'EPIC SNCF Mobilités ;

Faits et procédure

3. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 5 juillet 2019), M. [K] a été engagé en qualité de dirigeant d'unité voie, statut contractuel cadre, par la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF) suivant contrat à durée indéterminée à temps plein du 5 décembre 2011. Au mois de juillet 2015, son contrat de travail a été transféré à l'établissement public à caractère industriel et commercial la SNCF Réseau, aux droits duquel vient la société anonyme SNCF Réseau. Le 19 novembre 2015, M. [K] a démissionné.

4. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir paiement de diverses sommes.

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen du pourvoi n° G 19-23.566, de l'employeur, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi n° G 19-23.566

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter sa fin de non-recevoir tirée de la prescription des actions en paiement formées par le salarié à son encontre et de le condamner au paiement de certaines sommes, alors « que dans ses conclusions d'appel, le salarié affirmait uniquement avoir saisi le conseil de prud'hommes le 16 juin 2016, sans alléguer expressément l'avoir fait par courrier recommandé ; qu'il ne produisait ni avis de dépôt, ni accusé de réception, ni bordereau d'envoi de la lettre au greffe du conseil de prud'hommes datée du 16 décembre 2016 et revêtue d'un tampon du greffe datée du 17 juin 2016, qui constituait sa production n° 21 ; que SNCF Réseau soutenait que la saisine n'était intervenue que le 17 juin 2016, ainsi qu'il était mentionné sur sa convocation et sur le jugement lui-même ; que ce dernier mentionnait que le conseil de prud'hommes avait été saisi le 17 juin 2016, sans faire référence à une lettre recommandée ; qu'en affirmant que le conseil de prud'hommes avait été saisi par une lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 16 juin 2016, sans énoncer sur quel élément de preuve produit aux débats elle se fondait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 et 2241 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. Selon l'article 457 du code de procédure civile, le jugement a la force probante d'un acte authentique. Il en résulte que les mentions correspondant à des faits que le juge énonce comme les ayant accomplis lui-même, ou comme ayant eu lieu en sa présence, font foi jusqu'à inscription de faux.

8. L'arrêt relève que le salarié a saisi le conseil de prud'hommes le 16 juin 2016 et que, contrairement à ce que soutient la SNCF Réseau, le 16 juin 2016 doit être seul pris en compte pour déterminer la date de saisine du conseil de prud'hommes puisque cette dernière a eu lieu par lettre recommandée avec accusé de réception, même si celle-ci n'a été reçue au greffe que le 17 juin 2016.

9. Cette constatation ne peut être contestée que par la voie de l'inscription de faux.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en ses quatre premières et sixième branches, du pourvoi n° Q 19-23.319 du salarié

Enoncé du moyen

11. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en paiement de certaines sommes à titre de rappel de salaire, outre congés payés afférents, et à titre d'indemnité pour travail dissimulé, alors :

« 1°/ qu'il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient, dans un premier temps, au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, et si le salarié satisfait à cette exigence, il incombe à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'en se fondant, en conséquence, pour retenir que le salarié n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre, sur des "relevés des éléments variables de soldes" permettant aux salariés de faire apparaître tout élément particulier et les horaires effectifs de chaque jour pour les années litigieuses qui étaient produits par la SNCF Réseau, quand elle ne devait prendre en considération de tels relevés que pour apprécier, une fois retenu que le salarié avait étayé ses demandes par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre, si la SNCF Réseau avait fourni les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

2°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, s'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, il ne lui est pas fait obligation, pour satisfaire à cette exigence, de produire un décompte précisant les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que le salarié n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre, que le décompte d'heures supplémentaires produit par lui ne précisait pas les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en retenant, dès lors, que le salarié n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre, quand il résultait de ses propres constatations que l'intéressé avait notamment produit un décompte des heures de travail totales et des heures supplémentaires qu'il prétendait avoir réalisées, chaque semaine, à compter de la quarantième semaine de l'année 2012, ainsi que des messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, et, donc, des éléments suffisamment précis auxquels la SNCF Réseau pouvait répondre en fournissant ses propres éléments, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

4°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que le salarié n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre, que si le décompte d'heures supplémentaires produit par lui mentionnait un nombre d'heures travaillées différent chaque semaine, il ne précisait pas les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine, que le tableau transmis en cause d'appel était différent de celui versé aux débats en première instance, lequel était porteur de nombreuses erreurs quant aux jours effectivement travaillés, que le salarié avait soudainement et in extremis ajouté sa demande d'heures supplémentaires à l'ensemble des réclamations écrites en date du 5 février 2016 qu'il avait émises à l'encontre de la SNCF, que ce n'était, en réalité qu'aux termes de conclusions déposées le 28 décembre 2016 qu'il avait tenté de chiffrer des heures supplémentaires sur un unique tableau établi pour les besoins de sa cause et qu'il était rigoureusement impossible d'imaginer qu'au mois de décembre 2016, le salarié se souvenait des horaires quotidiens effectivement réalisés par lui en 2013, 2014 et 2015, quand ces circonstances étaient impropres à caractériser que, par la production du décompte des heures de travail totales et des heures supplémentaires qu'il prétendait avoir réalisées, chaque semaine, à compter de la quarantième semaine de l'année 2012, le salarié n'étayait pas ses demandes par des éléments suffisamment précis pour permettre à la SNCF Réseau d'y répondre, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

6°/ qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que, par les messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, le salarié n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre, que, compte tenu de son niveau de responsabilité et de l'autonomie dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, les extraits de la messagerie électronique de l'intéressé ne pouvaient venir corroborer le contenu du tableau qu'il versait aux débats, qu'ils le pouvaient d'autant moins que l'employeur produisait des "relevés des éléments variables de soldes" permettant aux salariés de faire apparaître tout élément particulier et les horaires effectifs de chaque jour pour les années litigieuses, que , contrairement à ce que soutenait l'intéressé, la comparaison entre ces relevés et ses bulletins de salaire montraient qu'il avait bien été rémunéré de ses heures d'intervention durant ses jours d'astreinte, quand ces circonstances étaient impropres à caractériser que, par la production de messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, le salarié n'étayait pas ses demandes par des éléments suffisamment précis pour permettre à la SNCF Réseau d'y répondre, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :

12. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

13. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

14. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d' heures supplémentaires , il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

15. Pour rejeter la demande en paiement au titre d'heures supplémentaires, l'arrêt relève que pour étayer sa demande, le salarié verse aux débats un décompte des heures durant lesquelles il affirme avoir travaillé semaine après semaine, à compter de la semaine 40 de l'année 2012, en mentionnant les heures supplémentaires qu'il estime avoir réalisées et leur rémunération, le témoignage d'un surveillant de travaux à la SNCF et celui d'une directrice d'école, son entretien d'évaluation 2015, l'extrait du rapport d'enquête sur la charge de travail d'une partie des cadres de la SNCF et nombre de messages électroniques adressés, pour l'essentiel, aux salariés dont il avait la responsabilité et envoyés à des horaires tardifs. Il retient que si le tableau produit mentionne un nombre d'heures travaillées différent chaque semaine, il ne précise pas les amplitudes horaires ni la répartition des heures entre les jours de la semaine, que le caractère très général des deux attestations ne leur permet pas de fournir des renseignements pertinents sur les horaires de travail effectivement réalisés, qu'il ne peut être déduit d'un constat très général une surcharge de travail qui serait propre au salarié et que compte tenu du niveau de responsabilité de celui-ci et de l'autonomie dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, les extraits de sa messagerie électronique ne peuvent venir corroborer le contenu du tableau. Il ajoute que l'employeur produit les "relevés des éléments variables de soldes" pour les années 2013, 2014 et 2015 permettant au salarié de faire apparaître tout élément particulier (astreinte, travail de nuit) mais également les horaires effectifs de travail pour chaque jour, de sorte que le salarié avait la possibilité de mentionner son temps de travail quotidien, sans se limiter, comme il l'explique, à mentionner la lettre "P" pour signifier sa présence au travail et constate qu'aucune mention concernant d'éventuelles heures supplémentaires n'y est portée. Il en déduit que l'intéressé n'étaie pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la SNCF Réseau de lui répondre.

16. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.

Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi n° G 19-23.566

Enoncé du moyen

17. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une certaine somme au titre de la clause de dédit-formation, alors « qu'en relevant d'office le moyen de défense tiré de ce que les 1 117 heures de formation visées par la clause de dédit-formation seraient celles qui sont indispensables pour l'obtention de la certification au métier de DUO et, par suite, de ce que si une partie des heures de formation théorique dont a bénéficié le salarié sont postérieures à la date à laquelle il a obtenu cette certification, elles n'entrent pas dans le cadre de ces 1 117 heures, moyen non soulevé par le salarié et sur lequel les parties n'ont pas été invitées préalablement à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé les articles 6, 7, 9 et 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

18. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

19. Pour condamner l'employeur au paiement d'une certaine somme au titre de la clause de dédit-formation, l'arrêt retient que le contrat de travail du salarié contenait, en son article 10, une clause de dédit formation prévoyant que le coût de la formation d'une durée de 1 117 heures délivrée au salarié serait entièrement pris en charge par la SNCF, la contrepartie résidant dans l'engagement pris par le salarié de rester à son service pendant une durée minimale de 5 ans, à compter de la fin de sa période d'essai, qu'en cas de cessation du contrat de travail, qu'il s'agisse d'une démission ou d'un licenciement pour faute grave, le salarié s'engageait à rembourser à la SNCF les frais de formation selon des modalités différentes selon la date de la rupture. Il relève que l'examen attentif des pièces versées par la SNCF Réseau met en évidence une contradiction majeure entre la date de la certification au métier de DUO délivrée au salarié le 6 mai 2013, et le tableau récapitulant l'ensemble des formations théoriques dont il a bénéficié, pour un nombre total de 708,30 heures, que des formations mentionnées dans ce tableau sont postérieures au 6 mai 2013, de sorte qu'elles ne peuvent entrer dans le cadre du stage de formation d'une durée de 1 117 heures. Il en déduit que, contrairement à ce que soutient la SNCF Réseau, le salarié n'a pas bénéficié de 708,30 heures de formation théorique dans le cadre du stage de formation initial visé à l'article 10 de son contrat de travail et que celui-ci invoque à juste titre l'exception d'inexécution par la SNCF Réseau de ses propres obligations.

20. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office tiré de l'absence de bénéfice par le salarié de 708,30 heures de formation théorique au titre du stage de formation initial visé au contrat de travail alors que l'intéressé soutenait, sans les distinguer selon leur nature, n'avoir bénéficié que de 708 heures de formation au lieu des 1 117 heures prévues à son contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

21. La cassation prononcée sur le troisième moyen du pourvoi n° G 19-23.566 n'emporte pas cassation des chefs de dispositif condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. [K] de ses demandes au titre des heures supplémentaires et de l'indemnité pour travail dissimulé et en ce qu'il condamne la société SNCF Réseau au paiement de la somme de 7 674,73 euros au titre de la clause de dédit-formation, l'arrêt rendu le 5 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;

Laisse à la charge de chacune des parties les dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit, au pourvoi n° Q 19-23.319, par la SAS Cabinet Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour M. [K]

Il est fait grief à l'arrêt, sur ces points confirmatif, attaqué D'AVOIR débouté M. [L] [K] de ses demandes tendant à la condamnation de la Sncf Réseau à lui payer la somme de 48 365, 85 euros à titre de rappel de salaires, la somme de 4 836, 59 euros au titre des congés payés afférents et la somme de 34 740, 72 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'« il doit être rappelé qu'en application des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatif aux litiges portant sur l'existence ou le nombre d'heures de travail accomplies, la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties. Il appartient toutefois au salarié de fournir au juge des éléments de nature à étayer sa demande, de tels éléments étant seuls susceptibles de permettre à l'employeur de répondre. Il appartient alors à ce dernier d'apporter à son tour des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés. / En l'espèce, il n'est désormais plus contesté que la durée quotidienne de travail de [L] [K] était de 7 h 45, sa durée hebdomadaire de travail étant de 38 h 45 en application de l'article 25-1 b du règlement RH0077 (pièce n° 6), le salarié entrant dans la catégorie du personnel non soumis à un tableau de service. / Pour étayer sa demande au titre des heures supplémentaires prétendument accomplies au-delà de ces deux seuils, l'appelant verse en premier lieu aux débats un décompte des heures durant lesquelles il affirme avoir travaillé semaine après semaine, à compter de la semaine 40 de l'année 2012, en mentionnant les heures supplémentaires qu'il estime avoir réalisées et leur rémunération (pièce n° 7). / Force est de constater que, si le tableau produit mentionne un nombre d'heures travaillées différent chaque semaine, il ne précise pas les amplitudes horaires ni la répartition des heures entre les jours de la semaine. De plus, le tableau transmis en cause d'appel est différent de celui versé aux débats en première instance, lequel était porteur de nombreuses erreurs quant aux jours effectivement travaillés, ce que fait observer à juste titre la Scf Réseau, sans être contredite sur ce point par l'appelant. / [L] [K] verse en second lieu aux débats le témoignage d'un surveillant de travaux à la Sncf, [V] [B], lequel " atteste que [L] [K], dirigeant de l'unité voie [Localité 1] était régulièrement présent au travail avant 8 h et après 18 h 30" (pièce n° 15). Il fournit également l'attestation de [U] [V], directrice d'école, laquelle déclare que les deux enfants de l'appelant ont, d'une part, entre septembre 2012 et juin 2013, d'autre part, entre septembre 2013 et juillet 2016, été " inscrit(s) régulièrement à l'accueil périscolaire" (pièce n° 16). / Le caractère très général de ces deux attestations ne leur permet cependant pas de fournir des renseignements pertinents sur les horaires de travail effectivement réalisés par [L] [K]. / Ce dernier produit encore son entretien d'évaluation 2015 au cours duquel il fait part de ce que " la situation de l'UP est difficile car tout au long de l'année des postes importants restent vacants (Ass planif, assi sécurité, DPX, TO géométrie). Cela impose un report de charge sur les autres cadres de l'unité" (pièce n° 17). Pour autant, il ne peut être déduit de ce constat très général une surcharge de travail qui lui serait propre, ce d'autant qu'aucune précision n'est apportée dans ce document sur les horaires exacts de travail du salarié. / Les mêmes observations doivent être formulées en ce qui concerne l'extrait du rapport d'enquête sur la charge de travail d'une partie des cadres de la Sncf, lequel, s'il mentionne un temps de travail " excessif " de certains cadres, ne peut permettre de dédire qu'il en était de même de [L] [K] (pièce n° 19). / En dernier lieu, l'appelant fournit nombre de messages électroniques adressés, pour l'essentiel, aux salariés dont il avait la responsabilité et envoyés à des horaires tardifs (au-delà de 20 heures ou avant 8 heures) (pièce n° 18). / Néanmoins, compte tenu de son niveau de responsabilité et de l'autonomie dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, les extraits de sa messagerie électronique ne peuvent venir corroborer le contenu du tableau que l'appelant verse aux débats. / Ils le peuvent d'autant moins que l'employeur produit quant à lui les " relevés des éléments variables de soldes " pour les années 2013, 2014 et 2015 permettant au salarié de faire apparaître tout élément particulier (astreinte, travail de nuit) mais également les horaires effectifs de travail pour chaque jour, de sorte que [L] [K] avait la possibilité de mentionner son temps de travail quotidien, sans se limiter, comme il l'explique, à mentionner la lettre " P " pour signifier sa présence au travail (pièces n° 9, 10 et 11). Or, force est de constater qu'aucune mention concernant d'éventuelles heures supplémentaires n'y est portée. De plus, contrairement à ce que soutient l'appelant, la comparaison entre ces relevés et ses bulletins de salaire montrent qu'il a bien été rémunéré de ses heures d'intervention durant ses jours d'astreinte, en sus des indemnités auxquelles il pouvait prétendre (à titre d'exemple : pièce n° 9, juillet 2013). / Il en résulte que l'appelant n'étaye pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre. / En conséquence, le jugement initial sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'heures supplémentaires formulée par [L] [K] et débouté le salarié de ses prétentions au titre du travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié » (cf., arrêt attaqué, p. 5 et 6) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QU'« il importe de rappeler que M. [K], salarié de Sncf Réseau, ne peut se voir appliquer la règlementation issue du code du travail pour ce qui concerne la durée du travail, sa répartition, ainsi que l'aménagement des horaires de travail. / Qu'en effet, l'alinéa de l'article L. 1321 du code des transports dans sa rédaction reconnaît que ni les dispositions du titre II du livre 1 de la 3ème partie du code du travail, ni les dispositions du présent chapitre ne s'appliquent aux salariés soumis à des règles particulières de la Sncf, de transports réguliers de personnes. / Attendu que M. [K] relevait des agents qui en raison de leur fonction ne peuvent être soumis à des horaires fixés à l'avance par un tableau de services. / Attendu que le nombre d'heures rémunérées est apprécié par le directeur d'établissement pour les agents de son établissement et par le directeur de région ou l'autorité assimilé pour les directeurs d'établissements. / [?] Attendu que M. [K] a soudainement et in extremis ajouté sa demande d'heures supplémentaires à l'ensemble des réclamations écrites du 5 février 2016, qu'il émettait à l'encontre de la Sncf ; / qu'il n'a aucunement évoqué une quelconque demande en rappel de salaires pour heures supplémentaires. / Attendu que ce n'est en réalité qu'aux termes de conclusions déposées le 28 décembre 2016, après sa démission, que M. [K] a tenté de chiffrer des heures supplémentaires sur un unique tableau établi pour les besoins de sa cause. / Attendu qu'en réalité, la décision de démissionner était indiscutablement liée à la nouvelle opportunité professionnelle proposée au sein de l'entreprise Sofrilog, entreprise qu'il rejoindra immédiatement après sa démission. / Qu'il est rigoureusement impossible d'imaginer qu'au mois de décembre 2016, M. [K] se souvienne des horaires quotidiens effectivement réalisés par lui en 2013, 2014 et 2015. / Qu'au surplus et en tout état de cause, le temps de travail semaine applicable à M. [K] est 38 h 45 et non de 35 h, et seules les heures au-delà peuvent recevoir la qualification juridique d'heures supplémentaires. / [?] Attendu [?] qu'il est de jurisprudence constante que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même (Cass. Soc 19/2/2014 n° 12-24.677). / Dès lors le conseil ne peut que débouter de telles demandes. / [?] Attendu qu'il a été démontré qu'il n'a pas été effectué des heures supérieures à celles figurant sur le bulletin de salaires. / Le conseil déboutera M. [K] de cette nouvelle demande » (cf., jugement entrepris, p. 4 et 5) ;

ALORS QUE, de première part, il résulte des dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient, dans un premier temps, au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, et si le salarié satisfait à cette exigence, il incombe à l'employeur de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'en se fondant, en conséquence, pour retenir que M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, sur des « relevés des éléments variables de soldes » permettant aux salariés de faire apparaître tout élément particulier et les horaires effectifs de chaque jour pour les années litigieuses qui étaient produits par la Sncf Réseau, quand elle ne devait prendre en considération de tels relevés que pour apprécier, une fois retenu que M. [L] [K] avait étayé ses demandes par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre, si la Sncf Réseau avait fourni les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par M. [L] [K], la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS QUE, de deuxième part, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, s'il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments, il ne lui est pas fait obligation, pour satisfaire à cette exigence, de produire un décompte précisant les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, que le décompte d'heures supplémentaires produit par M. [L] [K] ne précisait pas les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS QUE, de troisième part, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en retenant, dès lors, que M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, quand il résultait de ses propres constatations que M. [L] [K] avait notamment produit un décompte des heures de travail totales et des heures supplémentaires qu'il prétendait avoir réalisées, chaque semaine, à compter de la quarantième semaine de l'année 2012, ainsi que des messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, et, donc, des éléments suffisamment précis auxquels la Sncf Réseau pouvait répondre en fournissant ses propres éléments, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS QUE, de quatrième part, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, que si le décompte d'heures supplémentaires produit par M. [L] [K] mentionnait un nombre d'heures travaillées différent chaque semaine, il ne précisait pas les amplitudes horaires et la répartition des heures de travail entre les jours de la semaine, que le tableau transmis en cause d'appel était différent de celui versé aux débats en première instance, lequel était porteur de nombreuses erreurs quant aux jours effectivement travaillés, que M. [L] [K] avait soudainement et in extremis ajouté sa demande d'heures supplémentaires à l'ensemble des réclamations écrites en date du 5 février 2016 qu'il avait émises à l'encontre de la Sncf, que ce n'était, en réalité qu'aux termes de conclusions déposées le 28 décembre 2016 que M. [L] [K] avait tenté de chiffrer des heures supplémentaires sur un unique tableau établi pour les besoins de sa cause et qu'il était rigoureusement impossible d'imaginer qu'au mois de décembre 2016, M. [L] [K] se souvenait des horaires quotidiens effectivement réalisés par lui en 2013, 2014 et 2015, quand ces circonstances étaient impropres à caractériser que, par la production du décompte des heures de travail totales et des heures supplémentaires qu'il prétendait avoir réalisées, chaque semaine, à compter de la quarantième semaine de l'année 2012, M. [L] [K] n'étayait pas ses demandes par des éléments suffisamment précis pour permettre à la Sncf Réseau d'y répondre, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS QUE, de cinquième part, le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve des faits juridiques ; qu'en énonçant, dès lors, par motifs adoptés des premiers juges, pour retenir que M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions, par la production d'un décompte des heures de travail totales et des heures supplémentaires qu'il prétendait avoir réalisées, chaque semaine, à compter de la quarantième semaine de l'année 2012, pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, qu'il était de jurisprudence constante que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1315, devenu l'article 1353, du code civil ;

ALORS QUE, de sixième part, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient seulement au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en énonçant, dès lors, pour retenir que, par les messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, M. [L] [K] n'étayait pas suffisamment ses prétentions pour permettre à la Sncf Réseau de lui répondre, que, compte tenu de son niveau de responsabilité et de l'autonomie dont il disposait dans l'exercice de ses fonctions, les extraits de la messagerie électronique de M. [L] [K] ne pouvaient venir corroborer le contenu du tableau qu'il versait aux débats, qu'ils le pouvaient d'autant moins que l'employeur produisait des « relevés des éléments variables de soldes » permettant aux salariés de faire apparaître tout élément particulier et les horaires effectifs de chaque jour pour les années litigieuses, que M. [L] [K] avait la possibilité d'y mentionner son temps de travail quotidien, qu'aucune mention concernant d'éventuelles heures supplémentaires n'y était portée et que, contrairement à ce que soutenait M. [L] [K], la comparaison entre ces relevés et ses bulletins de salaire montraient qu'il avait bien été rémunéré de ses heures d'intervention durant ses jours d'astreinte, quand ces circonstances étaient impropres à caractériser que, par la production de messages électroniques qu'il avait adressés aux salariés dont il avait la responsabilité avant 8 heures du matin et après 20 heures, M. [L] [K] n'étayait pas ses demandes par des éléments suffisamment précis pour permettre à la Sncf Réseau d'y répondre, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail.

Moyens produits, au pourvoi n° G 19-23.566, par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la société SNCF Réseau

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription des actions en paiement formées par M. [K] à l'encontre de SNCF Réseau et d'avoir condamné SNCF Réseau à payer à M. [K] les sommes de 8 005,43 euros au titre de la part variable de sa rémunération, outre les congés payés afférents, de 4 767,80 au titre des primes de tenue de poste, outre les congés payés afférents et de 7 674,73 euros au titre de la clause de dédit-formation ;

AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en répétition de salaires se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; que la demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture ; que le nouveau délai de prescription s'applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la loi, sans que sa durée totale puisse excéder celle prévue par la loi antérieure ; qu'en l'espèce, l'éventuelle créance du salarié est née sous l'empire de la prescription quinquennale, puisqu'il sollicite le paiement d'heures supplémentaires portant sur la période de la semaine 40 de l'année 2012 à ce jour ; qu'ainsi, à la date de promulgation de la loi, le 16 juin 2013, l'ancien délai de prescription n'était pas échu, si bien que le nouveau délai de prescription triennale court à compter de cette dernière date, sans que la durée totale de la prescription ait pour effet d'excéder l'ancien délai de prescription de 5 ans ; que la demande en justice interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion ; qu'en l'espèce, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes le 16 juin 2016 notamment d'une demande de rappel de salaire sur heures supplémentaires ; que contrairement à ce que soutient la SNCF, le 16 juin 2016 doit être seul pris en compte pour déterminer la date de saisine du conseil de prud'hommes puisque cette dernière a eu lieu par lettre recommandée avec accusé de réception, même si cette dernière n'a été reçue au greffe que le 17 juin 2016 ; que cette saisine a interrompu la prescription quinquennale et le salarié peut prétendre à un rappel de salaire sur heures supplémentaires à compter du 16 juin 2011, en réalité à compter du 5 décembre 2011, date du début de son contrat de travail, étant précisé qu'il ne formule de prétentions à ce titre qu'à compter de l'année 2012 ;

ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, le salarié affirmait uniquement avoir saisi le conseil de prud'hommes le 16 juin 2016, sans alléguer expressément l'avoir fait par courrier recommandé ; qu'il ne produisait ni avis de dépôt, ni accusé de réception, ni bordereau d'envoi de la lettre au greffe du conseil de prud'hommes datée du 16 décembre 2016 et revêtue d'un tampon du greffe datée du 17 juin 2016, qui constituait sa production n° 21; que SNCF Réseau soutenait que la saisine n'était intervenue que le 17 juin 2016, ainsi qu'il était mentionné sur sa convocation et sur le jugement lui-même ; que ce dernier mentionnait que le conseil de prud'hommes avait été saisi le 17 juin 2016, sans faire référence à une lettre recommandée ; qu'en affirmant que le conseil de prud'hommes avait été saisi par une lettre recommandée avec accusé de réception envoyée le 16 juin 2016, sans énoncer sur quel élément de preuve produit aux débats elle se fondait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3245-1 du code du travail et 2224 et 2241 du code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné SNCF Réseau à payer à M. [K] la somme de 4 767,80 euros au titre des primes de tenue de poste, outre la somme de 476,78 euros au titre des congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE selon le contrat de travail, M. [K] a été embauché par la SNCF à compter du 5 décembre 2011, "sur un premier poste de Dirigeant d'Unité Voie, en tant que contractuel relevant de l'annexe C de la Directive RH-0254" ; que cette directive prévoit expressément qu'il pourra bénéficier "des indemnités prévues aux chapitres 6 et 8 de la directive RH 0131" (article 39), en ce compris l'indemnité de continuité du service et l'indemnité de management et d'encadrement ; que ces deux directives ne prévoient aucune restriction à l'allocation de ces deux indemnités, notamment du fait que le salarié concerné bénéficie d'une formation interne à la SNCF ; qu'il n'est pas contesté qu'une telle formation a été dispensée à M. [K], les deux parties ne s'accordant toutefois ni sur sa durée ni sur le fait qu'elle ait ou non été terminée ; que l'historique de carrière versé aux débats par la SNCF, issu de son logiciel interne, qui mentionne qu'à la date du 1er septembre 2012, [L] [K] aurait été "assist voie OA unité" puis à compter du 1er septembre 2013, "DU voie OA", ne peut remettre en cause le contenu de son contrat de travail ; qu'il en est de même de sa certification au métier de DUO en date du 6 mai 2013 ; que par conséquent, dès lors que le "référentiel régional Centre" auquel renvoie le référentiel RH 0131 prévoit que le DUO de l'infrapôle Centre, poste sur lequel l'appelant a été recruté, bénéficie de l'indemnité de continuité du service, cette indemnité lui est due dès sa prise de poste ; qu'il en est de même de l'indemnité de management et d'encadrement puisque, si le salarié disposait d'un adjoint, hormis pendant les périodes de vacance de ce poste et si chaque site composant l'infrapôle disposait d'un responsable de site, il a été embauché en qualité de dirigeant d'une unité de voie regroupant plus de 130 salariés et pouvait, de ce fait, prétendre au versement de l'indemnité considérée ;

ALORS QUE selon l'article 36 de la Directive RH00131, l'indemnité de continuité du service est attribuée aux agents qui, « affectés dans des emplois de dirigeants » désignés de certains établissements, « ont la responsabilité de la marche continue de ceux-ci ou du maintien du service », et selon l'article 40.2, l'indemnité de management et d'encadrement est versée aux agents des qualifications G et H « affectés dans des emplois de chef ou dirigeant d'unité de production, en lien hiérarchique direct avec les directeurs d'établissements, chargés du management et de l'organisation de la production opérationnelle de plusieurs équipes » ; que ces stipulations impliquent donc une affectation effective à un emploi qui confère à l'agent certaines responsabilités ; que SNCF Réseau faisait valoir que M. [K] ne pouvait prétendre auxdites indemnités qu'à compter de sa nomination effective au poste de dirigeant d'unité, qu'après avoir suivi une formation théorique à plein temps, il avait exercé des missions d'assistant DU et n'avait exercé la fonction de dirigeant d'unité qu'à compter du 1er septembre 2013 (p. 25) ; que M. [K] lui-même ne prétendait pas avoir exercé des fonctions de dirigeant d'unité voie avant le 1er septembre 2013 ; qu'il exposait avoir occupé, à compter du mois d'octobre 2012, le poste d'assistant d'unité de voie (concl. p. 6) ; qu'en retenant que dès l'instant où M. [K] avait été recruté en qualité de dirigeant d'unité de voie, il devait bénéficier des indemnités dès son embauche, sans rechercher, comme elle y était invitée, si leur versement n'était pas subordonné à la condition que le salarié soit effectivement nommé à l'emploi lui conférant les fonctions et responsabilités dont les deux indemnités en cause sont la contrepartie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 39 de la Directive RH0254 et des articles 36 et 40 de la Directive RH00131.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné SNCF Réseau à payer à M. [K] la somme de 7 674,73 euros au titre de la clause de dédit-formation ;

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail contient, en son article 10, une clause de dédit-formation prévoyant que le coût de la formation d'une durée de 1.117 heures délivrée au salarié serait entièrement pris en charge par la SNCF, la contrepartie résidant dans l'engagement pris par le salarié de rester à son service pendant une durée minimale de 5 ans, à compter de la fin de sa période d'essai ; qu'il est ensuite stipulé qu'"En cas de cessation du contrat de travail, qu'il s'agisse d'une démission ou d'un licenciement pour faute grave, M. [L] [K] s'engage à rembourser à la SNCF les frais de formation, soit une somme maximale de 29.896 euros HT si cette cessation intervient dans les 30 mois à compter de la fin de la période d'essai. Toute cessation du contrat de travail pour ces mêmes motifs au-delà de ces 30 mois entraînera un remboursement proportionnel au nombre de mois restant à courir jusqu'à l'expiration des 5 ans? " ; que si, pour s'opposer à l'application de cette clause, l'appelant évoque en premier lieu le non-respect par son employeur du nombre d'heures de formation prévues au contrat, la preuve de ses allégations sur ce point ne peut résulter du seul courrier qu'il a adressé le 5 février 2016 ; que pour autant, l'examen attentif des pièces versées à la procédure par la SNCF met en évidence une contradiction majeure entre, d'une part, la date de la certification au métier de DUO délivrée à M. [K] le 6 mai 2013, laquelle vise les "résultats de l'évaluation orale finale et de l'évaluation continue effectuée au cours du dispositif et portant sur les séances théoriques en centre de formation et les périodes pratiques sur le terrain" et, d'autre part, le tableau récapitulant l'ensemble des formations théoriques dont il a bénéficié, pour un nombre total de 708,30 heures ; qu'en effet, plusieurs des formations mentionnées dans ce tableau sont postérieures au 6 mai 2013, de sorte qu'elles ne peuvent entrer dans le cadre du "stage de formation devant débuter en principe le 12/12/2011, d'une durée de 1.117 heures, destiné à donner au salarié les acquis en vue de la tenue de poste d'encadrement à l'infrastructure", tel que mentionné dans le contrat de travail ; que M. [K] n'a donc pas bénéficié de 708,30heures de formation théorique dans le cadre du stage de formation initial visé à l'article 10 de son contrat de travail tandis que la formation pratique invoquée parallèlement par l'employeur n'est nullement détaillée ; qu'il en résulte que l'appelant invoque à juste titre l'exception d'inexécution par la SNCF Réseau de ses propres obligations au titre de l'article 10 du contrat, de sorte que l'intimée est mal fondée à lui appliquer une clause de dédit-formation, laquelle n'était que la contrepartie de ses propres engagements ;

1) ALORS QU'aux termes de la clause de dédit-formation du contrat de travail, la formation en contrepartie de laquelle M. [K] s'engageait à rester au service était destinée à lui donner les acquis en vue de la tenue de poste d'encadrement à l'Infrastructure ; que la clause ne prévoyait pas que le stage de formation initial s'achèverait ou serait sanctionné par une certification ; qu'elle n'établissait aucune relation entre la formation de 1.117 heures que le nouvel agent devrait, le cas échéant, rembourser, et la certification Infrastructure au métier de DUO, ni ne limitait par suite les heures de formation concernées à celles nécessaires à l'obtention d'une certification ; qu'en retenant cependant qu'une partie des formations théoriques dont M. [K] avait bénéficié étaient postérieures au 6 mai 2013, date de sa certification au métier de DUO, pour en déduire qu'elles n'entraient pas dans le cadre du stage de formation initial visé à l'article 10 de son contrat de travail, la cour d'appel a violé l'article 1134 devenu 1104 du code civil ;

2) ALORS en toute hypothèse QU'en relevant d'office le moyen de défense tiré de ce que les 1.117 heures de formation visées par la clause de dédit-formation seraient celles qui sont indispensables pour l'obtention de la certification au métier de DUO et, par suite, de ce que si une partie des heures de formation théorique dont a bénéficié le salarié sont postérieures à la date à laquelle il a obtenu cette certification, elles n'entrent pas dans le cadre de ces 1.117 heures, moyen non soulevé par le salarié et sur lequel les parties n'ont pas été invitées préalablement à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé les articles 6, 7, 9 et 16 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-23319;19-23566
Date de la décision : 30/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges, 05 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 jui. 2021, pourvoi n°19-23319;19-23566


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SAS Cabinet Colin - Stoclet, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.23319
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