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24/06/2021 | FRANCE | N°20-10964

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 juin 2021, 20-10964


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2021

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 666 F-D

Pourvoi n° F 20-10.964

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [F] [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE

FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 JUIN 2021

M. [F] [C], domicilié [Adresse 1...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2021

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 666 F-D

Pourvoi n° F 20-10.964

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [F] [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 JUIN 2021

M. [F] [C], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 20-10.964 contre l'arrêt rendu le 29 mars 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 3), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Garonne, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de Me Bouthors, avocat de M. [C], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Haute-Garonne, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, le 29 mars 2019), la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse) ayant refusé de prendre en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident dont il a déclaré avoir été victime le 20 novembre 2015, M. [C] (la victime) a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La victime fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que, selon l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, l'accident du travail est une lésion, qui peut être psychologique, survenue au temps ou au lieu de travail par le fait ou à l'occasion du travail, quelle qu'en soit la cause, le comportement fautif du salarié ne pouvant exclure la qualification d'accident du travail ; qu'au cas présent, il est acquis au débat que le salarié se trouvait le 20 novembre 2015 à 9h30 en réunion avec son supérieur hiérarchique qui l'avait fait appeler à son bureau lorsque s'est produit une altercation avec ce dernier qui a violemment barré la porte en hurlant « que personne ne sorte », entraînant pour le salarié qui a tenté de sortir « un traumatisme de l'épaule droite et un état anxio-dépressif » selon le certificat médical établi le même jour ; qu'ainsi l'existence d'une lésion subie par le salarié, physique et psychologique, survenue à l'occasion de son travail, au temps et au lieu de son travail, étant établie, la cour d'appel ne pouvait écarter la qualification d'accident du travail qui s'imposait, au motif inopérant que les lésions étaient la conséquence d'un comportement fautif du salarié, sans violer l'article susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 411- du code de la sécurité sociale :

3. Selon ce texte, est considéré comme accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

4. Pour refuser la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, d'une part, que convoquée, le 20 novembre 2015, dans le bureau de son responsable, la victime a déclaré avoir bousculé ce dernier pour s'échapper car elle avait eu peur et qu'en forçant la porte, son bras était venu percuter violemment le coin de la porte et, d'autre part, que le certificat médical établi le même jour fait état d'un traumatisme de l'épaule droite et d'un état anxio-dépressif. Il en déduit que les lésions ne sont pas la conséquence d'un fait accidentel survenu au temps et lieu du travail, mais d'un comportement violent de la victime.

5. En statuant ainsi, par des motifs contradictoires, alors qu'il résultait de ses constations que les lésions étaient survenues au temps et lieu de travail, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare le recours recevable, l'arrêt rendu le 29 mars 2019 entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Bouthors, avocat aux Conseils, pour M. [C]

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur [C] de sa demande de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident survenu le 20 novembre 2015

aux motifs qu'il résulte de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale qu'est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
L'accident du travail se définit comme un événement soudain, survenu au temps et au lieu de travail, ce qui s'entend par un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines, par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Ces trois conditions doivent être cumulativement remplies pour qu'il y ait accident du travail et l'accident est présumé être un accident du travail.
La charge de la preuve du fait accidentel incombe au salarié (ou à ses ayants droit), qui doit donc établir les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel. La charge de la preuve de la cause étrangère au travail de l'accident pèse sur l'employeur (ou la caisse qui a refusé la prise en charge).
Ainsi il incombe au salarié d'établir les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel, et toute lésion survenue soudainement, au temps et au lieu du travail est présumée résulter d'un accident du travail sauf s'il est rapporté la preuve qu'elle a une origine totalement étrangère au travail, ou que le salarié s'est soustrait à l'autorité du chef d'entreprise.
Des troubles psychiques peuvent caractériser un accident du travail si leur apparition est brutale et liée au travail, la lésion psychologique devant être imputable à un événement ou à une série d'événements survenus à des dates précises.
M. [C] expose avoir été victime le 20 novembre 2015 à 9 heures 15 d'un traumatisme psychologique grave, sur son lieu de travail consécutif à une altercation avec son employeur, lors d'une réunion au cours de laquelle il a été également victime d'une blessure à l'épaule, et qu'il y a bien eu ce jour-là un fait accidentel, ayant date certaine, aux temps et lieu du travail, lui ayant occasionné une lésion et qu'il incombe à la caisse de renverser la présomption d'imputabilité en démontrant que le travail n'a joué aucun rôle dans la survenance du traumatisme.
La caisse lui oppose que la matérialité d'un accident survenu au temps et lieu du travail n'est pas démontrée dès lors qu'il résulte des-propres déclarations de M. [C] d'une part que le traumatisme à l'épaule aurait été provoqué par le fait qu'il se serait volontairement cogné l'épaule contre le montant de la porte en voulant sortir de la pièce car il avait peur et que ce serait le choc émotionnel généré par l'organisation d'une réunion le 20 novembre 2015 qui constituerait le fait accidentel concernant son état anxio-dépressif, alors que le salarié procède par allégations.
En l'espèce, il résulte effectivement de la relation des faits donnée par M. [C] qu'informé par son chef d'équipe qu'il était demandé dans le bureau de M. [I], responsable "DSI" sur le site Airbus Saint-Eloi à [Localité 1], le 20 novembre 2015 à 9 heures, il s'est rendu dans le bureau de celui-ci et "lui a demandé la raison de cette convocation en lui posant la question suivante: ai-je fait une faute professionnelle" et que M. [I] lui a répondu qu'il n'avait pas commis de faute professionnelle. M. [C] poursuit ainsi sa relation de l'incident: "j'ai donc tenté de quitter son bureau après lui avoir dit que je n'avais ríen à faire là, c'est à ce moment-là que M. [I] s'est énervé et a employé les mots suivants, avec un ton très haut "on va fermer cette putain de porte". En disant ces mots là, M. [I] encore très énervé est allé claquer la porte en question de manière forte. Après avoir claqué (sic) cette porte il est resté devant celle-ci comme un gardien et a dit "personne ne sort". C'est à ce moment-là que je l'ai bousculé pour m'échapper car j'ai eu peur. J'ai forcé la porte et mon bras droit est alors venu percuter assez violemment le coin de la porte. C'est donc à ce moment précis que je me suis fait mal.
Même si cette relation de l'incident du 20 novembre 2015, n'est corroborée par aucun témoin, il en résulte que les blessures alléguées sont la conséquence du comportement d'insubordination réitéré de M. [C], qui après avoir interpellé son interlocuteur sur le point de savoir s'il aurait commis une faute professionnelle, a estimé qu'il n'avait pas à être et à rester dans son bureau, a décidé d'en partir, en recourant à la violence, d'une part en bousculant cette personne, ainsi qu'il l'écrit lui-même, et d'autre part en "forçant", suivant ses propres termes, la porte, ce qui a occasionné sa blessure au bras.
Les lésions alléguées sont donc la conséquence, non point d'un fait accidentel survenu au temps et lieu du travail, mais d'un comportement violent de sa part, et la version de l'employeur sur son questionnaire, bien que sibylline, n'est contradictoire que sur le fait que le salarié était en réunion.
Elle mentionne que "ne souhaitant pas entendre les recommandations de son responsable concernant les heures de prise de poste, M. [C] s'est emporté et a bousculé son responsable en sortant de la salle".
Cette relation correspond aux réserves mentionnées lors de la déclaration d'accident du travail.
La caisse verse en outre aux débats copies des pièces jointes au recours devant la commission de recours amiable et en particulier :
* la lettre d'avertissement en date du 2 décembre 2015, dont il résulte que cette sanction a été prononcée à l'encontre du salarié pour ne pas avoir le 20 novembre 2015 respecté son supérieur hiérarchique en refusant de participer à la réunion organisée à 8 heures sur l'organisation du travail, malgré les demandes des responsables pour qu'il y reste et d'avoir eu un comportement colérique à l'encontre de M. [I] et en le bousculant,
* la réponse de M. [C] à cette sanction, datée du 20 janvier 2016, dans laquelle il écrit tout en contestant la sanction "à mon retour, j'ai reconnu avoir paniqué et j'ai présenté mes excuses à M. [I]".
M. [C] ne rapporte donc pas la preuve, qui lui incombe, d'un fait accidentel survenu aux temps et lieu de travail.
La décision de refus de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident déclaré est donc justifiée.
Le jugement entrepris doit être intégralement confirmé.
Par suite de l'abrogation au 1er janvier 2019 des dispositions de l'article R. 144-10 du code de la sécurité sociale, la cour doit statuer sur les dépens qui doivent être mis à la charge de l'appelant » ;

alors que, selon l'article L.411-1 du code du travail, l'accident du travail est une lésion, qui peut être psychologique, survenue au temps ou au lieu de travail par le fait ou à l'occasion du travail, quelle qu'en soit la cause, le comportement fautif du salarié ne pouvant exclure la qualification d'accident du travail; qu'au cas présent, il est acquis au débat que Monsieur [C] se trouvait le 20 novembre 2015 à 9 h en réunion avec son supérieur hiérarchique qui l'avait fait appeler à son bureau lorsque s'est produit une altercation avec ce dernier qui a violemment barré la porte en hurlant « que personne ne sorte », entrainant pour le salarié qui a tenté de sortir «un traumatisme de l'épaule droite et un état anxio-dépressif » selon le certificat médical établi le même jour; qu'ainsi l'existence d'une lésion, physique et psychologique, survenue à M. [C] à l'occasion de son travail, au temps et au lieu de son travail étant établie, la cour d'appel ne pouvait écarter la qualification d'accident du travail qui s'imposait, au motif inopérant que les lésions étaient la conséquence d'un comportement fautif du salarié, sans violer l'article.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-10964
Date de la décision : 24/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 29 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 jui. 2021, pourvoi n°20-10964


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.10964
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