LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 juin 2021
Cassation partielle
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 625 F-D
Pourvoi n° T 19-15.065
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 JUIN 2021
L'Agent judiciaire de l'État, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de Charbonnage de France suite à la clôture de sa liquidation, a formé le pourvoi n° T 19-15.065 contre l'arrêt rendu le 7 février 2019 par la cour d'appel de Metz (chambre sociale, section 3, sécurité sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [T] [M], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à Mme [B] [P],
3°/ à M. [Q] [P],
domiciliés tous deux [Adresse 3],
4°/ à M. [R] [M], pris tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de son enfant [D] [M],
5°/ à Mme [W] [P],
domiciliés tous deux [Adresse 4],
6°/ à M. [Z] [M], domicilié [Adresse 5], pris tant en son nom personnel qu'en qualité de représentant légal de son enfant [P] [M],
7°/ à M. [L] [M], domicilié [Adresse 6],
8°/ à Mme [V] [M], domiciliée [Adresse 7],
9°/ à Mme [Y] [I], domiciliée [Adresse 8], pris tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses enfants [I] [I] et [A] [M],
agissant tous neuf en qualité d'ayants droit de [G] [M],
10°/ à la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines (CANSSM), dont le siège est [Adresse 9],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Talabardon, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de l'Agent judiciaire de l'État, de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de Mmes [T] et [V] [M], de Mmes [B] et [W] [P], de M. [Q] [P], de MM. [R] [Z] et [L] [M] et de Mme [I], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Talabardon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 7 février 2019), [G] [M] (la victime), employé du 19 décembre 1961 au 31 mai 1994 en qualité de mineur de fond par les Houillères du bassin de [A], aux droits desquelles se sont trouvés successivement l'établissement public Charbonnages de France et l'Agent judiciaire de l'État, a adressé le 19 août 2010 à la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines (la caisse) une déclaration de maladie professionnelle (silicose), accompagnée d'un certificat médical initial du 3 août 2010.
2. Par décision du 30 mars 2012, la caisse a pris en charge cette maladie au titre du tableau n° 25 des maladies professionnelles et, le 12 octobre suivant, elle a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 5 %, porté à 70 % à la suite du diagnostic d'un cancer broncho-pulmonaire suivant certificat médical du 26 juin 2013.
3. [G] [M] a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et, après son décès le [Date décès 1] 2014, ses ayants droit ont repris l'instance.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. L'Agent judiciaire de l'État fait grief à l'arrêt de fixer l'indemnisation des préjudices personnels subis par [G] [M] au titre de sa maladie professionnelle à raison de 40 000 euros au titre des souffrances morales, 20 000 euros au titre des souffrances physiques et 4 000 euros au titre du préjudice esthétique, de condamner la caisse à verser ces sommes à sa succession, soit un total de 64 000 euros, de dire que la caisse est fondée à exercer son action récursoire à l'égard de l'établissement public Charbonnages de France s'agissant des conséquences financières de la faute inexcusable et de condamner le liquidateur de cet établissement public à rembourser à la caisse les sommes que l'organisme social sera tenu d'avancer sur le fondement des articles L. 452-1 à L. 452-3 du code de la sécurité sociale, y compris l'indemnité forfaitaire, alors :
« 1°/ qu'il résulte des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que sont réparables, en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'en se bornant à affirmer que « les souffrances physiques (?) liées à ces soins décrites par ses proches et à leurs effets secondaires constituent un préjudice distinct qui n'est pas indemnisé par la rente qui a été servie à la victime jusqu'à son décès », sans expliquer, comme elle y était pourtant invitée par l'employeur, en quoi les souffrances invoquées par les ayants droit de la victime se distinguaient de celles déjà réparées au titre du déficit fonctionnel permanent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
2°/ qu'il résulte des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que sont réparables, en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'en se bornant à affirmer que « les souffrances (?) morales liées à ces soins décrites par ses proches et à leurs effets secondaires constituent un préjudice distinct qui n'est pas indemnisé par la rente qui a été servie à la victime jusqu'à son décès » et que « De plus, s'agissant des souffrances morales, M. [G] [M] était âgé de 66 ans quand a été posé le diagnostic d'une pathologie irréversible due à la présence de poussière de silice dans les poumons. La forte inquiétude générée par l'annonce d'une telle maladie et la conscience de son origine avec le risque d'évolution qu'elle comporte vers une pathologie plus grave mettant en jeu le pronostic vital, risque qui s'est effectivement réalisé, constitue un préjudice spécifique devant être indemnisé en tant que tel, distinct de celui réparé au titre du déficit fonctionnel permanent », la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à démontrer en quoi les souffrances morales invoquées par les ayants droit de la victime étaient distinctes de celles déjà réparées au titre du déficit fonctionnel permanent, a violé les textes susvisés. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 434-1, L. 434-2, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale :
6. Il résulte des trois premiers de ces textes que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent. Sont réparables en application, du quatrième, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent.
7. Pour fixer à une certaine somme l'indemnisation des souffrances physiques et morales endurées par la victime, l'arrêt relève que la silicose dont celle-ci était atteinte a évolué vers une pathologie plus grave, à savoir un cancer broncho-pulmonaire primitif ayant conduit à une réévaluation de son taux d'incapacité permanente partielle, et que l'intéressée a subi de lourds traitements visant à combattre et à faire régresser ce cancer. L'arrêt retient ensuite que les souffrances physiques et morales liées à ces soins et à leurs effets secondaires ont constitué un préjudice distinct qui n'a pas été indemnisé par la rente servie à la victime jusqu'à son décès.
8. S'agissant des souffrances morales, l'arrêt relève, en outre, que la victime était âgée de 66 ans quand a été posé le diagnostic d'une pathologie irréversible due à la présence de poussière de silice dans ses poumons. Puis il retient que la forte inquiétude causée par l'annonce d'une telle maladie et la conscience de son origine avec le risque d'évolution qu'elle comportait vers une pathologie plus grave mettant en jeu le pronostic vital, a constitué un préjudice spécifique, distinct de celui réparé au titre du déficit fonctionnel permanent et devant être indemnisé en tant que tel.
9. En statuant ainsi, par des motifs impropres à démontrer en quoi les souffrances physiques et morales endurées par la victime étaient distinctes de celles réparées au titre du déficit fonctionnel permanent, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement du 10 juillet 2017 du tribunal des affaires de sécurité sociale de [Localité 1], il fixe l'indemnisation des préjudices personnels subis par la victime de la manière suivante : 40 000 euros au titre du préjudice moral et 20 000 euros au titre des souffrances physiques, il condamne la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 1], agissant pour le compte de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, à verser à la succession de la victime la somme de 64 000 euros mais seulement en ce qu'elle inclut celle de 60 000 euros correspondant à ces préjudices, et il condamne l'établissement public Charbonnages de France à rembourser cette dernière somme à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 1], agissant pour le compte de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, l'arrêt rendu le 7 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;
Remet, sur ces points et dans cette limite, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour l'Agent judiciaire de l'État.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué, après avoir déclaré le jugement commun à la CPAM de [Localité 1] agissant pour le compte de la CANSSM et dit que la maladie professionnelle de [G] [M] inscrite au tableau 25 est due à la faute inexcusable de son employeur, CdF venant aux droits des HBL, d'avoir fixé l'indemnisation des préjudices personnels subis par [G] [M] au titre de cette maladie professionnelle de la manière suivante : 40 000 euros au titre des souffrances morales, 20 000 euros au titre des souffrances physiques et 4 000 euros au titre du préjudice esthétique, condamné la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, à verser ces sommes à la succession de [G] [M], soit un total de 64 000 euros, déclaré inopposable au liquidateur de CdF la décision de prise en charge du 30 mars 2012 de la maladie professionnelle de [G] [M] mais dit néanmoins que la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, est fondée à exercer son action récursoire à l'égard de CdF s'agissant des conséquences financières de la faute inexcusable et condamné le liquidateur de CdF, aux droits et obligations duquel se trouve l'Agent judiciaire de l'Etat, à rembourser à la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, les sommes que l'organisme social sera tenu d'avancer à la succession de [G] [M] sur le fondement des articles L. 452-1 à L. 452-3 du code de la sécurité sociale, y compris l'indemnité forfaitaire ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Sur les préjudices personnels subis par M. [G] [M] la rente ou l'indemnité en capital versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise d'une part les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent, en sorte que sont réparables en application de l'article L 452-3, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'il en résulte, par conséquent, que sont réparables, en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, les souffrances physiques ou morales subies avant consolidation ; qu'après consolidation, seules celles qui ne sont pas indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent par la rente ou l'indemnité en capital peuvent être indemnisées séparément ; que la date de consolidation des lésions a été fixée par la Caisse au 3 août 2010, date du certificat médical initial, à laquelle elle a fixé un taux d'incapacité permanente de 5 % qu'elle a porté à 70 % au 26 juin 2013 suite à l'aggravation de son état de santé imputable à sa maladie professionnelle dont M. [G] [M] est décédé, le [Date décès 1] 2014 ; qu'il ressort des pièces médicales produites que la silicose dont était atteint M. [G] [M] a évolué vers une pathologie plus grave, à savoir un cancer broncho-pulmonaire primitif mis en évidence le 26 juin 2013 (cf. certificat médical du docteur [W]) ayant conduit à une réévaluation de son taux d'IPP ; qu'il a subi de lourds traitements (chimiothérapie) visant à combattre et à faire régresser son cancer ; que les souffrances physiques et morales liées à ces soins décrites par ses proches et à leurs effets secondaires constituent un préjudice distinct qui n'est pas indemnisé par la rente qui a été servie à la victime jusqu'à son décès ; que de plus, s'agissant des souffrances morales, M. [G] [M] était âgé de 66 ans quand a été posé le diagnostic d'une pathologie irréversible due à la présence de poussière de silice dans les poumons ; que la forte inquiétude générée par l'annonce d'une telle maladie et la conscience de son origine avec le risque d'évolution qu'elle comporte vers une pathologie plus grave mettant en jeu le pronostic vital, risque qui s'est effectivement réalisé, constitue un préjudice spécifique devant être indemnisé en tant que tel, distinct de celui réparé au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'au vu des pièces produites, la Cour confirme le montant de 20 000 euros fixé par les premiers juges au titre du préjudice physique et celui de 40 000 euros alloué par les premiers juges au titre du préjudice moral, correspondant à une juste et intégrale indemnisation de ces chefs de dommage, eu égard à l'âge de la victime au moment du diagnostic de sa maladie professionnelle et de sa gravité ; que les troubles dans les conditions d'existence et la perte de qualité de vie décrits par les ayants droit de M. [G] [M] dans les attestations qu'ils produisent, lesquelles font état de ses difficultés à la marche, lors du jardinage et du bricolage, sont indemnisés dans le cadre du déficit fonctionnel permanent et n'ont pas lieu d'être indemnisés sous couvert d'un préjudice d'agrément général ; que force est de constater que les consorts [M] n'apportent pas la preuve par ces attestations de la pratique régulière par la victime, avant sa maladie ou son aggravation, d'une activité spécifique sportive ou de loisir, quelle qu'elle soit ; que sa demande au titre du préjudice d'agrément doit être rejetée et le jugement confirmé sur ce point ; que s'agissant du préjudice esthétique de M. [G] [M], les attestations de proches de la victime témoignent de sa pâleur et de sa perte de poids de sorte que ce chef de préjudice, en lien direct et certain avec sa maladie touchant à l'apparence physique de la victime, doit être indemnisée à hauteur de 4 000 euros ; que c'est en définitive une somme totale de 64 000 euros que la Caisse devra verser à la succession de M. [G] [M] au titre de ses préjudices extra patrimoniaux ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale dispose : « Indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle » ; que sur ce fondement, les consorts [M] demandent l'indemnisation des préjudices subis par M. [G] [M] de la manière suivante : 90 000 euros au titre de la souffrance morale, 70 000 euros au titre de la souffrance physique et 50 000 euros au titre du préjudice d'agrément ; que l'EPIC Charbonnages de France conteste ces demandes en indiquant que le lien entre la silicose et le cancer et le décès de M. [G] [M] n'a pas été formellement établi ; que cependant, dans ses dernières conclusions, l'EPIC Charbonnages de France présente les faits d'une autre affaire en indiquant que l'ancien salarié des HBL « était décédé des suites de sa maladie professionnelle, comme en l'espèce » (page 68) ; que l'EPIC Charbonnages de France reconnaît dès lors que M. [G] [M] est décédé des suites de sa maladie professionnelle ; que pour les victimes atteintes de maladies dues à l'amiante, il existe un préjudice moral spécifique consistant dans l'anxiété permanente face au risque, à tout moment, de dégradation de l'état de santé et de menaces sur le pronostic vital (voir par exemple Cass. 2ème Civ. 13 mars 2014, pourvoi n°13-13.507 ou Cass. 2ème Civ. 16 décembre 2011, pourvoi n° 10-15.947) ; que le diagnostic de cancer broncho pulmonaire a été posé pour M. [G] [M], le 26 juin 2013 à l'âge de 69 ans ; que M. [G] [M] se savait donc condamné, à court terme ; qu'il est d'ailleurs décédé dès le [Date décès 1] 2014 ; que son préjudice moral est nécessairement très conséquent et sera réparé à hauteur de 40 000 euros ; qu'en outre, M. [G] [M] a connu des souffrances physiques considérables qui ont justifié des soins morphiniques jusqu'à son décès comme l'atteste le certificat établi le 20 août 2014 par le docteur [T] ; que de plus, les témoignages de ses proches permettent d'attester des douleurs physiques et des difficultés à respirer qu'il a subies ; que des souffrances physiques intenses sont établies et seront réparées par l'allocation d'une somme de 20 000 euros ; que le préjudice d'agrément se traduit par l'impossibilité dans laquelle M. [G] [M] se trouverait de continuer la pratique d'une activité spécifique de sport ou de loisir ; que Mme [T] [M] produit des attestations de proches qui évoquent l'interruption de ses promenades en forêt, du bricolage, du jardinage sans autre précision ; mais qu'il s'agissait d'un agrément de la vie courante et non d'une activité spécifique de sport ou de loisirs ; qu'il convient donc de rejeter cette demande au titre du préjudice d'agrément ; que les préjudices personnels de M. [G] [M] seront donc fixés comme suit : 40 000 euros au titre du préjudice moral et 20 000 euros au titre des souffrances physiques ; que la CPAM de [Localité 1] agissant pour le compte de la CANSSM devra donc verser la somme de 60 000 euros à la succession de M. [G] [M] ;
1°) ALORS QU'il résulte des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que sont réparables, en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'en se bornant à affirmer que « les souffrances physiques (?) liées à ces soins décrites par ses proches et à leurs effets secondaires constituent un préjudice distinct qui n'est pas indemnisé par la rente qui a été servie à la victime jusqu'à son décès », sans expliquer, comme elle y était pourtant invitée par l'employeur, en quoi les souffrances invoquées par les ayants droit de la victime se distinguaient de celles déjà réparées au titre du déficit fonctionnel permanent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
2°) ALORS QU'il résulte des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; que sont réparables, en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, les souffrances physiques et morales non indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ; qu'en se bornant à affirmer que « les souffrances (?) morales liées à ces soins décrites par ses proches et à leurs effets secondaires constituent un préjudice distinct qui n'est pas indemnisé par la rente qui a été servie à la victime jusqu'à son décès » et que « De plus, s'agissant des souffrances morales, M. [G] [M] était âgé de 66 ans quand a été posé le diagnostic d'une pathologie irréversible due à la présence de poussière de silice dans les poumons. La forte inquiétude générée par l'annonce d'une telle maladie et la conscience de son origine avec le risque d'évolution qu'elle comporte vers une pathologie plus grave mettant en jeu le pronostic vital, risque qui s'est effectivement réalisé, constitue un préjudice spécifique devant être indemnisé en tant que tel, distinct de celui réparé au titre du déficit fonctionnel permanent », la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à démontrer en quoi les souffrances morales invoquées par les ayants droit de la victime étaient distinctes de celles déjà réparées au titre du déficit fonctionnel permanent, a violé les textes susvisés ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué, après avoir déclaré le jugement commun à la CPAM de [Localité 1] agissant pour le compte de la CANSSM et dit que la maladie professionnelle de [G] [M] inscrite au tableau 25 est due à la faute inexcusable de son employeur, CdF venant aux droits des HBL, d'avoir fixé l'indemnisation des préjudices subis par les proches de [G] [M] de la manière suivante : 30 000 euros pour le conjoint survivant de la victime, 15 000 euros pour chacun des quatre enfants et celle de 10 000 euros pour chacun des huit petits-enfants, condamné la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, à verser ces sommes à chacun pour un montant total de 170 000 euros, déclaré inopposable au liquidateur de CdF la décision de prise en charge du 30 mars 2012 de la maladie professionnelle de [G] [M] mais dit néanmoins que la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, est fondée à exercer son action récursoire à l'égard de CdF s'agissant des conséquences financières de la faute inexcusable et condamné le liquidateur de CdF, aux droits et obligations duquel se trouve l'Agent judiciaire de l'Etat, à rembourser à la CPAM de [Localité 1], agissant pour le compte de la CANSSM, les sommes que l'organisme social sera tenu d'avancer à la succession de [G] [M] sur le fondement des articles L. 452-1 à L. 452-3 du code de la sécurité sociale, y compris l'indemnité forfaitaire ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le décès de Monsieur [G] [M], survenu à l'âge de 70 ans a causé à ses proches, qui ont assisté à son dépérissement puis ont souffert de son décès un préjudice moral qui a été justement fixé par les premiers juges à hauteur de la somme de 30 000 euros pour sa veuve, 15 000 euros pour chacun de ses quatre enfants et par un montant de 10 000 euros pour chacun de ses huit petits-enfants ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Sur les préjudices personnels des proches de M. [G] [M] l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale prévoit qu'en cas d'accident suivi de mort, les ayants droit de la victime ainsi que les ascendants et descendants peuvent demander à l'employeur réparation du préjudice moral devant la juridiction de sécurité sociale ; que sur ce fondement, les consorts [M] sollicitent, au titre du préjudice moral, la somme de 70 000 euros pour la veuve, de 45 000 euros pour chacun des enfants et la somme de 10 000 euros pour chacun des petits-enfants nés lors du décès de leur grand-père ; que l'EPIC Charbonnages de France demande la réduction de ces sommes à de plus justes proportions et cite la solution d'un arrêt de la cour d'appel de Metz qui a fixé le préjudice moral de la veuve à 30 000 euros, celui des enfants à 15 000 euros et celui des petits-enfants à 8 000 euros ; que compte tenu des éléments fournis par les parties et notamment des relations fréquentes avec leur père ou leur grand-père, il convient de fixer le préjudice moral subi par les proches de M. [G] [M] comme suit : 30 000 euros pour Mme [T] [M], 15 000 euros pour le préjudice moral des quatre enfants de M. [G] [M] et 10 000 euros pour le préjudice moral des huit petits-enfants ; que la CPAM de [Localité 1] agissant pour le compte de la CANSSM devra donc payer ces sommes à Mme [T] [M] et à chaque enfant et petit-enfant de M. [G] [M] ;
1°) ALORS QU'en retenant que le décès de Monsieur [G] [M], survenu à l'âge de 70 ans a causé à ses proches, qui ont assisté à son dépérissement puis ont souffert de son décès un préjudice moral qui a été justement fixé par les premiers juges à hauteur de la somme de 30 000 euros pour sa veuve, 15 000 euros pour chacun de ses quatre enfants et par un montant de 10 000 euros pour chacun de ses huit petits-enfants, sans distinguer, pour les évaluer séparément, le préjudice d'accompagnement de fin de vie et le préjudice d'affection, la cour d'appel a violé l'article L. 452-3, alinéa 2, du code de la sécurité sociale, ensemble le principe de la réparation intégrale ;
2°) ALORS QUE le préjudice spécifique d'accompagnement de fin de vie a pour objet d'indemniser les troubles et perturbations dans les conditions d'existence d'un proche qui partageait habituellement une communauté de vie affective et effective avec la victime ; qu'en se bornant dès lors à relever que le décès de [G] [M] a causé à ses proches qui ont assisté à son dépérissement un préjudice moral, sans constater l'existence d'une communauté de vie effective entre la victime, d'une part, et ses différents ayants droit, d'autre part, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 452-3, alinéa 2, du code de la sécurité sociale et du principe de la réparation intégrale.