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17/06/2021 | FRANCE | N°17-17222

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 17 juin 2021, 17-17222


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 juin 2021

Cassation partielle sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 529 F-D

Pourvoi n° W 17-17.222

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 JUIN 2021

M. [H] [I], domicilié [Adresse 1], a formé

le pourvoi n° W 17-17.222 contre l'arrêt rendu le 16 novembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 2), dans le litige l'opposant a...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 17 juin 2021

Cassation partielle sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 529 F-D

Pourvoi n° W 17-17.222

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 17 JUIN 2021

M. [H] [I], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 17-17.222 contre l'arrêt rendu le 16 novembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 2), dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2], dont le siège est [Adresse 3], représenté par son syndic la société Nexity Lamy, dont le siège est [Adresse 4], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Schmitt, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. [I], de Me Le Prado, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2], après débats en l'audience publique du 18 mai 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Schmitt, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 novembre 2016), le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] (le syndicat) a assigné M. [I], propriétaire de lot, en paiement de charges.

Examen des moyens

Sur la demande d'annulation pour perte de fondement juridique

2. M. [I] demande l'annulation de l'arrêt pour perte de fondement juridique au motif qu'un jugement du 16 janvier 2018 passé en force de chose jugée a prononcé la nullité de la résolution n° 5 de l'assemblée générale du 26 mars 2015.

3. Cependant, l'annulation d'un arrêt pour perte de fondement juridique ne peut être fondée sur la nullité d'une résolution d'assemblée générale de copropriétaires prononcée par une décision judiciaire passée en force de chose jugée.

Sur les premier, deuxième, troisième moyens, sur le quatrième moyen, pris en sa première branche, et sur le cinquième moyen, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le quatrième moyen, pris en sa troisième branche

Vu l'article 1153, alinéa 4, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

5. Selon ce texte, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

6. M. [I] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer une somme à titre de dommages-intérêts, alors « que, à supposer que la cour d'appel ait entendu condamner M. [I] au versement de la somme de 1 000 euros au titre du retard pris dans le paiement des charges de copropriété, lorsque l'obligation consiste dans le paiement d'une somme d'argent, le créancier ne peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires que si le débiteur en retard lui a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel s'est bornée à relever que le syndicat des copropriétaires invoquait la faute de M. [I] qui a omis de s'acquitter à leur échéance des
appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il est redevable et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat et que « le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues était délibéré et abusif » ; qu'en statuant ainsi sans caractériser la mauvaise foi de M. [I], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »

7. Pour condamner M. [I] à payer des dommages-intérêts, l'arrêt retient que le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues est délibéré et abusif.

8. En statuant ainsi, sans caractériser la mauvaise foi du débiteur, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] une somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 16 novembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la demande de dommages-intérêts formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] ;

Dit n'y avoir lieu de modifier les dépens de première instance ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 2] aux dépens du pourvoi en cassation ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept juin deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour M. [I]

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de sursis à statuer, condamné M. [I] envers le syndicat à plusieurs sommes au titre des charges de copropriété et de dommages-intérêts, outre la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et rejeté l'ensemble des demandes de M. [I] ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de sursis à statuer ; que les conclusions de M. [I], qualifiées de conclusions d'"incident" mais qui saisissent la Cour d'une demande de sursis à statuer, datées du 28 juin 2016, sont mentionnées pour mémoire, dès lors que M. [I] présente la même demande de sursis à statuer dans ses dernières conclusions au fond du 28 juin 2016 ; que M. [H] [I] expose avoir saisi le tribunal correctionnel par voie de citation directe délivrée au syndicat des copropriétaires pour répondre des infractions de faux en écriture et "escroquerie au jugement" et invoque la fausseté des pièces n° 40 et 64 produites par le syndicat à l'appui de ses demandes devant la Cour de céans ; qu'aux termes de l'article 4 du code de procédure pénale : L'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction prévue par l'article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l'action publique. Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement. La mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu'elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil ; qu'en l'espèce, l'action civile exercée par M. [I] devant cette Cour, qui n'est pas une action en réparation au sens du 1er alinéa de l'article 4 du code de procédure pénale, présente simplement un lien de connexité avec l'action qu'il a engagée devant le tribunal correctionnel par voie de citation directe ; qu'en tout état de cause, les pièces n° 40 et 64 produites par le syndicat des copropriétaires arguées de faux par M. [I] et dont il soutient qu'elles servent de support à une escroquerie au jugement imputable au syndicat des copropriétaires commise à son détriment, sont des décomptes de créance et non des pièces comptables et il incombe précisément à cette Cour de statuer sur le bien-fondé de la demande du syndicat des copropriétaires au titre des charges ; qu'en conséquence, la demande de sursis à statuer n'est pas justifiée et sera rejetée » ;

ALORS QUE lorsque la demande est formée postérieurement à sa désignation, le conseiller de la mise en état est, jusqu'à son dessaisissement, seul compétent, à l'exclusion de toute autre formation de la cour, pour statuer sur les exceptions de procédure ; qu'en l'espèce, M. [I] a dans des conclusions d'incident spécialement adressées au magistrat de la mise en état, demandé à ce qu'il soit sursis à statuer dans l'attente du prononcé d'un jugement rendu par le tribunal correctionnel de Paris ; qu'en statuant sur cette exception de procédure dont le conseiller de la mise en état avait pourtant été saisi, la cour d'appel a violé les articles 761 et 907 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il avait débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] de sa demande en paiement d'une somme de 144 euros représentant des frais de prise d'hypothèque et, statuant à nouveau de ce chef, d'avoir condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] la somme de 144 euros au titre de frais d'hypothèque, d'avoir confirmé le jugement pour le surplus en ce qu'il avait condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis immeuble [Adresse 6], la somme de 4.762,12 euros au titre des charges de propriété et de travaux impayés pour la période comprise entre le 13 novembre 2012 et le 1er avril 2014 inclus et d'avoir condamné, en outre, M. [I] au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « B/ Sur les demandes relatives à la période du 13 novembre 2012 au 1er avril 2014 ; Sur les charges ; que le syndicat des copropriétaires qui produit à l'appui de sa demande : - le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 19 mars 2014 ayant approuvé les comptes de l'exercice 2012-2013 (ayant couru du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013) et décidé de travaux, - le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 26 mars 2015 ayant approuvé les comptes de l'exercice 2013-2014, décidé de travaux, et voté le budget prévisionnel de l'exercice 2014-2015, - les appels de fonds établis en corrélation avec les charges et travaux votés, - les régularisations annuelles des charges des exercices 2012-2013 et 2013-2014, - son décompte de créance, justifie du bien fondé de sa demande à hauteur des sommes de : - 3 688,91 ? au titre des charges, - 1 615,25 ? au titre des travaux votés, - soit au total 5 304,16 ? - sauf à déduire un paiement de 542,04 ? enregistré au crédit du compte de M. [I] le 6 mai 2014 mais imputé sur les charges arrêtées au 1er avril 2014 ; qu'il en résulte que M. [I] était débiteur de la somme de 4 762,12 ? au titre des charges arrêtées au 1er avril 2014 ; que M. [I] conteste la valeur probante des pièces comptables produites par le syndicat des copropriétaires n° 5, 7, 8, 10 à 12, 17, 18, 21 à 29 ; que sur ce point toutefois, il suffit de constater que ces pièces, qui sont relatives à des charges appelées antérieurement au 12 novembre 2012, sont inutilement produites par le syndicat et n'ont pas de valeur probante pour la période considérée ; que M. [I] soutient ensuite que les "relevés de charges", représentés par les pièces n° 19, 20, 41 et 42 et 43 du syndicat des copropriétaires "reproduisent la même irrégularité", s'agissant du solde débiteur de son compte ; que toutefois, ces pièces sont des appels de fonds provisionnels, même si certains rappellent également qu'il existe un arriéré de charges dues, ce qui n'est pas prohibé par la loi ; que l'argumentation de M. [I] est dépourvue de fondement sur ce point ; que le jugement sera confirmé, s'agissant des charges de la période du 13 novembre 2012 au 6 mai 2014, dont M. [I] est débiteur à hauteur de 4 762,12 ? ; Sur les frais de recouvrement ; qu'il s'agit des frais d'inscription d'hypothèque dont le tribunal a débouté le syndicat au motif que ce dernier ne justifiait pas de la matérialité des frais invoqués ; qu'en cause d'appel, le syndicat justifie des honoraires d'avocat qu'il a supportés en vue de l'inscription de son hypothèque légale sur les lots de M. [I] à la date du 2 janvier 2014 pour un coût de 144,00 ?, étant précisé qu'à cette date M. [I] était débiteur de charges, comme relevé ci-avant ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point et M. [I] condamné à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 144 ? » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur les charges de copropriété (et de travaux) ; qu'en application de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965 telle que modifiée, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot et aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots ; que l'approbation des comptes du syndic par l'assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges ; que le copropriétaire, qui n'a pas contesté dans les délais prévus à l'article 42 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965 la décision de l'assemblée générale ayant approuvé les comptes, n'est pas fondé à refuser de payer les sommes qui lui sont réclamées ; qu'en l'espèce, le syndicat des copropriétaires verse aux débats, outre la matrice cadastrale, les appels de charges et travaux, les relevés individuels de charges, les procès-verbaux des assemblées générales en date du 19 mars 2014, de l'exercice écoulé, du budget prévisionnel de l'exercice suivant et adoption de travaux, la mise en demeure du 1er juillet 2013, un décompte des sommes dues pour charges et travaux impayés en date du 28 avril 2014 de 9.669,69 euros pour la période comprise entre le 16 mars 2011 et le 1er avril 2014 et un décompte d'un montant de 5.448,16 euros pour la période comprise entre le 13 novembre 2012 et le 1er avril 2014 ; qu'il convient de rappeler que le jugement rendu par ce tribunal le 10 janvier 2013 a débouté le syndicat de sa demande reconventionnelle tendant à condamner Monsieur [H] [I] au paiement des charges de copropriété au titre des charges échues et impayées entre le 15 février 2011 et le 13 novembre 2012 ; qu'en conséquence, seule sera examinée la demande formée à titre subsidiaire tendant au paiement des charges pour la période comprise entre le 13 novembre 2012 et le 1er avril 2014 ; qu'au vu des pièces produites, Monsieur [H] [I] est redevable au titre des charges de copropriété et de travaux, de la somme de 4.762,12 euros au titre des charges et travaux pour la période comprise entre le 13 novembre 2012 et le 1er avril 2014 (après déduction de la somme de 542,04 euros, réglée par chèque du 1er avril 2014) ; que cette somme produira intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement »

1/ ALORS QU'il appartient au syndicat de copropriétaires qui poursuit l'un des copropriétaires en recouvrement de charges de prouver que celui-ci est effectivement débiteur des sommes réclamées ; que le syndicat de copropriétaires est tenu, à cette fin, de produire le procès-verbal de l'assemblée générale approuvant les comptes de l'exercice correspondant ainsi que les documents comptables et le décompte de répartition des charges s'y rapportant ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] au versement de la somme de 4.762,12 euros au titre des charges de copropriété dues pour la période comprise entre le 13 novembre 2012 et le 1er avril 2014, la cour d'appel a relevé qu'étaient produits les procès-verbaux des assemblées générales des 19 mars 2014 et 26 mars 2015, les appels de fonds établis en corrélation avec les charges et travaux votés, les régularisations annuelles des charges des exercices 2012-2013 et 2013-2014 et un décompte de créance ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si les documents comptables corroboraient les énonciations des procès-verbaux et du décompte de charges, quand M. [I] faisait valoir que les relevés de charge et les appels de fonds produits comportaient des irrégularités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2/ ALORS QUE le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même interdit au juge de se fonder exclusivement sur les éléments de preuve établis unilatéralement par la partie qui s'en prévaut ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] au paiement de la somme de 4.762,12 euros au titre des charges relatives à la période allant du 13 novembre 2012 au 1er avril 2014, la cour d'appel s'est fondée exclusivement sur les procès-verbaux de l'assemblée des copropriétaires des 19 mars 2014 et 26 mars 2015, les appels de fonds établis en corrélation avec les charges et travaux votés, les régularisation annuelles des charges des exercices 2012-2013 et 2013-2014 et le décompte de créance de M. [I] ; qu'en se fondant ainsi exclusivement sur des documents établis par le syndicat des copropriétaires, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5], outre la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5.854,87 euros au titre des charges et des travaux dus au titre de la période du 2 avril 2014 au 1er juin 2016 ;

AUX MOTIFS QUE « C. Sur la demande relative à la période ayant couru entre le 1er avril 2014 et le 1er juin 2016 ; Sur la recevabilité de la demande ; que M. [I] soutient que la demande est nouvelle devant la Cour et, partant, irrecevable ; que toutefois, l'actualisation par le syndicat des copropriétaires du montant des charges dues ne constitue pas une demande nouvelle au regard de l'article 566 du code de procédure civile, s'agissant d'une prétention qui était virtuellement comprise dans la demande initiale en paiement de charges de copropriété ; que la demande du syndic est, dès lors, recevable ; que sur le fond, le syndicat se prévaut d'une créance nouvelle de charges s'élevant à 5 854,87 ? comprenant les charges courantes et les appels de fonds pour travaux, appelés entre le 1er avril 2014 et le 1er juin 2016 ; que le syndicat des copropriétaires verse aux débats : - le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 19 mars 2014 ayant décidé de l'actualisation du budget prévisionnel de l'exercice 2013/2014, approuvé le budget prévisionnel de l'année 2015 et décidé de travaux, - le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 26 mars 2015 ayant approuvé les comptes de l'exercice ayant couru du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 et décidé de travaux, - le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 26 mars 2015 ayant approuvé les comptes de l'exercice couru du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2015 et décidé de travaux ainsi que voté un ajustement du budget prévisionnel de l'exercice 2015-2016, - ses appels de fonds provisionnels au titre des charges et des travaux des exercices correspondants, - son décompte de créance détaillé en charge : 4.503,38 ? travaux : 1 351,49 ? Total : 5 854,87 ?, étant constaté que ce décompte ne comporte aucune imputation au crédit du compte copropriétaire de M. [I] et que, réciproquement, ce dernier n'invoque aucun paiement au titre de cette période ; que pour s'opposer à la demande, M. [I] soutient : 1. que le syndicat des copropriétaires ne justifie pas de sa créance en l'absence de production des grands livres comptables ; que toutefois cette affirmation est inexacte et il appartient à un syndicat de copropriétaires qui poursuit le recouvrement de charges de produire les procès-verbaux des assemblées générales approuvant les comptes des exercices considérés ainsi que le décompte de répartition des charges ; qu'en l'espèce, les appels de fonds produits par le syndicat comportent la base de la répartition des charges en fonction des tantièmes de charges supportées par M. [I] et que ce dernier ne conteste pas, ainsi que la quote-part lui incombant en fonction de cette répartition ; que le syndicat justifie à cet égard du bien-fondé de sa demande ; 2. que les appels de charges sont édités par une "SA Nexity" N° RCS 444 346 795 alors que le syndic de copropriété est la SAS Nexity Lamy RCS 487 530 099, et que les appels de charges établie par la "SA Nexity" ne lui sont pas opposables ; que toutefois cette allégation est matériellement inexacte au vu des appels de fonds produits par le syndicat des copropriétaires qui sont établis sur des documents à en-tête de la SAS Nexity Lamy et portent la référence de son n° RCS 487 530 099 ; 3. que les appels de fonds mentionnent que les paiements doivent être effectués au nom de la société Nexity Lamy, alors que la loi oblige à l'ouverture d'un compte séparé au nom du syndicat des copropriétaires et que ces appels de fonds lui sont donc également inopposables pour cette raison ; que toutefois, les appels de fonds produits comportent la mention selon laquelle la somme due peut être payée soit par "TIP-SEPA" devant être signé par le copropriétaire au nom de "syndicat des copropriétaires [Adresse 2]" pour les appels de fonds de l'exercice 2013-2014 puis à l'ordre du "syndicat des copropriétaires [Adresse 5] C/O Nexity ? MS 101104" pour les appels de fonds établis à compter du 3 décembre 2014 ; qu'il n'est donc pas établi que les fonds transitent par les comptes du syndic ; que par ailleurs et en tout état de cause, quoi qu'il en soit de l'éventuelle absence de compte séparé, la sanction légale de cette infraction à la loi, à la supposer établie, n'est pas l'inopposabilité aux copropriétaires des appels de fonds mais la nullité du mandat du syndic, qui n'est pas invoquée en l'espèce ; qu'en conséquence, l'argumentation de l'appelant sur ce point ne fait pas échec à l'exigibilité des charges ; 4. que les pièces n° 59 et 61 produites par le syndicat sont des "faux en écriture comptable" dès lors que, suivant ordonnance du 26 mai 2014, la société Nexity Lamy n'était plus le syndic en fonction et avait été remplacée par un administrateur provisoire ; que sur ce point toutefois, M. [I] n'a pas produit l'ordonnance du 26 mai 2014 dont il fait état de sorte que son argumentation ne peut être retenue ; qu'il sera dès lors fait droit à la demande du syndicat au titre des charges courues entre le 1er avril 2014 et le 1er juin 2016 à hauteur de 5 854,87 ? » ;

1/ ALORS QU'il appartient au syndicat de copropriétaires qui poursuit l'un des copropriétaires en recouvrement de charges de prouver que celui-ci est effectivement débiteur des sommes réclamées ; que le syndicat de copropriétaires est tenu, à cette fin, de produire le procès-verbal de l'assemblée générale approuvant les comptes de l'exercice correspondant ainsi que les documents comptables et le décompte de répartition des charges s'y rapportant ; qu'en retenant, pour condamner M. [I] au paiement de la somme de 5.854,87 euros au titre des charges relatives à la période du 2 avril 2014 au 1er juin 2016, qu'il « appartient à un syndicat des copropriétaires qui poursuit le recouvrement de charges de produire les procès-verbaux des assemblées générales approuvant les comptes des exercices considérés ainsi que le décompté de répartition des charges » (cf. arrêt, p. 7, § 3), quand le syndicat des copropriétaires doit également produire les documents comptables s'y rapportant, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieur à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2/ ALORS QU'il appartient au syndicat de copropriétaires qui poursuit l'un des copropriétaires en recouvrement de charges de prouver que celui-ci est effectivement débiteur des sommes réclamées ; que le syndicat de copropriétaires est tenu, à cette fin, de produire le procès-verbal de l'assemblée générale approuvant les comptes de l'exercice correspondant ainsi que les documents comptables et le décompte de répartition des charges s'y rapportant ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] au versement de la somme de 5.854,87 euros au titre des charges de copropriété dues pour la période comprise entre le 2 avril 2014 et le 1er juin 2016, la cour d'appel a relevé qu'étaient produits les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires des 19 mars 2014, 26 mars 2015 et 29 mars 2016, les appels de fonds provisionnels au titre des charges et des travaux des exercices correspondants et le décompte de créance détaillé en charge et s'est référé au contenu du décompte de créance ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si les documents comptables corroboraient les énonciations des procès-verbaux et du décompte de répartition des charges, quand M. [I] faisait valoir que les relevés de charge produits et les appels de fonds comportaient des irrégularités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3/ ALORS QUE le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même interdit au juge de se fonder exclusivement sur les éléments de preuve établis unilatéralement par la partie qui s'en prévaut ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] au paiement de la somme de 5.854,87 euros au titre des charges relatives à la période du 2 avril 2014 au 1er juin 2016, la cour d'appel a relevé que le syndicat des copropriétaires versait aux débats les procès-verbaux des assemblées générales des copropriétaires des 19 mars 2014, 26 mars 2015 et 29 mars 2016, les appels de fonds provisionnels au titre des charges et des travaux des exercices correspondants et son décompte de créance ; qu'en se fondant ainsi exclusivement sur des documents établis par le syndicat des copropriétaires, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. [I] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble [Adresse 5] la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « III. sur les demandes réciproques de dommages et intérêts ; Sur la demande du syndicat des copropriétaires ; que le syndicat des copropriétaires invoque la faute de M. [I], qui omet de s'acquitter à leur échéance des appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il était redevable, et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat des copropriétaires qui a besoin de toutes ses ressources pour réaliser les travaux votés ; que le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues est délibéré et abusif ; qu'il sera fait droit à la demande à hauteur de 1 000 ? » ;

1/ ALORS QUE le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel s'est bornée à relever que le syndicat des copropriétaires invoquait la faute de M. [I] qui a omis de s'acquitter à leur échéance des appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il est redevable et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat et que « le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues [était] délibéré et abusif » ; qu'en statuant ainsi sans préciser le fondement juridique de sa décision, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;

2/ ALORS, subsidiairement, QUE, à supposer que le juge ait entendu condamné M. [I] au versement d'une somme de 1.000 euros pour résistance abusive, l'exercice du droit de se défendre en justice ne peut donner lieu au versement de dommages-intérêts que s'il dégénère en abus ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel s'est bornée à relever que le syndicat des copropriétaires invoquait la faute de M. [I] qui a omis de s'acquitter à leur échéance des appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il est redevable et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat et que « le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues [était] délibéré et abusif » ; qu'en statuant ainsi sans caractériser aucune circonstance de nature à faire dégénérer le droit de M. [I] de se défendre en abus, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 32-1 du code de procédure civile et 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3/ ALORS, plus subsidiairement encore, QUE à supposer que la cour d'appel ait entendu condamner M. [I] au versement de la somme de 1.000 euros au titre du retard pris dans le paiement des charges de copropriété, lorsque l'obligation consiste dans le paiement d'une somme d'argent, le créancier ne peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires que si le débiteur en retard lui a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel s'est bornée à relever que le syndicat des copropriétaires invoquait la faute de M. [I] qui a omis de s'acquitter à leur échéance des appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il est redevable et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat et que « le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues [était] délibéré et abusif » ; qu'en statuant ainsi sans caractériser la mauvaise foi de M. [I], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4/ ALORS, plus subsidiairement encore, QUE à supposer que la cour d'appel ait entendu condamner M. [I] au versement de la somme de 1.000 euros au titre du retard pris dans le paiement des charges de copropriété, lorsque l'obligation consiste dans le paiement d'une somme d'argent, le créancier ne peut obtenir des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires que si le débiteur en retard lui a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel s'est bornée à relever que le syndicat des copropriétaires invoquait la faute de M. [I] qui a omis de s'acquitter à leur échéance des appels de charges et des appels de fonds pour travaux dont il est redevable et le caractère préjudiciable de cette attitude pour le syndicat et que « le refus de l'appelant de s'acquitter des sommes dues [était] délibéré et abusif » ; qu'en statuant ainsi sans caractériser l'existence d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1153 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. [I] de sa demande de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la demande de M. [I] ; que M. [I] estime que le syndicat des copropriétaires a fait preuve à son égard d'un acharnement délibéré et fautif et sollicite son indemnisation à hauteur de 4.000 ? pour préjudice moral ; qu'en l'espèce, il n'est pas démontré que le syndicat des copropriétaires, dont les prétentions sont très largement justifiées, ferait preuve d'un acharnement fautif à l'égard de M. [I] ; que la demande sera rejetée » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur les demandes de dommages-intérêts ; que le droit d'agir ne dégénère en abus que s'il procède d'une erreur grossière équivalente au dol ou s'il révèle une intention de nuire qui n'est pas démontrée en l'espèce ; qu'il convient donc de débouter Monsieur [I] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ; que M. [I] ne fournit à l'appui de sa demande en dommages et intérêts aucune preuve de la réalité d'un préjudice subi ; que sa demande à ce titre sera également rejetée » ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur l'un des précédents moyens entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt critiqué par le présent moyen en étant dans un lien de dépendance nécessaire, et ce par application de l'article 624 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 17-17222
Date de la décision : 17/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 16 novembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 17 jui. 2021, pourvoi n°17-17222


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:17.17222
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