La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/06/2021 | FRANCE | N°19-24631

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 juin 2021, 19-24631


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 juin 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 437 F-D

Pourvoi n° R 19-24.631

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 JUIN 2021

La société Fashion B. Air, société anonyme, dont le siège est [Adress

e 1], a formé le pourvoi n° R 19-24.631 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

SG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 juin 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 437 F-D

Pourvoi n° R 19-24.631

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 16 JUIN 2021

La société Fashion B. Air, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 19-24.631 contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société XXX, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Girardet, conseiller, les observations écrites et orales de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Fashion B. Air, et de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société XXX, et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 mai 2021 où étaient présents Mme Batut, président, M. Girardet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Lavigne, avocat général, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 septembre 2019), la société XXX (la société XXX), déclarant être investie des droits d'auteur sur un dessin de dentelle qu'elle commercialise depuis 2012 sous le n° 970120 après que la société XXX, filiale, comme elle-même, de la société XXX, l'eut divulgué et commercialisé sous le n° 78184, et soutenant avoir constaté que la société Fashion B. Air (la société Fashion) proposait à la vente des vêtements confectionnés dans une dentelle qui reproduisait les caractéristiques de son dessin, l'a assignée en contrefaçon de droits d'auteur et en concurrence déloyale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. La société Fashion fait grief à l'arrêt de dire que le dessin référencé 970120 de la société XXX est original et qu'elle a commis des actes de contrefaçon et de prononcer à son encontre différentes condamnations, alors :

« 1°/ qu'en l'absence de revendication du ou des auteurs, seule l'exploitation de l'oeuvre par une personne physique ou morale sous son nom fait présumer, à l'égard du tiers recherché pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre du droit de propriété incorporelle d'auteur ; qu'en jugeant que la titularité du droit d'auteur sur le dessin litigieux devait être reconnue à la société XXX tout en ayant relevé que cette exploitation avait été faite au moins pour partie sous le nom de la société XXX, au motif inopérant que la société XXX justifie être titulaire de deux marques verbales XXX, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 113-5 du code de la propriété intellectuelle ;

2°/ que la société Fashion rappelait, page 7 de ses conclusions d'appel, que par un arrêt du 29 janvier 2019, la cour d'appel de Paris avait jugé, à propos du même dessin ayant porté la référence 78184 et aujourd'hui la référence 970120, que « la persistance de l'usage de ce nom (XXX) et de cette référence 78184 pour justifier de l'exploitation de ce dessin, moins de deux ans avant les faits de contrefaçon allégués (?) révèle une équivoque quant à la détermination de la personne morale exploitant l'oeuvre », de sorte que « la société XXX, qui n'est pas à l'origine de la création du dessin de dentelle et n'a pas été la première à le commercialiser, ne peut bénéficier de la présomption de titularité de droit d'auteur, faute de commercialisation sous son nom sans équivoque » ; qu'en jugeant que la titularité du droit d'auteur sur le dessin litigieux devait être reconnue à la société XXX sans accorder aucun motif à sa précédente décision du 29 janvier 2019, portant sur le même dessin et statuant en sens exactement contraire, et sans permettre à la société Fashion de comprendre la différence de jugement qu'elle a ainsi subi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que nul ne peut se constituer un titre à soi-même ;qu'en jugeant que « M. [L] [N], président de la société XXX, atteste par ailleurs que depuis 2006 la société XXX est propriétaire des sociétés XXX et XXX, que la société XXX a divulgué et commercialisé le dessin de dentelle litigieux à compter du 19 septembre 2008 et jusqu'en 2011 sous la référence 78184 et que la propriété du dessin a ensuite été transférée à la société XXX qui l'a exploité sous une nouvelle référence 970120 pour permettre la mise en production sur ses propres machines » et que « son témoignage ne peut être rejeté du seul fait qu'il serait partie au litige, la société XXX étant présidente des sociétés XXX et XXX, dès lors qu'il est corroboré par les autres éléments produits aux débats » (ibid.), et en retenant parmi ces autres éléments produits aux débats des faits d'exploitation du dessin litigieux sous le nom de la société XXX, qui contredisaient la titularité du droit d'auteur invoquée par la société XXX, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, alinéa 1er, du code civil ;

4°/ que, pour établir que le dessin litigieux appartenait toujours à la société XXX, la société Fashion soulignait, page 15 de ses conclusions d'appel, que le commissaire au compte de la société XXX avait pu établir une attestation « relative au chiffre de d'affaires de l'article 78184 pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2016 » produite aux débats et que « si le commissaire aux comptes de la société XXX est capable d'attester quant au chiffre d'affaires réalisé par la société XXX sur « l'article 78184 », c'est bien que cet article 78184 figure encore dans le patrimoine et la comptabilité de la société XXX », peu important que ce chiffre d'affaires puisse être nul ; qu'en ne répondant pas aux conclusions de la société Fashion sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

3. C'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments produits et en l'absence d'application à la preuve d'un fait juridique du principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue par une appréciation des droits de la société XXX portée antérieurement, lors d'une instance distincte, et n'avait pas à répondre à des prétentions que ses constatations rendaient inopérantes, a estimé que la société XXX avait cessé la commercialisation du dessin de dentelle litigieux et que la société XXX justifiait, par plusieurs éléments concordants, d'une exploitation non équivoque du dessin de dentelle n° 970120 sous son nom et sous ses marques verbales française et internationale, antérieurement aux actes de contrefaçon allégués, et qu'elle était dès lors recevable à agir en contrefaçon.

4. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. La société Fashion fait le même grief à l'arrêt, alors « que pour établir le défaut d'originalité du dessin litigieux, la société Fashion exposait que l'on retrouvait ses caractéristiques, à savoir une composition associant deux compositions florales différentes, composées de fleur et de feuillage sur des lignes horizontales, une impression de profusion et de densité des motifs floraux et la mise en valeur des espaces vides en espaçant les traits séparant chaque motif, dans plusieurs autres dentelles dont les dessins étaient également produits, parmi lesquelles la dentelle Angèle Giniaux composée de lignes répétées alternant fleurs et branchages, avec deux types de fleurs différentes et une composition florissante fastueuse créant une impression de profusion et de densité des motifs floraux, ainsi qu'un espacement net des traits avec une mise en valeur d'espaces vides, la dentelle Chanty Spitzenfabrik, composée également sur des lignes horizontales alternant fleurs et branchages, avec un effet de profusion de motifs floraux, et également une partie importante laissée aux espaces vides notamment pour le coeur des fleurs, avec une fleur similaire aux fleurs de la dentelle revendiquée, accompagnée de branchages également exécutés de façon identique, la dentelle robe Jacques Heim, composée de lignes alternant deux fleurs de type différent avec des branchages, comme sur le modèle de dentelle revendiquée, la dentelle Robert Attenbourgh, identique ou la dentelle Tianhai Lace, qui présente une fleur similaire à celle de la dentelle revendiquée, sur un ensemble composé d'une alternance de fleurs et de branchages sur une ligne horizontale ; qu'en jugeant que « la prétendue banalité du motif de dentelle opposé n'est aucunement avérée au vu des éléments versés aux débats par la société Fashion qui montrent des motifs de dentelle différents quoique relevant d'un même genre de dentelles
florales, aucune des dentelles préexistantes produites ne présentant dans une même combinaison les compositions florales revendiquées », sans examiner, même sommairement, les pièces produites aux débats, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. L'arrêt relève, d'abord, que le dessin de dentelle revendiqué se caractérise par une combinaison de deux compositions florales différentes, l'une constituée d'un coeur d'anémone éclose et l'autre composée d'une fleur arrondie entourée de plusieurs rangées de pétales, dotée chacune d'un feuillage spécifique, le créateur ayant fait le choix de proposer une densité du tissage des motifs floraux en contraste avec un aspect plus léger de l'espace en bordure de fleur, renforçant ainsi l'effet de contraste ainsi que des tissages et maillages différents pour chaque élément composant les fleurs et le feuillage du modèle. Il constate, ensuite, par motifs propres et adoptés, que, si la société Fashion verse aux débats des motifs relevant d'un même genre de dentelles florales, aucune des dentelles produites ne présente dans une même combinaison les compositions florales revendiquées et qu'au contraire, ils s'en distinguent en donnant à voir des dessins de motifs floraux et de feuillages tous différents.

7. Il s'en déduit que la cour d'appel a analysé les pièces produites aux débats et que le moyen, qui manque en fait, ne peut être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Fashion B. Air aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Fashion B. Air et la condamne à payer à la société XXX la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille vingt-et-un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Fashion B. Air

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société FASHION B. AIR et d'AVOIR en conséquence dit que le dessin référencé 970120 de la société XXX est original et d'AVOIR en conséquence confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société FASHION B. AIR a commis des actes de contrefaçon en faisant fabriquer, en important, en offrant à la vente et en commercialisant une blouse référencée TITUS, un short référencé SHERLOCK, un top à manches longues référencé CHARMEUR, une combinaison pantalon référencée CALCAIRE, une jupe longue référencée ROYON, un kimono référencé TACHA , une robe référencée ROYON, un kimono référencé KYLIE reproduisant les caractéristiques du dessin référencé 970120 de la société XXX et prononcé à ce titre différentes condamnations ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « sur la titularité du droit sur le dessin revendiqué par la société XXX, en l'absence de revendication du ou des auteurs, l'exploitation non équivoque d'une oeuvre par une personne morale sous son nom fait présumer, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre, qu'elle soit collective ou non, du droit de propriété incorporelle de l'auteur, sans qu'il soit nécessaire d'exiger de celle-ci de rapporter la preuve d'un processus créatif ou d'une cession des droits à son profit ; que les faits reprochés à la société Fashion ayant été constatés entre le mois de février et le mois de mai 2016, l'assignation ayant été délivrée au mois de juin 2016, c'est sur le premier semestre 2016 et notamment au mois de février 2016 qu'il convient de se placer pour appréhender la commercialisation non équivoque par la société XXX du dessin de dentelle revendiqué ; qu'il est constant, les parties étant en accord sur ce point, que le dessin de dentelle n'a pas été divulgué par la société XXX mais par la société XXX qui l'a commercialisé pour la première fois en septembre 1988, sous la référence 78184 et qui en a poursuivi la commercialisation à tout le moins jusqu'en 2011 ; que la société Fashion dénie à la société XXX la présomption de titularité en arguant qu'elle n'établit pas avec certitude la physionomie de la dentelle revendiquée et ne justifie pas d'une exploitation non équivoque dès lors qu'il n'est pas justifié que la société XXX ait cessé la commercialisation de la dentelle postérieurement à 2011 et que la société XXX fait toujours mention du nom de XXX et de l'ancienne référence pour nommer la dentelle litigieuse ; que la cour constate cependant que la société XXX produit un horodatage Fidealis du 24 janvier 2014, au nom de XXX portant sur une dentelle référencée 970120 et 78184, ainsi qu'un échantillon sous robrack de la même dentelle au nom de XXX sous les deux références 970120 et 78184, ces documents permettant d'établir que le motif de cette dentelle, parfaitement identifiée, est le même sous ces deux références ; que M. [L] [N], président de la société XXX, atteste par ailleurs que depuis 2006 la société XXX est propriétaire des sociétés XXX et XXX, que la société XXX a divulgué et commercialisé le dessin de dentelle litigieux à compter du 19 septembre 2008 et jusqu'en 2011 sous la référence 78184 et que la propriété du dessin a ensuite été transférée à la société XXX qui l'a exploité sous une nouvelle référence 970120 pour permettre la mise en production sur ses propres machines ; que son témoignage ne peut être rejeté du seul fait qu'il serait partie au litige, la société XXX étant présidente des sociétés XXX et XXX, dès lors qu'il est corroboré par les autres éléments produits aux débats ; qu'ainsi, la société XXX produit notamment pour justifier de l'exploitation revendiquée : - des factures de commercialisation par la société XXX du dessin référencé 970120 et précisant qu'il était initialement référencé 78184, factures établies entre 2012 et 2019, - un extrait de catalogue « XXX » de 2011 présentant un mannequin revêtu d'une robe reprenant les motifs du dessin revendiqué avec la mention XXX pour Carven n° 78184, - un extrait de catalogue « XXX » de 2012 présentant un mannequin revêtu d'une combinaison reprenant le dessin revendiqué et portant la mention XXX pour Valentino n° 78184, - un extrait de catalogue « XXX » de 2013 présentant un mannequin revêtu d'une robe reprenant les motifs du dessin revendiqué avec la mention XXX pour Valentino n° 78184 et précisant que XXX est une marque de la maison XXX, - un extrait de la collection VALENTINO Automne/Hiver 2013 sur lequel apparaît un mannequin revêtu d'une robe verte couverte de dentelle reprenant le motif revendiqué et qui fait apparaître la mention XXX et précisant que XXX est une marque de la maison XXX, - une attestation du cabinet comptable Cogefis qui atteste que le chiffre d'affaire de la société XXX généré par le dessin 970120 pour la période du 1er janvier 2012 au 11 septembre 2015 est de 4 058 910,67 euros, - une attestation du commissaire aux comptes de la société XXX qui atteste que cette société n'a fait aucun chiffre d'affaire généré par sa référence 978184 pour la période 2014/2016 ; qu'au vu de ces éléments concordants démontrant la réalité d'une exploitation par la seule société XXX de la dentelle en cause, la société Fashion arguerait vainement du caractère équivoque de cette exploitation aux motifs qu'il ne serait pas justifié de ce que la société XXX ait cessé la commercialisation de ce dessin de dentelle pour son compte et que persisterait l'utilisation du nom de XXX et du numéro 78184 qui était celui utilisé par cette société ; qu'à cet égard, il sera souligné que la société XXX justifie être titulaire de deux marques verbales XXX, l'une française déposée le 15 octobre 2012 et l'autre internationale désignant notamment l'union européenne déposée le 25 mars 2013, lui permettant d'utiliser cette appellation pour nommer ses collections provenant de dentelles initialement exploitées par la société XXX et il ressort des éléments précités qu'elle le rappelait expressément, en particulier pour ses collections 2013 ; qu'ainsi, en l'absence de revendication de la titularité par un tiers et notamment par la société XXX, la société XXX qui justifie exploiter le dessin litigieux, sous son nom XXX ou sous celui de sa marque XXX, bien antérieurement aux faits reprochés et alors qu'il est attesté que la société XXX en a cessé la commercialisation à tout le moins depuis 2014, est présumée, à l'égard de la société Fashion recherchée pour contrefaçon en 2016, être titulaire sur ce dessin du droit de propriété incorporelle d'auteur allégué ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Fashion » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, aux termes du jugement entrepris, « s'il est constant que le dessin revendiqué a été divulgué pour la première fois en 2008 et commercialisé à cette date d'abord par la société XXX et non par la société XXX, il ressort des éléments versés aux débats, sans être contredits par la société FASHION B. AIR de manière opérante, que la société XXX qui est présidée par la société XXX comme l'est la société XXX, est depuis le 25 mars 2013 titulaire de la marque XXX enregistrée sous le numéro 1162033, ce qui explique la persistance de la mention « XXX » accompagnant la commercialisation de dentelle reproduisant le dessin susvisé (?) que si comme le fait observer la société FASHION B. AIR, le commissaire aux comptes de la société XXX a attesté du chiffre d'affaires de cette société pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2016 s'agissant du produit référencé « 78184 », cette attestation confirme qu'aucune exploitation de ce produit n'a été poursuivie par cette société sur ce produit puisque précisément le commissaire aux comptes atteste d'un chiffre d'affaires qui est nul pour ce produit sur cette période ; que la commercialisation par la société XXX de la dentelle selon le dessin n° 970120 est enfin attestée par l'expertcomptable de cette société qui précise que le chiffre d'affaires réalisé par cette société a été de plus de 4 millions d'euros pour la période comprise entre 2012 et 2015 » ;

ALORS en premier lieu QU'en l'absence de revendication du ou des auteurs, seule l'exploitation de l'oeuvre par une personne physique ou morale sous son nom fait présumer, à l'égard du tiers recherché pour contrefaçon, que cette personne est titulaire sur l'oeuvre du droit de propriété incorporelle d'auteur ; qu'en jugeant que la titularité du droit d'auteur sur le dessin litigieux devait être reconnue à la société XXX tout en ayant relevé que cette exploitation avait été faite au moins pour partie sous le nom de la société XXX, au motif inopérant que la société XXX justifie être titulaire de deux marques verbales XXX, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 113-5 du code de la propriété intellectuelle ;

ALORS en deuxième lieu QUE la société FASHION B. AIR rappelait, page 7 de ses conclusions d'appel, que par un arrêt du 29 janvier 2019, la cour d'appel de Paris avait jugé, à propos du même dessin ayant porté la référence 78184 et aujourd'hui la référence 970120, que « la persistance de l'usage de ce nom (XXX) et de cette référence 78184 pour justifier de l'exploitation de ce dessin, moins de deux ans avant les faits de contrefaçon allégués (?) révèle une équivoque quant à la détermination de la personne morale exploitant l'oeuvre », de sorte que « la société XXX, qui n'est pas à l'origine de la création du dessin de dentelle et n'a pas été la première à le commercialiser, ne peut bénéficier de la présomption de titularité de droit d'auteur, faute de commercialisation sous son nom sans équivoque » (arrêt du 29 janvier 2019, pp. 7-8) ; qu'en jugeant que la titularité du droit d'auteur sur le dessin litigieux devait être reconnue à la société XXX sans accorder aucun motif à sa précédente décision du 29 janvier 2019, portant sur le même dessin et statuant en sens exactement contraire, et sans permettre à la société FASHION B. AIR de comprendre la différence de jugement qu'elle a ainsi subi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS en troisième lieu QUE nul ne peut se constituer un titre à soi-même ; qu'en jugeant que « M. [L] [N], président de la société XXX, atteste par ailleurs que depuis 2006 la société XXX est propriétaire des sociétés XXX et XXX, que la société XXX a divulgué et commercialisé le dessin de dentelle litigieux à compter du 19 septembre 2008 et jusqu'en 2011 sous la référence 78184 et que la propriété du dessin a ensuite été transférée à la société XXX qui l'a exploité sous une nouvelle référence 970120 pour permettre la mise en production sur ses propres machines » (arrêt, p 4) et que « son témoignage ne peut être rejeté du seul fait qu'il serait partie au litige, la société XXX étant présidente des sociétés XXX et XXX, dès lors qu'il est corroboré par les autres éléments produits aux débats » (ibid.), et en retenant parmi ces autres éléments produits aux débats des faits d'exploitation du dessin litigieux sous le nom de la société XXX, qui contredisaient la titularité du droit d'auteur invoquée par la société XXX, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, alinéa 1er, du code civil ;

ALORS en quatrième lieu QUE pour établir que le dessin litigieux appartenait toujours à la société XXX, la société FASHION B. AIR soulignait, page 15 de ses conclusions d'appel, que le commissaire au compte de la société XXX avait pu établir une attestation « relative au chiffre de d'affaires de l'article 78184 pour la période du 1er septembre 2014 au 31 août 2016 » produite aux débats et que « si le commissaire aux comptes de la société XXX est capable d'attester quant au chiffre d'affaires réalisé par la société XXX sur « l'article 78184 », c'est bien que cet article 78184 figure encore dans le patrimoine et la comptabilité de la société XXX », peu important que ce chiffre d'affaires puisse être nul ; qu'en ne répondant pas aux conclusions de la société FASHION B. AIR sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le dessin référencé 970120 de la société XXX est original et d'AVOIR en conséquence confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la société FASHION B. AIR a commis des actes de contrefaçon en faisant fabriquer, en important, en offrant à la vente et en commercialisant une blouse référencée TITUS, un short référencé SHERLOCK, un top à manches longues référencé CHARMEUR, une combinaison-pantalon référencée CALCAIRE, une jupe longue référencée ROYON, un kimono référencé TACHA , une robe référencée ROYON, un kimono référencé KYLIE reproduisant les caractéristiques du dessin référencé 970120 de la société XXX et d'AVOIR en conséquence prononcé différentes condamnations ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE, aux termes de l'arrêt attaqué, « sur l'originalité dessin de dentelle, l'article L. 111 -1 du code de la propriété intellectuelle dispose que l'auteur d'une oeuvre de l'esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous, comportant des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial ; que ce droit est conféré, selon l'article L. 112-1 du même code, à l'auteur de toute oeuvre de l'esprit, quels qu'en soient le genre, la forme d'expression, le mérite ou la destination ; qu'il se déduit de ces dispositions le principe de la protection d'une oeuvre sans formalité et du seul fait de la création d'une forme originale ; que néanmoins, lorsque cette protection est contestée en défense, l'originalité d'une oeuvre doit être explicitée par celui qui s'en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d'identifier les éléments traduisant sa personnalité ; que l'originalité d'une oeuvre doit s'apprécier de manière globale de sorte que la combinaison des éléments qui la caractérise du fait de leur agencement particulier lui confère une physionomie particulière qui démontre l'effort créatif et le parti pris esthétique portant l'empreinte de la personnalité de l'auteur ; que la société Fashion conteste l'originalité de la dentelle litigieuse et reproche à la société XXX de se contenter d'une description purement objective de cette dentelle qui ne permettrait pas de comprendre le parti pris de l'auteur ; qu'elle produit par ailleurs des antériorités à 2008 qui reprendraient, selon elle, les mêmes motifs ; que la société XXX, qui ne revendique pas des droits d'auteur sur un genre de dentelle mais bien sur un motif particulier dont la description a parfaitement été reprise par le jugement déféré qui retient pertinemment que le dessin revendiqué comporte une combinaison de deux compositions florales différentes, l'une constituée d'un coeur d'anémone éclose et l'autre composée d'une fleur arrondie entourée de plusieurs rangées de pétales, chacune des compositions comprenant un feuillage spécifique, le créateur ayant fait le choix de proposer une densité du tissage des motifs floraux en contraste avec un aspect plus léger de l'espace en bordure de fleur, renforçant ainsi l'effet de contraste ainsi que des tissages, et maillages différents pour chaque élément composant les fleurs et le feuillage du modèle ; que la prétendue banalité du motif de dentelle opposé n'est aucunement avérée au vu des éléments versés aux débats par la société Fashion qui montrent des motifs de dentelle différents quoique relevant d'un même genre de dentelles florales, aucune des dentelles préexistantes produites ne présentant dans une même combinaison les compositions florales revendiquées, étant rappelé que la notion d'antériorité est indifférente en droit d'auteur, seule la preuve du caractère original étant exigée comme condition de l'octroi de la protection ; que le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu l'originalité du dessin référencé 970120 » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE, aux termes du jugement entrepris, « il ressort de ces éléments que le dessin revendiqué comporte une combinaison de deux compositions florales différentes, l'une constituée d'un coeur d'anémone éclose et l'autre composée d'une fleur arrondie entourée de plusieurs rangées de pétales, chacune des compositions comprenant un feuillage spécifique, le créateur ayant fait le choix de proposer une densité du tissage des motifs floraux en contraste avec un aspect plus léger de l'espace en bordure de fleur, renforçant ainsi l'effet de contraste ainsi que des tissages et maillages différents pour chaque élément composant les fleurs et le feuillage du modèle, témoignant ainsi de choix créatifs dans le dessin des motifs qui lui sont propres et conférant à l'ensemble, composé de différentes formes dessinées avec différentes textures plus ou moins ajourées, le témoignage d'un parti pris esthétique et des choix personnels de son créateur conférant une originalité à ce dessin et qui permet le distinguer des autres motifs du même genre communiqué aux débats par la société FASHION B. AIR, dont aucun ne reprend les caractéristiques ci-dessus relevées et s'en distinguant au contraire par un dessin de motifs floraux et de feuillages tous différents » ;

ALORS QUE pour établir le défaut d'originalité du dessin litigieux, la société FASHION B. AIR exposait que l'on retrouvait ses caractéristiques, à savoir une composition associant deux compositions florales différentes, composées de fleur et de feuillage sur des lignes horizontales, une impression de profusion et de densité des motifs floraux et la mise en valeur des espaces vides en espaçant les traits séparant chaque motif, dans plusieurs autres dentelles dont les dessins étaient également produits, parmi lesquelles la dentelle Angèle GINIAUX composée de lignes répétées alternant fleurs et branchages, avec deux types de fleurs différentes et une composition florissante fastueuse créant une impression de profusion et de densité des motifs floraux, ainsi qu'un espacement net des traits avec une mise en valeur d'espaces vides (conclusions, pp 19-20), la dentelle CHANTY SPITZENFABRIK, composée également sur des lignes horizontales alternant fleurs et branchages, avec un effet de profusion de motifs floraux, et également une partie importante laissée aux espaces vides notamment pour le coeur des fleurs, avec une fleur similaire aux fleurs de la dentelle revendiquée, accompagnée de branchages également exécutés de façon identique (ibid. p. 20), la dentelle robe Jacques HEIM, composée de lignes alternant deux fleurs de type différent avec des branchages, comme sur le modèle de dentelle revendiquée (ibid. p. 22), la dentelle Robert ATTENBOURGH, identique (ibid. p. 22) ou la dentelle TIANHAI LACE, qui présente une fleur similaire à celle de la dentelle revendiquée, sur un ensemble composé d'une alternance de fleurs et de branchages sur une ligne horizontale (ibid.p. 23) ; qu'en jugeant que « la prétendue banalité du motif de dentelle opposé n'est aucunement avérée au vu des éléments versés aux débats par la société Fashion qui montrent des motifs de dentelle différents quoique relevant d'un même genre de dentelles florales, aucune des dentelles préexistantes produites ne présentant dans une même combinaison les compositions florales revendiquées » (arrêt, p. 6), sans examiner, même sommairement, les pièces produites aux débats, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-24631
Date de la décision : 16/06/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 septembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 16 jui. 2021, pourvoi n°19-24631


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.24631
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award