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02/06/2021 | FRANCE | N°19-16059

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 juin 2021, 19-16059


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 juin 2021

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 667 F-D

Pourvoi n° Y 19-16.059

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 JUIN 2021

La société Adrexo, société par actions simplifiÃ

©e, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-16.059 contre l'arrêt rendu le 6 mars 2019 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 2 juin 2021

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 667 F-D

Pourvoi n° Y 19-16.059

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 2 JUIN 2021

La société Adrexo, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-16.059 contre l'arrêt rendu le 6 mars 2019 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à Mme [P] [Q], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Monge, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Adrexo, de Me Le Prado, avocat de Mme [Q], après débats en l'audience publique du 8 avril 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Monge, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 6 mars 2019), Mme [Q] a été engagée, à compter du 30 août 2009, en qualité de distributrice par la société Adrexo, suivant contrat à temps partiel modulé soumis à la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004 et à l'accord d'entreprise du 11 mai 2005.

2. Licenciée le 14 janvier 2014, elle a saisi la juridiction prud'homale, le 12 juin 2014, à l'effet d'obtenir la requalification de son contrat de travail en un contrat de travail à temps plein et paiement de rappels de salaire et d'indemnités de rupture.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de requalification du contrat en contrat de travail à temps complet et de ses demandes subséquentes et de le condamner à payer diverses sommes à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2012 à avril 2014, de rappel d'indemnité de licenciement, d'allocation conventionnelle pour les arrêts de travail, de maintien de salaire au titre du congé maternité, outre congés payés afférents, alors :

« 1° / que le contrat à temps partiel modulé doit ?seulement? mentionner la durée mensuelle ou hebdomadaire de référence ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que "le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers" ; que pour requalifier en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, la cour d'appel a toutefois estimé que le contrat ne mentionnait pas de "durée hebdomadaire ou mensuelle de référence" et "ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet" ; qu'en statuant ainsi, quand l'emploi de l'expression "durée indicative mensuelle de travail variable selon le planning" dans le contrat de travail visait seulement à souligner que la durée mensuelle de référence n'est pas nécessairement in fine la durée réelle mensuelle de travail qui peut varier quant à elle en fonction du planning, pourvu qu'elle n'excède pas sur l'ensemble de la période de modulation la durée moyenne de référence, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

2°/ que le contrat à temps partiel modulé doit mentionner la durée mensuelle ou hebdomadaire de référence ; que la cour d'appel a constaté que "le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers", correspondant précisément à la durée mensuelle de référence visée par l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ; qu'en requalifiant pourtant en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé au motif le contrat ne mentionnait pas de "durée hebdomadaire ou mensuelle de référence" et "ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

3°/ que le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que la cour d'appel a constaté que "le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers" ; qu'en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, qu' "à défaut de mentionner ainsi une durée hebdomadaire ou mensuelle de référence" le contrat "ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet", la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée des stipulations du contrat de travail à temps partiel modulé conclu avec la salariée; qu'elle a, ce faisant, violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;

4°/ qu''il résulte de l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail lui sont notifiés par écrit, le contrat est alors simplement présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que l'intéressé n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que l'article 1.2 de la convention collective, dans sa partie applicable aux salariés à temps partiel modulé, stipule que "le programme indicatif de répartition de la durée du travail et les horaires de travail sont communiqués par écrit aux salariés concernés, au début de chaque période de modulation, selon les modalités définies au sein de chaque entreprise. Sous réserve d'un délai de prévenance de 7 jours ouvrés, délai pouvant être exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés en cas d'accord d'entreprise prévoyant une contrepartie pour les salariés, les entreprises ou les établissements peuvent modifier la durée de l'horaire de travail ainsi que les modalités de répartition initiale" ; qu'à cet égard, la feuille de route délivrée au distributeur (et contresignée par lui) avant chaque tournée ne tend pas à modifier la durée de travail ni les jours travaillés, mais à récapituler à l'avance la durée préquantifiée conventionnellement de la distribution à venir, et à en fixer le jour où la plage d'exécution, dans le respect des jours de disponibilité du salarié ; que par suite, en requalifiant en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, au motif inopérant qu'il n'est pas démontré que la salariée "recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant", sans nullement faire ressortir que lesdites feuilles de route modifiaient effectivement la durée de travail, ou encore les modalités de répartition initiale de la durée du travail du salarié, et en particulier qu'elles auraient prévu sans son accord des distributions en dehors de ses jours de disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées, ensemble de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

5°/ que, subsidiairement, si dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé conclu dans le secteur de la distribution directe l'employeur doit respecter un délai de prévenance d'au moins sept jours, qui peut être réduit à trois jours en cas de circonstances exceptionnelles, lorsqu'il notifie au distributeur des horaires qu'il a unilatéralement fixés, sous peine de voir le contrat présumé à temps complet, un tel délai de prévenance ne s'impose pas en revanche lorsque les horaires sont fixés d'un commun accord par les parties ; qu'en requalifiant le contrat à temps partiel modulé en temps complet au motif inopérant qu'il n'est pas démontré que la salariée "recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant", sans rechercher si la salariée ne signait pas systématiquement ses feuilles de route, de sorte que la durée préquantifiée et le jour de distribution étaient fixés d'un commun accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées, ensemble de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

6°/ que l'absence de mention d'une durée mensuelle de référence et/ou l'absence de remise au salarié en temps utile des programmes indicatifs de modulation n'emporte pas requalification automatique du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, mais seulement une présomption simple de temps complet, que l'employeur peut renverser en rapportant la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, en déduisant de l'irrégularité prétendue des mentions du contrat à temps partiel modulé et de l'absence de preuve de la délivrance des PIM, la requalification automatique du contrat en temps complet, tandis qu'il était seulement soumis à la présomption de temps complet, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

7°/ que lorsque le contrat à temps partiel modulé est présumé à temps complet, l'employeur peut, pour renverser cette présomption simple, rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'il n'a pas, en revanche, à rapporter la preuve de l'horaire contractuellement convenu, ce qui n'a pas de sens concernant un contrat à temps partiel modulé ; qu'en l'espèce, en requalifiant le contrat en temps complet au motif inopérant que l'employeur ne démontrait pas l'horaire contractuellement convenu, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

8°/ qu'en tout état de cause, le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat à temps partiel modulé est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que lorsque l'employeur ne rapporte pas cette preuve, la requalification en contrat à temps plein est encourue à compter de la première irrégularité ; que pour requalifier le contrat en temps complet, la cour d'appel a affirmé que "la société Adrexo ne produit pas non plus les programmes indicatifs" ; qu'en statuant de la sorte, tandis que la société Adrexo avait produit le programme indicatif de modulation, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

9°/ que de la même façon, en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, que la société Adrexo ne produisait pas les programmes indicatifs de modulation, tandis qu'il ressortait au contraire du bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la société qu'elle produisait le PIM mai 2010/avril 2011, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

10°/ que de la même façon, en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, que la société Adrexo ne produisait pas les programmes indicatifs de modulation, tandis qu'il ressortait au contraire du bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la société qu'elle produisait le programme indicatif de modulation décembre 2010/septembre 2011, la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte de l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition.

5. La cour d'appel, qui a relevé que l'employeur ne produisait pas les programmes indicatifs de répartition de la durée du travail et souverainement retenu qu'il ne rapportait pas la preuve de ce que la salariée, dont il ne démontrait pas qu'elle recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant, n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition, en a exactement déduit, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par le moyen pris en ses trois premières branches et sa septième branche et peu important que le bordereau des pièces de l'employeur fît mention de programmes indicatifs de modulation au titre de certains mois des années 2010 et 2011, que le contrat de travail à temps partiel modulé de l'intéressée devait être requalifié en contrat à temps complet et que l'employeur devait payer un rappel de salaire pour la période de novembre 2012 à avril 2014.

6. Le moyen, qui, pris en ses quatrième et cinquième branches, est inopérant et qui, en sa sixième branche, manque en fait, n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Adrexo aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Adrexo et la condamne à payer à Mme [Q] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Adrexo

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [Q] de sa demande de requalification du contrat en contrat de travail à temps complet et de ses demandes subséquentes et d'AVOIR condamné la société Adrexo à payer à Mme [Q] les sommes de 16.890,73 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période de novembre 2012 à avril 2014, outre 1.689,07 euros bruts de congés payés afférents, 836,86 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement, 468,93 euros d'allocation conventionnelle pour les arrêts de travail, outre 46,89 euros de congés payés afférents et 543,25 euros au titre du maintien de salaire au titre du congé maternité, outre 54,32 euros de congés payés afférents.

AUX MOTIFS QUE le contrat de travail de Mme [Q] est régi par l'article L. 3123-26 du code du travail, par la convention collective des entreprises de la distribution directe et par l'accord d'entreprise Adrexo du 11 mai 2005 restant en vigueur, ayant été conclu en application notamment de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 20 aout 2008 ; il doit donc mentionner une durée hebdomadaire ou mensuelle de référence et respecter les conditions posées par les accords conventionnelles, qui concernent notamment l'envoi de programmes indicatifs de répartition de la durée du travail et les programmes indicatifs de individuels ; cependant en l'espèce, si le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée es définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines inclues dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale du tiers ; la société Adrexo ne produit pas non plus les programmes indicatifs ; à défaut de mentionner ainsi une durée hebdomadaire ou mensuelle de référence, et en l'absence de délivrance de PIM, le contrat de travail à temps partiel modulé de Mme [Q] ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet, l'employeur ne rapportant pas la preuve de l'horaire contractuellement convenu et de ce que la salariée, dont il n'est pas démontré en outre qu'elle recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant, n'avait pas à se tenir constamment à sa disposition ; la société Adrexo doit donc être condamnée à payer à Mme [Q] les sommes de 16.890,73 euros bruts à titre de rappel de salaires pour la période de novembre 2012 à avril 2014, outre 1.689,07 euros bruts de congés payés afférents, et de 836,86 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement ; elle devra verser également la somme de 468,93 euros d'allocation conventionnelle pour les arrêts de travail outre 46,89 euros de congés payés afférents, et de 546,25 euros au titre du maintien de salaire au titre du congé maternité, outre 54,32 euros de congés payés afférents ;

1) ALORS QUE le contrat à temps partiel modulé doit ?seulement? mentionner la durée mensuelle ou hebdomadaire de référence ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que « le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers » ; que pour requalifier en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, la cour d'appel a toutefois estimé que le contrat ne mentionnait pas de « durée hebdomadaire ou mensuelle de référence » et « ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet » ; qu'en statuant ainsi, quand l'emploi de l'expression « durée indicative mensuelle de travail variable selon le planning » dans le contrat de travail visait seulement à souligner que la durée mensuelle de référence n'est pas nécessairement in fine la durée réelle mensuelle de travail qui peut varier quant à elle en fonction du planning, pourvu qu'elle n'excède pas sur l'ensemble de la période de modulation la durée moyenne de référence, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

2) ALORS QUE le contrat à temps partiel modulé doit mentionner la durée mensuelle ou hebdomadaire de référence ; que la cour d'appel a constaté que « le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers », correspondant précisément à la durée mensuelle de référence visée par l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ; qu'en requalifiant pourtant en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé au motif le contrat ne mentionnait pas de « durée hebdomadaire ou mensuelle de référence » et « ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

3) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que la cour d'appel a constaté que « le contrat de travail mentionne, de même que les avenants, une durée annuelle contractuelle de référence, la durée mensuelle indiquée est définie à titre indicatif, pouvant varier selon le nombre de semaines incluses dans la période mensuelle et modulée selon les prévisions du planning annuel avec une variation maximale d'un tiers » ; qu'en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, qu'« à défaut de mentionner ainsi une durée hebdomadaire ou mensuelle de référence » le contrat « ne répond pas aux exigences légales et doit donc être requalifié à temps complet », la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée des stipulations du contrat de travail à temps partiel modulé conclu avec Mme [Q] (production n° 1) ; qu'elle a, ce faisant, violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;

4) ALORS QU'il résulte de l'article L. 3123-25 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, qu'en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail lui sont notifiés par écrit, le contrat est alors simplement présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que l'intéressé n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que l'article 1.2 de la convention collective, dans sa partie applicable aux salariés à temps partiel modulé, stipule que « le programme indicatif de répartition de la durée du travail et les horaires de travail sont communiqués par écrit aux salariés concernés, au début de chaque période de modulation, selon les modalités définies au sein de chaque entreprise. Sous réserve d'un délai de prévenance de 7 jours ouvrés, délai pouvant être exceptionnellement réduit à trois jours ouvrés en cas d'accord d'entreprise prévoyant une contrepartie pour les salariés, les entreprises ou les établissements peuvent modifier la durée de l'horaire de travail ainsi que les modalités de répartition initiale » ; qu'à cet égard, la feuille de route délivrée au distributeur (et contresignée par lui) avant chaque tournée ne tend pas à modifier la durée de travail ni les jours travaillés, mais à récapituler à l'avance la durée préquantifiée conventionnellement de la distribution à venir, et à en fixer le jour où la plage d'exécution, dans le respect des jours de disponibilité du salarié ; que par suite, en requalifiant en contrat à temps complet le contrat à temps partiel modulé conclu entre les parties, au motif inopérant qu'il n'est pas démontré que la salariée « recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant », sans nullement faire ressortir que lesdites feuilles de route modifiaient effectivement la durée de travail, ou encore les modalités de répartition initiale de la durée du travail du salarié, et en particulier qu'elles auraient prévu sans son accord des distributions en dehors de ses jours de disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées, ensemble de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

5) ALORS Subsidiairement QUE si dans le cadre d'un contrat à temps partiel modulé conclu dans le secteur de la distribution directe l'employeur doit respecter un délai de prévenance d'au moins sept jours, qui peut être réduit à trois jours en cas de circonstances exceptionnelles, lorsqu'il notifie au distributeur des horaires qu'il a unilatéralement fixés, sous peine de voir le contrat présumé à temps complet, un tel délai de prévenance ne s'impose pas en revanche lorsque les horaires sont fixés d'un commun accord par les parties ; qu'en requalifiant le contrat à temps partiel modulé en temps complet au motif inopérant qu'il n'est pas démontré que la salariée « recevait ses feuilles de route avec un délai suffisant », sans rechercher si la salariée ne signait pas systématiquement ses feuilles de route, de sorte que la durée préquantifiée et le jour de distribution étaient fixés d'un commun accord, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions conventionnelles susvisées, ensemble de l'article L. 3123-25 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ;

6) ALORS QUE l'absence de mention d'une durée mensuelle de référence et/ou l'absence de remise au salarié en temps utile des programmes indicatifs de modulation n'emporte pas requalification automatique du contrat à temps partiel modulé en contrat à temps complet, mais seulement une présomption simple de temps complet, que l'employeur peut renverser en rapportant la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, en déduisant de l'irrégularité prétendue des mentions du contrat à temps partiel modulé et de l'absence de preuve de la délivrance des PIM, la requalification automatique du contrat en temps complet, tandis qu'il était seulement soumis à la présomption de temps complet, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

7) ALORS QUE lorsque le contrat à temps partiel modulé est présumé à temps complet, l'employeur peut, pour renverser cette présomption simple, rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'il n'a pas, en revanche, à rapporter la preuve de l'horaire contractuellement convenu, ce qui n'a pas de sens concernant un contrat à temps partiel modulé ; qu'en l'espèce, en requalifiant le contrat en temps complet au motif inopérant que l'employeur ne démontrait pas l'horaire contractuellement convenu, la cour d'appel a violé l'article L. 212-4-6, devenu L. 3123-25, du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ;

8) ALORS en tout état de cause QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; en cas de défaut de respect des modalités selon lesquelles le programme indicatif de la répartition de la durée du travail est communiqué par écrit au salarié et des conditions et délais dans lesquels les horaires de travail sont notifiés par écrit au salarié, le contrat à temps partiel modulé est présumé à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que lorsque l'employeur ne rapporte pas cette preuve, la requalification en contrat à temps plein est encourue à compter de la première irrégularité ; que pour requalifier le contrat en temps complet, la cour d'appel a affirmé que « la société Adrexo ne produit pas non plus les programmes indicatifs » ; qu'en statuant de la sorte, tandis que la société Adrexo avait produit le programme indicatif de modulation 2009/2010 (pièce n° 2 et production n° 6), la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

9) ALORS encore QUE, de la même façon, en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, que la société Adrexo ne produisait pas les programmes indicatifs de modulation, tandis qu'il ressortait au contraire du bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la société qu'elle produisait le PIM mai 2010/avril 2011 (pièce n° 3 et production n° 7), la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil ;

10) ALORS enfin QUE de la même façon, en affirmant, pour requalifier le contrat en temps complet, que la société Adrexo ne produisait pas les programmes indicatifs de modulation, tandis qu'il ressortait au contraire du bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la société qu'elle produisait le programme indicatif de modulation déc. 2010/sept. 2011 (pièce n° 6 et production n° 8), la cour d'appel a dénaturé le bordereau de communication de pièces de la société Adrexo, et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 1134 devenu 1103 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-16059
Date de la décision : 02/06/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 06 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 jui. 2021, pourvoi n°19-16059


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.16059
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