La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2021 | FRANCE | N°19-25053

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 mai 2021, 19-25053


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 437 F-D

Pourvoi n° Z 19-25.053

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société Lyonnaise de banque, dont le siège es

t [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 19-25.053 contre l'arrêt rendu le 10 octobre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-1), dan...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 mai 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 437 F-D

Pourvoi n° Z 19-25.053

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 19 MAI 2021

La société Lyonnaise de banque, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 19-25.053 contre l'arrêt rendu le 10 octobre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Lagardère, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [A] [N], puis de Mme [I] [R] lui succédant, prise en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Lagardère,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Lagardère et de la société BTSG, ès qualités, après débats en l'audience publique du 23 mars 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 octobre 2019), statuant sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 17 octobre 2018, pourvoi n° 17-17.773) et les productions, la société Lagardère ayant fait l'objet d'une procédure de sauvegarde le 13 décembre 2012, la société Lyonnaise de banque (la banque) a déclaré au passif une créance de 149 995,62 euros au titre du solde débiteur d'un compte. Cette créance a été contestée.

2. Le 26 février 2014, la société Lagardère a fait l'objet d'un plan de sauvegarde, la société BTSG étant ultérieurement désignée en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

3. Par une ordonnance du 13 janvier 2015, le juge-commissaire s'est déclaré « incompétent » pour statuer sur la créance contestée.

4. Se prévalant de ce que le débiteur ou son mandataire n'avait pas, dans le délai fixé par l'article R. 624-5 du code de commerce, saisi la juridiction du fond pour trancher la contestation, la banque a demandé au juge-commissaire de tirer les conséquences de cette carence et de statuer sur la demande d'admission de sa créance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande d'admission de créance alors, selon le moyen, « que les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions dont ils sont régulièrement saisis ; que dans ses conclusions notifiées le 20 juin 2019, la banque s'est prévalue d'un arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 décembre 2018 (n° 17-15.883 et 17-26.501) en faisant valoir que la question de la compétence exclusive du juge-commissaire pour connaître de l'admission, ou non, d'une créance déclarée vient de faire l'objet d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 19 décembre 2018 (pièce n° 7) par lequel la Cour Suprême a cassé un arrêt qui avait retenu la compétence du juge du fond pour statuer sur l'admission des créances en retenant qu' "en statuant ainsi, alors que, sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées et qu'après une décision d'incompétence du juge commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l'examen de cette contestation, la cour d'appel a violé le texte susvisé" ; qu'ainsi, même en présence d'une décision d'incompétence, le juge-commissaire reste seul compétent pour décider de l'admission ou du rejet d'une créance déclarée ; que cet arrêt est sans aucune ambiguïté ; qu'en l'espèce, l'ordonnance du 13 janvier 2015 par laquelle le juge commissaire s'est déclaré incompétent, ne l'empêchait pas de statuer sur la demande d'admission présentée par la société concluante ; que c'est donc à tort que dans son ordonnance querellée, le juge-commissaire a considéré la demande de la société concluante comme "irrecevable" au motif que l'ordonnance du 13 janvier 2015 "ne comportait aucun sursis à statuer" ; que la Cour de céans réformera donc l'ordonnance entreprise et se déclarera compétente pour connaître l'admission de la société concluante (et non pour "trancher la contestation" comme retenu à tort par l'arrêt du 9 mars 2017 objet de la cassation, cette erreur, vraisemblablement de plume, ayant conduit à la cassation) » ; qu'en déclarant irrecevable la demande d'admission de la créance de la banque sans répondre à ces conclusions déterminantes attestant que, même en présence d'une décision d'incompétence, le juge-commissaire dispose d'une compétence exclusive en matière d'admission ou de rejet des créances déclarées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 624-2 et l'article R. 624-5 du code de commerce, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 12 mars 2014 et le second dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret du 30 juin 2014 :

6. Il résulte de ces textes que le juge-commissaire qui s'estime incompétent pour trancher une contestation reste compétent, une fois la contestation tranchée par le juge compétent ou la forclusion acquise, pour statuer sur la créance déclarée, en l'admettant ou en la rejetant. En cas de forclusion, l'admission ou le rejet de la créance déclarée dépend du point de savoir quelle partie avait intérêt à saisir le juge compétent, seule cette partie devant, dans le cadre de la procédure de vérification et d'admission des créances, supporter les conséquences de l'absence de saisine de ce juge.

7. Pour déclarer irrecevable la demande d'admission de la créance de la banque, l'arrêt retient que le juge-commissaire saisi de la contestation de cette créance s'est, par une ordonnance du 13 janvier 2015, déclaré incompétent sans ordonner de sursis à statuer, que la banque n'a pas formé contredit contre cette décision ni saisi le juge du fond dans le mois suivant l'avis qui lui avait été adressé, que, quelque soit son bien-fondé, cette décision d'incompétence a acquis autorité de la chose jugée et dessaisi le juge-commissaire de la demande d'admission de la créance contestée, en application de l'article 481 du code de procédure civile. L'arrêt en déduit que c'est à bon droit que, par l'ordonnance du 18 juin 2015, le même juge-commissaire s'est estimé dessaisi et a déclaré irrecevable la seconde demande d'admission formée par la banque pour la même créance.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne la société Lagardère et la société BTSG, en sa qualité de mandataire judiciaire de la première, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Lyonnaise de banque.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR, au visa de l'arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 17 octobre 2018, confirmé l'ordonnance du juge-commissaire du 18 juin 2015 ayant déclaré irrecevable la demande d'admission de créance formée par la société CIC Lyonnaise de Banque.

AUX MOTIFS QUE « L'article R 624-5 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au présent litige antérieure au décret du 30 juin 2014, dispose que la décision d'incompétence du juge-commissaire statuant sur l'admission d'une créance ouvre au créancier, au débiteur et au mandataire judiciaire un délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré pour saisir la juridiction compétente à peine de forclusion, à moins de contredit.
En l'espèce, le juge-commissaire saisi de la contestation de la créance formée par la société LAGARDERE pour s'opposer à son admission au passif s'est déclaré incompétent, sans ordonner de sursis à statuer, par ordonnance en date du l3 janvier 2015 ; la société CIC LYONNAISE DE BANQUE n'a pas formé contredit à cette décision, et n'a pas saisi le juge du fond dans le mois suivant l'avis qui lui avait été adressé ; il en résulte que la décision d'incompétence, quelle que soit par ailleurs son bien fondé, a acquis autorité de la chose jugée et a dessaisi en application de l'article 481 du code de procédure civile le juge commissaire de la demande en admission au passif de la créance contestée ; c'est dès lors à bon droit que le même juge commissaire, par ordonnance en date du 18 juin 2015, s'est estimé dessaisi et a jugé irrecevable la seconde demande d'admission formée pour la même créance par la société CIC LYONNAISE DE BANQUE ».

ALORS QUE les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions dont ils ont régulièrement saisis ; que dans ses conclusions notifiées le 20 juin 2019 (p 3 § 12 et suivants), la société Lyonnaise de Banque s'est prévalue d'un arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 décembre 2018 (n° 17-15.883 et 17-26.501) en faisant valoir que « la question de la compétence exclusive du juge-commissaire pour connaitre de l'admission, ou non, d'une créance déclarée vient de faire l'objet d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 19 décembre 2018 (pièce n°7) par lequel la Cour Suprême a cassé un arrêt qui avait retenu la compétence du juge du fond pour statuer sur l'admission des créances en retenant qu'«en statuant ainsi, alors que, sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées et qu'après une décision d'incompétence du juge commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l'examen de cette contestation, la cour d'appel a violé le texte susvisé » ; qu'ainsi, même en présence d'une décision d'incompétence, le juge commissaire reste seul compétent pour décider de l'admission ou du rejet d'une créance déclarée ; que cet arrêt est sans aucune ambigüité ; qu'en l'espèce, l'ordonnance du 13 janvier 2015 par laquelle le juge commissaire s'est déclaré incompétent, ne l'empêchait pas de statuer sur la demande d'admission présentée par la société concluante ; que c'est donc à tort que dans son ordonnance querellée, le juge commissaire a considéré la demande de la société concluante comme « irrecevable» au motif que l'ordonnance du 13 janvier 2015 « ne comportait aucun sursis à statuer » ; que la Cour de Céans réformera donc l'ordonnance entreprise et se déclarera compétente pour connaitre l'admission de la société concluante (et non pour « trancher la contestation » comme retenu à tort par l'arrêt du 9 mars 2017 objet de la cassation, cette erreur, vraisemblablement de plume, ayant conduit à la cassation) »; qu'en déclarant irrecevable la demande d'admission de la créance de la banque sans répondre à ces conclusions déterminantes attestant que, même en présence d'une décision d'incompétence, le juge-commissaire dispose d'une compétence exclusive en matière d'admission ou de rejet des créances déclarées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-25053
Date de la décision : 19/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 10 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 mai. 2021, pourvoi n°19-25053


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.25053
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award