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12/05/2021 | FRANCE | N°19-26280

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 2021, 19-26280


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 547 F-D

Pourvoi n° G 19-26.280

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

1°/ La Fédération nationale des

syndicats des salariés des mines et de l'énergie CGT (FNME-CGT), dont le siège est [Adresse 1],

2°/ la Fédération des travailleurs de la métallu...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC. / ELECT

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 547 F-D

Pourvoi n° G 19-26.280

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

1°/ La Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie CGT (FNME-CGT), dont le siège est [Adresse 1],

2°/ la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (FTM-CGT), dont le siège est [Adresse 2],

3°/ Mme [W] [X], domiciliée [Adresse 3], prise en qualité de déléguée syndicale et de déléguée syndicale centrale CGT au sein de la société Orano DS,

ont formé le pourvoi n° G 19-26.280 contre le jugement rendu le 18 décembre 2019 par le tribunal d'instance de Palaiseau (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant :

1°/ à la société Orano DS-Démantèlement et services, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],

2°/ au syndicat CGT Orano DS, dont le siège est [Adresse 5],

3°/ à M. [Z] [C], domicilié [Adresse 5],

4°/ à M. [A] [P], domicilié [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Les parties ou leurs mandataires ont produits des mémoires

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie CGT, de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et de Mme [X], ès qualités, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Orano DS-Démantèlement et services, après débats en l'audience publique du 17 mars 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Palaiseau, 18 décembre 2019), un certain nombre de sociétés constituaient le groupe Areva, aujourd'hui Orano, dont la société STMI. Suite aux élections du 17 novembre 2015, le syndicat CGT STMI, qui existe depuis 1997, a notamment désigné M. [C] en qualité de délégué syndical, remplacé le 6 juin 2017 par M. [M], et M. [Y] en qualité de délégué syndical central.

2. Au 1er janvier 2018, la société STMI a absorbé trois autres sociétés du groupe. La société Orano DS (Démantèlement et services) a été créée suite à cette fusion-absorption.

3. Un accord relatif au dialogue social au sein de la Business Unit démantèlement et services, signé le 13 décembre 2017, applicable aux quatre sociétés précitées, prévoit notamment que la réalisation des fusions est sans incidence sur la représentativité syndicale établie au sein de la société STMI et que les délégations syndicales conviées à la négociation des accords négociés et signés post-fusion seront composées de quatre membres dont le délégué syndical central STMI.

4. Un certain nombre de conflits liés à des désignations concurrentes de représentants syndicaux CGT sont survenus. Par jugement du 6 novembre 2018, devenu définitif, le tribunal d'instance de Palaiseau a validé la désignation de M. [P] le 20 juillet 2018 par le syndicat CGT Orano DS aux lieu et place de M. [Y].

5. M. [M] a démissionné de son mandat de délégué syndical le 27 septembre 2019.

6. Par lettre du 3 octobre 2019, les fédérations CGT FNME et FTM ont informé l'employeur de la désignation de Mme [X], en qualité de délégué syndical central en remplacement de M. [P] et en qualité de délégué syndical en remplacement de M. [M].

7. Par lettre du 4 octobre 2019, le syndicat CGT Orano DS a confirmé que M. [P] restait délégué syndical central CGT Orano DS, conformément à la désignation du 20 juillet 2018, confirmée par jugement définitif du tribunal d'instance de Palaiseau du 6 novembre 2018 et confirmé la désignation de M. [M], indiquant ne pas avoir été destinataire d'une démission de celui-ci.

8. Par lettre du 7 octobre 2019, le syndicat CGT Orano DS a désigné M. [C] en qualité de délégué syndical suite à la démission de M. [M].

9. Par requête reçue le 18 octobre 2019, la société Orano DS a saisi le tribunal d'instance aux fins de détermination de la désignation du délégué syndical central à retenir au sein de la société, de la désignation du délégué syndical CGT à retenir au sein de la société et d'annulation des désignations dissidentes.

Examen des moyens

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La FNME-CGT, la FTM-CGT et Mme [X], en sa qualité de déléguée syndicale et de déléguée syndicale centrale CGT au sein de la société Orano DS font grief au jugement du tribunal d'instance du 18 décembre 2019 d'annuler la désignation de Mme [X] en qualité de déléguée syndicale centrale CGT au sein de la société Orano DS ainsi que sa désignation en qualité de déléguée syndicale CGT au sein de la même société, alors « que le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en retenant, pour juger irrégulières les nominations de Mme [X] opérées par les fédérations FNME CGT et FTM CGT, qu'il n'était pas justifié d'une décision de l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit entre les deux syndicats CGT au sein de la société Orano DS cependant que le syndicat CGT Orano DS ne contestait pas l'existence d'une décision prise par le Comité exécutif fédéral de la fédération FNME CGT, le 11 avril 2019, de ne pas le reconnaître comme affilié à la CGT et de lui refuser le droit de se prévaloir valablement au sein de la société Orano DS de son affiliation à la CGT mais contestait seulement la régularité de sa désaffiliation au regard des dispositions statutaires fédérales et confédérales, le tribunal d'instance a violé l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

11. Vu l'article 4 du code de procédure civile :

12. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

13. Pour annuler la désignation de Mme [X] en qualité de délégué syndical et de délégué syndical central, le jugement énonce que si la FNME CGT, la FTM CGT et Mme [X] indiquent qu'une décision de désafilliation a été prise le 19 avril 2019 afin de régler le conflit entre les deux syndicats CGT Orano DS, ils n'en rapportent pas la preuve. Le jugement retient également qu'il ressort de l'ensemble des éléments produits au débat qu'aucune des parties ne justifie de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit entre les deux syndicats CGT au sein de la société Orano DS conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet pas plus qu'il n'est prévu par une disposition des statuts de la FNME CGT ou des statuts du syndicat CGT Orano DS que la FNME CGT ne peut pas se substituer au syndicat pour exercer les droits conférés à celui-ci, que les statuts de la FNME CGT sont muets quant aux règles applicables en matière de conflit de désignation, qu'ainsi, à défaut de dispositions statutaires, il convient d'appliquer la règle chronologique excepté si les litiges concernent le remplacement du délégué syndical pour lequel il convient de faire application de la règle selon laquelle seul le syndicat mandant peut procéder au remplacement du délégué syndical déjà nommé.

14. En statuant ainsi, alors que le syndicat CGT Orano DS ne contestait pas l'existence d'une décision prise par le comité exécutif fédéral de la fédération FNME CGT de ne pas le reconnaître comme affilié à la CGT et de lui refuser le droit de se prévaloir valablement au sein de la société Orano DS de son affiliation à la CGT, mais contestait seulement la régularité de sa désaffiliation au regard des dispositions statutaires fédérales et confédérales, ce qu'il appartenait au tribunal d'examiner, le tribunal d'instance, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande de sursis à statuer, le jugement rendu le 18 décembre 2019, entre les parties, par le tribunal d'instance de Palaiseau ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d'Evry autrement composé ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la Fédération nationale des syndicats des salariés des mines et de l'énergie CGT, la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT et Mme [X], ès qualités

Ce moyen reproche au jugement attaqué d'avoir annulé la désignation de Madame [W] [X] en qualité de déléguée syndicale centrale CGT au sein de la société ORANO DS ainsi que sa désignation en qualité de déléguée syndicale CGT au sein de la même société et d'avoir condamné in solidum la fédération FNME CGT et la fédération FTM CGT à verser, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 1000 euros au syndicat CGT ORANO DS, celle de 1000 euros à Monsieur [C], celle de 1000 euros à Monsieur [P] et celle de 1000 euros à la société ORANO DS ;

AUX MOTIFS QUE sur le bien-fondé de la contestation, selon l'article L.2143-3 du code du travail, chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli à titre personnel et dans leur collège au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur ; que si aucun des candidats présentés par l'organisation syndicale aux élections professionnelles ne remplit les conditions mentionnées au premier alinéa du présent article ou s'il ne reste, dans l'entreprise ou l'établissement, plus aucun candidat aux élections professionnelles qui remplit les conditions mentionnées au même premier alinéa, ou si l'ensemble des élus qui remplissent les conditions mentionnées audit premier alinéa renoncent par écrit à leur droit d'être désigné délégué syndical, une organisation syndicale représentative peut désigner un délégué syndical parmi les autres candidats, ou, à défaut, parmi ses adhérents au sein de l'entreprise ou de l'établissement ou parmi ses anciens élus ayant atteint la limite de durée d'exercice du mandat au comité social et économique fixée au deuxième alinéa de l'article L. 2314-33 ; que la désignation d'un délégué syndical peut intervenir lorsque l'effectif d'au moins cinquante salariés a été atteint pendant douze mois consécutifs ; qu'elle peut intervenir au sein de l'établissement regroupant des salariés placés sous la direction d'un représentant de l'employeur et constituant une communauté de travail ayant des intérêts propres, susceptibles de générer des revendications communes et spécifiques ; que selon l'article L2133-3 du code du travail, les unions de syndicats jouissent de tous les droits conférés aux syndicats professionnels par le présent titre ; qu'en vertu de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'il est de principe que sauf accord collectif plus favorable, les syndicats affiliés à la même confédération nationale ne peuvent désigner ensemble dans la même entreprise un nombre de délégués et représentants syndicaux supérieur à celui fixé par la loi, quel que soit l'effectif de l'entreprise ou de l'établissement ; que la désignation d'un délégué syndical en remplacement d'un délégué syndical précédemment désigné n'est régulière que si elle émane de la même organisation syndicale représentative ; qu'en cas de désaffiliation de l'organisation syndicale ayant procédé à la désignation d'un délégué syndical, la confédération syndicale, la fédération ou l'union à laquelle le syndicat désignataire était affilié, peut révoquer le mandat de ce délégué ; qu'en cas de concurrence dans une même entreprise ou établissement entre deux syndicats affiliés à une même organisation, il appartient au syndicat de justifier des dispositions statutaires déterminant le syndicat ayant qualité pour procéder aux désignations des représentants syndicaux ou à leur remplacement, ou de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet ; qu'à défaut, par application de la règle chronologique, seule la désignation d'un représentant de section syndicale notifiée en premier lieu doit être validée ; que la validité et la régularité de la désignation s'apprécient à la date de la désignation ;
QU'en l'espèce, les statuts de la FNME CGT prévoient en leur article 10 « Le comité exécutif fédéral » en « 2/ Rôle » que « (...) La pratique de la concertation, le respect des présents statuts et l'information complète et régulière des syndique.es concerné.es, sont la base des solutions aux différends qui peuvent survenir dans les syndicats, entre syndicats ou entre syndique.es. Le comité exécutif fédéral examine ces différends et conflits. Il propose un processus de règlement après avoir entendu les parties en présence. En cas de désaccord persistant suite au processus de règlement du conflit proposé par le comité exécutif fédéral, celui-ci pourra, dans le respect des règles de vie démocratique syndicale, prendre toute mesure qui s'impose pour mettre fin au conflit. » ; que si la Fédération nationale des mines et de l'énergie CGT (FNME CGT), la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (FTM CGT) et Madame [W] [X] indiquent qu'une décision de désaffiliation a été prise le 19 avril 2019 afin de régler le conflit entre les deux syndicats CGT ORANO DS, ils n'en rapportent pas la preuve ; qu'en effet, le document produit intitulé « Relevé de décision du comité exécutif fédéral du 11 avril 2019», dépourvu de toute signature, prévoit concernant le conflit que « le CEF décide en conséquence, pour mettre fin à ce conflit, d'une part, de saisir la commission d'affiliation confédérale et d'autre part, d'adresser un courrier commun par les deux secrétaires généraux de la FNME et de la FTM informant la direction d'ORANO DS de sa non reconnaissance du syndicat ORANO DS ainsi que de son impossibilité de se pourvoir valablement de son affiliation à la CGT» ; qu'il n'est nullement indiqué dans ce document que le comité exécutif fédéral a pris la décision de désaffilier le-syndicat CGT ORANO DS ; qu'en outre, si la Fédération nationale des mines et de l'énergie CGT (FNME CGT), la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT (FTM CGT) et Madame [W] [X] indiquent qu'une décision de désaffiliation a effectivement été prise le 15 octobre 2019, le seul document portant cette date, au demeurant produit par le syndicat CGT ORANO DS et Monsieur [A] [P], consiste en un courrier signé par les co-présidents de la commission d'affiliation précisant « 2 membres de la commission ont étudié le dossier et ont reçu les deux parties afin de vérifier que c'était du ressort de cette dernière. Il s'avère que certaines demandes ne sont pas du ressort de la commission. En séance du 11 septembre, les membres de la commission affiliation souhaitent que vous puissiez reclarifier votre saisine » ; qu'il ne ressort nullement de ce courrier qu'une décision de désaffiliation a été effectivement prise à l'égard du syndicat CGT ORANO DS ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'aucune des parties à l'instance ne justifie de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit entre les deux syndicats CGT au sein de la société ORANO DS conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet pas plus qu'il n'est prévu par une disposition des statuts de la FNME CGT ou des statuts du syndicat CGT ORANO DS que la FNME CGT ne peut pas se substituer au syndicat pour exercer les droits conférés à celui-ci ; qu'en outre, les statuts de la FNME CGT sont muets quant aux règles applicables en matière de conflit de désignation ; qu'ainsi, à défaut de dispositions statutaires, il convient de faire application du principe chronologique, excepté si les litiges concernent le remplacement du délégué syndical pour lequel il convient de faire application de la règle selon laquelle seul le syndicat mandant peut procéder au remplacement du délègue syndical déjà nommé ;
QUE concernant la désignation en qualité de délégué syndical central, par courrier du 03 octobre 2019, la FNME CGT et la FTM CGT ont désigné Madame [W] [X] « en remplacement de Monsieur [A] [P] » ; que cette désignation a été faite en violation du principe selon lequel seul le syndicat mandant peut procéder au remplacement du délégué syndical déjà nommé ; qu'en conséquence, il convient d'annuler la désignation de Madame [W] [X] en qualité de délégué syndical central CGT au sein de l'entreprise ORANO DS.
QUE concernant la désignation en qualité de délégué syndical, Monsieur [M] a été nommé en qualité de délégué syndical par le syndicat CGT ORANO DS par courrier du 06 juin 2017 (pièce 15 de la société ORANO DS) et a présenté sa démission par courrier du 27 septembre 2019 (pièce 12 de la société ORANO DS) ; que la FNME CGT et la FTM CGT ont désigné Madame [W] [X] en qualité de délégué syndical en remplacement de ce dernier ; que cette désignation a été faite en violation du principe selon lequel seul le syndicat mandant peut procéder au remplacement du délégué syndical déjà nommé ; qu'en conséquence, il convient d'annuler la désignation de Madame [W] [X] en qualité de délégué syndical CGT au sein de l'entreprise ORANO DS ;

ALORS D'UNE PART QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; qu'en retenant, pour juger irrégulières les nominations de Madame [X] opérées par les fédérations FNME CGT et FTM CGT, qu'il n'était pas justifié d'une décision de l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit entre les deux syndicats CGT au sein de la société ORANO DS cependant que le syndicat CGT ORANO DS ne contestait pas l'existence d'une décision prise par le Comité Exécutif Fédéral de la fédération FNME CGT, le 11 avril 2019, de ne pas le reconnaître comme affilié à la CGT et de lui refuser le droit de se prévaloir valablement au sein de la société ORANO DS de son affiliation à la CGT mais contestait seulement la régularité de sa désaffiliation au regard des dispositions statutaires fédérales et confédérales, le Tribunal d'instance a violé l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS D'AUTRE PART QUE l'article 10 des statuts de la fédération FNME CGT prévoit que le comité exécutif fédéral « examine les conditions d'affiliation des syndicats à la Fédération » et les « différends et conflits » « qui peuvent survenir dans les syndicats, entre syndicats ou entre syndiqués » ; qu'il « propose un règlement après avoir entendu les parties en présence » et qu' « en cas désaccord persistant suite au processus de règlement du conflit proposé par le comité exécutif fédéral, celui-ci pourra , dans le respect des règles de vie syndicale, prendre toute mesure qui s'impose pour mettre fin au conflit » ; que ces dispositions ne précisent pas la nature de la mesure devant être adoptée par l'instance fédérale pour résoudre la situation de blocage née de la concurrence entre plusieurs organisations syndicales ; qu'en considérant néanmoins que faute d'indication dans le relevé de décision du comité exécutif fédéral en date du 11 avril 2019 que ledit comité avait pris la décision de « désaffilier » le syndicat CGT ORANO DS, il n'était pas justifié d'une décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit entre les deux syndicats CGT au sein de la société ORANO, le Tribunal d'instance a dénaturé les termes clairs et précis des statuts de la fédération FNME CGT, en violation de l'article 1103 du code civil ;

ALORS DE TROISIEME PART QUE sauf accord collectif plus favorable, une confédération syndicale et les organisations syndicales qui lui sont affiliées ne peuvent désigner ensemble un nombre de délégués syndicaux supérieur à celui prévu par la loi ; qu'il appartient dès lors aux syndicats de justifier des dispositions statutaires déterminant le syndicat ayant qualité pour procéder aux désignations des délégués syndicaux, ou à leur remplacement, ou de la décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit conformément aux dispositions statutaires prévues à cet effet ; qu'à défaut, par application de la règle chronologique, seule la désignation notifiée en premier lieu doit être validée ; qu'ayant constaté que lors d'une réunion du 11 avril 2019, le comité exécutif fédéral de la FNME CGT, compétent pour examiner et trancher les conflits et différends entre syndicats adhérents, avait décidé, pour mettre fin au conflit né de la coexistence, au sein de la société ORANO DS, de deux syndicats CGT « d'adresser un courrier commun des deux secrétaires généraux de la FNME et de la FTM informant la direction de la société ORANO de la non reconnaissance du syndicat ORANO DS ainsi que de son impossibilité de pouvoir se prévaloir valablement de son affiliation à la CGT », ce dont il résultait que le conflit avait bien été résolu au niveau fédéral, le Tribunal d'instance qui a cependant conclu à l'absence de justification d'une décision prise par l'organisation syndicale d'affiliation pour régler le conflit opposant les organisations syndicales CGT quant à l'exercice des prérogatives syndicales dans l'entreprise, au motif inopérant qu'il n'était pas indiqué dans ce document précité que le comité exécutif fédéral aurait pris la décision de « désaffilier » le syndicat CGT ORANO, a violé les articles L.2143-3, L.2143-5, L.2143-12 et L.2143-8 du code du travail ;

ALORS DE QUATRIEME PART QU'en relevant de façon inopérante, à propos du « relevé de décisions du comité exécutif fédéral en date du 11 avril 2019 », dont aucune des parties ne remettait en cause l'authenticité et qui mentionnait qu'à l'issue d'un vote, le comité exécutif fédéral s'était prononcé, par 28 voix pour et une abstention, en faveur de la non reconnaissance du syndicat CGT ORANO DS et de l'impossibilité pour ce syndicat de se prévaloir de son affiliation au sein de l'entreprise, que ledit document était dépourvu de signature, sans qu'il ressorte de ses énonciations que l'adoption par le comité exécutif fédéral, en application de l'article 10 des statuts de la FNME CGT, d'une mesure destinée à mettre fin à un conflit interne entre syndicats ait dû revêtir la forme d'un écrit signé de ses auteurs, le Tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles L.2143-3 et L.2143-5 du code du travail, ensemble l'article 1103 du code civil ;

ALORS DE CINQUIEME PART QU'il est interdit au juge de dénaturer les écritures d'une partie ; que dans leurs conclusions devant le tribunal, c'est d'un courrier de la confédération CGT, en date du 7 novembre 2019, que les fédérations exposantes et Madame [X] se prévalaient en soutenant que la confédération y confirmait la légitimité de leur position en précisant notamment que « le syndicat nommé « CGT ORANO DS ne peut être affilié à la CGT ? et de fait ne peut se réclamer de la CGT au sein de l'entreprise » ; qu'elles n'invoquaient l'existence d'aucune décision confédérale en date du 15 octobre 2019 ; qu'en affirmant que les exposantes indiquent qu'une décision de désaffiliation a effectivement été prise le 15 octobre 2019 mais qu'il ne ressort pas du seul document portant cette date, produit au demeurant par le syndicat CGT ORANO DS, qu'une décision de désaffiliation a été effectivement prise à l'égard du syndicat CGT ORANO DS, le Tribunal d'instance a dénaturé les conclusions des fédérations FNME CGT et FTM CGT et de Madame [X], en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

ALORS DE SIXIEME PART QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties à l'appui de leurs prétentions ; que le Tribunal d'instance qui a annulé les désignations de Madame [X] opérées par les fédérations FNME CGT et FTM CGT sans examiner la lettre de la confédération CGT du 7 novembre 2019 expressément visée dans leurs conclusions, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS DE SEPTIEME PART QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve versés aux débats par les parties à l'appui de leurs prétentions ; que les fédérations exposantes et Madame [X] faisaient valoir que l'animateur confédéral de l'espace de vie syndicale avait précisé, par une lettre du 25 septembre 2019 qu'elles versaient aux débats, que conformément aux règles de vie de la CGT, les délégués syndicaux centraux CGT ne pouvaient être désignés que par leur fédération d'affiliation ; qu'étaient également produit le document intitulé « les recommandations/conseils de la CGT pour désigner les délégués syndicaux » joint à cette lettre par l'animateur de l'espace de vie syndicale spécifiant clairement la compétence de la fédération concernée pour la désignation des délégués syndicaux centraux dans une entreprise ; qu'en statuant comme il l'a fait sans analyser, même sommairement, les pièces ainsi produites par les exposantes, qui établissaient la légitimité de la désignation par la FNME CGT de Madame [X] en date du 3 octobre 2019, le Tribunal d'instance n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ET ALORS DE HUITIEME PART, et en tout état de cause, QUE la règle suivant laquelle une union syndicale ne peut valablement procéder au remplacement des délégués syndicaux antérieurement désignés par un autre syndicat signifie seulement qu'il n'appartient en principe qu'à l'instance qui a désigné un délégué syndical de révoquer ce dernier ; qu'elle ne fait pas obstacle à la désignation par une union syndicale, laquelle, sauf dispositions statutaires contraires, dispose des mêmes droits que ceux reconnus aux syndicats adhérents qui la composent, d'un délégué syndical quand le mandat de ce dernier est vacant dans l'entreprise ; que le Tribunal d'instance a constaté que Madame [X] avait été désignée par la FNME CGT et la FMT CGT en qualité de déléguée syndicale au sein de la société ORANO DS en remplacement de Monsieur [M], par lettre du 3 octobre 2019, après que ce dernier, nommé en qualité de délégué syndical par le syndicat CGT ORANO DS depuis le 6 juin 2017, eut démissionné de son mandat par lettre du 27 septembre 2019 ; qu'en considérant néanmoins que la désignation contestée avait été faite en violation du principe selon lequel seul le syndicat mandant peut procéder au remplacement du délégué syndical déjà nommé, le Tribunal d'instance a violé l'article L.2143-3 et L.2133-3 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-26280
Date de la décision : 12/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Palaiseau, 18 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 2021, pourvoi n°19-26280


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.26280
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