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12/05/2021 | FRANCE | N°19-13715

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mai 2021, 19-13715


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 538 F-D

Pourvoi n° A 19-13.715

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

Le syndicat CFDT agroalimentaire du Pays Basque, dont le

siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 19-13.715 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2019 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale),...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 mai 2021

Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 538 F-D

Pourvoi n° A 19-13.715

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 12 MAI 2021

Le syndicat CFDT agroalimentaire du Pays Basque, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 19-13.715 contre l'arrêt rendu le 17 janvier 2019 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la coopérative agricole Lur Berri, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque,

2°/ à la société LB, société par actions simplifiée,

3°/ à la société LBO, société par actions simplifiée,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],

4°/ à la société Lur Berri distribution, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],

5°/ à la société Lur Berri Holding, société par actions simplifiée,

6°/ à la société Praviland, société par actions simplifiée,

7°/ à la coopérative Agricole Lur Berri, venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque,

8°/ à la société Lur Berri jardineries,

ayant toutes quatre leur siège [Adresse 2],

défenderesses à la cassation.

La coopérative agricole Lur Berri, en son nom et venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque, les sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Praviland et Lur Berri jardineries ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Les demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat CFDT agroalimentaire du Pays Basque, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Coopérative agricole Lur Berri, en son nom et venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque, des sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Praviland et Lur Berri jardineries, après débats en l'audience publique du 17 mars 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 143-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 17 janvier 2019), le 28 juin 1995 les diverses entités du groupe Lur Berri et les organisations syndicales représentatives, dont le syndicat CFDT agroalimentaire du Pays Basque (le syndicat CFDT), ont conclu un accord de participation aux résultats de l'entreprise d'une durée de quatre ans, applicable à compter du 1er juillet 1993, qui a été renouvelé par accords des 18 décembre 1997, 29 novembre 2000 et 20 septembre 2002.

2. Le 1er avril 2003, les syndicats signataires de l'accord ont saisi le tribunal de grande instance de Bayonne afin d'obtenir la réintégration de diverses sommes dans la réserve spéciale de participation.

3. Par arrêt devenu définitif du 4 avril 2014, la cour d'appel de Bordeaux a dit que les décisions prises par les sociétés Lur Berri au cours des exercices comptables compris entre le 1er juillet 1993 et le 31 août 2002, relatives à l'absence de réintégration au compte de résultats d'une provision de diversification et à la constitution de provisions, ne respectant pas les règles comptables, revêtaient un caractère abusif et a en conséquence ordonné la réintégration dans la réserve de participation de certaines sommes au titre de la provision de diversification et des provisions pour éventualités diverses.

4. Se prévalant des dispositions de l'article 6 des accords de participation conclus au sein de groupe Lur Berri, relatives au calcul des intérêts des sommes inscrites en comptes dans la réserve spéciale de participation, par acte du 7 avril 2015, les syndicats CFDT et UNSA agriculture agro-alimentaire ont fait assigner devant le tribunal de grande instance, statuant en référé, la coopérative agricole Lur Berri, en son nom et venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque, et les sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Lur Berri jardineries et Praviland, à l'effet d'obtenir la réintégration au sein de la réserve spéciale de participation d'une somme représentant le montant des intérêts dus sur les sommes dont la réintégration a été ordonnée par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 4 avril 2014. Les demandes des syndicats ont été rejetées par ordonnance du 26 mai 2015.

5. Par acte du 11 décembre 2015, le syndicat CFDT a saisi le tribunal de grande instance, statuant au fond, des mêmes demandes.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident de la coopérative agricole Lur Berri et des sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Lur Berri jardineries et Praviland, qui est préalable

Enoncé du moyen

6. Il est fait grief à l'arrêt de juger que les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation étaient productifs d'intérêts déterminés selon les taux et modalités de l'article 6 des accords de participation, conclus entre d'une part les syndicats signataires, d'autre part la coopérative agricole Lur Berri, en son nom et venant aux droits de l'UCAAB, et les sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Praviland et Lur Berri jardineries, à compter de la date de réintégration de ces sommes dans cette réserve et de condamner celles-ci à verser le montant des intérêts ainsi déterminés aux salariés bénéficiaires, alors « que le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, lorsque le syndicat CFDT Agroalimentaire du Pays Basque a saisi le tribunal de grande instance de Bayonne le 1er avril 2003 pour solliciter la réintégration dans la réserve spéciale de participation (RSP) de plusieurs dotations et provisions, il connaissait déjà les faits lui permettant de demander la condamnation des sociétés du groupe Lur Berri aux intérêts sur les sommes à réintégrer ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit la prescription des actions personnelles ou mobilières à cinq ans, la prescription était donc acquise le 19 juin 2013 soit avant que le syndicat saisisse le juge des référés en avril 2015 ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. »

Réponse de la Cour

7. Selon l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

8. La cour d'appel, qui a constaté que par arrêt du 4 avril 2014 la cour d'appel de Bordeaux avait ordonné la réintégration de certaines sommes à titre de provisions dans la réserve spéciale de participation des salariés du groupe Lur Berri, en a exactement déduit que cette décision avait fait naître le droit pour les salariés de revendiquer les intérêts prévus par l'article 6 des accords de participation sur les sommes réintégrées, de sorte que l'action du syndicat CFDT n'était pas prescrite.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le premier moyen du pourvoi principal du syndicat CFDT

Enoncé du moyen

10. Le syndicat CFDT fait grief à l'arrêt de juger que les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation sont productifs d'intérêts déterminés selon les taux et modalités de l'article 6 des accords de participation conclus entre les sociétés et les syndicats à compter de la date de la réintégration de ces sommes dans cette réserve, alors « que selon l'article 6 des accords de participation, les intérêts des sommes inscrites dans la réserve spéciale de participation courent à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée ; qu'il n'est pas prévu de dérogation lorsque le montant de la réserve spéciale de participation a été minoré en conséquence d'une décision abusive de l'employeur ; qu'en refusant de faire courir les intérêts sur les sommes inscrites avec retard dans la réserve spéciale de participation des entreprises, du groupe Lur Berri du fait de décisions abusives de ces dernières, à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation aurait dû être attribuée et en fixant leur point de départ à la date de la réintégration de ces sommes dans la réserve spéciale de participation, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

11. Ayant relevé que l'article 6 des accords de participation conclus au sein du groupe Lur Berri prévoit que les sommes inscrites en comptes courants bloqués dans la réserve spéciale de participation portent intérêts à un taux qu'il définit et que ces intérêts sont calculés à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le fait générateur des intérêts est l'inscription des sommes en comptes courants, de sorte que les sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation étaient productives d'intérêts, selon le taux et les modalités déterminés par l'article 6 précité, à compter de la date de réintégration de ces sommes dans la réserve spéciale de participation.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen du pourvoi principal du syndicat CFDT

Enoncé du moyen

13. Le syndicat CFDT fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts, alors « que la cassation à intervenir au titre du premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef du dispositif attaqué par le second moyen en application de l'article 624 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

14. Le rejet du premier moyen rend sans portée le second moyen qui invoque une cassation par voie de conséquence.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois, tant principal qu'incident ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour le syndicat CFDT agroalimentaire du Pays Basque

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation sont productifs d'intérêts déterminés selon les taux et modalités de l'article 6 des accords de participation conclus entre les sociétés et les syndicats à compter de la date de la réintégration de ces sommes dans cette réserve.

AUX MOTIFS QUE l'article 6 de l'ensemble des accords de participation est ainsi rédigé : « Les sommes constituant la réserve de participation sont affectées à un fonds détenu par Lur Berri Holding que celle-ci consacrera à des investissements. Les salariés ayant sur Lur Berri Holding un droit de créance égal au montant des sommes versées en fonds. La créance individuelle de chaque salarié est inscrite à un compte nominatif dans les écritures de l'entreprise (?) Les sommes ainsi inscrites en comptes courants bloqués au sein de Lur Berri Holding porteront intérêts au taux moyen annuel de TME/2 + T4M/2, majoré de 2% (moyenne annuelle arithmétique des 12 mois). Ces intérêts seront calculés à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée, sans que ce taux puisse être inférieur au taux prévu de l'article 17, alinéa 7 du décret 87-544 du 17 juillet 1987. Le taux moyen sera calculé sur la période allant du 1er septembre au 31 août de l'année suivante. Les intérêts seront versés chaque année aux bénéficiaires de la participation au premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice » ; que la cour d'appel de Bordeaux a dit que les décisions prises par les sociétés du groupe LUR BERRI au cours des exercices comptables compris entre le 1er juillet 1993 et le 31 août 2002, relatives à l'absence de réintégration au compte de résultat d'une provision de diversification et à la constitution de provisions ne respectant pas les règles comptables, revêtaient un caractère abusif, a ordonné la réintégration dans la réserve spéciale de participation des salariés du groupe LUR BERRI de la somme de 360.389 ? au titre de la provision de diversification et de la somme de 881.284,75 ? au titre des provisions pour éventualités diverses, n'a pas statué sur les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation, dès lors qu'elle n'était pas saisie d'une telle demande, ce qu'admettent aussi bien les entreprises du groupe LUR BERRI que le syndicat; que l'autorité de chose jugée ne saurait dès lors être invoquée à cet égard ; qu'il en va de même de la prescription ; qu'en effet, et selon l'article 6 précité, c'est l'inscription des sommes en compte courant qui constitue le fait générateur des intérêts (« Les sommes ainsi inscrites en comptes courants bloqués au sein de Lur Berri Holding porteront intérêts au taux moyen de TME/2 + T4M/2 majoré de 2% (moyenne annuelle arithmétique des 12 mois) ; que de plus, comme l'a justement relevé le premier juge dans les motifs de sa décision approuvé en cela par le syndicat, « c'est l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux qui a fait naître le droit pour les salariés de revendiquer les intérêts sur les sommes réintégrées » ; que ces intérêts sont en conséquences incontestablement dus au titre de l'exercice au cours duquel ils sont été attribués, soit au titre de l'année 2014, selon les modalités prévues à l'article 6 c'est-à-dire « à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au cours duquel la participation est attribuée » ; qu'en revanche, pour les exercices antérieurs, la prescription ne pouvait courir puisque la créance n'existait pas, les sommes susceptibles de faire naître ces intérêts n'ayant pas été attribuées ou plus précisément « inscrites en compte » ; que la seule créance susceptible d'être revendiquée par les salariés pour le retard mis à verser ces sommes en compte n'aurait pu être que de nature indemnitaire ; qu'en l'absence d'indication donnée par les parties sur la date à laquelle ces versements ont été effectués, la cour est dans l'incapacité d'évaluer le montant de ces intérêts ; que toutefois ces montants peuvent être précisément déterminés dans la mesure où le point de départ des intérêts (date du versement des provisions en compte spécial) est connue des parties et en tout cas aisément déterminable et que le taux comme les modalités de calcul de ces intérêts ne font pas débat (application de l'article 6 précité).

ALORS QUE selon l'article 6 des accords de participation, les intérêts des sommes inscrites dans la réserve spéciale de participation courent à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée ; qu'il n'est pas prévu de dérogation lorsque le montant de la réserve spéciale de participation a été minoré en conséquence d'une décision abusive de l'employeur ; qu'en refusant de faire courir les intérêts sur les sommes inscrites avec retard dans la réserve spéciale de participation des entreprises, du groupe Lur Berri du fait de décisions abusives de ces dernières, à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation aurait dû être attribuée et en fixant leur point de départ à la date de la réintégration de ces sommes dans la réserve spéciale de participation, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté le syndicat de sa demande de dommages et intérêts.

AUX MOTIFS QUE il en va de même des dommages et intérêts alloués au syndicat sur le fondement de la prétendue résistance abusive des entreprises du groupe Lur Berri à verser, à compter du 30 juin 1994, les intérêts des provisions abusivement exclues de la réserve spéciale de participation du 1er juillet 1993 au 31 août 2002.

ALORS QUE la cassation à intervenir au titre du premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef du dispositif attaqué par le second moyen en application de l'article 624 du code de procédure civile. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la Coopérative agricole Lur Berri, venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque, les sociétés LB, LBO, Lur Berri distribution, Lur Berri Holding, Praviland, Lur Berri jardineries et la coopérative agricole Lur Berri

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation étaient productifs d'intérêts déterminés selon les taux et modalités de l'article 6 des accords de participation conclus entre la coopérative agricole Lur Berri, la société LB, la société LBO, la société Lur Berri distribution, la société Lur Berri holding, la société Praviland, la Coopérative agricole Lur Berri venant aux droits de l'Union coopérative agricole alimentaire du bétail du Pays Basque (UCCAB) et la société Lur Berri jardineries, et les syndicats signataires, à compter de la date de réintégration de ces sommes dans cette réserve et d'AVOIR condamné les appelantes à verser le montant des intérêts ainsi déterminés aux salariés bénéficiaires.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article 6 de l'ensemble des accords de participation est ainsi rédigé : « Les sommes constituant la réserve de participation sont affectées à un fonds détenu par Lur Berri Holding que celle-ci consacrera à des investissements. Les salariés ayant sur Lur Berri Holding un droit de créance égal au montant des sommes versées en fonds. La créance individuelle de chaque salarié est inscrite à un compte nominatif dans les écritures de l'entreprise (?) Les sommes ainsi inscrites en comptes courants bloqués au sein de Lur Berri Holding porteront intérêts au taux moyen annuel de TME/2 + T4M/2, majoré de 2% (moyenne annuelle arithmétique des 12 mois). Ces intérêts seront calculés à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au titre duquel la participation est attribuée, sans que ce taux puisse être inférieur au taux prévu de l'article 17, alinéa 7 du décret 87-544 du 17 juillet 1987. Le taux moyen sera calculé sur la période allant du 1er septembre au 31 août de l'année suivante. Les intérêts seront versés chaque année aux bénéficiaires de la participation au premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice ». La cour d'appel de Bordeaux a dit que les décisions prises par les sociétés du groupe Lur Berri au cours des exercices comptables compris entre le 1er juillet 1993 et le 31 août 2002, relatives à l'absence de réintégration au compte de résultat d'une provision de diversification et à la constitution de provisions ne respectant pas les règles comptables, revêtaient un caractère abusif, a ordonné la réintégration dans la réserve spéciale de participation des salariés du groupe Lur Berri de la somme de 360 389 ? au titre de la provision de diversification et de la somme de 881 284,75 ? au titre des provisions pour éventualités diverses, n'a pas statué sur les intérêts des sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation, dès lors qu'elle n'était pas saisie d'une telle demande, ce qu'admettent aussi bien les entreprises du groupe Lur Berri que le syndicat. L'autorité de chose jugée ne saurait dès lors être invoquée à cet égard. Il en va de même de la prescription. En effet, et selon l'article 6 précité, c'est l'inscription des sommes en compte courant qui constitue le fait générateur des intérêts ("Les sommes ainsi inscrites en comptes courants bloqués au sein de Lur Berri Holding porteront intérêts au taux moyen de TME/2 + T4M/2 majoré de 2% (moyenne annuelle arithmétique des 12 mois)") ; que de plus, comme l'a justement relevé le premier juge dans les motifs de sa décision approuvé en cela par le syndicat, « c'est l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux qui a fait naître le droit pour les salariés de revendiquer les intérêts sur les sommes réintégrées » ; que ces intérêts sont en conséquences incontestablement dus au titre de l'exercice au cours duquel ils sont été attribués, soit au titre de l'année 2014, selon les modalités prévues à l'article 6 c'est-à-dire « à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l'exercice au cours duquel la participation est attribuée » ; qu'en revanche, pour les exercices antérieurs, la prescription ne pouvait courir puisque la créance n'existait pas, les sommes susceptibles de faire naître ces intérêts n'ayant pas été attribuées ou plus précisément « inscrites en compte ». La seule créance susceptible d'être revendiquée par les salariés pour le retard mis à verser ces sommes en compte n'aurait pu être que de nature indemnitaire. En l'absence d'indication donnée par les parties sur la date à laquelle ces versements ont été effectués, la cour est dans l'incapacité d'évaluer le montant de ces intérêts. Toutefois ces montants peuvent être précisément déterminés dans la mesure où le point de départ des intérêts (date du versement des provisions en compte spécial) est connu des parties et en tout cas aisément déterminable et que le taux comme les modalités de calcul de ces intérêts ne font pas débat (application de l'article 6 précité) » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « les sociétés défenderesses font état des dispositions de l'article 2224 du code civil pour affirmer que les demandes du syndicat CFDT Agroalimentaire du Pays Basque sont prescrites depuis juin 2013, le délai de prescription ayant commencé à courir au plus tard au moment de la date d'assignation du groupe Lur Berri devant le tribunal de grande instance de Bayonne le 1er avril 2003. Le tribunal ne suit pas cette analyse et ce dans la mesure où l'application de l'article 6 de l'accord est lié au versement ou non de sommes par l'employeur de sommes dans la réserve spéciale de participation. Ainsi, si aucune somme n'est versée, l'article 6 n'a pas vocation à s'appliquer. (...) Il n'y a nullement prescription des demandes du syndicat CFDT Agroalimentaire dans la mesure où celui-ci ne pouvait exiger l'application de l'article 6 de l'accord de participation qu'après la décision de la cour d'appel de Bordeaux en avril 2014 : c'est cette décision qui fait naître le droit pour les salariés de revendiquer les intérêts sur les sommes réintégrées » ;

ALORS QUE le délai de prescription court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, lorsque le syndicat CFDT Agroalimentaire du Pays Basque a saisi le tribunal de grande instance de Bayonne le 1er avril 2003 pour solliciter la réintégration dans la réserve spéciale de participation (RSP) de plusieurs dotations et provisions, il connaissait déjà les faits lui permettant de demander la condamnation des sociétés du groupe Lur Berri aux intérêts sur les sommes à réintégrer ; qu'à la suite de l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ayant réduit la prescription des actions personnelles ou mobilières à cinq ans, la prescription était donc acquise le 19 juin 2013 soit avant que le syndicat saisisse le juge des référés en avril 2015 ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-13715
Date de la décision : 12/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 17 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mai. 2021, pourvoi n°19-13715


Composition du Tribunal
Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.13715
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