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06/05/2021 | FRANCE | N°19-22141

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 06 mai 2021, 19-22141


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 mai 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 388 F-P

Pourvoi n° J 19-22.141

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 MAI 2021

M. [X] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 19-22.141 contr

e l'ordonnance n° RG 18/04832 rendue le 11 juillet 2019 par le premier président la de cour d'appel de Montpellier, dans le litige l'opposant :

...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 mai 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 388 F-P

Pourvoi n° J 19-22.141

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 MAI 2021

M. [X] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 19-22.141 contre l'ordonnance n° RG 18/04832 rendue le 11 juillet 2019 par le premier président la de cour d'appel de Montpellier, dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [A] [O], domiciliée [Adresse 2],

2°/ à M. [C] [O], domicilié [Adresse 3], pris tous en leur qualité d'héritiers de [K] [L], décédée,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [F], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [A] [O] et de M. [C] [O], et l'avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 mars 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Montpellier, 11 juillet 2019), Mme [O], en sa qualité de tutrice de [K] [L], a conclu, les 6 mai 2011 et 19 octobre 2015, avec M. [F], avocat (l'avocat), trois conventions d'honoraires pour assurer la défense des intérêts de [K] [L] dans le cadre de plusieurs procédures judiciaires.

2. Deux de ces conventions prévoyaient, outre des honoraires de diligence, des honoraires de résultat, celle du 6 mai 2011, concernant la procédure en résolution judiciaire d'une vente contre rente viagère, stipulant un honoraire de résultat de 9% HT de la valeur du bien immobilier récupéré, et la seconde convention, du 19 octobre 2015 relative à une action en paiement des loyers, prévoyant des honoraires de résultat à hauteur de 10% HT des sommes perçues ou économisées par la cliente.

3. Ces conventions ont été conclues sans l'accord du juge des tutelles.

4. M. [F] a saisi, le 9 novembre 2017, le bâtonnier de son ordre d'une demande de fixation des honoraires de diligence et de résultat dus par Mme [A] [O] et M. [C] [O], héritiers de [K] [L].

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. L'avocat fait grief à l'ordonnance de fixer les honoraires qui lui sont dus à la seule somme de 36 099 euros TTC, puis de les condamner en conséquence à payer ce dernier, compte tenu des sommes déjà versées, la seule somme de 26 517 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance alors « que la convention d'honoraires de résultat constitue un acte de disposition si et seulement si elle engage le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l'avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ; qu'en retenant, pour décider que les conventions d'honoraires de résultat conclues entre l'avocat et Mme [O], ès qualité de tutrice de [K] [L], constituaient des actes de disposition soumis à autorisation du juge des tutelles conformément à l'annexe 1, colonne 2, IX, du décret du 22 décembre 2008, que la somme de plus de 50 000 euros sollicitée par l'avocat au titre des honoraires de résultat constituait une amputation conséquente du capital de [K] [L], le premier président de la cour d'appel, qui a procédé à une appréciation globale et purement théorique de l'effet de l'exécution de l'ensemble des conventions d'honoraires de résultat sur le patrimoine de [K] [L], au lieu d'examiner distinctement l'impact du paiement de chacun des honoraires de résultat réclamés sur le patrimoine de celle-ci, en rapportant le montant de chacun d'eux à la valeur de l'immeuble et aux sommes que les procédures diligentées par Me [F] avait permis à [K] [L] de récupérer, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 465, 496, 504, 505 du code civil, ainsi que des articles 1 et 2 et de l'annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, et pris en application des articles 452, 496 et 502 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte de la combinaison des articles 465, 4°, et 505, alinéa 1er, du code civil, qu'à peine de nullité de plein droit de l'acte, le tuteur ne peut, sans y être autorisé par le conseil de famille ou, à défaut, le juge, faire des actes de disposition au nom de la personne protégée.

7. Selon l'annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008, relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, constitue un acte de disposition soumis à l'autorisation du juge les conventions d'honoraires proportionnels en tout ou partie à un résultat, indéterminés ou aléatoires.

8. C'est donc par une exacte application de ces dispositions, et sans avoir à procéder à un contrôle des conséquences de ces actes sur le patrimoine de la personne protégée, que le premier président, constatant que les conventions d'honoraires de résultat n'avaient pas été autorisées par le juge, les a déclarées nulles.

9.Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [F] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [F] et le condamne à payer à Mme [A] [O] et M. [C] [O] la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. [F]

Le moyen reproche à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir fixé les honoraires dus par Mme [A] [O] et M. [C] [O] à Me [F] à la seule somme de 36 099 euros TTC, puis d'avoir condamné en conséquence Mme [A] [O] et M. [C] [O] à payer à Me [F], compte tenu des sommes déjà versées, la seule somme de 26 517 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance ;

AUX MOTIFS QU'
« Il n'est pas contesté par les parties que trois conventions d'honoraires ont été signées, la première le 6 mai 2011 dans le cadre de la procédure entamée par Madame [L] devant le TGI de Montpellier à l'encontre de la SCI Llucat et autres, la seconde le 19 octobre 2015, relative à une procédure de saisie conservatoire à l'encontre de la SCI Llucat, la troisième signée également le 19 octobre 2015 relative à la procédure opposant Madame [L] à la société Le Lézard ; Ces trois conventions prévoyaient des honoraires de diligences et des honoraires de résultat ;

Sur la nullité des conventions d'honoraires

Les appelants soutiennent qu'une convention d'honoraire étant un acte de disposition, la signature des trois conventions prévoyant des honoraires de résultat ayant été passée sans l'accord du juge des tutelles, les conventions seraient nulles et qu'en conséquence aucune rémunération ne serait due à ce titre à Me [F] ;

Me [F] de son côté soutient que Madame [O], informée du mode de règlement, par ailleurs tutrice en exercice de sa grand-mère, aucun vice du consentement n'affecte l'accord des parties alors par ailleurs que Madame [O] l'aurait trompé sur les autorisations qu'elle avait obtenu du juge des tutelles ;

Quand bien même ces allégations auraient été démontrées, il appartenait à Me [F] d'en vérifier la réalité ; qu'il est constant que la somme de plus de 50 000 euros au titre des honoraires de résultat constituait une amputation conséquente du capital de madame [L] et comme tel constituait un acte de disposition soumis à autorisation du juge des tutelles conformément aux dispositions de l'annexe 1, colonne 2-IX du décret du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, listant comme un acte de disposition la convention d'honoraires ;

C'est en vain que Me [F] fait état de l'avis du juge des tutelles du 12 novembre 2014 qui ne s'appliquait pas à la convention d'honoraires mais au seul droit d'agir en justice de la tutrice ;

Les conventions doivent donc être déclarées nulles et en conséquence rejetées toutes demandes d'honoraires de résultat faites à ce titre par Me [F] » ;

ALORS QUE la convention d'honoraires de résultat constitue un acte de disposition si et seulement si elle engage le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l'avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ; qu'en retenant, pour décider que les conventions d'honoraires de résultat conclues entre Me [F] et Mme [O], ès qualités de tutrice de feue [K] [L], constituaient des actes de disposition soumis à autorisation du juge des tutelles conformément à l'annexe 1, colonne 2, IX, du décret du 22 décembre 2008, que la somme de plus de 50 000 euros sollicitée par Me [F] au titre des honoraires de résultat constituait une amputation conséquente du capital de [K] [L], le premier président de la cour d'appel, qui a procédé à une appréciation globale et purement théorique de l'effet de l'exécution de l'ensemble des conventions d'honoraires de résultat sur le patrimoine de [K] [L], au lieu d'examiner distinctement l'impact du paiement de chacun des honoraires de résultat réclamés sur le patrimoine de celle-ci, en rapportant le montant de chacun d'eux à la valeur de l'immeuble et aux sommes que les procédures diligentées par Me [F] avait permis à [K] [L] de récupérer, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 465, 496, 504, 505 du code civil, ainsi que des articles 1 et 2 et de l'annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle, et pris en application des articles 452, 496 et 502 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-22141
Date de la décision : 06/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

MAJEUR PROTEGE - Tutelle - Effets - Représentation du majeur - Domaine d'application - Gestion du patrimoine - Actes nécessitant une autorisation du juge des tutelles - Définition - Cas - Convention d'honoraires de résultat

MAJEUR PROTEGE - Tutelle - Fonctionnement - Tuteur - Pouvoirs - Acte nécessitant une autorisation du conseil de famille ou du juge des tutelles - Applications diverses - Convention d'honoraires de résultat AVOCAT - Honoraires - Contestation - Honoraires de résultat - Autorisation du conseil de famille ou du juge des tutelles - Nécessité POUVOIRS DES JUGES - Premier président - Avocat - Honoraires - Honoraires de résultat - Contestation - Appréciation

Il résulte de la combinaison des articles 465, 4°, et 505, alinéa 1, du code civil, qu'à peine de nullité de plein droit de l'acte, le tuteur ne peut, sans y être autorisé par le conseil de famille ou, à défaut, le juge, faire des actes de disposition au nom de la personne protégée. Selon l'annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008, relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes en curatelle ou en tutelle, constitue un acte de disposition soumis à l'autorisation du juge les conventions d'honoraires d'avocat proportionnels en tout ou partie à un résultat, indéterminés ou aléatoires. Dès lors, c'est par une exacte application de ces dispositions, et sans avoir à procéder à un contrôle des conséquences de ces actes sur le patrimoine de la personne protégée, que le premier président, constatant que les conventions d'honoraires de résultat litigieuses n'avaient pas été autorisées par le juge, les a déclarées nulles


Références :

articles 465, 4°, et 505, alinéa 1, du code civil

annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008.

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 11 juillet 2019

A rapprocher : 1re Civ., 3 juillet 2001, pourvoi n° 98-16854, Bull. 2001, I, n° 195 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 06 mai. 2021, pourvoi n°19-22141, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.22141
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