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05/05/2021 | FRANCE | N°19-21688

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 mai 2021, 19-21688


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mai 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 390 F-P

Pourvoi n° S 19-21.688

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 MAI 2021

La société [Per

sonne physico-morale 1], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [Q] [X], agissant ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 mai 2021

Rejet

M. RÉMERY, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 390 F-P

Pourvoi n° S 19-21.688

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 MAI 2021

La société [Personne physico-morale 1], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [Q] [X], agissant en qualité de liquidateur de la société Seafrance, a formé le pourvoi n° S 19-21.688 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre 1, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à l'administration des douanes et droits indirects, dont le siège est [Adresse 2], prise en la personne du directeur régional et du receveur régional des douanes et des droits indirects de Dunkerque,

2°/ à la société Euro-Transmanche, société par actions simplifiée unipersonnelle,

3°/ à la société Euro-Transmanche 3 BE, société par actions simplifiée unipersonnelle,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société [Personne physico-morale 1], ès qualités, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de l'administration des douanes et droits indirects, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 mars 2021 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société [Personne physico-morale 1], agissant en qualité de liquidateur de la société Seafrance, du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 juin 2019), par des contrats du 29 juin 2012, les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE (les sociétés Euro-Transmanche) ont conclu, chacune, avec la société Seafrance un contrat d'affrètement coque nue, portant respectivement sur les navires Rodin et Berlioz, pour une durée de trois ans renouvelable, à compter de la livraison du navire, les contrats pouvant être dénoncés au moins trente jours avant leur terme. Par un jugement du 10 avril 2015, la société Seafrance a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde. Le 27 mai 2015, les sociétés Euro-Transmanche ont mis fin aux contrats avec effet au 1er juillet 2015, à minuit. Par des jugements des 11 juin et 31 juillet 2015, la société Seafrance a été mise en redressement puis liquidation judiciaire et M. [X] a été désigné en qualité de liquidateur.

3. Par une ordonnance du 29 juin 2015, le juge des référés d'un tribunal de commerce a dit n'y avoir lieu d'ordonner la suspension des effets de la résiliation des contrats d'affrètement coque nue. Faisant valoir qu'à compter du 2 juillet 2015, la société Seafrance avait perdu la qualité d'affréteur et d'armateur des navires dont la garde juridique avait été transférée aux sociétés Euro-Transmanche qui en étaient propriétaires, M. [X] a assigné l'administration des douanes et droits indirects (l'administration des douanes) et les sociétés Euro-Transmanche en restitution de la consignation constituée pour garantir le paiement des contributions indirectes et des droits de port pour la période du 2 juillet 2015 au 13 septembre 2015.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa septième branche, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches

Enoncé du moyen

5. M. [X], ès qualités, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de l'administration des douanes à lui payer la somme de 249 126 euros, avec intérêts capitalisés, alors :

« 1°/ que la redevance de stationnement au titre des droits de port est à la charge de l'armateur ; qu'en cas d'affrètement, tel que défini par les dispositions de l'article L. 5423-1 du code des transports, l'affréteur devient l'armateur du navire ; que l'affréteur perd sa qualité d'armateur à la date d'expiration du contrat d'affrètement, nonobstant la possession du navire, qui est une simple situation factuelle ne modifiant pas la durée du contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les deux contrats d'affrètement conclus entre la société Seafrance, affréteur, et les sociétés Euro-Transmanche, fréteurs respectifs des navires Rodin et Berlioz, prévoyaient, en leurs articles 3.1/3.2/3.3, que l'affrètement était conclu pour une durée de trois ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur et qu'il serait renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties trente jours avant son échéance ; qu'elle a également relevé que par lettre recommandée du 27 mai 2015, les sociétés Euro-Transmanche avaient mis fin aux contrats d'affrètement à effet au 1er juillet 2015 à minuit ; qu'il en ressortait qu'à compter du 1er juillet 2015 à minuit, les contrats d'affrètement arrivaient à expiration ; qu'en affirmant néanmoins qu'à raison de la possession du navire, la société Seafrance n'avait perdu la qualité d'armateur que le 12 septembre 2015, et qu'elle était redevable des droits de port jusqu'à cette date, la cour d'appel a violé les articles L. 5321-1, L. 5411-2, R. 5321-1 et R. 5321-19 du code des transports ;

2°/ que la redevance de stationnement au titre des droits de port est à la charge de l'armateur ; qu'en cas d'affrètement, tel que défini par les dispositions de l'article L. 5423-1 du code des transports, l'affréteur devient l'armateur du navire ; qu'en affirmant que le fait que les sociétés Euro-Transmanche aient conclu de nouveaux contrats d'affrètement sur les navires avec une société tierce, signés en juin 2015 et prévoyant la mise à disposition des navires pour le nouvel armateur le 2 juillet 2015, était sans incidence sur la détermination du redevable des droits de port, la cour d'appel a violé les articles L. 5321-1, L. 5411-2, R. 5321-1 et R. 5321-19 du code des transports ;

3°/ que les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les deux contrats d'affrètement conclus entre la société Seafrance, affréteur, et les sociétés Euro-Transmanche, fréteurs respectifs des navires Rodin et Berlioz, prévoyaient, en leurs articles 3.1/3.2/3.3, que l'affrètement était conclu pour une durée de trois ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur et qu'il serait renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties trente jours avant son échéance ; que la cour d'appel n'a relevé, parmi les stipulations contractuelles relatives à la restitution du navire, mentionnées aux articles 5.1/5.2/5.3/5.4 des contrats, l'existence d'aucune clause de prolongation de la durée des contrats d'affrètement ; qu'en affirmant que la relation contractuelle ne prenait pas fin à la date d'expiration du contrat mais à la date à laquelle le fréteur avait repris possession du navire, et que cette reprise se traduisait par l'établissement d'un procès-verbal de restitution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

4°/ qu'un procès-verbal de restitution établi contradictoirement par les cocontractants se borne à constater une situation de fait et ne conditionne pas la restitution elle-même ; qu'en affirmant que la restitution des navires ne pouvait être caractérisée par la simple mise à disposition des navires mais était conditionnée à la signature par les parties d'un procès-verbal de restitution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

5°/ que la restitution d'une chose mise à disposition est effective à la date de remise en possession de la chose au propriétaire ; qu'en l'espèce, en estimant que la société Seafrance n'avait pas remis les sociétés Euro-Transmanche en possession des navires dès le 2 juillet 2015, en se bornant à relever que les navires étaient occupés par des salariés de la société Seafrance et des tiers, sans rechercher comme elle y était invitée si la société Seafrance n'avait pas donné son accord sur le lieu et le jour de la restitution et sur l'identité de l'expert chargé de l'inventaire, si elle n'avait pas désarmé les navires, si elle n'avait pas désactivé les badges de l'équipage, et si l'occupation des navires, malgré la présence de salariés de la société Seafrance, n'était pas une occupation illicite réalisée sans autorisation et hors de son chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

6°/ que la restitution d'une chose mise à disposition est effective à la date de réalisation des opérations contradictoires de remise en possession de la chose au propriétaire, et non à la date de la signature du procès-verbal constatant ces opérations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les expertises contradictoires prévues aux contrats d'affrètement étaient intervenues les 2, 3, 4 et 7 septembre 2015 et que ce n'est que le 12 septembre 2015 que les sociétés Euro-Transmanche avaient pris acte des redélivraisons ; qu'en jugeant que les navires avaient été restitués le 12 septembre 2015, soit à une date dépendant exclusivement du bon-vouloir des sociétés Euro-Transmanche, plutôt qu'au 7 septembre 2015, date de fin de réalisation des expertises contradictoires, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des articles R. 5321-19 du code des transports ou R. 212-2 du code des ports maritimes que la redevance de stationnement est à la charge de l'armateur, c'est-à-dire de celui qui exploite le navire en son nom, qu'il en soit ou non propriétaire. Après avoir exactement énoncé que l'armateur s'entend de l'affréteur en cas d'affrètement coque nue, l'arrêt constate d'abord que les contrats d'affrètement litigieux ont été dénoncés par les sociétés Euro-Transmanche avec effet au 1er juillet 2015 à minuit, que, postérieurement à cette date, les navires sont restés occupés par des salariés de la société Seafrance et des tiers non déterminés et qu'aux termes d'un protocole de sortie de crise du 31 août 2015, les représentants des salariés de la société Seafrance se sont engagés à libérer les navires au plus tard le 2 septembre 2015. Il relève ensuite que la société Seafrance était tenue contractuellement de restituer les navires à la date d'expiration des contrats et, en cas de retard, de payer une indemnité et retient que les parties avaient prévu que la date d'expiration du contrat et celle de la restitution du navire pussent ne pas coïncider. Il en déduit justement que les contrats expirés ont continué à produire des effets et que la société Seafrance, qui avait conservé « la garde de la structure et du comportement » des navires jusqu'à leur restitution, n'avait perdu sa qualité d'armateur qu'à la date de cette restitution.

7. Après avoir constaté que les parties avaient prévu que la restitution des navires serait matérialisée par un procès-verbal de restitution dûment signé, auquel serait annexé le rapport d'expertise contradictoire des navires, que les expertises contradictoires n'avaient pu intervenir que les 2, 3, 4 et 7 septembre 2015 et que, le 12 septembre 2015, les sociétés Euro-Transmanche avaient pris acte de la redélivraison non conforme des navires, l'arrêt en déduit justement qu'en dépit de la conclusion par les sociétés Euro-Transmanche de nouveaux contrats d'affrètement prévoyant une mise à disposition des navires le 2 juillet 2015, date à laquelle les navires auraient dû leur être restitués, la restitution n'a eu lieu que le 12 septembre 2015, de sorte que la société Seafrance restait redevable des droits de port jusqu'à cette date.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [X], en qualité de liquidateur de la société Seafrance, aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société [Personne physico-morale 1], ès qualités.

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté Me [X], ès qualités de liquidateur de la SCOP Seafrance, de l'intégralité de ses demandes, en particulier de sa demande de condamnation de l'administration des douanes à lui payer la somme de 249 126 €, majorée des intérêts au taux légal avec anatocisme et d'AVOIR condamné Me [X], ès qualités de liquidateur de la SCOP Seafrance, à payer des sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS QUE « Il est constant que le litige porte sur le redevable de la taxe de stationnement des deux navires Rodin et Berlioz ayant fait l'objet par la Scop d'une consignation de 249 126 euros entre les mains de l'Administration des Douanes. Il résulte de l'application combinée des articles R. 5321-1 et R. 5321-29 du code des transports que cette redevance de stationnement est à la charge de l'armateur. Il n'est pas contesté par les parties que dans le cadre des contrats d'affrètement coque nue tels que ceux conclus entre la Scop et les sociétés ETM sur les deux navires Rodin et Berlioz, l'affréteur, en l'occurrence la Scop, a la qualité d'armateur. Comme l'a indiqué le premier juge, le seul point discuté porte sur la date à laquelle la Scop a perdu la qualité d'armateur et, par suite, la qualité de redevable de la taxe en cause : — la date d'expiration des contrats d'affrètement selon la Scop, soit le 1er juillet 2015, — la date de la restitution effective des navires selon les sociétés ETM, soit le 12 septembre 2015, le tribunal ayant pertinemment observé qu'il ne pouvait être considéré que la Scop avait conservé la qualité d'armateur jusqu'au jour de la modification des publications quant à sa qualité d'affréteur coque nue des navires Berlioz et Rodin, en relevant exactement que les publications ont pour effet de rendre les situations opposables aux tiers et que sur les actes de francisation des navires, l'indication du nom du nouvel affréteur coque nue n'est intervenue qu'en février 2016, alors même que les sociétés ETM admettent qu'à compter du 13 septembre 2015 la Scop n'avait plus la qualité d'armateur. Les deux contrats d'affrètement conclus entre les parties prévoient au paragraphe "durée de l'affrètement", en ses articles 3.1/3.2/3.3, que l'affrètement est conclu pour une durée de 3 ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur ; qu'il sera renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties 30 jours avant son échéance ; que la dénonciation se fera par tous moyens appropriés permettant de justifier de la réception de cette dénonciation par le co-contractant. Après le paragraphe suivant relatif à la livraison du navire, le contrat stipule un paragraphe 5 relatif à la restitution du navire, contenant : - un article 5.1 ainsi rédigé : Le navire sera restitué par l'affréteur au fréteur au port désigné par le fréteur (au moins 10 jours avant sa restitution) à un quai sûr (ci-après "le lieu de restitution") à l'expiration du contrat. - un article 5.2 : Si l'affréteur n'est pas en mesure de restituer le navire à l'expiration du délai stipulé à l'article 5.1 ci-dessus, l'affréteur devra indemniser le fréteur de la somme de 3 fois le taux de fret journalier du navire par jour de retard jusqu'à sa restitution, à moins que l'absence ou le retard de restitution intervienne du fait du fréteur ou d'un cas de force majeure. - un article 5.3 : La restitution du navire sera matérialisée par un procès-verbal de restitution dûment signé par les parties. - un article 5.4 : Le fréteur et l'affréteur désigneront conjointement un expert pour procéder à un examen contradictoire de l'état du navire au moment de sa restitution. Cette expertise se fera aux frais de l'affréteur. Le rapport de l'expert sera annexé au procès-verbal de restitution. Les paragraphes suivants portent sur le loyer, les obligations du fréteur, les obligations de l'affréteur, les assurances, etc... La restitution du navire constitue ainsi une obligation contractuelle de l'affréteur ; la relation contractuelle ne prend pas fin à la date d'expiration du contrat mais à la date à laquelle le fréteur a repris possession du navire, cette reprise se traduisant par l'établissement d'un procès-verbal de restitution. Le contrat prévoit en effet que ces deux dates (expiration du contrat et restitution), peuvent ne pas coïncider, et en cas de restitution après l'arrivée à terme du contrat, il met à la charge de l'affréteur une obligation de payer une indemnité équivalente à trois fois le taux de fret journalier du navire par jour de retard jusqu'à sa restitution, cette obligation succédant à celle de payer le loyer jusqu'au terme du contrat. L'affréteur ne se trouve ainsi libéré de ses obligations contractuelles qu'après établissement du procès-verbal de restitution. Il convient donc de déterminer, comme l'a dit le premier juge, quand a eu lieu la restitution ou la "redélivraison" des deux navires, celle-ci ne pouvant être caractérisée par la simple mise à disposition des navires. La restitution doit en effet, aux termes du contrat, intervenir suivant des modalités particulières : par un procès-verbal de restitution dûment signé par les parties ; par la désignation conjointe d'un expert pour procéder à un examen contradictoire de l'état du navire au moment de sa restitution, le rapport de l'expert étant annexé au procès-verbal ; par un inventaire complet et contradictoire des équipements, consommables et pièces de rechange à bord et à terre, dressé conjointement par les parties. Or, il résulte des éléments au dossier que les sociétés ETM n'ont pas pu entrer en possession des navires dès le 2 juillet 2015, lendemain du terme des contrats. Les bateaux étaient en effet occupés par des salariés de la Scop et des tiers non déterminés. Ainsi, à une sommation interpellative du 1er juillet 2015, les administrateurs de la Scop ont répondu : "instruction a été donnée par les administrateurs judiciaires, malgré le comportement de certains membres du personnel, malgré l'incapacité des pouvoirs publics à maintenir l'ordre au sein du port de [Localité 1], que la restitution soit effectuée en temps et en heures", ce dont il résulte, comme l'a relevé le premier juge, que dès avant la date prévue et l'horaire fixé pour la redélivraison, les navires étaient occupés. Cela résulte aussi de l'ordonnance d'expulsion rendue le 4 juillet 2015 par le président du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-mer requis à cette fin par les administrateurs de la Scop le 3 juillet 2015. Par ailleurs, il ressort d'un protocole de sortie de crise signé le 31 août 2015 entre notamment le représentant du groupe Eurotunnel et celui des représentants des salariés de la Scop, que " Les représentants des salariés signataires du présent protocole, et tous occupants de leur chef, s'engagent à libérer définitivement les bateaux Rodin et Berlioz et à laisser le Nord-Pas-de-Calais libre de toute occupation au plus tard le mercredi 2 septembre 2015 à 9 h. Mardi 1er septembre, les salariés récupéreront leurs effets personnels sur les navires...", ce dont il résulte qu'au 31 août 2015, les deux navires n'étaient pas encore libérés. La Scop soutient à tort qu'elle aurait perdu la garde juridique des navires à compter de la date d'échéance des contrats d'affrètement (1er juillet 2015 à minuit) et qu'il relevait de la seule responsabilité des sociétés propriétaires des navires de mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour en assurer la sécurité et permettre l'établissement des procès-verbaux de redélivraison, alors qu'aux termes du contrat, elle est débitrice de l'obligation de restituer les navires et qu'au 1er juillet 2015 elle n'était pas encore libérée de cette obligation contractuelle et conservait dès lors la garde de la structure et du comportement des navires. Elle fait une mauvaise analyse de la requête adressée par les fréteurs au président du tribunal de commerce tendant à ce que les administrateurs judiciaires de la Scop (et non la Scop) se voient confier la garde des navires, cela dans le but de les responsabiliser sur le sort des bateaux jusqu'à leur redélivraison. Les fréteurs précisent d'ailleurs dans cette requête que la Scop Seafrance et les administrateurs désignés sont toujours gardiens de la structure et du comportement des navires. Il résulte en outre des pièces au dossier que les expertises contradictoires prévues aux contrats d'affrètement n'ont pu intervenir que les 2,3,4 et 7 septembre 2015, suite au protocole de sortie de crise du 31 août 2015, aucun accès aux bateaux n'ayant été possible avant cette date, et que par mail du 12 septembre 2015 les sociétés ETM ont pris acte de redélivraisons non conformes. C'est donc au 12 septembre 2015, comme l'a conclu le premier juge, que les navires ont été restitués, le tribunal jugeant aussi avec pertinence, d'une part, que le fait que les sociétés ETM aient conclu de nouveaux contrats d'affrètement sur les navires avec une société tierce est sans incidence sur la détermination de la date effectivement de redélivraison, ces contrats, signés en juin 2015, prévoyant la mise à disposition des navires pour le nouvel armateur le 2 juillet 2015, date à laquelle la Scop aurait dû les avoir restitués ; d'autre part, que le fait que les sociétés ETM aient assuré les navires à compter du 2 juillet 2015 n'emportait pas reconnaissance par elles de la redélivraison. La décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a jugé que la Scop n'ayant perdu la qualité d'armateur que le 12 septembre 2015, elle est redevable des taxes de port jusqu'à cette date et doit être déboutée de sa demande de mainlevée de la consignation effectuée auprès de l'Administration des Douanes » ;

ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « L'article R. 5321-1 dispose que « le droit de port est dû à raison des opérations commerciales ou des séjours des navires effectués dans le port. Les éléments constitutifs du droit de port comprennent, dans les conditions définies au présent code, les redevances suivantes : 1° Pour les navires de commerce : a) une redevance sur le navire, b) une redevance de stationnement, c) une redevance sur les marchandises, d) une redevance sur les passagers, e) une redevance sur les déchets d'exploitation des navires ». L'article R. 5321-29 précise que la redevance de stationnement est applicable aux navires dont le séjour au port dépasse un délai déterminé en fonction des conditions d'exploitation et du trafic qui sont propres à ce port. L'article R. 5321-19 ajoute que « la redevance sur le navire et, le cas échéant, la redevance de stationnement, sont à la charge de l'armateur ». Il importe donc, pour statuer sur la demande de remboursement faite par la SCOP Seafrance, de déterminer si cette dernière, qui a opéré la consignation au titre des droits de ports (dont le montant n'est pas remis en cause et qui s'élèvent à la somme de 249 126 euros pour la période du 2 juillet au 13 septembre 2015), était l'armateur des navires à cette période. L'administration des douanes ne peut, en effet, pour conserver la somme consignée, se contenter d'affirmer que les droits sont dus. Il importe que les droits soient dus par la SCOP. A défaut, les fonds doivent lui être restitués et l'administration des douanes ne peut prétendre que la SCOP devra se retourner contre le débiteur effectif des droits. Il revient, dans une telle hypothèse, à l'administration des douanes de demander paiement au débiteur réel sans pouvoir opérer une retenue sur une garantie versée par un tiers, non débiteur. Selon l'article L. 5411-1 du code des transports, "l'armateur est celui qui exploite le navire en son nom, qu'il en soit ou non propriétaire". L'article L. 5411-2 ajoute que "le propriétaire ou les copropriétaires du navire sont présumés en être l'armateur. En cas d'affrètement, tel que défini par les dispositions de l'article L. 5423-1, l'affréteur devient l'armateur du navire, si le contrat d'affrètement le prévoit et a été régulièrement publié". La SCOP Seafrance et les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE ont conclu un contrat d'affrètement coque nue portant sur les navires de transport de passagers Berlioz et Rodin. Les contrats prévoient expressément que l'affréteur, soit la SCOP, doit armer les navires, qu'il a la charge de l'entretien et des réparations et qu'il assurer la gestion nautique et commerciale. Les contrats d'affrètement ont fait l'objet d'une publication sur les fiches matricules des navires mais également d'une mention sur les actes de francisation des navires. Il découle de ces éléments que la SCOP avait bien la qualité d'amateur des navires pendant la durée des contrats d'affrètement, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par Me [X]. Le problème réside sur le point de savoir à quelle date a cessé cette qualité d'armateur, étant observé, sur ce point, que les publications ont pour effet de rendre les situations opposables aux tiers mais qu'il ne peut être prétendu que la SCOP a conservé la qualité d'armateur jusqu'au jour de la modification des publications. Il sera en effet relevé que sur les actes de francisation des navires, l'indication du nom de nouvel affréteur coque nue (qui a la qualité d'armateur) n'est intervenue qu'en février 2016, alors même que les sociétés Euro-Transmanche admettent qu'à compter du 13 septembre 2015, la SCOP n'avait plus la qualité d'armateur. Les contrats d'affrètement régularisés entre les parties prévoient que : - (article 3.1) l'affrètement est conclu pour une durée de 3 ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur. (article 3.2) Il sera renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties 30 jours avant son échéance. (article 3.3) le dénonciation se fera par tous moyens appropriés permettant de justifier de la réception de cette dénonciation par le co-contractant. - (article 5.1) le navire sera restitué par l'affréteur au fréteur au port désigné par le fréteur (au moins 10 jours avant sa restitution) à un quai sûr (ci-après le lieu de restitution) à l'expiration du contrat, - (article 5.2) si l'affréteur n'est pas en mesure de restituer le navire à l'expiration du délai stipulé à l'article 5.1 ci-dessus, l'affréteur devra indemniser le fréteur de la somme de 3 fois le taux de fret journalier du navire par jour de retard jusqu'à sa restitution, à moins que l'absence ou le retard de restitution intervienne du fait du fréteur ou d'un cas de force majeure - (article 5.3) la restitution du navire sera matérialisée par un procès-verbal de restitution dûment signé par les parties, - (article 5.4) le fréteur et l'affréteur désigneront conjointement un expert pour procéder à un examen contradictoire de l'état du navire au moment de sa restitution. Cette expertise se fera aux frais de l'affréteur. Le rapport de l'expert sera annexé au procès-verbal de restitution. En l'absence de toute suspension des effets par le juge des référés de la résiliation des contrats auxquels les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE ont mis fin par lettres recommandées du 27 mai 2015 avec effet au 1er juillet 2015 à minuit, les contrats auraient dûs prendre fin à minuit le 1er juillet 2015. Cependant, le contrat prévoit les obligations de l'armateur en l'espèce la redélivraison du navire. A défaut d'une telle restitution, l'affréteur est tenu au paiement d'indemnité dont le montant a été fixé contractuellement. L'analyse du contrat démontre ainsi que l'engagement des parties perdure tant que la restitution du navire n'est pas intervenue (alors normalement que cette restitution doit intervenir à la fin de la période triennale, à défaut de tacite reconduction). Ainsi, l'affréteur qui n'a pas restitué le navire reste tenu de ses obligations outre les sanctions contractuellement prévues. Le contrat ne peut être analysé, au regard des clauses portant sur la redélivraison du navire, comme permettant d'autres modalités de fin du contrat. La remise n'est pas seulement un fait juridique mais est aussi l'événement qui met un terme réel aux engagements des parties. En effet, seule la remise du navire permet au propriétaire de reprendre possession de celui-ci et ainsi de pouvoir l'exploiter tant sur le plan commercial que sur le plan nautique. Il convient donc de déterminer quand a eu lieu cette redélivraison. Il sera relevé sur ce point que les modalités de la remise ont été précisément prévues par les parties au contrat et notamment l'obligation d'une expertise contradictoire, d'autant plus importante que l'affréteur a l'obligation de restituer le navire dans l'état où il l'a reçu sauf usure normale (article 8.9). Le fait que Me [X] affirme que le 1er juillet 2015 à minuit, les navires étaient à la disposition des sociétés Euro-Transmanche, dans le port choisi par les parties, ne suffit pas à caractériser la redélivraison. En effet, les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE n'ont pas pu reprendre possession des navires qui étaient occupés par des salariés (outre des tiers non déterminés) ; ainsi, à une sommation interpellative du 1er juillet 2015, les administrateurs de la SCOP ont répondu que "instruction a été donnée par les administrateurs judiciaires, malgré le comportement de certains membres du personnel, malgré l'incapacité des pouvoirs publiques à maintenir l'ordre au sein du port de [Localité 1], que la restitution soit effectuée en temps et en heures". Il en résulte que, dès avant la date prévue et l'horaire fixé pour la redélivraison, les navires étaient occupés, et Me [X] ne peut prétendre que cette situation est due au défaut de sécurité mise en place par les sociétés Euro-Transmanche, lesquelles n'avaient pas encore la garde des navires le 1er juillet 2015. En définitive, les expertises contradictoires prévues aux contrats d'affrètement n'ont pu intervenir que les 2, 3, 4, 7 septembre 2015 (aucun accès aux bateaux n'ayant été possible avant cette date). Par un mail du 12 septembre 2015, les sociétés Euro-Transmanche ont pris acte de redélivraisons non conformes. C'est donc au 12 septembre 2015 que les navires ont été restitués. Le fait que les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE aient conclu de nouveaux contrats d'affrètement concernant les navires avec une société tierce est sans incidence sur la détermination de la date effectivement de redélivraison. En effet, si ces contrat, signés en juin 2015, prévoyaient une date de mise à disposition des navires pour le nouvel armateur le 2 juillet 2015, c'est qu'à cette date, la SCOP aurait dû les avoir restitués. De même, le fait que les sociétés Euro-Transmanche aient assuré les navires à compter du 2 juillet 2015 ne signifie pas qu'elles considéraient que la redélivraison avait eu lieu. Il ne peut pas plus être tiré argument du fait qu'elle ont essayé d'obtenir que les administrateurs de la SCOP soient désignés gardiens des navires, étant observé que la qualité de gardien est totalement distincte de celle d'armateur. Il sera d'ailleurs observé que les administrateurs de la SCOP ont, quant à eux, tenté d'obtenir l'expulsion des occupants des navires, indiquant dans leurs écritures avoir demandé le concours de la force publique auprès du préfet (alors qu'ils n'auraient eu aucune qualité à agir s'ils n'étaient plus armateurs et s'ils avaient effectivement opéré la redélivraison) et même de poursuivre l'assurance des navires. Compte tenu de la restitution des navires le 12 septembre 2015, il doit être constaté que la SCOP Seafrance a conservé jusqu'à cette date, la qualité d'armateur, le contrat n'ayant pu prendre fin qu'à la date de restitution effective des navires. Dès lors, elle reste redevable des droits de port et sa demande tendant à obtenir la mainlevée de la consignation opérée par les douanes sur la somme consignée pour garantir le paiement doit être rejetée de même que la demande de remboursement présentée » ;

1) ALORS QUE la redevance de stationnement au titre des droits de port est à la charge de l'armateur ; qu'en cas d'affrètement, tel que défini par les dispositions de l'article L. 5423-1 du code des transports, l'affréteur devient l'armateur du navire ; que l'affréteur perd sa qualité d'armateur à la date d'expiration du contrat d'affrètement, nonobstant la possession du navire, qui est une simple situation factuelle ne modifiant pas la durée du contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les deux contrats d'affrètement conclus entre la SCOP Seafrance, affréteur, et les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE, fréteurs respectifs des navires Rodin et Berlioz, prévoyaient, en leurs articles 3.1/3.2/3.3, que l'affrètement était conclu pour une durée de trois ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur et qu'il serait renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties 30 jours avant son échéance ; qu'elle a également relevé que par lettre recommandée du 27 mai 2015, les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE avaient mis fin aux contrats d'affrètement à effet au 1er juillet 2015 à minuit ; qu'il en ressortait qu'à compter du 1er juillet 2015 à minuit, les contrats d'affrètement arrivaient à expiration ; qu'en affirmant néanmoins qu'à raison de la possession du navire, la SCOP Seafrance n'avait perdu la qualité d'armateur que le 12 septembre 2015, et qu'elle était redevable des droits de port jusqu'à cette date, la cour d'appel a violé les articles L. 5321-1, L. 5411-2, R. 5321-1 et R. 5321-19 du code des transports.

2) ALORS QUE la redevance de stationnement au titre des droits de port est à la charge de l'armateur ; qu'en cas d'affrètement, tel que défini par les dispositions de l'article L. 5423-1 du code des transports, l'affréteur devient l'armateur du navire ; qu'en affirmant que le fait que les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE aient conclu de nouveaux contrats d'affrètement sur les navires avec une société tierce, signés en juin 2015 et prévoyant la mise à disposition des navires pour le nouvel armateur le 2 juillet 2015, était sans incidence sur la détermination du redevable des droits de port, la cour d'appel a violé les articles L. 5321-1, L. 5411-2, R. 5321-1 et R. 5321-19 du code des transports.

3) ALORS QUE les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les deux contrats d'affrètement conclus entre la SCOP Seafrance, affréteur, et les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE, fréteurs respectifs des navires Rodin et Berlioz, prévoyaient, en leurs articles 3.1/3.2/3.3, que l'affrètement était conclu pour une durée de trois ans à compter de la livraison du navire à l'affréteur et qu'il serait renouvelé par tacite reconduction à l'expiration de cette période pour une durée identique, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties 30 jours avant son échéance ; que la cour d'appel n'a relevé, parmi les stipulations contractuelles relatives à la restitution du navire, mentionnées aux articles 5.1/5.2/5.3/5.4 des contrats, l'existence d'aucune clause de prolongation de la durée des contrats d'affrètement ; qu'en affirmant que la relation contractuelle ne prenait pas fin à la date d'expiration du contrat mais à la date à laquelle le fréteur avait repris possession du navire, et que cette reprise se traduisait par l'établissement d'un procès-verbal de restitution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

4) ALORS subsidiairement QU'un procès-verbal de restitution établi contradictoirement par les cocontractants se borne à constater une situation de fait et ne conditionne pas la restitution elle-même ; qu'en affirmant que la restitution des navires ne pouvait être caractérisée par la simple mise à disposition des navires mais était conditionnée à la signature par les parties d'un procès-verbal de restitution, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

5) ALORS subsidiairement QUE la restitution d'une chose mise à disposition est effective à la date de remise en possession de la chose au propriétaire ; qu'en l'espèce, en estimant que la SCOP Seafrance n'avait pas remis les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE en possession des navires dès le 2 juillet 2015, en se bornant à relever que les navires étaient occupés par des salariés de la SCOP Seafrance et des tiers, sans rechercher comme elle y était invitée si la SCOP Seafrance n'avait pas donné son accord sur le lieu et le jour de la restitution et sur l'identité de l'expert chargé de l'inventaire, si elle n'avait pas désarmé les navires, si elle n'avait pas désactivé les badges de l'équipage, et si l'occupation des navires, malgré la présence de salariés de la SCOP Seafrance, n'était pas une occupation illicite réalisée sans autorisation et hors de son chef, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

6) ALORS très subsidiairement QUE la restitution d'une chose mise à disposition est effective à la date de réalisation des opérations contradictoires de remise en possession de la chose au propriétaire, et non à la date de la signature du procès-verbal constatant ces opérations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les expertises contradictoires prévues aux contrats d'affrètement étaient intervenues les 2, 3, 4 et 7 septembre 2015 et que ce n'est que le 12 septembre 2015 que les sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE avaient pris acte des redélivraisons ; qu'en jugeant que les navires avaient été restitués le 12 septembre 2015, soit à une date dépendant exclusivement du bon-vouloir des sociétés Euro-Transmanche et Euro-Transmanche 3BE, plutôt qu'au 7 septembre 2015, date de fin de réalisation des expertises contradictoires, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.

7) ALORS en tout état de cause QUE le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, Me [X], ès qualités de liquidateur de la SCOP Seafrance, faisait valoir dans ses conclusions d'appel (pages 13 et 14) que l'administration des douanes ne disposait d'aucun titre de créance ni d'avis de mise en recouvrement à l'encontre de la SCOP Seafrance et qu'elle était par conséquent tenue de restituer les fonds consignés, la consignation étant sans objet ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-21688
Date de la décision : 05/05/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS MARITIMES - Affrètement - Affrètement coque nue - Affréteur - Perte de la qualité d'armateur - Date - Détermination

DROIT MARITIME - Port - Droits de port et de navigation - Droit de port - Navires de commerce - Taxe de stationnement - Perte de la qualité d'armateur - Date - Détermination DOUANES - Droits de port et de navigation - Droit de port - Navires de commerce - Taxe de stationnement - Perte de la qualité d'armateur - Date - Détermination

Il résulte des articles R. 5321-19 du code des transports ou R. 212-2 du code des ports maritimes que la redevance de stationnement est à la charge de l'armateur, c'est-à-dire de celui qui exploite le navire en son nom, qu'il en soit ou non propriétaire. Après avoir exactement énoncé que l'armateur s'entend de l'affréteur en cas d'affrètement coque nue, la cour d'appel qui a constaté d'abord que les contrats d'affrètement litigieux avaient été dénoncés par les fréteurs avec effet au 1er juillet 2015 à minuit, que, postérieurement à cette date, les navires étaient restés occupés par des salariés de l'affréteur et des tiers non déterminés et qu'aux termes d'un protocole de sortie de crise du 31 août 2015, les représentants des salariés de l'affréteur s'étaient engagés à libérer les navires au plus tard le 2 septembre 2015, a relevé ensuite que l'affréteur était tenu contractuellement de restituer les navires à la date d'expiration des contrats et, en cas de retard, de payer une indemnité et a retenu que les parties avaient prévu que la date d'expiration du contrat et celle de la restitution du navire pussent ne pas coïncider, en a déduit justement que les contrats expirés avaient continué à produire des effets et que l'affréteur, qui avait conservé « la garde de la structure et du comportement » des navires jusqu'à leur restitution, n'avait perdu sa qualité d'armateur qu'à la date de cette restitution. Après avoir constaté que les parties avaient prévu que la restitution des navires serait matérialisée par un procès-verbal de restitution dûment signé, auquel serait annexé le rapport d'expertise contradictoire des navires, que les expertises contradictoires n'avaient pu intervenir que les 2, 3, 4 et 7 septembre 2015 et que, le 12 septembre 2015, les fréteurs avaient pris acte de la redélivraison non conforme des navires, la cour d'appel en a déduit justement qu'en dépit de la conclusion par les fréteurs de nouveaux contrats d'affrètement prévoyant une mise à disposition des navires le 2 juillet 2015, date à laquelle les navires auraient dû leur être restitués, la restitution n'avait eu lieu que le 12 septembre 2015, de sorte que l'affréteur restait redevable des droits de port jusqu'à cette date


Références :

article R. 5321-19 du code des transports

article R. 212-2 du code des ports maritimes.

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 06 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 mai. 2021, pourvoi n°19-21688, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21688
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