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14/04/2021 | FRANCE | N°19-21024

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 avril 2021, 19-21024


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 318 F-P

Pourvoi n° V 19-21.024

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 juillet 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRA

NÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 AVRIL 2021

Mme [F] [C], épouse [R], domiciliée...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 avril 2021

Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 318 F-P

Pourvoi n° V 19-21.024

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [C].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 juillet 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 AVRIL 2021

Mme [F] [C], épouse [R], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 19-21.024 contre l'arrêt rendu le 12 juin 2019 par la cour d'appel d'Orléans (chambre de la famille), dans le litige l'opposant à M. [S] [R], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Gargoullaud, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de Mme [C], et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Gargoullaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 12 juin 2019), un jugement a prononcé le divorce de M. [R] et de Mme [C].

Examen des moyens

Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. Mme [C] fait grief à l'arrêt de fixer la résidence de l'enfant commun, [P], au domicile de M. [R], et de décider que son droit de visite s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative et de dire qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de [P], alors « que le juge qui décide que le droit de visite d'un parent s'exercera dans un espace de rencontre neutre doit fixer la durée de cette mesure et déterminer la périodicité et la durée des rencontres ; qu'en décidant que Mme [C] exercera un droit de visite deux fois par mois dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'Aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative, sans préciser la durée exacte de ces rencontres ni celle de la mesure, la cour d'appel a violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du code civil ainsi que l'article 1180-5 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 373-2-9, 375-3 et 375-7 du code civil et l'article 1180-5 du code de procédure civile :

4. Selon ce dernier texte, lorsque le juge aux affaires familiales décide que le droit de visite s'exercera dans un espace de rencontre en application du premier, il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres, sans pouvoir s'en remettre sur ce point à la décision du juge des enfants prise sur le fondement des deux autres, qui est provisoire.

5. Après avoir constaté que [P] fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative mise en place par le juge des enfants selon les modalités prévues dans un jugement du 12 avril 2019 et fixé la résidence de celui-ci chez son père, l'arrêt décide que Mme [C] exercera un droit de visite deux fois par mois dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'Aide sociale à l'enfance selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative.

6. En statuant ainsi, en s'en remettant à la décision du juge des enfants sur la durée de la mesure et celle des rencontres, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du deuxième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il décide que le droit de visite de Mme [F] [C] à l'égard de [P] s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative et dit qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de [P], l'arrêt rendu le 12 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans autrement composée ;

Condamne M. [R] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour Mme [C]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir fixé la résidence de [P] au domicile de monsieur [R], d'avoir décidé que le droit de visite de madame [C] à l'égard de [P] s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative et d'avoir dit qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de [P];

Aux motifs que, sur la résidence, en application de l'article de l'article 373-2-6 du code civil, « le juge délégué aux affaires familiales règle les questions qui lui sont soumises dans le cadre de sa compétence en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs» ; en application de l'article 373-2-8 du code civil, « la résidence de l'enfant peut être fixée en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l'un d'eux » ; à l'appui de sa demande de transfert de résidence de [P] à son domicile, M. [S] [R] rappelle que Mme [F] [C] est toujours en guerre contre lui et que cette situation a des répercussions sur la prise en charge de [P] et sur son évolution ; qu'il rappelle les constatations du [Établissement 1] aux termes desquelles [P], en présence de sa mère, appelle son père « [S] » et lorsqu'il est avec son père, il l'appelle « papa » ; que lorsqu'il est avec sa mère, la communication avec l'enfant est difficile, que Mme [F] [C] répond à sa place, sans lui laisser le temps de s'exprimer alors que rencontré chez son père, [P] est ouvert, souriant et que les services ont pu échanger avec lui, sans qu'il ait besoin d'un traducteur, que Mme [F] [C] agit comme si elle était la seule détentrice de l'autorité parentale vis-à-vis des tiers, que [P] lorsqu'il réside chez Mme [F] [C], est pris en charge par des intervenants différents chaque jour de la semaine alors que cette sur-stimulation est contraire au développement de l'enfant qui aurait besoin de se poser ; Mme [F] [C] s'oppose à cette demande en faisant valoir que M. [S] [R] persiste à se caractériser par un refus de tout dialogue, toute souplesse et par un immobilisme incontestable tout en continuant à diffuser à l'égard de Mme [F] [C] un discours calomnieux y compris dans la relation des faits auprès des services éducatifs, et qui sert de support à l'entier rapport de fin de mesure ; elle ajoute que [S] [R] qui n'avait pas demandé la résidence de l'enfant au cours de la procédure de divorce, avait d'emblée demandé aux services éducatifs s'ils ne pouvaient pas placer directement l'enfant en institution, ce qui conduisait à l'arracher à son milieu familial ; que les préconisations des services éducatifs ne sont pas davantage respectueuses de l'enfant puisqu'elles conduiraient à couper radicalement les liens entre l'enfant et sa mère et à bouleverser complètement ses repères alors qu'il a besoin de repères et de stabilité ; Mme [F] [C] ajoute que ses préconisations sont contraires à celles de l'expert psychologue qui estime que les difficultés de Mme [F] [C] nécessiteraient un accompagnement psychologique et éducatif » et qui recommande une résidence alternée ; Mme [F] [C] estime que ce n'est pas parce qu'elle est favorable à une solution de formation de [P] en milieu scolaire ordinaire et qu'elle fait tout son possible pour permettre à [P] d'en bénéficier, que ses progrès d'ailleurs en attestent, qu'elle devrait être sanctionnée sur le plan de la résidence ; qu'à défaut, elle est favorable à la résidence alternée ; il ressort des conclusions et des pièces communiquées par les parties dont le rapport d'enquête sociale et le rapport d'expertise psychologique de 2011 ainsi que de la décision rendue par le juge des enfants du tribunal de grande instance d'Orléans le 12 avril 2019 et des rapports d'expertise psychologique et d'investigation éducative, que Mme [F] [C] et M. [S] [R] ne sont pas parvenus à dépasser leur conflit qui s'est étendu à des différends quant à l'éducation de [P] ; que ce conflit était déjà très accentué à la naissance de l'enfant, se concrétisant par des tensions croissantes et de la violence réciproque jusqu'au point de rupture qui s'est traduit en septembre 2010 par le départ irrévocable de M. [S] [R] du domicile conjugal avec [P] qui avait deux ans, que la séparation des parents a entraîné pour ce dernier, une succession de ruptures brutales tant affectives qu'environnementales ; que l'enquêtrice sociale et l'expert psychologue constataient en 2011 que [P] était devenu l'enjeu du conflit entre ses parents et que l'enfant était en difficulté pour communiquer verbalement avec autrui et qu'il présentait déjà un retard important dans le domaine de la propreté et de la psychomotricité ; il est établi par les rapports récents, que l'enfant qui a aujourd'hui 10 ans, présente toujours un handicap de développement ; que l'expert psychologue intervenu en 2019 note que « les dysfonctionnements relatifs aux dissensions parentales, les changements d 'environnement récurrents en fonction des attributions de résidence, la violence laquelle il a assisté et peut-être subi, l'impossible référence à une cohérence parentale unie autour de lui, les difficultés relationnelles maternelles et le fait que le père apparaisse constamment dénigré aux yeux de sa mère, constituent des items préjudiciables quant à la construction de la personnalité de [P] mais aussi de la maturation de ses fonctions cognitives, émotionnelles, relationnelles et physiologiques. [P] n 'apparaît pas sujet et son identité n'est pas structurée » ; il est constant que les investigations médicales diligentées par les parents ont conduit à écarter des troubles d'origine autistique ou psychotique et par courrier daté du 31 décembre 2018, le professeur de médecine de l'hôpital [Établissement 2]-enfants malades (service de génétique clinique) écrit à son homologue de l'hôpital [Établissement 3] [Localité 2], que le bilan génétique est déjà extrêmement dense et négatif et il doute que de nouveaux examens puissent modifier le diagnostic bien qu'il suggère encore un approfondissement par examen du génome entier (pièce 159-Mme [F] [C] ) ; la cour relève également que les différents experts judiciaires et le service éducatif du [Établissement 1] qui ont rencontré chacun des parents séparément ainsi que l'enfant et les professionnels intervenant auprès de ce dernier de manière habituelle, ont tous constaté que Mme [F] [C] avait besoin d'un tiers pour entrer en contact avec son fils, et ce dès le plus jeune âge de l'enfant où la mère de Mme [F] [C] a été appelée pour aider pendant plusieurs mois, sa fille après la naissance, qu'en revanche, ces mêmes experts n'ont observé aucune difficulté relationnelle entre [P] et son père bien que Mme [F] [C] lui dénie sa place de père, en le faisant appeler par l'enfant par son prénom ou comme « papa du week-end » ; de surcroît le service éducatif du [Établissement 1] lors des rencontres à domicile, a constaté que [P] était détendu et souriant au domicile de M. [S] [R] et avait fait visiter avec « un plaisir manifeste » toute la maison de M. [S] [R], y compris les chambres des trois autres garçons vivant avec M.[S] [R] et sa compagne actuelle, qu'il avait également assisté à l'entretien avec son père et sa compagne alors qu'au domicile de Mme [F] [C], l'enfant devait rester avec l'éducatrice dans sa chambre pendant que Mme [F] [C] s'entretenait avec l'assistante sociale en présence de la nourrice de l'enfant, que ce dernier se renfermait et fermait la porte de sa chambre lorsqu'on lui demandait de parler du compagnon de Mme [F] [C] ; le [Établissement 1] a également pu noter les observations du milieu scolaire fréquenté par [P] qui relève que l'enfant a un comportement différent selon qu'il vient de passer un week-end chez sa mère d'où il revient très fatigué et peu loquace et d'un week-end passé chez son père d'où il revient plus détendu et reposé et parlant plus facilement ; que tous les intervenants scolaires ont fait part au [Établissement 1] que [P], en dépit de la présence d'une assistante spécialisée, ne pouvait pas suivre le rythme d'apprentissage des autres enfants de la classe et que cette situation était niée par Mme [F] [C], provoquant des difficultés avec le personnel des établissements et il est aussi apparu au [Établissement 1] que Mme [F] [C] faisait délibérément obstacle à l'admission de son fils dans un IME ; la cour déduit de l'ensemble de ces éléments que l'intérêt de l'enfant commande que sa résidence soit fixée au domicile de M. [S] [R] ; le jugement déféré sera infirmé sur ce point ;

1°) Alors que l'autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant ; que chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ; que lorsqu'il se prononce sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale, le juge prend notamment en considération la pratique que les parents avaient précédemment suivie, l'aptitude de chacun des parents à assumer ses devoirs et respecter les droits de l'autre, les résultats des expertises éventuellement effectuées, les renseignements qui ont été recueillis dans les enquêtes sociales ; que la cour d'appel s'est bornée à énoncer, pour fixer la résidence de l'enfant [P] au domicile du père que, lors d'une rencontre au domicile de monsieur [R], le service éducatif du [Établissement 1] avait constaté que [P] était détendu et souriant, qu'il avait fait visiter avec plaisir toute la maison, qu'il avait assisté à l'entretien avec son père et sa compagne quand, au domicile de madame [C], l'enfant était resté dans sa chambre pendant que sa mère s'entretenait avec l'assistance sociale en présence de la nourrice, que l'enfant revenait plus détendu et reposé après un weekend passé chez son père, que les intervenants scolaires avaient indiqué que [P] ne pouvait pas suivre le rythme d'apprentissage des autres enfants de la classe et que madame [C] faisait délibérément obstacle à l'admission de son fils dans une IME ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée (concl. d'appel pp. 16 à 18), si le transfert chez le père de la résidence habituelle de l'enfant de nature à entraîner une coupure radicale des liens entre la mère et l'enfant, par un bouleversement majeur de l'intégralité des habitudes de [P], tant dans l'emploi du temps qu'au regard des différents intervenants auxquels il était attaché, étaient contraires à son intérêt, tandis qu'étaient invoqués de manière récurrente les besoins de [P] en matière de stabilité et de repères, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des article 373-2-6 et 373-2-11 du code civil, ensemble de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) Alors que, dans les décisions qui concernent les enfants, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; que madame [C] faisait valoir (concl. pp. 17 et 18) que les préconisations du rapport de fin de mesure judiciaire d'investigation éducative, telles que relayées par la responsable d'unité éducative, s'écartaient totalement des conclusions de l'expert psychologue – nommé à la demande du juge des enfants – laquelle n'évoquait nullement un besoin d'écarter la mère de la prise en charge de l'enfant et avait conclu à l'opportunité d'une résidence alternée, au domicile des deux parents, seule modification qui serait conforme à l'intérêt de l'enfant, quelle que soit la prise en charge dont celui-ci ferait l'objet dans la journée ; qu'en fixant la résidence de l'enfant au domicile de monsieur [R], sans tenir compte des conclusions de l'expert psychologue de nature à justifier que, dans l'intérêt de l'enfant, sa résidence soit, à tout le moins, fixée alternativement au domicile de chacun de ses parents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2-6 et 373-2-11 du code civil, ensemble de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°) Alors que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que madame [C] faisait valoir qu'elle avait la volonté de trouver une solution conforme à l'intérêt de [P] en proposant au père de mettre en oeuvre une mesure de résidence alternée, que la relation mère-enfant était une relation empreinte de bienveillance et d'affection et versait aux débats de nombreux témoignages relatant la qualité de sa relation avec son enfant, l'extrême engagement et le courage avec lequel elle faisait face depuis de nombreuses années au véritable parcours du combattant que représentait l'accompagnement de [P] et la recherche des meilleurs solutions pour son épanouissement et son développement, le docteur [U] ayant notamment attesté que madame [C] prodiguait des soins attentionnés nécessaires à son enfant, qu'elle n'avait jamais eu aucun doute sur l'amour maternel dont madame [C] avait fait preuve et que la relation mère-enfant était normale ; qu'en se fondant uniquement sur les conclusions du rapport [Établissement 1] qui faisait preuve de partialité à l'encontre de madame [C] et ne reflétait pas la réalité de la situation, sans examiner les multiples témoignages produits par madame [C] de nature à établir que cette dernière était disponible à l'égard de [P] et lui offrait une réelle stabilité, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) Alors que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que madame [C] faisait valoir que si la cour d'appel estimait devoir statuer sur une modification de la prise en charge scolaire de [P], une solution pourrait être trouvée dans une orientation de temps partagé entre l'IME et la classe ULIS (concl. p. 22) ; qu'en affirmant, pour refuser de faire droit à la demande subsidiaire de madame [C] tendant à ce que la résidence de [P] soit fixée de manière alternée, que madame [C] faisait délibérément obstacle à l'admission de son fils dans un IME, sans tenir compte des conclusions de madame [C] qui établissaient le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) Alors que madame [C] faisait valoir (concl. p. 20) qu'il était de l'intérêt de l'enfant [P] de bénéficier de l'inclusion scolaire, et plus généralement de l'inclusion dans la société toute entière et indiquait que le rapport rendu en mars 2019, sous l'égide de l'Assemblée générale des Nations-Unies, sur les droits des personnes handicapées dans le cadre de la 40ème session du Conseil des droits de l'homme, consacré au cas de la France, déplorait un nombre très élevé d'enfants et adultes handicapés résidant dans des institutions où ils se retrouvaient isolés du reste de la société, appelait le gouvernement français à lancer un plan d'action pour fermer progressivement ces institutions et les transformer en services implantés dans la communauté et relevait que des parents qui s'opposaient au placement de leur enfant handicapé en institution étaient victimes d'actes d'intimidation ou de menaces et dans certains cas perdaient la garde de leur enfant lorsque celui-ci était placé en institution, ce dont il s'évinçait que la prise de position de madame [C] n'était ni marginale ni contraire à l'intérêt de son enfant ; qu'en se fondant, pour fixer la résidence de [P] au domicile de son père, sur la circonstance qu'il était apparu au [Établissement 1] que madame [C] faisait délibérément obstacle à l'admission de son fils dans une IME, sans rechercher, comme elle y était ainsi invitée, si la prise de position de madame [C] en faveur d'une inclusion de son fils sur le plan scolaire et dans la société en général n'était pas légitime et réalisable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2-6 et 373-2-11 du code civil, ensemble de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir, fixé la résidence de [P] au domicile de monsieur [R], d'avoir décidé que le droit de visite de madame [C] à l'égard de [P] s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative et d'avoir dit qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de [P];

Aux motifs que, sur les droits de visite et d'hébergement, en application de l'article 373-2-9 du code civil," lorsque la résidence de l'enfant est fixée au domicile de l'un des parents, le juge aux affaires familiales statue sur les modalités du droit de visite de l'autre parent ; ce droit de visite lorsque l'intérêt de l'enfant le commande, peut par décision spécialement motivée, être exercée dans un espace de rencontre désigné par le juge. Lorsque l'intérêt de l'enfant le commande ou lorsque la remise directe de l'enfant à l'autre parent présente un danger pour l'un d'eux, le juge en organise les modalités pour qu'elle présente toutes les garanties nécessaires. Il peut prévoir qu'elle s 'effectue dans un espace de rencontre qu'il désigne, ou avec l'assistance d'un tiers de confiance ou du représentant d 'une personne morale qualifiée » ; en l'espèce, dès lors que la résidence de [P] est fixée au domicile de M. [S] [R] et que l'exercice de l'autorité parentale reste conjoint, la cour doit statuer sur les modalités d'exercice du droit de visite de Mme [F] [C] ; compte tenu des difficultés relationnelles entre [P] et Mme [F] [C] qui ont été relevés par tous les experts, la cour décide que le droit de visite de Mme [F] [C] s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'Aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative ;

1°) Alors que le juge qui décide que le droit de visite d'un parent s'exercera dans un espace de rencontre neutre doit fixer la durée de cette mesure et déterminer la périodicité et la durée des rencontres ; qu'en décidant que madame [C] exercera un droit de visite deux fois par mois dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'Aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative, sans préciser la durée exacte de ces rencontres ni celle de la mesure, la cour d'appel a violé les articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du code civil ainsi que l'article 1180-5 du code de procédure civile ;

2°) Alors qu' en tout état de cause, le droit de visite et d'hébergement d'un parent ne peut être limité qu'en raison de motifs graves caractérisés à la date à laquelle le juge statue ; qu'en se bornant à relever, pour limiter le droit de visite et d'hébergement de madame [R] à des rencontres dans un lieu de rencontre médiatisé, que les experts avaient relevé des difficultés relationnelles entre [P] et madame [C], la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser des motifs graves justifiant la limitation du droit de visite de madame [C] et a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-9 du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir fixé la résidence de [P] au domicile de monsieur [R], d'avoir décidé que le droit de visite de madame [C] à l'égard de [P] s'exercera deux fois par mois, dans un espace de rencontre en présence du représentant désigné par l'aide sociale à l'enfance [Localité 1] selon les modalités fixées par le juge des enfants pendant la durée de la mesure d'assistance éducative, d'avoir dit qu'au-delà de ce délai, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir le juge aux affaires familiales pour fixer les nouvelles modalités d'exercice de l'autorité parentale à l'égard de [P] et d'avoir débouté madame [C] de sa demande de mainlevée de l'interdiction de sortie du territoire de l'enfant ;

Aux motifs propres que, sur la demande de mainlevée de l'interdiction de sortie du territoire, la cour constate que les motifs sur lesquels s'est fondé le juge de première instance, restent pertinents au regard de la situation actuelle et du conflit entre les parents ainsi que du fait que Mme [F] [C] déclare être isolée familialement en France, sa famille demeurant à l'étranger, et ne pas trouver facilement d'emploi en France ; en conséquence, le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;

Et aux motifs adoptés que, sur l'interdiction de sortie du territoire français, l'article 373-2-6 du code civil permet au juge aux affaires familiales d'ordonner l'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents ; cette interdiction est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de la République ; en l'espèce, il résulte des éléments et pièces versés aux débats que le conflit entre Madame [C] et Monsieur [R] demeure important, et ce tout particulièrement s'agissant de la sortie du territoire national de l'enfant [P] ; dès lors, et s'il est justifié par Madame [C] d'un projet d'accession à la propriété en France, il apparaît que la sauvegarde des intérêts de l'enfant mineur encore très jeune, dans le contexte de conflit parental qui demeure depuis la séparation du couple, soit au cours de l'année 2010, commande de maintenir l'interdiction prononcée antérieurement ; néanmoins, il y a lieu d'attirer l'attention des parties sur la nécessité de prendre en compte en priorité l'intérêt de l'enfant, qui est celui de maintenir une relation avec ses deux parents, mais également de connaître les membres de sa famille, tant paternelle que maternelle, ce qui doit pouvoir conduire, en l'espèce, dans un exercice conjoint de l'autorité parentale à un dialogue autour de l'organisation du quotidien de [P] afin qu'il lui soit permis de tisser des liens tant avec la famille de Monsieur [R] qu'avec celle de Madame [C] ;

1°) Alors que la mesure d'interdiction de sortie de l'enfant du territoire français sans l'autorisation des deux parents ne peut être ordonnée que lorsqu'il existe un risque grave d'un déplacement illicite de l'enfant hors du territoire national, la seule circonstance que l'un des parents ait toute sa famille à l'étranger ne pouvant suffire à justifier une telle interdiction ; qu'en l'espèce, en se bornant à retenir que le conflit entre madame [C] et monsieur [R] demeurait important, ce tout particulièrement s'agissant de la sortie du territoire national de l'enfant [P] et que madame [C] déclarait être isolée familialement en France, sa famille vivant à l'étranger et ne pas trouver facilement d'emploi en France, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé un risque avéré et sérieux de déplacement illicite de l'enfant, donc d'atteinte à la continuité et à l'effectivité du maintien des liens de l'enfant avec ses deux parents, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 373-2-6 du code civil, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°) Alors que, de même, en l'espèce, en se bornant à retenir que la mère déclarait être isolée familialement en France et ne pas trouver facilement d'emploi en France, sans rechercher, comme elle y avait été invitée (concl. pp. 30 à 32, spéc. p. 31 in limine), si les circonstances que madame [C] – qui s'était établie en France en 2007 – doive faire suivre médicalement son enfant en France et ait mis en route un projet d'accession à la propriété, si modeste soit-il, étaient de nature à caractériser son implantation en France et, par suite, l'absence de risque de départ à l'étranger au détriment des droits du père et de l'enfant, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 373-2-6 du code civil, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-21024
Date de la décision : 14/04/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

AUTORITE PARENTALE - Exercice - Intervention du juge aux affaires familiales - Fixation des modalités d'exercice de l'autorité parentale - Décision - Droit de visite médiatisé - Office du juge - Etendue - Détermination - Référence à la décision du juge des enfants - Exclusion

Selon l'article 1180-5 du code de procédure civile, lorsque le juge aux affaires familiales décide que le droit de visite s'exercera dans un espace de rencontre en application de l'article 373-2-9 du code civil, il fixe la durée de la mesure et détermine la périodicité et la durée des rencontres, sans pouvoir s'en remettre sur ce point à la décision, de nature provisoire, du juge des enfants prise sur le fondement des articles 375-3 et 375-7 du code civil


Références :

Articles 373-2-9, 375-3 et 375-7 du code civil

article 1180-5 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 12 juin 2019

A rapprocher : 1re civ., 28 janvier 2015, pourvoi n° 13-27983, Bull. 2015, I, n° 18 (cassation partielle) ;

1re Civ., 4 mai 2017, pourvoi n° 16-16709, Bull. 2017, I, n° 96 (cassation partielle)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 avr. 2021, pourvoi n°19-21024, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21024
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