LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 avril 2021
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 358 F-D
Pourvoi n° T 19-16.468
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 14 AVRIL 2021
1°/ M. [Q] [Z], domicilié [Adresse 1],
2°/ la société l'Empreinte, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° T 19-16.468 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [J] [E] [U], domicilié [Adresse 3],
2°/ à M. [D] [T], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [Z] et de la société l'Empreinte, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [E] [U], et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2019), par deux actes du 9 mars 2016, MM. [E] [U] et [L], seuls associés de la Sarl l'Empreinte, ont, chacun, cédé les parts qu'ils détenaient dans le capital de celle-ci, respectivement à M. [Z] et à M. [T].
2. Soutenant que ces cessions étaient intervenues en violation des dispositions de l'article L. 223-14 du code de commerce imposant la notification du projet de cession à chacun des associés et à la société, MM. [E] [U] et [L] ont assigné MM. [Z] et [T] et la société l'Empreinte en annulation desdites cessions.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. [Z] et la société l'Empreinte font grief à l'arrêt de déclarer nulles les cessions, alors :
« 1°/ qu'il incombe au cédant d'informer ses associés du projet de cession qu'il envisage au profit d'une personne étrangère à la société ; qu' en rejetant le moyen mis en oeuvre par la société l'Empreinte tiré de ce que c'est à M. [E] [U] et à M. [L], cédant, qu'il revenait de notifier les projets de cession, de sorte que M. [E] [U] était mal venu d'invoquer l'absence de notification, motif pris de ce que l'auteur de la notification n'aurait pas été précisé par la loi et le décret, la cour d'appel a violé l'article L. 223-14 du code de commerce ;
2°/ qu'en se bornant, pour déclarer nulles les cessions de parts sociales du 9 mars 2016, à relever qu'aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés n'était versée au débat, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, régulièrement produit au débat, que les actionnaires avaient été convoqués le 15 février 2016 et qu'ils avaient reçu avec cette convocation, l'ordre du jour de cette assemblée, comportant l'approbation des projets de cessions litigieuses, de sorte que la société et les associés s'étaient vu notifier les projets de cession par la convocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-14 du code de commerce ;
3°/ qu'en ne répondant pas au moyen péremptoire tiré de ce que les projets de cessions avaient été approuvés par l'unanimité des actionnaires, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
4. Ayant relevé qu'aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés n'était versée au débat et retenu qu'en raison du caractère d'ordre public de l'article L. 223–14 du code de commerce, il convenait de respecter scrupuleusement le formalisme légal, aucune confirmation implicite de la cession ne pouvant faire échec à l'annulation d'une cession effectuée en violation de ce formalisme, c'est à bon droit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche invoquée par la deuxième branche ni de répondre aux conclusions invoquées par la troisième branche, que ses constatations rendaient inopérantes, a prononcé l'annulation des cessions litigieuses.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [Z] et la société l'Empreinte aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze avril deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. [Z] et la société l'Empreinte.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nulles les cessions de parts sociales en date du 9 mars 2016 intervenues entre M. [J] [E] [U] et M. [Q] [Z] et entre M [Z] [L] et M. [D] [T] ;
aux motifs que «Selon l'article L.223-14 du code de commerce, les parts sociales des SARL ne peuvent être cédées à des tiers étrangers à la société qu'avec le consentement de la majorité des associés représentant au moins la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte. Lorsque la société comporte plus d'un associé, le projet de cession est notifié à la société et à chacun des associés. En l'espèce, aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés n'est versée au débat, et ni la loi ni le décret ne précise qui doit être l'auteur de cette notification. En raison du caractère d'ordre public de l'article L223–14 du code de commerce, il convient de respecter scrupuleusement le formalisme légal, aucune confirmation implicite de la cession, tel le paiement du prix de cession, ne pouvant faire échec à l'annulation d'une cession effectuée en violation du formalisme requis par ce texte. C'est en vain que la société intimée se prévaut de l'adage « Nemo auditur propriam suam turpitudinem allegans» selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude, celui-ci n'étant applicable que pour bloquer le jeu des restitutions consécutives à l'annulation d'un contrat dont la cause est immorale, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. En conséquence, les cessions de parts de SARL à des tiers étrangers à la société, sans qu'aucun projet de cession n'ait été notifié à la société et à chacun des associés, doivent être déclaré nulles et le jugement sera donc infirmé » ;
alors 1°/ qu'il incombe au cédant d'informer ses associés du projet de cession qu'il envisage au profit d'une personne étrangère à la société ; qu'en rejetant le moyen mis en oeuvre par la société L'Empreinte tiré de ce que c'est à M. [E] [U] et à M [L], cédant, qu'il revenait de notifier les projets de cession, de sorte que M. [E] [U] était mal venu d'invoquer l'absence de notification, motif pris de ce que l'auteur de la notification n'aurait pas été précisé par la loi et le décret, la cour d'appel a violé l'article L. 223-14 du code de commerce ;
alors 2°/ qu'en se bornant, pour déclarer nulles les cessions de parts sociales du 9 mars 2016, à relever qu'aucune notification du projet de cession à la société et à chacun des associés n'était versée au débat, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas du procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, régulièrement produit au débat, que les actionnaires avaient été convoqués le 15 février 2016 et qu'ils avaient reçu avec cette convocation, l'ordre du jour de cette assemblée, comportant l'approbation des projets de cessions litigieuses, de sorte que la société et les associés s'étaient vu notifier les projets de cession par la convocation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 223-14 du code de commerce ;
alors 3°/ qu'en ne répondant pas au moyen péremptoire tiré de ce que les projets de cessions avaient été approuvés par l'unanimité des actionnaires, lors de l'assemblée générale extraordinaire du 9 mars 2016, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.