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01/04/2021 | FRANCE | N°19-23695

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 01 avril 2021, 19-23695


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er avril 2021

Cassation sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 328 FS-P

Pourvoi n° Y 19-23.695

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER AVRIL 2021

1°/ la société Durance Granulats, société par act

ions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ M. A... K..., pris en qualité de directeur de la société Durance Granulats

3°/ M. Y... G..., pris ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 1er avril 2021

Cassation sans renvoi

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 328 FS-P

Pourvoi n° Y 19-23.695

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER AVRIL 2021

1°/ la société Durance Granulats, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ M. A... K..., pris en qualité de directeur de la société Durance Granulats

3°/ M. Y... G..., pris en qualité de président de la société Durance Granulats,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° Y 19-23.695 contre l'ordonnance rendue le 10 octobre 2019 par le premier président de la cour d'appel de Nîmes, dans le litige les opposant :

1°/ à la commune de Cheval Blanc représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité en [...],

2°/ à M. W... E..., domicilié [...] , pris en qualité de garde champêtre de la commune de [...] ,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Farrenq-Nési, conseiller, les observations orales de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Durance Granulats et de MM. K... et G..., de la SCP Boulloche, avocat de la commune de Cheval Blanc et de M. E..., et l'avis de M. Brun, avocat général, auquel Me U... et la SCP Boulloche, invités à le faire, ont répliqués et après débats en l'audience publique du 2 mars 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, MM. Jacques, Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

1. Selon l'ordonnance attaquée (Nîmes, 10 octobre 2019), rendue par le premier président d'une cour d'appel, le garde-champêtre de la commune de Cheval Blanc s'est rendu sur le site de la [...] pour procéder à des investigations sur un dépôt sauvage de déchets potentiellement polluants.

2. S'étant vu refuser l'accès au site, il a, ainsi que le maire de la commune, saisi le juge des libertés et de la détention en application de l'article L. 172-1 du code de l'environnement, afin d'obtenir l'autorisation d'y pénétrer, accompagné d'un employé municipal susceptible d'utiliser, si nécessaire, un engin mécanique permettant de procéder à des investigations sur les dépôts et le sol.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société Durance granulats fait grief à l'ordonnance d'accueillir la demande, alors « que le préfet est la seule autorité administrative titulaire de pouvoirs de police, y compris de police des déchets, sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement ; qu'il en résulte que, sur le site d'une installation classée, seuls les fonctionnaires et agents chargés des contrôles des installations classées, sous l'autorité du préfet, et non les agents municipaux sous l'autorité du maire, peuvent mettre en oeuvre les pouvoirs nécessaires au contrôle du respect des dispositions légales en matière de déchets ; qu'en retenant au contraire que le maire de la commune de Cheval Blanc avait pu valablement saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de se voir autorisé, ainsi que le garde champêtre, agent municipal, à effectuer une visite sur le site de l'installation classée exploitée par la société Durance granulats, le premier président a violé les articles L. 171-2, dans sa rédaction applicable à l'espèce, antérieure à l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019, L. 541-3, dans sa rédaction applicable à l'espèce, antérieure à la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019, et R. 541-12-16 du code de l'environnement. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 171-2, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019, L. 541-3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019, et R. 541-12-16 du code de l'environnement :

4. Selon le premier de ces textes, lorsque l'accès à des espaces clos et aux locaux accueillant des installations soumises aux dispositions du code de l'environnement est refusé aux agents, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter.

5. Il résulte du deuxième que, lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions de la loi en matière de prévention et gestion des déchets et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente peut mettre le producteur ou détenteur des déchets en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation.

6. Aux termes du troisième, sans préjudice de dispositions particulières, lorsque les dispositions du titre relatif aux déchets s'appliquent sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement, l'autorité titulaire du pouvoir de police mentionnée à l'article L. 541-3 est l'autorité chargée du contrôle de cette installation classée.

7. Il incombe au juge des libertés et de la détention, saisi en application de l'article L. 171-1 du code de l'environnement, de vérifier la compétence de l'autorité à l'origine de la requête.

8. Avant l'entrée en vigueur du décret du 21 avril 2013 créant l'article R. 541-12-16 du code de l'environnement, le Conseil d'Etat a jugé que le maire disposait, en vertu de l'article L. 541-3 du même code, d'une compétence de principe pour prendre à l'égard du producteur ou du détenteur de déchets abandonnés, déposés ou gérés dans des conditions présentant des dangers pour l'homme ou pour l'environnement, les mesures nécessaires pour en assurer l'élimination (CE, 18 novembre 1998, n° 161612), y compris lorsque ces déchets se trouvaient sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement, ou étaient issus de cette installation, la compétence du maire s'exerçant, dans ce dernier cas, concurremment avec celle reconnue au préfet, au titre de la police des installations classées, en application de l'article L. 514-1 du même code (CE, 11 janvier 2007, n° 287674).

9. L'article R. 541-12-16, introduit en 2013, vise de manière générale les dispositions applicables aux déchets et désigne désormais le préfet comme autorité de police compétente au titre de l'article L. 541-3 dès lors que les déchets se trouvent sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement, sans distinguer selon leur provenance ou limiter cette compétence aux déchets liés à l'activité de l'installation classée.

10. Pour retenir la compétence du maire, l'ordonnance énonce que, si l'article R. 541-12-16 dispose que l'autorité titulaire du pouvoir de police mentionnée à l'article L. 541-3 est l'autorité administrative chargée du contrôle de l'installation classée, en l'espèce le préfet, ce même texte précise qu'il s'applique « sans préjudice de dispositions particulières », et notamment des pouvoirs de police du maire quant au contrôle des dépôts sauvages de déchets.

11. En statuant ainsi, alors que ces dépôts sont régis par le texte général de l'article L. 541-3 et que l'article R. 541-12-16 n'opère aucune distinction entre les déchets qui, lorsqu'ils se trouvent sur le site d'une installation classée, relèvent, pour l'application de l'article L. 541-3, du pouvoir de l'autorité administrative chargée du contrôle de cette installation, le premier président de la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne l'annulation de toutes les dispositions de l'ordonnance.

13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

14. La cassation prononcée n'implique pas un renvoi de l'affaire. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 10 octobre 2019, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Nîmes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Rejette la requête présentée par M. E... et le maire de la commune de Cheval Blanc ;

Dit que les dépens d'appel resteront à la charge de la commune de Cheval Blanc et dit qu'il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel ;

Condamne la commune de Cheval Blanc aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour la société Durance Granulats et MM. K... et G....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance confirmative attaquée d'avoir autorisé monsieur W... E..., garde champêtre chef, agent de police judiciaire adjoint, en résidence à la police municipale de Cheval-Blanc, dûment agréé et assermenté par monsieur le procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Avignon, assisté de monsieur D... F..., officier de police judiciaire, maire de Cheval-Blanc, à pénétrer sur le site de la carrière de la [...], accompagné de tel employé communal susceptible d'utiliser si nécessaire un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol, exploitée suivant arrêté préfectoral n°99 du 10 juin 1999 à la société Gravisud puis en lieu et place à la société Provence Agregats pour une durée de 15 ans par arrêté préfectoral n°86 du 20 juillet 2006 complété par l'arrêté préfectoral du 31 août 2017, [...] de la parcelle cadastrée [...] à 37, [...], 47 à 62, [...], [...] à [...], [...] à [...], [...], [...] à 334, [...], [...], [...], [...], [...], 388 à 395, section [...] et [...], Cheval-Blanc (France), [...] , de 9 heures à 18 heures ;

Aux motifs que « les textes du code de l'environnement applicables à l'espèce sont les suivants : - article L. 541-3 (version au 01.01.2019, modifié par loi n°2017-1775 du 28 décembre 2017 - art. 73 (V)) : "I.- Lorsque des déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux prescriptions du présent chapitre et des règlements pris pour leur application, l'autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu'il encourt et, après l'avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai d'un mois, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut le mettre en demeure d'effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé" ; - article L. 541-4 (modifié par ordonnance n°2010-1579 du 17 décembre 2010 - art. 3) : "Les dispositions du présent chapitre s'appliquent sans préjudice des dispositions spéciales concernant notamment les installations classées pour la protection de l'environnement, les déchets radioactifs, les eaux usées dans la mesure où elles sont acheminées sans rupture de charge de l'installation génératrice vers l'installation de traitement ou le milieu récepteur, les cadavres d'animaux, les épaves d'aéronefs, les épaves maritimes, les immersions ainsi que les rejets provenant des navires. Elles ne font pas échec à la responsabilité que toute personne encourt en raison des dommages causés à autrui, notamment du fait de la gestion des déchets qu'elle a détenus ou transportés ou provenant de produits qu'elle a fabriqués" ; - article R. 541-12-16 (créé par décret n°2013-301 du 10 avril 2013 - art. 2) : "Sans préjudice de dispositions particulières, lorsque les dispositions du présent titre s'appliquent sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement, l'autorité titulaire du pouvoir de police mentionnée à l'article L. 541-3 est l'autorité administrative chargée du contrôle de cette installation" ; - article L. 171-1 du code de l'environnement (créé par ordonnance n°2012-34 du 11 janvier 2012 - art. 3) : "I.- Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles prévus à l'article L. 170-1 ont accès : 1° Aux espaces clos et aux locaux accueillant des installations, des ouvrages, des travaux, des aménagements, des opérations, des objets, des dispositifs et des activités soumis aux dispositions du présent code, à l'exclusion des domiciles ou de la partie des locaux à usage d'habitation. Ils peuvent pénétrer dans ces lieux entre 8 heures et 20 heures et, en dehors de ces heures, lorsqu'ils sont ouverts au public ou lorsque sont en cours des opérations de production, de fabrication, de transformation, d'utilisation, de conditionnement, de stockage, de dépôt, de transport ou de commercialisation mentionnées par le présent code ; / 2° Aux autres lieux, à tout moment, où s'exercent ou sont susceptibles de s'exercer des activités soumises aux dispositions du présent code ; / 3° Aux véhicules, navires, bateaux, embarcations et aéronefs utilisés à titre professionnel pour la détention, le transport, la conservation ou la commercialisation des animaux, des végétaux ou de tout autre produit susceptible de constituer un manquement aux prescriptions du présent code. / II.- Les fonctionnaires et agents chargés des contrôles ne peuvent avoir accès aux domiciles et à la partie des locaux à usage d'habitation qu'en présence de l'occupant et avec son assentiment" ; article L. 171-2 (modifié par loi n°2016-1087 du 8 août 2016 - art. 164) : "I.- Lorsque l'accès aux lieux mentionnés aux 1° et 3° du I de l'article L. 171-1 est refusé aux agents, que la personne ayant qualité pour autoriser l'accès ne peut être atteinte ou lorsque les conditions d'accès énoncées au II du même article ne sont pas remplies, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter. / L'ordonnance comporte l'adresse des lieux à visiter, le nom et la qualité du ou des agents habilités à procéder aux opérations de visite ainsi que les heures auxquelles ils sont autorisés à se présenter. / L'ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute. / II.- L'ordonnance est notifiée sur place au moment de la visite à l'occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite. En l'absence de l'occupant des lieux ou de son représentant, l'ordonnance est notifiée, après la visite, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l'avis. A défaut de réception, il est procédé à la signification de l'ordonnance par acte d'huissier de justice. / L'acte de notification comporte mention des voies et délais de recours contre l'ordonnance ayant autorisé la visite et contre le déroulement des opérations de visite. Il mentionne également que le juge ayant autorisé la visite peut être saisi d'une demande de suspension ou d'arrêt de cette visite. / III.- La visite s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention qui l'a autorisée. Le juge des libertés et de la détention peut, s'il l'estime utile, se rendre dans les locaux pendant l'intervention. A tout moment, il peut décider la suspension ou l'arrêt de la visite. La saisine du juge des libertés et de la détention aux fins de suspension ou d'arrêt des opérations de visite n'a pas d'effet suspensif. / IV.- La visite est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, qui peut se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant des lieux, les agents chargés de la visite ne peuvent procéder à celle-ci qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité. / Un procèsverbal relatant les modalités et le déroulement de l'opération et consignant les constatations effectuées est dressé sur-le-champ par les agents qui ont procédé à la visite. Le procès-verbal est signé par ces agents et par l'occupant des lieux ou, le cas échéant, son représentant et les témoins. En cas de refus de signer, mention en est faite au procès- verbal. / L'original du procès-verbal est, dès qu'il a été établi, adressé au juge qui a autorisé la visite. Une copie de ce même document est remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'occupant des lieux ou à son représentant. / Le procès-verbal mentionne le délai et les voies de recours. / V.- L'ordonnance autorisant la visite peut faire l'objet d'un appel devant le premier président de la cour d'appel suivant les règles prévues par le code de procédure civile. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat. / Cet appel est formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la notification de l'ordonnance. Cet appel n'est pas suspensif. / Le greffe du tribunal de grande instance transmet sans délai le dossier de l'affaire au greffe de la cour d'appel où les parties peuvent le consulter. / L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation, selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai du pourvoi en cassation est de quinze jours. / VI.- Le premier président de la cour d'appel connaît des recours contre le déroulement des opérations de visite autorisées par le juge des libertés et de la détention suivant les règles prévues par le code de procédure civile. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat. / Le recours est formé par déclaration remise ou adressée par pli recommandé au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter de la remise ou de la réception du procès-verbal de visite. Ce recours n'est pas suspensif. /
L'ordonnance du premier président de la cour d'appel est susceptible d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure civile. Le délai du pourvoi en cassation est de quinze jours. / VII.- Le présent article est reproduit dans l'acte de notification de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la visite" ; en l'espèce, le maire de la commune de Cheval Blanc, alerté par une suspicion de dépôt de déchets potentiellement polluants sur le site de la carrière de la Grande Bastide, qui relève des installations classées, a tenté de fait procéder le 10 avril 2019 à des constations par le garde champêtre de la commune M. W... E..., mais ces opérations n'ont pas pu être menées à leur terme en l'état de l'opposition des représentants de la société Durance Granulats à cette visite ; il a été dressé procès-verbal de ces opérations (pièce [...] ) ; sur la base de ce procès-verbal, et des photographies qui ont pu être prises sur place depuis l'extérieur de l'enceinte de la carrière, le maire de la commune de Cheval Blanc et le garde champêtre W... E... ont saisi le juge des libertés et de la détention d'Avignon d'une requête en date du 12 avril 2019, sur le fondement des articles L. 541-3, L. 171-1 et 2 du code de l'environnement, afin d'être autorisés à pénétrer sur le site de la carrière de la Grande Bastide accompagnés de tel employé communal, susceptible d'utiliser si nécessaire un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol du site d'exploitation de la carrière ; une ordonnance a été rendue par le juge des libertés et de la détention d'Avignon le 15 avril 2019 et a accordé les autorisations demandées ; la visite a eu lieu le 18 avril 2019 et a donné lieu à un procès-verbal de constatations (pièce 5 Durance Granulats) ; 1) la société Durance Granulats a régulièrement interjeté appel de l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention et soutient en premier lieu l'incompétence du maire, en qualité d'autorité de contrôle, et par voie de conséquence l'impossibilité pour le juge des libertés de lui accorder l'autorisation de visite qu'il sollicitait ; il résulte des dispositions des articles L. 171-1 et L. 171-2 du code de l'environnement que lorsque l'accès aux espaces clos et aux locaux accueillant des installations, des ouvrages, des travaux, des aménagements, des opérations, des objets, des dispositifs et des activités soumis aux dispositions dudit code, à l'exclusion des domiciles ou de la partie des locaux à usage d'habitation, est refusé aux agents, ce qui a été le cas en l'espèce, les visites peuvent être autorisées par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux ou les locaux à visiter, de sorte que le principe du recours à une ordonnance d'autorisation du juge des libertés et de la détention était nécessaire préalablement à la visite ; en application des dispositions de l'article L. 541-3 du code de l'environnement, il n'est pas contesté que le maire dispose d'un pouvoir de police lui permettant de procéder au contrôle des dépôts sauvages de déchets ; si l'article R. 541-12-16 dispose que, s'agissant d'une installation classée pour la protection de l'environnement, ce qui est le cas en l'espèce pour la carrière de la Grande Bastide, l'autorité titulaire du pouvoir de police mentionnée à l'article L. 541-3 est l'autorité administrative chargée du contrôle de cette installation, en l'espèce le préfet, ce même article précise qu'il s'applique "sans préjudice de dispositions particulières", et notamment des pouvoirs de police du maire dans le cadre du contrôle des dépôts sauvages de déchets ; en conséquence, le maire de la commune de [...] , qui avait pu suspecter, notamment au regard des clichés photographiques pris depuis l'extérieur du site le 10 avril 2019, la présence de divers déchets, a pu valablement saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de se voir autoriser à effectuer une visite sur site ; 2) la société Durance Granulats conteste en second lieu l'étendue de l'autorisation accordée par le juge des libertés et de la détention et elle soutient que ce magistrat n'avait pas compétence pour autoriser l'utilisation, si nécessaire, d'un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol ; l'autorisation accordée par le juge avait pour objet de permettre la réalisation de contrôles, sur un site dont les clichés photographiques pris de l'extérieur lors de la première tentative de visite le 1er avril 2019 permettaient de suspecter la présence de déchets enterrés ou semi enterrés ; il sera par ailleurs relevé que les dispositions de l'article L. 171-3-1 7 prévoient notamment la possibilité de faire procéder, lors des opérations de contrôle, à des prélèvements d'échantillons, ce qui suppose que le contrôle soit assorti des moyens techniques nécessaires pour en assurer l'effectivité ; le juge des libertés et de la détention n'a en conséquence pas excédé les pouvoirs qu'il tenait des dispositions de l'article L. 171-2 du code de l'environnement en autorisant dans son ordonnance le garde champêtre de la commune de Cheval Blanc à pénétrer sur le site, accompagné de tel employé municipal susceptible d'utiliser si nécessaire un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol » (ordonnance du premier président, pp. 6 à 11) ;

Et aux motifs éventuellement adoptés qu'« il est ici rappelé que le Maire peut intervenir en matière d'ICPE, sur la base de son pouvoir de police en matière de déchets (ART L 541-3 du code de l'environnement), lorsqu'ils font l'objet de dépôts sauvages » (première page de la requête au juge des libertés et de la détention, visée par l'ordonnance de première instance) ;

1°) Alors que le préfet est la seule autorité administrative titulaire de pouvoirs de police, y compris de police des déchets, sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement ; qu'il en résulte que, sur le site d'une installation classée, seuls les fonctionnaires et agents chargés des contrôles des installations classées, sous l'autorité du préfet, et non les agents municipaux sous l'autorité du maire, peuvent mettre en oeuvre les pouvoirs nécessaires au contrôle du respect des dispositions légales en matière de déchets ; qu'en retenant au contraire que le maire de la commune de Cheval-Blanc avait pu valablement saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de se voir autorisé, ainsi que le garde champêtre, agent municipal, à effectuer une visite sur le site de l'installation classée exploitée par la société Durance Granulats, le premier président a violé les articles L. 171-2, dans sa rédaction applicable à l'espèce, antérieure à l'ordonnance n°2019-964 du 18 septembre 2019, L. 541-3, dans sa rédaction applicable à l'espèce, antérieure à la loi n°2019-773 du 24 juillet 2019, et R. 541-12-16 du code de l'environnement ;

2°) Alors que le juge des libertés et de la détention, lorsqu'il statue sur le fondement de l'article L. 171-2 du code de l'environnement, n'a le pouvoir que d'autoriser la visite du site d'une installation classée pour la protection de l'environnement, à l'exclusion de toute autre mesure, même utile à des contrôles ; qu'en retenant néanmoins que le juge des libertés et de la détention pouvait valablement autoriser l'utilisation d'un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol sur le site de l'installation classée exploitée par la société Durance Granulats, motif impropre pris de ce que cette mesure d'investigation avait pour objet de permettre la réalisation de contrôles, le premier président a violé l'article L. 171-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à l'espèce, antérieure à l'ordonnance n°2019-964 du 18 septembre 2019 ;

3°) Alors que la loi ne disposant que pour l'avenir, elle n'a point d'effet rétroactif ; qu'en se fondant sur les dispositions de l'article L. 171-3-1 du code de l'environnement, introduites dans ce code par la loi du 24 juillet 2019 et permettant le prélèvement d'échantillons lors des opérations de contrôle, pour en déduire que le juge des libertés et de la détention pouvait valablement autoriser, aux fins d'effectivité du contrôle litigieux, l'utilisation d'un engin mécanique permettant d'investiguer les dépôts et le sol sur le site de l'installation classée exploitée par la société Durance Granulats, quand un tel texte n'était pas applicable au jour où le juge des libertés et de la détention avait statué sur la requête, le premier président a fait une application rétroactive du texte susmentionné et violé l'article 2 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté les demandes de la société Durance Granulats et notamment celle tendant à voir juger nulles les opérations réalisées sur le fondement de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention près de tribunal de grande instance d'Avignon du 15 avril 2019 ;

Aux motifs que « les dispositions de l'article L. 171-2 VI du code de l'environnement confèrent au premier président compétence pour connaître des recours contre le déroulement des opérations de visite autorisées par le juge des libertés et de la détention ; en l'espèce, ces opérations se sont déroulées conformément à l'autorisation donnée par le juge des libertés et de la détention et dans les limites de celles-ci, de sorte qu'il n'y a pas lieu à en prononcer l'annulation » (ordonnance du premier président, pp. 6 à 12) ;

Alors qu'en l'état du lien de dépendance nécessaire entre le chef de dispositif de l'ordonnance ayant rejeté la demande de la société Durance Granulats tendant à voir juger nulles les opérations réalisées sur le fondement de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rendue le 15 avril 2019 et le chef de dispositif ayant autorisé une visite sur le site de l'installation classée par la société Durance Granulats, la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif attaqué par le présent moyen, en application de l'article 624 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-23695
Date de la décision : 01/04/2021
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Déchets - Prévention et gestion - Autorité compétente - Détermination - Condition

En application de l'article R. 541-12-16 du code de l'environnement, le préfet est l'autorité compétente pour exercer la police des déchets définie à l'article L. 541-3 du même code, dès lors que des déchets, y compris sauvages, se trouvent sur le site d'une installation classée pour la protection de l'environnement


Références :

articles L. 541-3 et R. 541-12-16 du code de l'environnement.

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 10 octobre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 01 avr. 2021, pourvoi n°19-23695, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.23695
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