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25/03/2021 | FRANCE | N°19-19498

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 25 mars 2021, 19-19498


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2021

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 298 F-D

Pourvoi n° M 19-19.498

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2021

M. V... G..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 19

-19.498 contre l'arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. S... G...,...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 mars 2021

Cassation partielle

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 298 F-D

Pourvoi n° M 19-19.498

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 25 MARS 2021

M. V... G..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° M 19-19.498 contre l'arrêt rendu le 23 mai 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. S... G...,

2°/ à Mme C... G...,

domiciliés tous deux [...],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Béghin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. V... G..., de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. et Mme G..., après débats en l'audience publique du 16 février 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Béghin, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 mai 2019), à la suite d'un acte de donation-partage du 3 décembre 1990 ayant divisé un fonds, M. S... G... est devenu propriétaire des parcelles cadastrées [...] et [...], et M. V... G... des parcelles cadastrées [...] , [...] et [...], au profit desquelles l'acte de division a établi une servitude de passage sur la parcelle [...] . M. S... G... est ultérieurement devenu propriétaire des parcelles voisines cadastrées [...] , [...], [...], [...], [...].

2. M. S... G... et Mme J..., son épouse, reprochant à M. V... G... d'user d'un passage sur les parcelles [...] , [...] et [...], excédant les limites de la servitude conventionnelle, ont agi en fixation de l'assiette du passage, rendue nécessaire par l'insuffisance de l'accès fourni par la parcelle [...] , sur les parcelles [...] et [...] et en paiement de dommages-intérêts.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. V... G... fait grief à l'arrêt de dire qu'il n'avait pas prescrit l'assiette du chemin traversant les fonds [...] , [...] , [...] et [...] , de dire que le désenclavement des parcelles [...] , [...] et [...] se ferait suivant l'offre des époux G..., sur la longueur Ouest des parcelles cadastrées [...] et [...] , tel que figurant sur le plan n° 13/10549 au 1/200ème du géomètre-expert, M. I..., sur une emprise de 170 m², de le condamner à verser aux époux G... la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 682 du code civil, de lui faire défense d'utiliser le passage sur les parcelles [...] , [...], [...], [...] et [...], sous astreinte, d'ordonner la restitution des clefs du portail ouvrant sur ce chemin et de rejeter sa demande tendant à voir interdire à M. S... G... de le filmer lorsqu'il passe sur le chemin situé sur les parcelles [...] , [...] , [...] , [...] et [...] , alors « qu'est enclavé le fonds qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante ; qu'en jugeant, pour rejeter les demandes de M. V... G... fondées sur la prescription de l'assiette de la servitude légale pour cause d'enclave, « qu'avant l'acte du 3 décembre 1990, il ne [pouvait] prétendre à une situation d'enclave », quand il s'évinçait pourtant de ses propres constatations que le passage qui lui avait été conventionnellement consenti sur la parcelle [...] appartenant à M. S... G..., était « insuffisant à relier la voie publique au fonds de V... G... » puisque le chemin existant traversait notamment des parcelles [...] et [...] , qui appartenaient à des tiers et n'étaient devenues la propriété de M. S... G... que postérieurement à l'acte de donation partage du 3 décembre 1990, la cour d'appel a violé les articles 682 et 685 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 685 du code civil :

4. Selon ce texte, l'assiette et le mode de servitude de passage pour cause d'enclave sont déterminés par trente ans d'usage continu.

5. Pour dire que M. V... G... n'a pas prescrit l'assiette de la servitude de passage qu'il revendique sur les parcelles [...] , [...] , [...] , [...] et [...] , l'arrêt retient qu'il ne peut se prévaloir de son usage par ses parents antérieurement à l'acte du 3 décembre 1990.

6. En statuant ainsi, alors qu'elle avait relevé que le passage consenti sur la parcelle [...] ne permettait pas d'assurer le désenclavement du fonds de M. V... G..., le chemin existant traversant les parcelles [...] et [...] , au nord de la parcelle [...] , et [...] et [...] , au sud de cette même parcelle, la cour d'appel, qui n'a pas établi que le fonds divisé n'était pas déjà enclavé avant l'acte du 3 décembre 1990, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que M. V... G... n'avait pas prescrit l'assiette du chemin traversant les fonds [...] , [...] , [...] et [...] , dit que le désenclavement des parcelles [...] , [...] et [...] se ferait suivant l'offre des époux G..., sur la longueur Ouest des parcelles cadastrées [...] et [...] , tel que figurant sur le plan n° 13/10549 au 1/200ème du géomètre-expert, M. I..., sur une emprise de 170 m², condamné M. V... G... à verser aux époux G... la somme de 2 000 euros en vertu de l'article 682 du code civil, fait défense à M. V... G... d'utiliser le passage sur les parcelles [...] , [...], [...], [...] et [...], sous astreinte, ordonné la restitution des clefs du portail ouvrant sur ce chemin et rejeté la demande de M. V... G... tendant à voir interdire à M. S... G... de le filmer lorsqu'il passe sur le chemin situé sur les parcelles [...] , [...] , [...] , [...] et [...] , l'arrêt rendu le 23 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. et Mme S... G... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme S... G... et les condamne à payer à M. V... G... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt et un.

Le conseiller referendaire rapporteur le president

Le greffier de chambre

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. V... G....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que M. V... G... n'avait pas prescrit l'assiette du chemin traversant les fonds [...] , [...] , [...] et [...] , d'AVOIR dit que le désenclavement des parcelles [...] , [...] et [...] se ferait suivant l'offre des époux S... G..., sur la longueur Ouest des parcelles cadastrées section [...] et [...] , tel que figurant sur le plan n° 13/10549 au 1/200ème du géomètre-expert, M. I..., sur une emprise de 170 m², d'AVOIR condamné M. V... G... à verser aux époux S... G... la somme de 2 000 € en vertu de l'article 682 du code civil, d'AVOIR fait défense à M. V... G... d'utiliser le passage sur les parcelles [...] , [...], [...], [...] et [...], sous astreinte de 300 € par infraction constatée, d'AVOIR ordonné la restitution des clefs du portail ouvrant sur ce chemin et d'AVOIR rejeté la demande de M. V... G... tendant à voir interdire à son frère, M. S... G..., à ne plus le filmer lorsqu'il passe sur le chemin assis sur les parcelles [...] , [...] , [...] , [...] et [...] ;

AUX MOTIFS QUE les servitudes de passage, discontinues, ne peuvent s'établir que par titre, eu égard aux dispositions de l'article 691 du code civil ; que si l'enclave (constituant un titre) est établie, la prescription trentenaire permet de déterminer l'assiette et le mode de la servitude de passage (article 685 du code civil) ; que par acte du 3 décembre 1990, et afin qu'il puisse accéder a la parcelle échue dans son lot, une servitude de passage a été consentie par S... G... a V... G..., le fonds servant étant la parcelle [...] pour la 65ca, et les fonds dominants les parcelles [...] pour 38a 30ca, [...] pour 4a 20ca et [...] pour 62a 30ca ; qu'il s'avère que le passage consenti sur la parcelle [...] est insuffisant à relier la voie publique au fonds de V... G..., le chemin existant traversant les parcelles [...] , [...] , au nord de la parcelle [...] , et [...] et [...] au sud de la parcelle [...] ; qu'à l'époque, en 1990, la parcelle [...] était la propriété d'L... A... et B... O... ; ils Pont vendue le 4 novembre 2009 A S... G... et son épouse C... J... en mentionnant expressément à l'acte que V... G... revendiquait un droit de passage alors qu'ils n'avaient connaissance d'aucune servitude de passage à son profit ; que la parcelle [...] était, depuis le 9 mars 2006 la propriété de la SC1 Sophil qui l'avait acquise de H... A... et son épouse R... N... ; qu'elle a été vendue (en même temps que la [...]) a S... G... et son épouse C... J... par acte du 5 juillet 2013 ; que si V... G... prétend avoir prescrit l'assiette de la servitude de passage qu'il revendique par les fonds [...], [...], [...], [...] et [...], aujourd'hui tous propriété de son frère, force est de constater qu'avant l'acte du 3 décembre 1990, il ne peut prétendre à une situation d'enclave, et que de cette date à l'assignation du 11 juin 2015, il ne s'est pas écoulé trente ans qui lui permettrait de prétendre à une prescription de l'assiette du passage qu'il revendique dans les conditions prévues par l'article 685 du code civil ; que c'est en vain qu'il se prévaut de la prescription antérieure par ses parents alors qu'ils étaient à la fois propriétaires du fonds dominant et d'une partie des fonds servants revendiqués ; qu'à supposer même que V... G... soit passé par le chemin qu'il revendique, depuis le 3 décembre 1990 ou il est devenu nu-propriétaire des parcelles [...] , [...] et [...], il résulte de l'article 685-1 du code civil que la cessation de l'état d'enclave pour laquelle la servitude de passage avait été consentie lui ferait perdre ses droits sur ce passage puisqu'il résulte du titre constitutif lui-même que ladite servitude lui était consentie « afin qu'il puisse accéder a la parcelle ethue dans son lot » ; qu'i1 s'avère que depuis 2009, un autre passage est emprunté par V... G... sur la partie ouest des parcelles [...] et [...], lui-même ayant indiqué à l'huissier qu'il avait missionne le 1er avril 2014, l'avoir aménagé pour limiter les passages sur le chemin d'origine et limiter les dérangements causés aux occupants de la maison située sur la parcelle [...] ; que dès lors que S... G... et C... J... sont fondes à refuser à V... G... le passage sur les fonds [...], [...], [...] et [...], la servitude de passage consentie sur la seule parcelle [...] est totalement inefficace a désenclaver le fonds de V... G..., et s'il a utilisé ce chemin depuis l'année 1990, ce n'est qu'en vertu d'une tolérance qui peut être supprimée ; que S... G... et C... J..., conscients de leur devoir de désenclaver les parcelles [...] , [...] et 61 de V... G..., doivent être accueillis en leur proposition de lui accorder un passage par le chemin le plus court et le moins dommageable pour eux, notamment car rectiligne et plus éloigné de leur habitation, sur la longueur ouest des parcelles [...] et [...], tel qu'il est figuré sur le plan n°13/10549 au 1/200eme du géomètre expert I... versé aux débats, pour une emprise de 170 m2 ;

1°) ALORS QU'est enclavé le fonds qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante ; qu'en jugeant, pour rejeter les demandes de M. V... G... fondées sur la prescription de l'assiette de la servitude légale pour cause d'enclave, « qu'avant l'acte du 3 décembre 1990, il ne [pouvait] prétendre à une situation d'enclave », quand il s'évinçait pourtant de ses propres constatations que le passage qui lui avait été conventionnellement consenti sur la parcelle [...] appartenant à M. S... G..., était « insuffisant à relier la voie publique au fonds de V... G... » puisque le chemin existant traversait notamment des parcelles [...] et [...] , qui appartenaient à des tiers et n'étaient devenues la propriété de M. S... G... que postérieurement à l'acte de donation partage du 3 décembre 1990, la cour d'appel a violé les articles 682 et 685 du code civil ;

2°) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en jugeant, pour rejeter les demandes de l'exposant, qu'il ne pouvait se prévaloir de la possession exercée antérieurement par ses parents sur le chemin servant au désenclavement de son fonds dès lors qu'ils étaient propriétaires « du fonds dominant et d'une partie du fonds servant (arrêt page 7, al. 1er) tout en relevant que les parcelles [...] et [...] qui servaient d'assiette à ce chemin, avaient été cédées à M. S... G... par des tiers (M. L... A..., Mme par Mme B... O... et la SCI Sophil) en 2009 et en 2013 (arrêt page 6, al. 7 et 8), la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QU'en toute hypothèse, si l'enclave résulte de la division d'un fonds, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l'objet de ces actes ; qu'en fixant la servitude de passage destinée à désenclaver la parcelle [...] appartenant à M. V... G... sur les parcelles [...] et [...] quand il résultait des constatations de l'arrêt que l'état d'enclave actuel de la parcelle [...] était né de la division de la propriété de Mme D..., aux termes de la donation-partage du 3 décembre 1990, la continuité de sa desserte n'étant plus assurée comme elle l'était auparavant en raison de ce que ses propriétaires n'étaient plus, par ailleurs, propriétaires des parcelles permettant de la relier à la voie publique, de sorte que le passage permettant le désenclavement devait s'exercer sur les parcelles [...], [...] et [...] issues du partage, la cour d'appel a violé l'article 684 du code civil.
Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-19498
Date de la décision : 25/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 25 mar. 2021, pourvoi n°19-19498


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.19498
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