LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
MF
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 17 mars 2021
Cassation partielle
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 349 F-D
Pourvoi n° Y 19-22.039
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 17 MARS 2021
M. Q... J..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-22.039 contre l'arrêt rendu le 19 juin 2019 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à la société [...] , dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. J..., de Me Balat, avocat de la société [...] , après débats en l'audience publique du 27 janvier 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Lanoue, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 19 juin 2019), M. J... a été engagé à compter du 3 décembre 2007, en qualité de dessinateur, par le cabinet d'architecture [...] , aux droits duquel est venue la société [...] (la société). Par avenant du 21 juin 2014, le salarié est devenu chargé d'études confirmé, statut agent de maîtrise.
2. Il a été licencié par lettre du 18 juillet 2014.
3. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 11 mars 2015 de diverses demandes.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, troisième, cinquième et sixième moyens, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le quatrième moyen
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; que pour juger le licenciement de M. J... fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu qu'il avait critiqué l'organisation de l'agence d'architecture dans un compterendu du 29 juin 2014, adressé au seul employeur, de la réunion tripartite tenue avec les deux co-gérants, sollicitant la tenue de réunions avec le personnel pour y remédier, ce qui constitue un acte d'insubordination rendant impossible le maintien des relations contractuelles ; qu'en statuant ainsi, alors que la remise d'un compte-rendu d'une réunion tenue entre le salarié et son employeur dont ce dernier était seul destinataire, dans lequel le salarié a exposé son point de vue sur l'organisation de l'entreprise et qui ne contenait aucun propos injurieux, diffamatoire ou excessif, ne caractérise pas un abus de la liberté d'expression du salarié, la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1121-1 du code du travail :
6. Il résulte de ce texte que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. Il ne peut être apporté à celle-ci que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.
7. Pour dire le licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, qu'il ressort du document établi par le salarié, daté du 29 juin 2014, par lequel il a retranscrit le compte-rendu de la réunion tripartite du 20 juin 2014, tenue entre les deux co-gérants du cabinet d'architecture et le salarié, que ce dernier a émis de nombreuses et fortes critiques sur des éléments qui relèvent du pouvoir exclusif et discrétionnaire du chef d'entreprise quant à l'organisation et au fonctionnement de l'entreprise, critiques constituant, compte tenu de leur teneur, un acte d'insubordination rendant impossible le maintien des relations contractuelles, le salarié évoquant lui-même l'éventualité pour lui de quitter l'entreprise si ses remarques n'étaient pas prises en compte.
8. En statuant ainsi, alors que le compte-rendu litigieux, adressé uniquement à l'employeur et rédigé en des termes qui n'étaient ni injurieux, diffamatoires ou excessifs, ne caractérisait pas un abus dans la liberté d'expression du salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. J... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 19 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;
Condamne la société [...] aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [...] et la condamne à payer à M. J... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. J....
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire fondé sur le bénéfice du niveau IV, position I, coefficient 430 de la convention collective des entreprises d'architecture ;
Aux motifs que « M. Q... J... expose qu'il bénéficiait d'une classification d'agent de maîtrise correspondant au niveau III coefficient 370 de la convention collective alors que les fonctions qu'il exerçait lui permettaient légitimement de bénéficier d'une classification en qualité de cadre niveau IV.
Il ressort des dispositions de la convention collective des entreprises d'architecture que le niveau III correspond aux salariés qui "réalisent et organisent, sous contrôle de bonne fin, les travaux de leur spécialité à partir de directives générales ; leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie régulièrement ; ils sont, dans cette limite, responsables de leurs travaux" ; que les salariés classés au niveau IV "réalisent et organisent, sous la condition d'en rendre compte à leur direction, des missions à partir de directives générales ; leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie ponctuellement".
Il ressort des pièces du dossier, et en particulier des pièces 18 à 24 du dossier de la SARL [...] , que si M. J... avait un rôle certain d'élaboration et de suivi des dossiers, les devis, plans d'exécution, procès-verbaux de réception et de levée des réserves étaient signés par M. F... T... ; que celui-ci contrôlait voire amendait les projets préparés par M. J... ; qu'il entretenait des contacts direct avec les clients ; que c'est donc par une exacte appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont constaté que M. Q... J... ne disposait pas d'un degré d'autonomie suffisant pour revendiquer un classement dans la catégorie "cadre".
Ils ont également exactement rappelé que le titre d'architecte ne permettait pas l'attribution automatique du statut de cadre en l'absence d'une habilitation HMONP.
La demande sera donc rejetée, et la décision entreprise sera donc confirmée sur ce point » (arrêt p 6, § 9 et suiv.) ;
Et aux motifs que « compte tenu de la taille de l'entreprise et de l'autonomie dont bénéficiait M. Q... J..., il ne ressort pas des éléments du dossier que le manquement de l'employeur quant à l'absence de mention d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie du salarié relève d'une démarche intentionnelle » (arrêt p. 8 § 3) ;
Et aux motifs adoptés du jugement que « M. J... a été initialement embauché en qualité de dessinateur.
En 2007, il obtiendra le diplôme d'architecte diplômé d'Etat et, en mai 2011, celui d'architecte du patrimoine.
En juin 2011, M. J... va passer dessinateur projecteur.
Toutefois, M. J... affirme que les fonctions qu'il exerce, ne correspondent ni à sa qualification, ni à son statut.
Selon lui, il devrait relever du niveau IV position I et avoir le statut de cadre.
En effet, M. J... précise :
-qu'il a réalisé le suivi, en toute autonomie et de façon consécutive, de plusieurs chantiers,
-qu'il était le représentant du maître d'oeuvre et donc, garant de ses responsabilités,
-qu'il contrôlait, corrigeait et signait pour ordre les plans d'exécution et les devis de chantiers,
-qu'il réalisait, en toute autonomie, des opérations de réception de travaux engageant la responsabilité pénale du maître d'oeuvre,
-qu'il a organisé et tenu seul le déroulement de ses missions ;
l'employeur se contentant de signer à l'avance les documents concernés.
Il fournit à l'appui de sa demande, divers documents concernant des dossiers sur lesquels il a travaillé (cf les pièces 49, 47, 97 et 98, 48, 90, 94 et 95, 91 du demandeur), ainsi que deux attestations de M. O..., collège de travail et ami, qui certifie que M. J... réalisait des missions de maître d'oeuvre, dépassant les fonctions de dessinateur et qu'il travaillait en toute autonomie (cf les pièces 51 et 102 du demandeur).
Eu égard à tous ces éléments, M. J... sollicite donc un rappel de salaire d'un montant de 21 649,92 € bruts auquel s'ajoutent les congés payés y afférent.
Mais, en l'espèce, M. J... a signé le 21 juin 2014 un avenant dans lequel "les parties conviennent que le poste occupé par M. J... est celui d'un chargé d'études confirmé, correspondant au niveau III position 2, coefficient 370 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture, agent de maîtrise, assimilé cadre au titre de la retraite complémentaire, auquel correspond une rémunération brute mensuelle de 2 680,00 € pour 151,67 heures mensuelles" (cf pièce 1 du demandeur).
Le niveau reconnu à M. J... correspond déjà à un niveau d'intervention élevé, puisque selon la convention collective des entreprises d'architecture, il implique que :
"Les salariés réalisent et organisent, sous contrôle de bonne fin, les travaux de leur spécialité à partir de directives générales. Leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie régulièrement.
Ils sont, dans cette limite, responsables de leurs travaux. Les emplois de cette position comportent des travaux nécessitant des initiatives réelles adaptées aux missions confiées et des connaissances maîtrisées du méti er acquises par :
-diplôme de niveau II de l'éducation nationale ;
-des formations continues ou autres ;
-et/ou une expérience professionnelle acquise aux positions précédentes".
En comparaison le niveau IV position I implique :
"Les salariés réalisent et organisent, sous la condition d'en rendre compte à leur direction, des missions à partir de directives générales.
Leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie ponctuellement.
Ils sont dans cette limite responsables de l'accomplissement de leurs missions.
Les emplois de ce niveau comportent des missions nécessitant d'une part, la maîtrise des outils nécessaires à leur réalisation d'autre part, la capacité à analyser les contraintes liées à leur activité acquise par :
-diplôme de niveau II ou de niveau I à l'éducation nationale,
-des formations continues ou autres,
-et/ou une expérience professionnelle acquise aux positions précédentes.
L'architecte en titre est classé à cette position (cf article III-2-2)".
La SARL apporte un certain nombre de documents (cf les pièces 18-1 à 18-3 ; 19-1 à 19-5 ; 20-1 à 20-9 ; 21-1 à 21-8 ; 22-1 à 22-4 ; 23-1 à 23-5 et 24-1 à 24-2 du défendeur) qui démontrent que M. J... ne remplissait pas tous les critères d'autonomie et de responsabilité et n'avait pas toutes les compétences lui permettant d'accéder au statut de cadre tel que défini dans la convention collective.
Notamment, ce n'était pas M. J... qui signait directement les documents. Il n'agissait que pour "ordre". Les documents étant toujours signés par M. ou Mme T.... C'était donc eux qui engageaient la responsabilité du cabinet. Ce qui confirme que M. J... n'avait pas de réels pouvoirs.
D'autre part, M. J... ne peut pas non plus revendiquer une attribution automatique du statut cadre car il aurait fallu pour se faire, qu'il ait obtenu son habilitation HMONP.
Il aurait alors eu le titre d'architecte, aurait été inscrit à l'ordre des architectes et il aurait fallu que ce titre soit utilisé par l'entreprise. Ce qui n'était pas le cas en l'espèce.
Certes, M. J... a bénéficié de la formation de l'école [...] et a pu se spécialiser en restauration du patrimoine. Mais cela ne lui permet pas pour autant de se voir attribuer le statut de cadre automatiquement.
En conséquence, le conseil ne fait pas droit à la demande de M. J... de le classifier niveau IV position I et de lui appliquer le statut de cadre.
Ainsi, le conseil déboute M. J... de l'ensemble de ses demandes pécuniaires formulées à ce titre » (jugement p 6, § 1 et suiv.) ;
1°) Alors que la classification professionnelle d'un salarié dépend des fonctions effectivement exercées ; que la classification niveau IV, position I, de la convention collective des entreprises d'architecture est donnée aux salariés qui réalisent et organisent, sous la condition d'en rendre compte à leur direction, des missions à partir de directives générales ; que leur activité s'exerce dans le cadre d'une autonomie définie ponctuellement ; qu'ils sont, dans cette limite, responsables de l'accomplissement de leurs missions ; que pour rejeter la demande de M. J... en reconnaissance du statut de cadre niveau IV, position I, de la convention collective des entreprises d'architecture, la cour d'appel a estimé qu'il ne disposait pas d'un degré suffisant d'autonomie dans la mesure où s'il avait un rôle certain d'élaboration et de suivi des dossiers, les devis, plans d'exécution, procèsverbaux de réception et de levée des réserves étaient signés par M. F... T... ; que celui-ci contrôlait voire amendait les projets préparés par M. J... ; qu'il entretenait des contacts directs avec les clients ; qu'en statuant ainsi, alors que le niveau IV, position I, de la convention collective des entreprises d'architecte n'exige qu'une « autonomie définie ponctuellement », le salarié continuant à remplir sa mission sous l'autorité et à partir des directives de son employeur et sa mission pouvant consister à élaborer et suivre les dossiers, ce qui, selon la cour d'appel, incombait à M. J..., la cour a violé l'article V.1.1 de la convention collective des entreprises d'architecture du 27 février 2003 ;
2°) Alors qu'aux termes de la convention collective des entreprises d'architecture, la classification niveau IV, position I, n'exige qu'une autonomie définie ponctuellement ; qu'en l'espèce, M. J... a fait valoir que dans de nombreux dossiers, il réalisait seul de nombreuses tâches, par exemple des opérations de réception de travaux (concl. p 17, § 11 et suiv.), les dossiers d'autorisation administratives (p 18, § 6), les dossiers de consultation des entreprises (p 18, § 7), qu'il assurait en autonomie le contrôle des travaux sur les chantiers et que son employeur ne faisait que signer les documents qu'il avait lui-même élaborés (concl. p 18, § 4) ; qu'en considérant que M. J... ne disposait pas d'un degré suffisant d'autonomie pour que lui soit reconnu le statut de cadre, niveau IV, position I, de la convention collective des entreprises d'architecture, sans répondre point par point à l'argumentation pertinente développée par M. J..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) Alors qu'en considérant d'un côté que M. J... ne disposait pas d'un degré d'autonomie suffisant pour revendiquer un classement dans la catégorie « cadre » et en retenant de l'autre qu'il bénéficiait d'autonomie pour rejeter sa demande au titre du travail dissimulé, la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) Alors qu'aux termes de l'article V.1.1 de la convention collective des entreprises d'architecture, l'architecte en titre doit être classé au niveau IV, position 1 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le titre d'architecte ne permettait pas l'attribution automatique du statut de cadre en l'absence d'une habilitation HMONP ; qu'en ajoutant ainsi une condition non prévue à la loi, la cour a violé l'article V.1.1 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture du 27 février 2003.
Le deuxième moyen de cassation fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité la condamnation de la société [...] à verser à M. J... la somme de 4 560 € au titre des heures supplémentaires ;
Aux motifs qu'« aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instructions qu'il estime utiles.
Si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.
M. Q... J... produit au dossier un décompte faisant état de 332,15 heures supplémentaires non réglées pour les années 2012 et 2013, établi sur une base hebdomadaire.
En conséquence il convient de constater que M. Q... J... étaye sa demande.
La SARL [...] , sur qui repose la preuve des horaires effectivement réalisés par les salariés, n'apporte aucun élément sur ce point.
En conséquence, et compte tenu des éléments apportés par M. J..., il sera fait droit à la demande à hauteur de 4 560 € et la décision entreprise sera infirmée sur ce point » (arrêt p 7, § 4 et suiv.) ;
1°) Alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef du dispositif ayant condamné la société [...] à verser à M. Q... J... la seule somme de 4 560 € au titre des heures supplémentaires dès lors que ces chefs de dispositif sont liés par un lien de dépendance nécessaire, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) Alors que le juge doit respecter les termes du litige ; qu'en l'espèce, M. J... a demandé un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées non seulement au cours des années 2012 et 2013 mais encore en 2014 ; qu'en se bornant à accorder un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires des années 2012 et 2013, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile.
Le troisième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande de condamnation de la SARL [...] au paiement d'une indemnité pour travail dissimulé ;
Aux motifs qu'« aux termes de l'article L 8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 du même code relatif au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
L'article L 8221-5, 2°, du code du travail dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.
Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.
Compte tenu de la taille de l'entreprise et de l'autonomie dont bénéficiait M. Q... J..., il ne ressort pas des éléments du dossier que le manquement de l'employeur quant à l'absence de mention d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie du salarié relève d'une démarche intentionnelle.
La demande sera rejetée et la décision entreprise sera confirmée sur ce point » (arrêt p 7 in fine et suiv.) ;
Et aux motifs qu'« il ressort des pièces du dossier, et en particulier des pièces 18 à 24 du dossier de la SARL [...] , que si M. J... avait un rôle certain d'élaboration et de suivi des dossiers, les devis, plans d'exécution, procès-verbaux de réception et de levée des réserves étaient signés par M. F... T... ; que celui-ci contrôlait voire amendait les projets préparés par M. J... ; qu'il entretenait des contacts direct avec les clients ; que c'est donc par une exacte appréciation des éléments de la cause que les premiers juges ont constaté que M. Q... J... ne disposait pas d'un degré d'autonomie suffisant pour revendiquer un classement dans la catégorie "cadre" » (arrêt p. 7 § 1er) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés du jugement que « M. J... réclame une somme de 18 860 € net pour travail dissimulé - si le statut de cadre lui est reconnu ou, à défaut, une somme de 16 080 €, - au motif que la SARL [...] ne lui avait pas rémunéré l'ensemble de ses heures travaillées.
Il a été démontré précédemment que le conseil avait refusé de reconnaître le statut de cadre de M. J....
Il convient donc de ne pas prendre en considération que sa demande pour un montant de 16 080 €.
M. J... appuie sa demande en se fondant sur l'article L.8221-5 du code du travail qui dispose :
"Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L 1221-10, relatif à la déclaration préalable d'embauche ;
2° soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales".
Mais il résulte de la combinaison des articles L 8221-1 et L 8221-5 du code du travail que le travail dissimulé n'est caractérisé que si l'employeur a agi de manière intentionnelle et frauduleuse, et notamment s'il ne paie pas, à ses salariés, la totalité des heures de travail qu'ils ont effectuées.
En l'espèce, le conseil de céans vient de débouter M. J... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires.
L'employeur ne peut donc se voir reprocher d'avoir voulu dissimuler le travail de M. J....
Sa mauvaise foi ou une éventuelle intention frauduleuse de sa part n'est ni établie, ni caractérisée. Au contraire, il a même proposé à trois reprises un accord transactionnel à M. J... (cf les pièces 9, 10 et 11 du défendeur).
En conclusion, le conseil déboute M. J... de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé » (jugement p 7, § 11 et suiv.) ;
1°) Alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef de dispositif ayant débouté M. J... de sa demande de condamnation de la société [...] à lui verser une indemnité pour travail dissimulé dès lors que les chefs de dispositif attaqués sont liés par un lien de dépendance nécessaire, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) Alors qu'en considérant que M. J... ne disposait pas d'un degré d'autonomie suffisant pour revendiquer un classement dans la catégorie « cadre » et, pour rejeter sa demande au titre du travail dissimulé, qu'il bénéficiait d'une autonomie, la cour d'appel s'est contredite, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
Le quatrième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que « selon l'article L 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profit au salarié.
Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Il ressort de la lettre du 18 juillet 2014 par laquelle la SARL [...] a notifié à M Q... J... son licenciement notamment en ces termes :
" En outre, ce refus de prendre en compte nos remarques et directives a dérivé et a abouti lors de l'entretien du 20 juin dernier, à une remise en cause particulièrement agressive de votre part, de la direction de l'agence, propos réitérés dans le compte-rendu que vous nous avez fait parvenir, et dont nous contestons formellement la teneur des propos que vous nous attribuez.
Vous invoquez pêle-mêle notre malhonnêteté, notre mauvaise foi, notre absence de moralité, et de prétendues irrégularités au regard des règles du droit du travail.
Vous sous-entendez que nous produisons un travail bâclé, et acceptons des signatures de complaisance.
Vous mettez en cause le choix de nos sous-traitants, de l'organisation des tâches au sein de l'agence, et vous vous érigez en porte-parole des autres salariés exigeant la tenue d'une réunion avec l'ensemble du personnel.
Sans compter votre refus de l'autorité de Mme T..., co-gérante de l'agence".
Ces éléments sont précis et matériellement vérifiables.
Il est apporté au dossier un document établi par M. Q... J..., daté du 29 juin 2014, constituant "un exemplaire de la retranscription informatique du compte-rendu de notre réunion du 20 juin 2014, effectué par nos soins".
C'est par une exacte appréciation du contenu de ce document, dont des extraits sont reproduits, que les premiers juges ont constaté que M. J... a émis de nombreuses et fortes critiques sur des éléments qui relèvent du pouvoir exclusif et discrétionnaire du chef d'entreprise quant à l'organisation de l'entreprise, critiques constituant compte tenu de leur teneur un acte d'insubordination rendant impossible le maintien des relations contractuelles, le salarié évoquant lui-même l'éventualité pour lui de quitter l'entreprise si ses remarques n'étaient pas prises en compte.
Compte tenu de ces éléments, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs évoqués dans la lettre de licenciement, il convient de dire le licenciement de M. Q... J... par la SARL [...] justifié par une cause réelle et sérieuse, et en conséquence de confirmer la décision entreprise sur ce point » (arrêt p 8, § 5 et suiv.) ;
Et aux motifs adoptés du jugement que « M. J... conteste son licenciement aux motifs que la lettre de licenciement est imprécise et se place essentiellement sur le terrain disciplinaire, alors qu'il n'a jamais fait l'objet d'avertissement et/ou de mise en garde antérieurs, que ce soit au titre de son travail ou de son comportement.
Il reproche, en effet, à son employeur d'évoquer de vagues griefs, des éléments inconsistants, sans fondement précis et peu vérifiables.
Mais en cas de contestation par le salarié du motif de son licenciement, il appartient au juge de contrôler le caractère réel et sérieux du motif invoqué ; le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
En l'espèce, l'employeur a licencié son salarié (cf la pièce 19 du demandeur) car il lui reproche, non seulement, de ne pas réaliser son travail, conformément à la mission qui lui est confiée et dans les délais impartis et cohérents (voir par exemple, pièce 15-1 et 15-2 du défendeur), mais surtout eu égard au dénigrement dont fait preuve M. J... à l'encontre de son cabinet d'architecture et de ses deux co-gérants.
En effet, M. J... a adressé à son employeur, le 29 juin 2017, un compte-rendu de réunion tripartite, qui s'est tenu entre M. T..., Mme T... et lui-même (cf pièce 13 du demandeur).
Compte rendu dans lequel M. J... critique vertement et ouvertement ses employeurs, leur reprochant leur fonctionnement, l'organisation du cabinet d'architecture.
Par exemple :
-paragraphe 3, page 4 : "cette baisse d'activité est liée de façon évidente aux demandes et règles d'organisation du travail, mises en place par Mme T... depuis le début du mois de janvier 2014"
-Ou les deux derniers paragraphes en bas de page 4 : " M. J... rappelle également à Mme T... les demandes répétées de leurs employés pour la tenue de réunions régulières pour établir l'organisation, la répartition et le calendrier des tâches. M. J... déplore l'absence de leur mise en place et explique que ces dernières seraient pourtant utiles à une meilleure circulation des informations et planification du travail qui fait aujourd'hui défaut.
Mme T... s'offusque et demande à M. J... de confirmer la remise en cause de l'organisation de l'agence". M. J... confirme ses dires.
-outre, autre exemple, dernier paragraphe de la page 7 : "M. J... indique qu'il veut bien comprendre la stratégie adoptée mais rappelle que malgré tout, il y a un temps minimum pour réaliser un travail aussi bâclé soit-il".
-ou encore avant dernier paragraphe de la page 10 : "M. J... essaie d'expliquer en vain à Mme T..., qu'une telle organisation n'est pas la plus efficace. Pour preuve, il évoque le temps perdu correspondant à celui qu'un employé est forcé d'utiliser pour se mettre en connaissance d'un dossier et comprendre le travail qu'il récupère et qui conditionne le sien. Avec un tel trajet des tâches, il n'est pas nécessaire d'évoquer les temps perdus et les difficultés, lors des modifications à faire en cours de travail".
Et le fait qu'ils ne "prennent pas en compte les avis, remarques et propositions faites par leurs employés pour améliorer le fonctionnement de l'agence" (cf le paragraphe 3 de la page 11 de ce compte rendu).
Ainsi, dans cette affaire, il apparait clairement que M. J... critique ses employeurs sur des éléments qui ne lui incombent pas, mais relève de leur pouvoir exclusif et discrétionnaire de décisions et d'organisation.
En agissant de la sorte, M. J... fait montre d'un comportement véritablement contestataire et critique, emprunt d'insubordination et de dénigrement.
En conséquence, le conseil considère qu'il ressort des éléments du dossier que la SARL [...] évoque un certain nombre de faits dont la matérialité ne peut être qu'établie puisque reconnue par M. J... lui-même à travers son compte-rendu.
C'est la raison pour laquelle le conseil dit et juge que le licenciement de M. J... est justifié car reposant sur un motif réel et sérieux résultant du comportement même de M. J....
Et le déboute de sa demande en dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail d'un montant de 34 000 € » (jugement p 9, § 6 et suiv.) ;
Alors que sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression, à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées ; que pour juger le licenciement de M. J... fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu qu'il avait critiqué l'organisation de l'agence d'architecture dans un compte-rendu du 29 juin 2014, adressé au seul employeur, de la réunion tripartite tenue avec les deux co-gérants, sollicitant la tenue de réunions avec le personnel pour y remédier, ce qui constitue un acte d'insubordination rendant impossible le maintien des relations contractuelles ; qu'en statuant ainsi, alors que la remise d'un compte-rendu d'une réunion tenue entre le salarié et son employeur dont ce dernier était seul destinataire, dans lequel le salarié a exposé son point de vue sur l'organisation de l'entreprise et qui ne 2 4 contenait aucun propos injurieux, diffamatoire ou excessif, ne caractérise pas un abus de la liberté d'expression du salarié, la cour d'appel a violé les articles L 1121-1 du code du travail et 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
Le cinquième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande de condamnation de la société [...] à lui verser un complément d'indemnité de préavis, les congés payés y afférents et une indemnité de licenciement ;
Aux motifs que « ces demandes sont fondées sur la qualité de cadre revendiquée par M. Q... J... ; cette demande ayant été rejetée, les demandes relatives au complément d'indemnité de préavis et de complément d'indemnité de licenciement qui en constituent l'accessoire seront rejetées et la décision entreprise confirmée sur ce point » (arrêt p 9, § 3) ;
Et aux motifs adoptés du jugement que « M. J... réclame le paiement de la somme de 3 143, 30 € d'indemnité compensatrice de préavis, de 314,33 € de congés payés y afférents et de 586,55 € au titre d'un complément d'indemnité de licenciement.
Il formule cette demande en partant du postulat que le conseil a admis sa demande en reconnaissance du statut cadre et reconnu que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Mais le conseil l'a débouté précédemment de ces demandes.
Dès lors, il n'y a pas lieu de faire droit à ces divers compléments d'indemnité» (jugement p 10, § 5 et suiv.) ;
Alors que la cassation à intervenir sur les premier et quatrième moyens entraînera par voie de conséquence celle du chef de dispositif ayant débouté M. J... de sa demande de condamnation de la société [...] à lui verser un complément d'indemnité de préavis, les congés payés y afférents et une indemnité de licenciement dès lors que les chefs de dispositif critiqués sont liés par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
Le sixième moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. J... de sa demande en condamnation de la SARL [...] à lui verser un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés ;
Aux motifs que « M. Q... J... expose que l'employeur n'a pas retenu, pour le calcul de ses congés payés pris à compter de 2012, la méthode de calcul qui lui était la plus favorable.
Il ressort cependant d'une note établie par l'expert comptable de la SARL [...] que la base de calcul pour établir le montant des congés payés a été calculée sur la méthode la plus favorable au salarié compte tenu du montant de la rémunération pouvant être retenue pour chaque période concernée.
La demande sera donc rejetée et la décision entreprise confirmée sur ce point » (arrêt p 9) ;
Alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef du dispositif ayant débouté M. J... de sa demande de condamnation de la société [...] à lui verser un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés dès lors que les chefs de dispositif critiqués sont liés par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 624 du code de procédure civile.