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10/03/2021 | FRANCE | N°20-13230

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 mars 2021, 20-13230


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 318 F-D

Pourvoi n° U 20-13.230

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme F....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 12 décembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________r>
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 MARS 2021

Mme W... F..., domicil...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 318 F-D

Pourvoi n° U 20-13.230

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme F....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 12 décembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 MARS 2021

Mme W... F..., domiciliée chez Mme V... Y..., [...] , a formé le pourvoi n° U 20-13.230 contre l'arrêt rendu le 7 novembre 2018 par la cour d'appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Haute-Corse, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Lecaplain-Morel, conseiller, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mme F..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Corse, après débats en l'audience publique du 20 janvier 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lecaplain-Morel, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bastia, 7 novembre 2018), Mme F... a été engagée à compter du 2 décembre 2013 par la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse suivant plusieurs contrats de travail à durée déterminée successifs. La relation de travail a pris fin le 12 mai 2015.

2. La salariée a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir, notamment, la requalification de la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La salariée fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, que le dernier contrat à durée déterminée a pris régulièrement fin à son terme et n'y avoir lieu à rappel de salaire ni versement d'indemnités, alors : « d'une part, qu'en appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; que, d'autre part, il résulte de l'article L. 1242-12 du code du travail que le contrat à durée déterminée de remplacement doit comporter le nom et la qualification du salarié remplacé ; que pour infirmer le jugement entrepris et la débouter de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel s'est bornée à énoncer que les contrats conclus à compter du 24 mai 2014 comportaient un motif précis puisqu'ils indiquaient tous qu'elle était engagée pour assurer le remplacement d'une salariée jusqu'à la fin de son congé maternité puis la fin du délai de son congé annuel, puis pendant son absence de quinze jours ; qu'en statuant ainsi sans vérifier si les contrats de travail comportaient la mention de la classification de la salariée remplacée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 472 du code de procédure civile, l'article 954, alinéa 5, du même code, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, les articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail :

4. Il résulte, d'une part, de la combinaison des deux premiers de ces textes que l'intimé dont les conclusions sont déclarées irrecevables est réputé ne pas avoir conclu et s'être approprié les motifs du jugement attaqué, d'autre part, du premier de ces textes qu'en appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond, et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

5. Il résulte de la combinaison des articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail, qu'est réputé à durée indéterminée le contrat de travail à durée déterminée qui ne comporte pas la définition précise de son motif et que cette exigence de précision quant à la définition du motif implique nécessairement que le nom et la qualification du salarié remplacé figurent dans le contrat lorsqu'il s'agit de l'un des cas visés au 1° de l'article L. 1242-2 du code du travail.

6. Pour débouter la salariée de sa demande en requalification des contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, l'arrêt relève que les deux premiers contrats à durée déterminée mentionnent que la salariée est engagée dans le but de pallier un surcroît d'activité et définissent ainsi précisément leur motif conformément à l'article L. 1242-12 du code du travail. Il ajoute, quant aux quatre contrats de travail suivants, qu'ils indiquent tous que la salariée est engagée dans le but d'assurer le remplacement d'une autre salariée. L'arrêt retient qu'il a ainsi été satisfait aux prescriptions impératives du premier alinéa de l'article L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail, qui imposent, à peine de voir la convention réputée conclue pour une durée indéterminée, que le contrat de travail à durée déterminée soit établi par écrit et qu'il comporte la définition précise de son motif.

7. En se déterminant ainsi, alors que la salariée, qui n'avait pas conclu, était réputée s'approprier les motifs du jugement ayant constaté qu'une des mentions obligatoires ne figurait pas sur le contrat de travail du 24 mai 2014 et que plusieurs contrats de travail à durée déterminée avaient été conclus en l'absence de mentions obligatoires, la cour d'appel qui, pour réfuter ces motifs, n'a pas constaté la conformité des contrats de travail à durée déterminée à l'ensemble des exigences légales, n'a pas donné de base légale à sa décision.

Portée et conséquence de la cassation

8. La cassation prononcée n'atteint pas le chef de dispositif, évoqué par le moyen, déboutant la salariée de sa demande en paiement d'un rappel de salaire pour la période du 24 mai 2014 au 12 mai 2015.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit n'y avoir lieu à rappel de salaire, l'arrêt rendu le 7 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie de Haute Corse et la condamne à payer à la SCP Didier et Pinet la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un, et signé par lui, le conseiller rapporteur et Mme Piquot, greffier en remplacement du greffier empêché.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour Mme F...

Le pourvoi reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, dit que le dernier contrat à durée déterminée a pris régulièrement fin à son terme et dit n'y avoir lieu à rappel de salaire ni versement d'indemnités à Mme F... par la CPAM de Haute-Corse.

AUX MOTIFS QU'il est rappelé liminairement qu'en l'état des seules conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Corse, celles de W... F... ayant été déclarées irrecevables, la cour n'est pas saisie de l'examen des dispositions du jugement du 15 juin 2017 ayant débouté cette dernière de ses demandes de réintégration, remboursement des indemnités pôle emploi, allocation de 10.000 euros pour préjudice distinct, et de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dispositions ainsi définitives ; que pour le surplus : le premier juge a estimé « qu'une des mentions obligatoires (selon l'article L.1242-12 premier alinéa du code du travail) n'est pas mentionnée sur le contrat de travail du 24 mai 2014,
que plusieurs contrats à durée déterminée ont été conclus en l'absence de mentions obligatoires
ce seul motif suffi(sant) pour constater la requalification ». En conséquence, il n'y a pas lieu pour la cour, sur les seules conclusions de l'appelante, à statuer sur les deux premiers contrats à durée déterminée, exécutés du 2 décembre 2013 au 7 mars 2014, puis du 8 mars 2014 au 23 mai 2014, lesquels, en toute hypothèse, en mentionnant que W... F... est engagée dans le but de pallier un surcroît d'activité, définissent précisément leur motif conformément à l'article L.1242-12 du code du travail ; que quant au quatre contrats de travail suivants, conclus à compter du 24 mai, puis du 30 septembre 2014, et ensuite du 28 janvier 2015, puis du 9 mars 2015, ils indiquent tous en leur article premier, intitulé « engagement » que W... F... est engagée dans le but d'assurer le remplacement de K... N..., respectivement jusqu'à la fin de son congé légal de maternité, jusqu'à la fin du délai légal conventionnel, durant son congé annuel, à titre de remplacement provisoire pendant la durée de son absence, minimale de quinze jours ; il a ainsi été satisfait aux prescriptions impératives du premier alinéa de l'article L.1242-12 et L.1245-1 du code du travail, qui imposent, à peine de voir la convention réputée conclue pour une durée indéterminée, que le contrat de travail à durée déterminée soit établi par écrit et qu'il comporte la définition précise de son motif ; qu'il n'y a dès lors pas lieu à requalification, la relation contractuelle entre les parties ayant régulièrement pris fin à l'issue du dernier contrat de travail à durée déterminée, le 12 mai 2015, la décision appelée devant à cet égard être infirmée ; qu'elle le sera également, par nécessaire voie de conséquence, et sans qu'il soit utile d'entrer plus avant dans le détail de l'argumentation de l'appelante, quant à ses dispositions relatives à l'octroi au profit de W... F... d'indemnités de requalification (1.592,83 euros), de préavis (1.592,83 euros), de licenciement (413,92 euros), et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (9.556,98 euros) ; qu'elle sera infirmée aussi, s'agissant du rappel de salaires de 1.167,59 euros, alloué par le premier juge pour la période du 24 mai 2014 au 12 mai 2015, aucun élément soumis à l'examen de la cour ne permettant de considérer que le coefficient « 198 + 8 points de compétence », attribué à W... F... dans ses fonctions d'agent administratif polyvalent est inférieur à celui dont elle devait bénéficier, l'appelante rappelant par ailleurs à ce titre, que la salariée n'a pas exercé l'ensemble des tâches confiées à la salariée remplacée, ne possédant pas pour certaines la technicité requise, et qu'elle ne peut prétendre dans ces conditions à qualification et rémunération égale.

1°) ALORS d'une part qu'en appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; que d'autre part il résulte de l'article L.1242-12 du code du travail que le contrat à durée déterminée de remplacement doit comporter le nom et la qualification du salarié remplacé ; que pour infirmer le jugement entrepris et débouter Mme F... de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée la cour d'appel s'est bornée à énoncer que les contrats conclus à compter du 24 mai 2014 comportaient un motif précis puisqu'ils indiquaient tous que Mme F... était engagée pour assurer le remplacement de Mme N... jusqu'à la fin de son congé maternité puis la fin du délai de son congé annuel, puis pendant son absence de 15 jours ; qu'en statuant ainsi sans vérifier si les contrats de travail comportaient la mention de la classification de la salariée remplacée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1242-12 et L.1245-1 du code du travail.

2°) ALORS QUE le recours à un contrat à durée déterminée ne peut avoir pour objet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise ; que l'accroissement temporaire d'activité de l'entreprise ne justifie le recours au contrat à durée déterminée que si ce surcroît d'activité est inhabituel et que l'employeur ne peut y faire face avec ses effectifs permanents ; que pour débouter Mme F... de sa demande en requalification, la cour d'appel a retenu qu'en mentionnant que la salariée était engagée dans le but de pallier un surcroît d'activité, les contrats du 2 décembre 2013 au 7 mars 2014 et du 8 mai 2014 au 23 mai 2014 définissaient précisément leur motif ; qu'en statuant ainsi quand il lui appartenait de vérifier la réalité du surcroît d'activité invoqué par la caisse primaire d'assurance maladie, auquel celle-ci n'aurait pu faire face avec son effectif permanent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1242-2 du code du travail ;

3°) ALORS QUE (subsidiairement) le contrat à durée déterminée conclu pour le remplacement d'un salarié doit indiquer le motif de l'absence du salarié remplacé ou la cause de la suspension de son contrat ; que dans ses conclusions d'appel (p. 6), Mme F... faisait valoir que les contrats à durée déterminée des 30 septembre 2014 et 9 mars 2015 mentionnaient qu'elle remplacerait Mme K... N..., sans autre précision sur les raisons de l'absence de cette salariée ; qu'en refusant de requalifier ces contrats en contrats à durée indéterminée sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 20-13230
Date de la décision : 10/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia, 07 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 mar. 2021, pourvoi n°20-13230


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.13230
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