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10/03/2021 | FRANCE | N°19-16328

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 mars 2021, 19-16328


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Cassation partielle sans renvoi

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 219 F-D

Pourvoi n° R 19-16.328

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MARS 2021

La société [...] , sociétÃ

© à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 19-16.328 contre l'arrêt rendu le 13 mars 2019 par la cour d'appel d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 mars 2021

Cassation partielle sans renvoi

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 219 F-D

Pourvoi n° R 19-16.328

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 10 MARS 2021

La société [...] , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° R 19-16.328 contre l'arrêt rendu le 13 mars 2019 par la cour d'appel de Riom (3e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la société JPC créations, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société [...] , de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société JPC créations, après débats en l'audience publique du 19 janvier 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Riom, 13 mars 2019), la société JPC créations (la société JPC) a conclu avec la société [...] (la société [...]) un contrat d'agent commercial prévoyant la rémunération de celle-ci par une commission calculée sur les ventes et une commission versée en contrepartie de la clause de ducroire souscrite par l'agent au profit de sa mandante.

2. Le 31 octobre 2014, la société JPC a informé la société [...] de la résiliation du contrat avec un préavis de trois mois, prenant effet au 31 janvier 2015, et lui a proposé une indemnité de rupture de 35 420,70 euros, calculée sur la base de deux années de commissions, en excluant la rémunération servie au titre de la clause de ducroire.

3. Contestant le montant de l'indemnité de rupture proposée, la société [...] a assigné la société JPC en paiement d'un complément d'indemnité.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

4. La société [...] fait grief à l'arrêt de limiter le montant de l'indemnité due par société JPC à la somme de 29 418,34 euros, alors « que le juge ne peut méconnaître les termes clairs et précis des conclusions qui le saisissent ; qu'en déduisant de l'indemnité due au titre de la rupture unilatérale du contrat d'agent commercial conclu entre la société JPC et la société [...], un impayé de la société Bureau vallée Guadeloupe au titre d'une clause de ducroire, quand la société JPC soutenait au contraire qu' « a posteriori, entre-temps, le client Bureau vallée Guadeloupe a payé la concluante de telle sorte que cette dernière n'a pas retenu l'impayé », la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'obligation pour le juge ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

5. Pour condamner la société JPC à payer une indemnité de cessation du contrat de 29 418,34 euros, l'arrêt, après avoir relevé, d'un côté, que la société JPC avait elle-même proposé de servir une indemnité de rupture équivalente à deux années de commissions déterminée sur la période la plus favorable à son agent, de l'autre, que l'assiette de calcul de l'indemnité devait intégrer la rémunération de 3 % pratiquée entre les parties au titre de l'engagement de ducroire pris par la société [...] au profit de sa mandante, fixe le montant total des commissions versées sur cette période à 81 348 euros, dont elle retranche la somme de 16 509,06 euros, en retenant que, dans la mesure où la clause de ducroire a donné lieu au versement de commissions, cette dernière somme, qui correspond au montant de l'impayé émanant d'un client, la société Bureau vallée Guadeloupe, doit, réciproquement, être déduite.

6. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la société JPC précisait qu'en application de la clause de ducroire, l'impayé susvisé de 16 509,06 euros avait, dans un premier temps, été déduit des sommes versées à la société [...] au titre du 1er trimestre 2014, mais qu'ensuite, le client concerné l'ayant payée, elle n'avait pas retenu cet impayé, ce dont il résultait que l'impayé avait été régularisé, la cour d'appel, qui a dénaturé ces écritures, a violé le principe susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

7. Ainsi que le propose le demandeur au pourvoi, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

8. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, réformant le jugement déféré, il condamne la société JPC créations à payer à la société [...] une indemnité de 29 418,34 euros, l'arrêt rendu le 13 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Condamne la société JPC créations à payer à la société [...] la somme de 45 927,40 euros à titre d'indemnité de rupture du contrat d'agent commercial ;

Condamne la société JPC créations aux dépens, incluant ceux exposés devant les juges du fond ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société JPC créations et la condamne à payer à la société [...] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour la société [...] .

La société [...] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité le montant de l'indemnité due par la société JPC Créations à la somme de 29 418,34 euros ;

AUX MOTIFS QU'en application de l'article L. 134-5 du code de commerce, le droit à commission de l'agent commercial porte sur tout élément de rémunération variant avec le nombre ou la valeur des affaires et, dans le silence du contrat, l'agent commercial a droit à une rémunération conforme aux usages pratiqués, dans le secteur d'activité couvert par son mandat, là où il exerce son activité ; que le même texte précise qu'en l'absence d'usages, l'agent commercial a droit à une rémunération raisonnable qui tient compte de tous les éléments qui ont trait à l'opération ; que par ailleurs, il est d'usage que lorsque l'agent commercial est lié par une convention de ducroire, les risques de non-paiement étant à sa charge, la rémunération est due au moment de la réalisation de l'opération, et que sa rémunération est plus importante du fait de l'existence de cette convention ; qu'il s'ensuit que le calcul de l'indemnité due à l'agent commercial à raison de la rupture de son contrat, a vocation à prendre en considération les rémunérations de toute nature acquises lors de l'activité déployée par l'agent commercial dans l'intérêt des parties ; qu'en l'espèce, la société JPC affirme elle-même qu'une clause de ducroire, rétribuée au taux de 3 %, avait été convenue entre les parties en sus de la commission de 2 % calculée sur les opérations effectuées par l'agent commercial ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin de trancher le débat qui oppose désormais les deux sociétés pour déterminer si cette clause a été acceptée ou, au contraire, imposée par la société JPC à son agent commercial, la rémunération de 3 % effectivement pratiquée dans leurs relations au titre de l'engagement de ducroire doit être prise en considération pour le calcul de l'indemnité de rupture ; que le tribunal de commerce, prenant en considération le chiffre d'affaires réalisé par l'agent commercial au cours des périodes énoncées par la société JPC et un taux de commissionnement de 5 %, équivalent à la commission et à la rémunération de la clause de ducroire, a pris pour base un chiffre d'affaires de 97 532,25 euros TTC déterminé par des factures émises entre le 14 mai 2013 et le 20 janvier 2015, à raison de commissions relatives à l'activité exercée entre le 1er trimestre 2013 et le 2ème trimestre 2014 ; qu'il a précisé que les deux dernières années de collaboration avaient été les plus favorables pour l'agent ; que la société JPC, qui a elle-même proposé de servir une indemnité de rupture, selon une base, commune en la matière, équivalente à deux années de commissions déterminée sur la période la plus favorable à son agent, est aujourd'hui malvenue à venir la remettre en cause ; qu'en revanche, c'est de façon fondée qu'elle indique que cette indemnité compensatrice, qui présente un caractère indemnitaire, ne doit pas être déterminée en prenant en considération la taxe à la valeur ajoutée ; que le contrat d'agence ayant pris fin le 31 janvier 2015, le montant de l'indemnité compensatrice sera déterminé en prenant en considération les commissions HT effectivement versées à l'agent par la société JPC pour la période ayant couru du 1er février 2013 jusqu'à cette date, qui s'établissent selon les factures et relevés versés aux débats, à : commissions 1er trimestre 2013 : 7 327,30 euros, commissions 2ème trimestre 2013 : 18 742,70 euros ; commissions 3ème trimestre 2013 : 7 796,76 euros ; commissions 4ème trimestre 2013 : 3 069,83 euros ; commissions 1er trimestre 2014 : 11 030,72 euros ; commissions 2ème trimestre 2014 : 19 204,67 euros ; commissions 3ème trimestre 2014 : 7 858,58 euros ; commissions 4ème trimestre 2014 : 6 317,54 euros, soit un sous-total de 81 348,10 euros ; que dans la mesure où la clause de ducroire a donné lieu au versement de commissions, doit être déduit de cette somme, le montant de l'impayé de 16 509,06 euros de « Bureau Vallée Guadeloupe » ce qui détermine une indemnité de 64 839,04 euros ; que de cette indemnité, il convient en outre de déduire la somme de 35 420,70 euros déjà versée par la société JPC ce qui détermine un solde de 29 418,34 euros ; qu'en conséquence, le jugement sera réformé et la société JPC condamnée au paiement de cette somme ; que le présent arrêt constituant le titre de nature à fonder l'action en restitution de la société JPC si, en vertu de l'exécution provisoire assortissant le jugement critiqué, elle a versé à la société [...] la totalité de l'indemnité compensatrice liquidée par les premiers juges, il n'y a lieu à faire droit à sa demande en restitution ;

1°) ALORS QUE le litige est fixé par les prétentions respectives des parties ;
qu'en déduisant de l'indemnité due au titre de la rupture unilatérale du contrat d'agent commercial conclu entre la société JPC Créations et la société [...] , un impayé de la société Bureau Vallée Guadeloupe au titre d'une clause de ducroire (arrêt, p. 10, al. 7), quand la société JPC Créations n'avait jamais formulé une telle demande à l'encontre de la société [...] , la cour d'appel a statué ultra petita en violation des articles 4, 5 et 954 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE le juge ne peut méconnaître les termes clairs et précis des conclusions qui le saisissent ; qu'en déduisant de l'indemnité due au titre de la rupture unilatérale du contrat d'agent commercial conclu entre la société JPC Créations et la société [...] , un impayé de la société Bureau Vallée Guadeloupe au titre d'une clause de ducroire (arrêt, p. 10, al. 7), quand la société JPC Créations soutenait au contraire qu'« a posteriori, entretemps, le client Bureau Vallée Guadeloupe a payé la concluante de telle sorte que cette dernière n'a pas retenu l'impayé » (ses conclusions, p. 22, al. 2), la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE le juge doit préciser les éléments de preuve sur lesquels il fonde sa décision ; qu'en affirmant que la clause de ducroire avait donné lieu au versement de commission, et qu'il devait être déduit de l'indemnité pour rupture du contrat d'agent commercial le montant d'impayés de 16 509,06 euros de la société Bureau Vallée Guadeloupe au titre de la clause de ducroire (arrêt, p. 10, al. 7), sans préciser sur quel élément de preuve elle se fondait pour affirmer que la société Bureau Vallée Guadeloupe n'avait pas payé toutes ses dettes envers la société JPC Créations, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-16328
Date de la décision : 10/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 13 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 mar. 2021, pourvoi n°19-16328


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Buk Lament-Robillot, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.16328
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