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03/03/2021 | FRANCE | N°19-19329

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mars 2021, 19-19329


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 mars 2021

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 271 F-D

Pourvoi n° C 19-19.329

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 MARS 2021

M. Q... U... , domicilié [...] , a formé

le pourvoi n° C 19-19.329 contre l'arrêt rendu le 15 mai 2019 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre prud' homale), dans le litige l'opposant ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 mars 2021

Cassation partielle

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 271 F-D

Pourvoi n° C 19-19.329

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 MARS 2021

M. Q... U... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° C 19-19.329 contre l'arrêt rendu le 15 mai 2019 par la cour d'appel de Rennes (9e chambre prud' homale), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Transena, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

2°/ à Pôle emploi Bretagne, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. U... , de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Transena, après débats en l'audience publique du 12 janvier 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Marguerite, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Désistement partiel

1. Il est donné acte à M. U... du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi Bretagne.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 mai 2019), M. U... a été engagé le 21 juillet 2008 par la société Transena en qualité de conducteur routier. Ayant appris que le permis de conduire du salarié n'avait pas été renouvelé à compter du 12 juin 2014, faute de visite médicale, l'employeur, par lettre du 13 août 2014, l'a convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement et, à cette occasion, lui a confirmé sa mise à pied à titre conservatoire, effective depuis le 7 août 2014. Le salarié a été licencié pour faute grave le 9 septembre 2014.

3. Contestant son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire justifié par une faute grave son licenciement et de le débouter de toutes ses demandes, alors « que le juge, qui ne peut statuer par voie d'affirmation, doit préciser sur quels éléments de preuve il se fonde ; qu'en considérant, pour retenir que la mise à pied avait un caractère conservatoire, que le délai de six jours qui avait précédé l'engagement de la procédure de licenciement était celui dont l'employeur avait eu besoin pour procéder aux dernières vérifications indispensables, sans ni préciser la nature de ces vérifications ni si l'employeur les avait effectuées ni sur quels éléments de preuve elle se fondait, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.

6. Pour dire justifié le licenciement du salarié pour faute grave, l'arrêt retient que les six jours s'étant écoulés entre le 7 août -effectivité de la mise à pied conservatoire- et le 13 août 2014 -lettre de convocation à un entretien préalable prévu le 3 septembre- correspondent au délai raisonnable dont l'employeur avait besoin pour procéder aux dernières vérifications s'étant avérées indispensables, délai reposant ainsi sur un motif légitime avant que ne lui soit expressément confirmée sa mise à pied « prononcée à titre conservatoire pendant tout le déroulement de la procédure et dans l'attente de la décision à intervenir ».

7. En statuant ainsi, en procédant par simple affirmation, sans préciser ni la nature et la réalité des vérifications que l'employeur alléguait, ni les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute Pôle emploi de ses demandes, l'arrêt rendu le 15 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes autrement composée ;

Condamne la société Transena aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Transena et la condamne à payer à M. U... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour M. U...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit justifié par une faute grave le licenciement de M. U... et D'AVOIR débouté M. U... de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE, sur l'examen au fond du présent litige, la société Transena produit aux débats une photocopie du permis de conduire poids lourds au nom de M. U... avec une date limite au 12 juin 2014, ce qui ne l'a pas spécialement alerté puisqu'il a continué cette activité jusqu'au 6 août 2014, ce dont la société appelante s'est aperçue le jour même lors d'un contrôle périodique en interne ; que, contrairement à ce que prétend M. U... , qui ne discute pas la matérialité même du grief énoncé dans la lettre de licenciement, rien ne vient démontrer qu'il aurait continué à travailler après le 12 juin 2014 « sur instruction de son employeur », sachant qu'il ne passera sa visite médicale pour la reconduction de son permis de conduire que le 12 août suivant, et peu important finalement qu'il ait été alors déclaré apte pour être à nouveau en règle quand l'entretien préalable s'est tenu le 3 septembre suivant - validité dudit permis couvrant la nouvelle période du 12 août 2014 au 12 août 2019 - au regard des faits lui étant reprochés ; que, comme ne manque pas en effet de le souligner l'employeur, il est manifeste que l'intimé a contrevenu aux dispositions du code de la route en matière de détention du permis de conduire, que dans le cadre de son obligation plus générale de prévention des risques il a été élaboré en interne un « document unique » abordant notamment la thématique du présent litige, que le contrat de travail des salariés leur rappelle qu'ils s'engagent « à prendre toutes mesures nécessaires pour être toujours en possession d'un permis en cours de validité, s'agissant d'un élément indispensable à l'exécution de la relation contractuelle », que cela a encore été rappelé aux conducteurs par une note de service du 15 janvier 2013, et qu'une inspection des services de la préfecture de la région Bretagne le 20 avril 2015 n'a donné lieu à aucune observation particulière s'agissant des réglementations applicables ; que, nonobstant enfin ce que soutient M. U... , iI ne peut y avoir lieu en l'espèce à requalification de la mise à pied conservatoire ayant débuté le 7 août 2014, telle que prévue à l'article L. 1332-3 du code du travail, en une mise à pied disciplinaire qui, selon lui, aurait déjà sanctionné le manquement lui étant reproché et rendrait alors de facto son licenciement injustifié en vertu de l'adage non bis in idem voulant que l'on ne puisse sanctionner deux fois un même fait fautif, puisque les six jours s'étant écoulés entre le 7 août - effectivité de la mise à pied conservatoire - et le 13 août 2014 - lettre de convocation à un entretien préalable prévu le 3 septembre - correspondent au délai raisonnable dont l'employeur avait besoin pour procéder aux dernières vérifications s'étant avérées indispensables, délai reposant ainsi sur un motif légitime avant que ne lui soit expressément confirmée sa « mise à pied... prononcée à titre conservatoire pendant tout le déroulement de la procédure et dans l'attente de la décision à intervenir » ; que ces circonstances factuelles, au regard des implications directes en termes de responsabilité et d'assurances en cas d'accident de la route, amènent la cour à retenir contre M. U... la qualification de faute grave ayant rendu impossible la poursuite entre les parties de l'exécution du contrat de travail avec la nécessité de son départ immédiat de l'entreprise sans indemnités ; que son licenciement pour faute grave est donc pleinement justifié.

ALORS, 1°), QUE le juge, qui ne peut statuer par voie d'affirmation, doit préciser sur quels éléments de preuve il se fonde ; qu'en considérant, pour retenir que la mise à pied avait un caractère conservatoire, que le délai de six jours qui avait précédé l'engagement de la procédure de licenciement était celui dont l'employeur avait eu besoin pour procéder aux dernières vérifications indispensables, sans ni préciser la nature de ces vérifications ni si l'employeur les avait effectuées ni sur quels éléments de preuve elle se fondait, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°) et en tout état de cause, QUE la faute grave, qui seule peut justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien dans l'entreprise ; qu'en considérant que la faute commise par le salarié avait rendu impossible la poursuite entre les parties de l'exécution du contrat de travail avec la nécessité de son départ immédiat de l'entreprise cependant que le fait reproché au salarié qui comptait six ans d'ancienneté, était isolé et que le salarié avait procédé à la régularisation de sa situation avant même l'engagement de la procédure de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-19329
Date de la décision : 03/03/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 15 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mar. 2021, pourvoi n°19-19329


Composition du Tribunal
Président : Mme Leprieur (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.19329
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