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03/02/2021 | FRANCE | N°19-21658

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 février 2021, 19-21658


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 149 F-D

Pourvoi n° J 19-21.658

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Etablissements Gaston Roze et

Fils, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 19-21.658 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2019 par la cour...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 149 F-D

Pourvoi n° J 19-21.658

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Etablissements Gaston Roze et Fils, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 19-21.658 contre l'arrêt rendu le 26 juin 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme R... X..., épouse P..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

Mme X... a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Etablissements Gaston Roze et Fils, de Me Occhipinti, avocat de Mme X..., après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Reims, 26 juin 2019), Mme X... a été engagée par la société Etablissements Gaston Roze et Fils à compter du 1er décembre 1972.

2. Suite à un arrêt de travail pour maladie professionnelle, elle a été déclarée inapte à son poste de travail le 18 mars 2015.

3. Licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 9 juillet 2015, elle a saisi la juridiction prud'homale.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée des sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférent ainsi qu'à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :

« 1°/ que si en principe le refus par un salarié d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement n'implique pas, à lui seul, le respect par celui-ci de cette obligation, il en va autrement lorsque l'absence de reclassement du salarié est due à son refus abusif d'un emploi conforme aux préconisations du médecin du travail et qui n'entraînait aucune modification du contrat de travail ; qu'en jugeant en l'espèce le licenciement de Mme X... sans cause réelle et sérieuse en raison d'une violation par la société Gaston Roze de son obligation de reclassement, quand elle constatait expressément que la salariée avait refusé à plusieurs reprises le poste de magasinière et assistante contrôle qui lui avait été proposé par son employeur et que ce refus était abusif dès lors que le poste était conforme aux préconisations du médecin du travail, interrogé avant et après la proposition de poste, et qu'il n'entraînait aucune modification du contrat de travail puisque le temps de travail, la qualification et le salaire étaient maintenus, ce dont il se déduisait que l'impossibilité de reclassement de la salariée était exclusivement due à son refus abusif de l'emploi qui lui avait été proposé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige ;

2°/ que l'employeur peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte dans ses recherches de reclassement ; que lorsque toutes les entreprises du groupe sont situées dans la même localité en France, l'employeur peut déduire la volonté du salarié de ne pas être reclassé au niveau du groupe, sur le territoire national, comme à l'étranger, du refus par le salarié d'un poste en France en raison de sa localisation ; qu'en l'espèce, la société Gaston Roze faisait valoir et démontrait que Mme X... ne souhaitait pas être reclassée à un poste éloigné de son domicile et de son ancien lieu de travail, en France comme à l'étranger, dès lors que dans son courrier en date du 23 avril 2015, elle avait refusé le poste de reclassement sur le site des Hautes Rivières, pourtant situé à seulement 18 kms de son ancien poste de travail, en raison de sa localisation et que l'ensemble des société relevant du périmètre de reclassement sont toutes situées aux Hautes Rivières ; qu'en considérant, pour retenir un manquement de la société Gaston Roze à son obligation de reclassement, qu'il n'est justifié ni d'une absence de poste disponible dans les entreprises du groupe, ni de recherches loyales de solutions de reclassement dans toutes les entreprises du groupe, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par l'employeur, si la volonté de Mme X... de ne pas être reclassée au sein des sociétés du groupe situées en France comme à l'étranger ne résultait pas du courrier du 23 avril 2015 dans lequel elle avait refusé le poste d'assistance administrative sur le site de Hautes Rivières en raison de sa localisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

5. Le refus par le salarié de postes de reclassement n'impliquant pas à lui seul l'impossibilité pour l'employeur de le reclasser, la cour d'appel, qui a retenu que la société ne justifiait pas d'une recherche loyale et sérieuse au sein des sociétés du groupe, a légalement justifié sa décision.

Sur le moyen du pourvoi incident

Enoncé du moyen

6. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande au titre de l'indemnité spéciale de licenciement, alors :

« 1°/ que seul un refus abusif d'un poste de reclassement prive le salarié licencié pour inaptitude d'origine professionnelle de l'indemnité spéciale de licenciement ; que l'abus est analysé en fonction des éléments d'information en possession du salarié ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, s'il n'était pas exact que l'employeur s'était abstenu de communiquer à Mme P... les lettres du médecin du travail confirmant que la poste de magasinière proposé était conforme à ses préconisations, de sorte que son refus de ce poste ne pouvait pas être considéré comme abusif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-14 du code du travail ;

2°/ que refuser un poste présenté comme conforme aux préconisations du médecin du travail n'est pas abusif en soi ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le poste de magasinière proposé à Mme P... n'impliquait pas, en réalité, le port de charges supérieures à cinq kilos et ne violait donc pas les préconisations du médecin du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-14 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel, qui a constaté que le poste était conforme aux préconisations du médecin du travail, qui avait été interrogé avant et après la proposition de poste, et que la société avait renouvelé au salarié à la suite de cette consultation sa proposition, en précisant la réponse du médecin du travail, a légalement justifié sa décision.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Etablissements Gaston Roze et Fils

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Établissements Gaston Roze et Fils à payer à Mme P... les sommes de 3580 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 358 euros au titre des congés payés y afférents et 25000 euros au titre des dommages-intérêts en réparation des préjudices nés du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE « Mme R... P... soutient que son licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse : - que l'employeur, voyant se réduire les capacités de sa salariée, n'a pas assuré, par la formation, son employabilité, ; - que l'employeur a violé son obligation de reclassement en lui proposant un poste qui ne correspondait pas à l'avis d'inaptitude, lequel interdisait toute manutention ; que le médecin du travail ne pouvait modifier son avis en permettant par la suite un port de charges n'excédant pas 5 kg ; qu'en toute hypothèse, le poste proposé comprenait une manutention de charges supérieures à 5 kg ; que le poste administratif lui a été proposé sans formation ; que l'employeur n'a pas suivi les préconisations du médecin ; elle note que la société appartient au groupe ROZE et qu'elle ne justifie pas de l'absence de poste disponible au sein du groupe ; l'employeur soutient avoir fait une recherche de poste dans différents établissements et sollicité les sociétés du groupe ; qu'il appartient à la salariée de prouver la permutabilité des emplois dans les sociétés du groupe ; que la société de Tunisie n'a commencé à produire que bien après la recherche de reclassement ; que les recherches faites ont dégagé deux propositions de postes, conformes aux préconisations du médecin ; que la salariée les a refusés, l'un en raison de sa localisation alors que le poste était distant de 18 km de son ancien lieu de travail ; que le médecin a pu, conformément à la jurisprudence, préciser son avis et admettre la comptabilité des postes proposés ; la preuve de l'impossibilité du reclassement incombe à l'employeur, qui doit proposer au salarié déclaré inapte par le médecin du travail un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l'emploi précédent, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de poste ou aménagement du temps de travail ; il n'est pas contesté que la société appartient à un groupe ; en pièce 26 de son dossier, la salariée produit un extrait du site internet du groupe qui présente les sociétés incluses dans son périmètre comme étant : - la société GASTON ROZE, - la société BOURGUIGNON BARRE, - la société BARROIS BADRE, - la société BROUET LEONARD, - la société LEON JEAN BADRE ; s'ajoute la société ROZE TUNISIE créée en 2015 et entrée en production en 2016 comme en justifie l'attestation de son comptable ; l'employeur prétend que le périmètre du groupe n'est pas celui décrit par la salariée alors que ce périmètre découle de sa propre présentation publique du groupe ; ainsi, il souvient que la société BROUET LEONARD ne fait pas partie du groupe alors qu'elle est présentée dans la pièce précitée comme faisant partie du groupe et qu'elle a pour président, le président de la société GASTON ROZE ; d'ailleurs, dans un courriel du 7 avril 2015, le médecin du travail indique qu'il valide la compatibilité de l'état de santé de la salariée avec les postes ‘montage' ‘contrôle final' ainsi que les postes de saisie de relevés de production aussi bien chez BOURGUIGNON BARRE que chez LEONARD BROUET ou chez BARROIS BADRE ; il en ressort que le périmètre de reclassement s'étend bien à ces sociétés citées par le médecin ; l'employeur peut se libérer de son obligation en justifiant l'absence de poste disponible dans les sociétés du groupe, ce qu'il ne fait pas, faute de production des registres du personnel des entreprises, l'absence d'une telle pièce étant pourtant soulignée par la salariée dans ses écritures ; il ne produit pas le moindre élément de preuve d'une vérification de l'existence ou de la non existence de postes disponibles susceptibles d'être proposés à Mme R... P..., fut-ce après un aménagement ; pour autant, il faut apprécier la recherche loyale de poste disponible par l'employeur ; or, aucune pièce du dossier, si ce n'est la proposition de deux postes, ne vient témoigner des démarches, dans toutes les sociétés du groupe, pour la recherche de postes disponibles susceptibles d'être compatibles avec les exigences légales et les préconisations de la médecine du travail ; seule la soumission des postes envisagés à l'appréciation du médecin du travail est justifiée ; le refus par un salarié déclaré inapte à son poste d'une proposition de reclassement n'implique pas, à lui seul, le respect par l'employeur de son obligation de reclassement ; par conséquent, il n'est justifié ni d'une absence de poste disponible dans les entreprises du groupe, ni de recherches loyales de solutions de reclassement dans toutes les entreprises du groupe ; surabondamment, il sera fait observer que l'absence de consultation des délégués du personnel n'est pas érigé en moyen dès lors que l'employeur produit le procès-verbal de carence pour les élections de 2014 ; dans ces conditions, le licenciement doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé de ce chef ; Mme R... P... est fondée à prétendre à : - une indemnité compensatrice de préavis de deux mois en application de l'article L.1234-1 du code du travail, soit la somme de 3.580 euros sur la base d'un salaire de 1.789,94 euros, salaire qu'elle aurait perçu si elle avait travaillé ; - à des congés payés y afférent, soit la somme de 358,00 euros ; - à des dommages et intérêts en réparation des préjudices nés de la rupture abusive du contrat de travail sur le fondement de l'article L1226-15 du code du travail, étant précisé que la salariée a plus de deux ans d'ancienneté et que l'entreprise occupait plus de onze salariés ; compte tenu de l'ancienneté de 42 ans et 7 mois, de l'âge de la salariée (58 ans), des conséquences du licenciement à son égard, sachant qu'elle justifie de l'ouverture de droit à l'allocation de retour à l'emploi à compter du 19 octobre 2015 et bénéficier de sa retraite personnelle depuis le 1er novembre 2016, la somme d e25 000 euros apparaît de nature à réparer entièrement les préjudices subis, étant observé que les salaires pour six mois travaillés s'élèvent à 21 480 euros » ;

1°) ALORS QUE si en principe le refus par un salarié d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement n'implique pas, à lui seul, le respect par celui-ci de cette obligation, il en va autrement lorsque l'absence de reclassement du salarié est due à son refus abusif d'un emploi conforme aux préconisations du médecin du travail et qui n'entraînait aucune modification du contrat de travail ; qu'en jugeant en l'espèce le licenciement de Mme P... sans cause réelle et sérieuse en raison d'une violation par la société Gaston Roze de son obligation de reclassement, quand elle constatait expressément que la salariée avait refusé à plusieurs reprises le poste de magasinière et assistante contrôle qui lui avait été proposé par son employeur et que ce refus était abusif dès lors que le poste était conforme aux préconisations du médecin du travail, interrogé avant et après la proposition de poste, et qu'il n'entraînait aucune modification du contrat de travail puisque le temps de travail, la qualification et le salaire étaient maintenus, ce dont il se déduisait que l'impossibilité de reclassement de la salariée était exclusivement due à son refus abusif de l'emploi qui lui avait été proposé, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige.

2°) ALORS QUE l'employeur peut tenir compte de la position prise par le salarié déclaré inapte dans ses recherches de reclassement ; que lorsque toutes les entreprises du groupe sont situées dans la même localité en France, l'employeur peut déduire la volonté du salarié de ne pas être reclassé au niveau du groupe, sur le territoire national comme à l'étranger, du refus par le salarié d'un poste en France en raison de sa localisation ; qu'en l'espèce, la société Gaston Roze faisait valoir et démontrait que Mme P... ne souhaitait pas être reclassée à un poste éloigné de son domicile et de son ancien lieu de travail, en France comme à l'étranger, dès lors que dans son courrier en date du 23 avril 2015, elle avait refusé le poste de reclassement sur le site des Hautes Rivières, pourtant situé à seulement 18 kms de son ancien poste de travail, en raison de sa localisation et que l'ensemble des sociétés relevant du périmètre de reclassement sont toutes situées aux Hautes Rivières (conclusions, p. 15) ; qu'en considérant, pour retenir un manquement de la société Gaston Roze à son obligation de reclassement, qu'il n'est justifié ni d'une absence de poste disponible dans les entreprises du groupe, ni de recherches loyales de solutions de reclassement dans toutes les entreprises du groupe, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par l'employeur, si la volonté de Mme P... de ne pas être reclassée au sein des sociétés du groupe situées en France comme à l'étranger ne résultait pas du courrier du 23 avril 2015 dans lequel elle avait refusé le poste d'assistance administrative sur le site de Hautes Rivières en raison de sa localisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige. Moyen produit, au pourvoi incident, par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour Mme X..., épouse P...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme P... de sa demande au titre de l'indemnité spéciale de licenciement ;

AUX MOTIFS PROPRES QU'en application de l'article L.1226-14 du code du travail, l'indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9 du code du travail n'est pas due au salarié inapte à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle lorsque l'employeur établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif. Est abusif le refus d'une proposition de reclassement conforme aux préconisations du médecin du travail et qui n'entraîne aucune modification du contrat de travail. Ce caractère abusif ne peut être retenu que lorsqu'il s'agit d'un refus sans motif légitime d'un poste approprié aux nouvelles capacités et comparable à l'emploi précédemment occupé. En l'espèce, le 18 mars 2015, le médecin du travail a rendu l'avis suivant : 'inapte au poste occupé : à reclasser à un poste sans manutention, sans élévation des bras au-dessus du plan des épaules, sans utilisation d'engins vibrants. Inaptitude en une seule visite pour danger immédiat. Art R. 4624-313 " Deux postes ont été proposés à Mme R... P... par courrier du 13 avril 2015 avec maintien du salaire, du temps de travail et de la qualification. Le 23 avril 2015, Mme R... P... a refusé le poste de magasinière et assistante contrôle, au motif que "ce poste comporte systématiquement et nécessairement de la manutention" et celui d'assistante administrative aux motifs qu'il nécessitait une modification de l'emploi par sa localisation et ne répondait pas à ses capacités. Par courrier du 27 avril 2015, l'employeur a précisé comprendre le refus de Mme R... P... concernant le second poste. En revanche, s'agissant du premier poste, il a précisé que le médecin du travail avait été favorable à cette proposition. Le 3 mai 2015, Mme R... H... a maintenu son refus et réitéré le fait que le poste comportait de la manutention. Le 12 mai 2015, la société a sollicité le médecin du travail afin d'aménager le poste de magasinière et assistante contrôle eu égard aux refus de la salariée. Le 19 mai 2015, celui-ci a répondu "renouveler son avis favorable" pour ce type de poste et ajouté que s'agissant du poste d'assistante administrative, il pourrait être proposé à la salariée une formation adaptée. Le 5 juin 2015, la société a renouvelé sa proposition de poste de magasinière et assistante contrôle à Mme R... H... en précisant la réponse du médecin, laquelle a réitéré son refus par courrier du 18 juin 2015, soutenant que le médecin se contredisait par rapport à son avis d'inaptitude. Si s'agissant du poste d ' assistante administrative, le refus de Mme R... H... ne saurait être qualifié d'abusif, il en est autrement de celui opposé pour le poste de magasinière et assistante contrôle. En effet, le poste était conforme aux préconisations du médecin, qui a été interrogé avant et après la proposition de poste, et n'entraînait aucune modification du contrat de travail puisque le temps de travail, la qualification et le salaire étaient maintenus. En conséquence, Mme R... P... sera déboutée de sa demande et le jugement confirmé de ce chef ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les deux postes de reclassement proposés un poste de magasinier et assistance contrôle de production, position assise, service magasin, tendeur), mise en sachet de petites pièces, conditionnement. Contrôle final : vérification de la conformité des pièces. Saisies des relevés de production sur fichier existant (excel) un poste d'assistance administrative sur un autre site à Hautes Rivières situé à 18 kms ont reçu l'aval du médecin du travail et sont des propositions sérieuses et précises. Mme P..., au terme d'un processus de 4 mois de recherche a refusé ces postes de reclassement. Ce poste correspond aux prescriptions du médecin du travail ; ce poste ne s'accompagne pas d'une diminution de salaire ; qu'il n' entraîne pas de réduction du coefficient hiérarchique ; qu'il n'impose pas un changement d'horaire substantiel ; le poste proposé est adapté aux capacités résiduelles du salarié et comparable à son précédent emplois En rappel , en particulier , poste assis ,mise en sachet de petites pièces, saisies de relevés ; l'art L 6321-1 du code du travail prévoit en matière de formation, une adaptation du salarié à son poste de travail et non une formation initiale que le salarié n'aurait pas la recherche d'un poste de .reclassement ne peut sc faire que dans les compétences initiales du salarié, qu'en l'espèce pour le poste d'assistance administrative la Société Roze pouvait envisager une formation pour Mme P... , mais ce ne fut pas le cas, car elle refusera le poste pour hors compétence pour elle, mais surtout trop éloigné (18 km) ; le médecin du travail est l'expert le plus compétent et reconnu pour évaluer les correspondances entre les postes dans l'entreprise, les difficultés physiques des métiers et les capacités physiques résiduelles, pour émettre un avis sur la position de refus du salarié ; clans une de ses correspondances avec l'employeur elle met en doute péremptoirement l'avis du médecin du travail en osant dire : « En l'occurrence sans doute le médecin du travail malgré sa compétence d'Expert médical a-t-il par sa méconnaissance du poste, sous-estimé la réalité et les conséquences de ce poste ; qu'en l'espèce sur le poste de magasinier et assistance en production, seul le médecin du travail est capable de déterminer les capacités physiques résiduelles salarié à occuper tel emploi ; le poste de reclassement proposé par la Société Roze est en pleine correspondance avec les critères de reclassement définis par l'ait L 1226-10 du code du travail le refus de l'accepter par Mme P... ne peut avoir comme conséquence qu'un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Il y a bien une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'en l'espèce après un long processus de recherche, le médecin du travail écrit devant le refus de Mme P... : un peu de bonne foi dans ce domaine ne serait pas inutile, l'attitude de Mme P... est en effet surprenante et relève à mon avis du refus d'être reclassée » ; malgré tout Mme P... rejette les propositions de l'employeur, employeur qui s'est efforcé dans l'intérêt de Mme P..., de trouver une solution de reclassement ; de ces éléments, il conviendra de qualifier le licenciement de Mme P... non seulement comme ayant une cause réelle et sérieuse mais également de caractériser son refus de reclassement comme abusif ; l'article L 1226-14 du code travail prévoit notamment une indemnité compensatrice de préavis dont le montant correspond au doublement de l'indemnité légale de licenciement en cas de licenciement suite à une inaptitude professionnelle ayant pour motif une impossibilité de reclassement ; a contrario le refus de reclassement de Mme P... est considéré comme abusif, la société Roze n'a pas à verser l'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L 1226-14 du code du travail ;

1°) – ALORS QUE seul un refus abusif d'un poste de reclassement prive le salarié licencié pour inaptitude d'origine professionnelle de l'indemnité spéciale de licenciement ; que l'abus est analysé en fonction des éléments d'information en possession du salarié ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, s'il n'était pas exact que l'employeur s'était abstenu de communiquer à Mme P... les lettres du médecin du travail confirmant que la poste de magasinière proposé était conforme à ses préconisations, de sorte que son refus de ce poste ne pouvait pas être considéré comme abusif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-14 du code du travail ;

2°) - ALORS QUE refuser un poste présenté comme conforme aux préconisations du médecin du travail n'est pas abusif en soi ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le poste de magasinière proposé à Mme P... n'impliquait pas, en réalité, le port de charges supérieures à cinq kilos et ne violait donc pas les préconisations du médecin du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 1226-14 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-21658
Date de la décision : 03/02/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 26 juin 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 fév. 2021, pourvoi n°19-21658


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.21658
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