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03/02/2021 | FRANCE | N°19-17526

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 février 2021, 19-17526


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 175 F-D

Pourvoi n° T 19-17.526

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La Société pour l'informatique ind

ustrielle SII, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Feel Europe groupe, elle-même venant aux droits de la soc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 175 F-D

Pourvoi n° T 19-17.526

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La Société pour l'informatique industrielle SII, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Feel Europe groupe, elle-même venant aux droits de la société Feel Europe IDF, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

a formé le pourvoi n° T 19-17.526 contre l'arrêt rendu le 11 avril 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à M. R... Y..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société pour l'informatique industrielle SII, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Y..., après débats en l'audience publique du 9 décembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Reprise d'instance

1. Il est donné acte à la Société pour l'informatique industrielle SII de sa reprise d'instance.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 avril 2019), M. Y... a été engagé à compter du 3 janvier 2012 par la société Feel Europe Infrastuctures, aux droits de laquelle vient la société Feel Europe IDF, en qualité d'analyste d'exploitation, statut cadre, coefficient 130, position 2.2.

3. Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil du 15 décembre 1987, dite Syntec, et le contrat de travail énonçait que la durée du travail est fixée forfaitairement à 38 heures 30 par semaine complète de travail, le salarié bénéficiant en outre de 10 jours de RTT par année civile complète.

4. Le 30 novembre 2015, M. Y... a démissionné de son emploi et a saisi, le 23 décembre 2015, la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir le prononcé de la nullité de convention de forfait et le paiement de diverses sommes.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié certaines sommes au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents et au titre de l'indemnité compensatrice de repos compensateur non pris, outre les congés payés afférents, alors « que l'article 3 du chapitre 2 de l'accord national du 22 juin 1999 prévoit, pour les cadres qui ne peuvent suivre un horaire prédéfini, la possible conclusion d'une convention de forfait en heures de 38 heures 30 par semaine avec une rémunération forfaitaire au moins égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, en posant une garantie d'un nombre maximal de jours de travail et de contrôle annuel du nombre de jours travaillés ; qu'il n'impose ni que le nombre maximum de jours travaillés soit rappelé dans la convention individuelle de forfait, ni que le nombre de jours travaillés donne lieu à l'établissement de documents particuliers et s'accompagne d'entretien entre le salarié et l'employeur sur la charge de travail de l'intéressé ; que les conventions de forfait en heures conclues en application de ces dispositions sont donc valables dès lors qu'elle fixent le nombre d'heures de travail hebdomadaires inclues dans le forfait et restent opposables au salarié même en l'absence d'un dispositif spécifique de contrôle du nombre de jours travaillés et d'entretien destiné à suivre sa charge de travail ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué, d'une part, que le contrat de travail de M. Y... prévoyait, en visant les dispositions conventionnelles précitées, que sa durée de travail est fixée forfaitairement à 38 heures 30 par semaine complète d'activité et, d'autre part, que la société Feel Europe lui demandait de renseigner des comptes-rendus d'activité mensuels ; qu'en considérant, après avoir pourtant reconnu que le salarié était soumis à une convention de forfait en heures, et non en jours, que cette convention de forfait était privée d'effet, dès lors qu'elle ne précisait pas le nombre maximum de jours travaillés, que l'employeur ne justifiait pas d'un contrôle du temps de travail autrement qu'en produisant les comptes-rendus d'activité précités et qu'il n'avait pas organisé d'entretien avec le salarié, ni exercé un suivi régulier de la charge de travail du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-38 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et l'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3121-10, L. 3121-22, L. 3121-39, L. 3121-40, L. 3121-41 du code du travail dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail attaché à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 :

6. Selon l'article L. 3121-39 du code du travail, la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année est prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou à défaut, par une convention ou un accord de branche qui détermine préalablement les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait ainsi que la durée individuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi et fixe les caractéristiques principales de ces conventions.

7. En application de cette disposition, l'accord du 22 juin 1999 prévoit, en son chapitre II, trois modalités de gestion du temps de travail, au nombre desquelles figure une modalité intitulée « réalisation de missions » laquelle, en ce qu'elle prévoit d'une part, une convention horaire sur une base hebdomadaire de trente-huit heures trente avec une rémunération forfaitaire au moins égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, d'autre part, un nombre maximum de jours travaillés dans l'année, constitue un forfait en heures assorti de la garantie d'un nombre maximal annuel de jours de travail.

8. Pour déclarer la convention de forfait inopposable au salarié et faire droit à ses demandes au titre des heures supplémentaires et des repos compensateurs, l'arrêt, après avoir constaté que les parties avaient conclu une convention de forfait en heures dans le cadre des dispositions de l'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999, retient, d'une part, que la société n'a pas indiqué le nombre de jours maximum travaillés de 219 jours et d'autre part, qu'elle n'a jamais convoqué le salarié à des entretiens annuels obligatoires dans le cadre d'un temps de travail forfaitisé, n'a pas contrôlé la réalité de son temps et de sa charge de travail, et n'était pas ainsi à même de rectifier rapidement, le cas échéant, les éventuelles anomalies en cas de non-respect des exigences de protection et de la santé et de la sécurité au travail.

9. En statuant ainsi, alors que l'accord du 22 juin 1999 n'exige, pour appliquer au salarié, qui y est éligible, la modalité dite « réalisation de missions », ni l'indication du nombre maximum de jours travaillés dans la convention individuelle de forfait en heures, ni l'organisation d'un suivi régulier de la charge de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société à verser au salarié la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour perte de bénéfice de formation, l'arrêt rendu le 11 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Feel Europe IDF

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Feel Europe IDF à payer à M. Y... les sommes de 6.650 au titre des heures supplémentaires, outre les congés payés afférents et de 9.020,37 euros au titre de l'indemnité compensatrice de repos compensateur non pris, outre les congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE « M. Y... soutient que la durée de son travail était régie par une convention de forfait qui est nulle. Il invoque en premier lieu l'existence d'une convention de forfait jours en raison de la mention sur ses bulletins de salaire et pendant l'intégralité de la relation de travail d'un "forfait annuel 218 jours". Il vise également les dispositions de l'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999 qui a pour objet la convention de forfait en heures sur la semaine. La société FEEL EUROPE IDF fait valoir que M. Y... n'était pas soumis à un forfait annuel en jours mais qu'il a été convenu un forfait en heures selon la modalité "réalisation de missions" prévue par l'accord de branche SYNTEC du 22 juin 1999 sur la durée du travail. Le contrat de travail liant les parties stipule en son article 7 : " Dans la mesure où la durée du travail du salarié ne peut suivre strictement un horaire prédéfini par l'employeur, et conformément aux dispositions de l'article L. 3121-28 du code du travail, et à celles de la convention collective applicable, la durée de travail applicable est fixée de manière forfaitaire dans le cadre des modalités dites de « réalisation de mission ». La durée de travail est fixée forfaitairement à 38h30 par semaine complète de travail. Le salarié bénéficie en outre de 10 jours de RTT par année civile complète, dont la moitié est prise à son initiative et l'autre à l'initiative de la Direction (...)". L'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail définit trois modalités de gestion des horaires : - modalités standard ; - modalités de réalisation de missions ; - modalités de réalisation de missions avec autonomie complète. L'article 3 invoqué par M. Y... définit les modalités de réalisation de missions en ces termes : " Ces modalités s'appliquent aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète. Tous les ingénieurs et cadres sont a priori concernés, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. De plus, en fonction de l'activité de l'entreprise, un accord d'entreprise doit préciser les conditions dans lesquelles d'autres catégories de personnel peuvent disposer de ces modalités de gestion. Compte tenu de la nature des tâches accomplies (responsabilités particulières d'expertise technique ou de gestion qui ne peuvent s'arrêter à heure fixe, utilisation d'outils de haute technologie mis en commun, coordination de travaux effectués par des collaborateurs travaillant aux mêmes tâches...), le personnel concerné, tout en disposant d'une autonomie moindre par rapport aux collaborateurs définis à l'article 3, ne peut suivre strictement un horaire prédéfini. La comptabilisation du temps de travail de ces collaborateurs dans le respect des dispositions légales se fera également en jours, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement (chapitre III). Les appointements de ces salariés englobent les variations horaires éventuellement accomplies dans une limite dont la valeur est au maximum de 10 % pour un horaire hebdomadaire de 35 heures. La rémunération mensuelle du salarié n'est pas affectée par ces variations. Les dépassements significatifs du temps de travail, commandés par l'employeur, au-delà de cette limite, représentant des tranches exceptionnelles d'activité de 3,5 heures, sont enregistrés en suractivité. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer ces suractivités qui ont vocation à être compensées par des sous-activités (récupérations, intercontrats...) par demi-journée dans le cadre de la gestion annuelle retenue. Ces salariés ne peuvent travailler plus de 219 jours pour l'entreprise, compte non tenu des éventuels jours d'ancienneté conventionnels. Le compte de temps disponible peut être utilisé pour enregistrer les jours accordés aux salariés concernés par ces modalités. Toutefois, ce chiffre de 219 jours pourra être abaissé par accord d'entreprise ou d'établissement, négocié dans le cadre de l'article L. 132-19 du code du travail. Le personnel ainsi autorisé à dépasser l'horaire habituel dans la limite de 10 % doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie. L'adoption de ces modalités de gestion du temps de travail ne peut entraîner une baisse du salaire brut de base en vigueur à la date de ce choix." Il résulte clairement de ces stipulations contractuelles et des dispositions de l'accord précité que les parties ont conclu une convention de forfait en heures sur la semaine dans le cadre des dispositions de l'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999 applicable à la situation de M. Y... qui avait le statut de cadre et dont les tâches correspondaient à celles définies par cette article. Cet élément est corroboré par le paiement d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie qui serait exclu en cas d'application d'une convention de forfait jours. La mention d'un forfait jours annuel de 218 jours sur les bulletins de paie est donc inopérante. Il convient donc de rechercher si la convention de forfait en heures sur la semaine est nulle. A l'appui de cette nullité, M. Y... fait valoir qu'en contravention des dispositions de l'accord de branche du 22 juin 1999, la société n'a pas indiqué le nombre de jours maximum travaillés, 219 jours, elle ne l'a jamais convié à des entretiens annuels obligatoires dans le cadre d'un temps de travail forfaitisé et n'a pas contrôlé la réalité de son temps et de sa charge de travail. Comme le souligne à juste titre le salarié, le contrat de travail ne précise pas qu'il ne peut pas travailler plus de 219 jours par an. En outre, alors que l'accord du 22 juin 1999 prévoit une comptabilisation en jours du temps de travail des collaborateurs soumis à une convention de forfait en heures sur la semaine, avec un contrôle du temps de travail opéré annuellement, il ne résulte pas des éléments produits que la société a effectué un contrôle de la réalité du temps de travail et de la charge de travail de M. Y... sur l'année, seuls des comptes rendus d'activité du salarié étant versés au débats ainsi que des demandes de l'employeur à ce titre. Au surplus, aucun compte rendu d'entretien entre le salarié et l'employeur n'est produit aux débats. Ainsi la société n'exerçait pas un suivi régulier de la charge de travail et n'était pas à même de rectifier rapidement, le cas échéant, les éventuelles anomalies en cas de non-respect des exigences de protection de la santé et de la sécurité du salarié. Dès lors, la convention de forfait est privée d'effet. La décision des premiers juges sera infirmée. Sur les heures supplémentaires ; M. Y... soutient qu'il a effectué 13 heures supplémentaires par semaine, leur seuil de déclenchement devant être fixé à 35 heures. Il souligne qu'il a accompli également des astreintes. La société FEEL EUROPE IDF conteste la réalisation d'heures supplémentaires au-delà de celles qui ont été rémunérées et souligne que le seuil de déclenchement de ces heures est fixé à 38 heures 30. Elle fait valoir que M. Y... ne produit des éléments que pour l'année 2014 qu'il extrapole pour les années 2013 et 2015 et qu'il confond astreinte et heures de travail. Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Il appartient, cependant, au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement exécutés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments. En l'espèce, M. Y... produit des fiches d'intervention et des fiches d'astreintes. A juste titre, la société fait remarquer que l'astreinte n'est pas un temps de travail effectif en dehors de toute intervention et qu'elle ne doit pas être confondue avec les heures supplémentaires. Les fiches d'intervention concernent l'année 2014. Elles comportent l'heure de début et de fin de chaque intervention chez le client. Ainsi, M. Y... étaye sa demande au titre de cette année. Par contre, il ne produit aucun élément de nature à étayer sa demande pour les années 2013 et 2015. En réponse pour l'année 2014, la société verse aux débats des échanges de mails entre M. Y... et la société comportant pour l'un d'entre eux (mail du 8 octobre 2014) le décompte d'heures supplémentaires effectué par le salarié. Elle n'apporte pas d'éléments concernant les horaires de travail effectués par le salarié et conteste uniquement son mode de décompte de manière non circonstanciée. Elle fait valoir à tort que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires est fixé à 38 heures 30 de travail hebdomadaire alors que la cour a précédemment retenu que la convention de forfait était privée d'effet de sorte que ce seuil de déclenchement est fixé à 35 heures par semaine. Il résulte de ces éléments que M. Y... n'étaye pas sa demande au titre des années 2013 et 2015. Il ne sera pas fait droit à sa demande au titre de ces deux années. Au titre de l'année 2014, au vu des éléments produits de part et d'autre, la cour retient qu'il a effectué des heures supplémentaires dont certaines ont été payées comme cela résulte des bulletins de paie de l'année 2014. En conséquence, la société sera condamnée à lui payer la somme de 6 650 euros au titre des heures supplémentaires effectuées au cours de l'année 2014 outre la somme de 665 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents. La décision des premiers juges sera infirmée. Sur le repos compensateur. M. Y... soutient qu'il devait bénéficier d'un repos compensateur pour les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent annuel de 220 heures. La société FEEL EUROPE IDF conteste la réalisation d'heures supplémentaires. Il résulte des articles D. 3121-14-1, L. 3121-15 et D. 3121-7 et suivants du code du travail dans leur rédaction applicable au litige que le salarié qui a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de 220 heures et dont le contrat prend fin avant qu'il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit, reçoit une indemnité correspondant à ses droits, cette indemnité ayant une nature de salaire. En l'espèce, compte tenu des heures supplémentaires effectuées par M. Y... au-delà du contingent annuel de 220 heures au cours de l'année 2014, il lui est du la somme de 9 020,37 euros à ce titre outre celle de 902,03 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents. Il y a donc lieu d'infirmer la décision des premiers juges » ;

1. ALORS QUE l'article 3 du chapitre 2 de l'accord national du 22 juin 1999 prévoit, pour les cadres qui ne peuvent suivre un horaire prédéfini, la possible conclusion d'une convention de forfait en heures de 38h30 par semaine avec une rémunération forfaitaire au moins égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, en posant une garantie d'un nombre maximal de jours de travail et de contrôle annuel du nombre de jours travaillés ; qu'il n'impose ni que le nombre maximum de jours travaillés soit rappelé dans la convention individuelle de forfait, ni que le nombre de jours travaillés donne lieu à l'établissement de documents particuliers et s'accompagne d'entretien entre le salarié et l'employeur sur la charge de travail de l'intéressé ; que les conventions de forfait en heures conclues en application de ces dispositions sont donc valables dès lors qu'elle fixent le nombre d'heures de travail hebdomadaires inclues dans le forfait et restent opposables au salarié même en l'absence d'un dispositif spécifique de contrôle du nombre de jours travaillés et d'entretien destiné à suivre sa charge de travail ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué, d'une part, que le contrat de travail de M. Y... prévoyait, en visant les dispositions conventionnelles précitées, que sa durée de travail est fixée forfaitairement à 38h30 par semaine complète d'activité et, d'autre part, que la société Feel Europe lui demandait de renseigner des comptes-rendus d'activité mensuels ; qu'en considérant, après avoir pourtant reconnu que le salarié était soumis à une convention de forfait en heures, et non en jours, que cette convention de forfait était privée d'effet, dès lors qu'elle ne précisait pas le nombre maximum de jours travaillés, que l'employeur ne justifiait pas d'un contrôle du temps de travail autrement qu'en produisant les comptes-rendus d'activité précités et qu'il n'avait pas organisé d'entretien avec le salarié, ni exercé un suivi régulier de la charge de travail du salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-38 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige et l'article 3 du chapitre 2 de l'accord du 22 juin 1999 ;

2. ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE pour assurer le respect de la durée maximale de travail de 219 jours travaillés fixée par l'article 3 de l'accord national du 22 juin 1999, les parties au contrat de travail peuvent prévoir l'octroi au salarié d'un certain nombre de jours de repos rémunérés ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que le contrat de travail de M. Y..., qui prévoit l'application d'une durée de travail forfaitaire de 38h30 par semaine, ajoute ensuite que « le salarié bénéficie également de 10 jours de RTT par année civile complète », ce qui lui garantit une durée de travail inférieure à 219 jours travaillés, compte tenu du nombre de jours ouvrables dans l'année, du nombre de jours de congés payés légaux et du nombre moyen de jours fériés coïncidant avec un jour ouvrable ; qu'il n'était en outre nullement contesté que le salarié a bénéficié chaque année de ces jours de RTT dont le décompte figurait dans ses bulletins de paie, lesquels faisaient au demeurant état d'un « forfait annuel de 218 jours » ; qu'en estimant néanmoins que cette convention individuelle de forfait était privée d'effet, au motif inopérant qu'elle ne précisait pas le nombre maximum de jours travaillés et que l'employeur ne justifiait pas avoir organisé un contrôle particulier du nombre de jours travaillés, ni un suivi de la charge de travail du salarié, cependant que les stipulations du contrat et les mentions des bulletins de paie faisaient apparaître le respect du nombre maximum de jours travaillés par l'octroi de jours de RTT, la cour d'appel a violé l'article 3 du chapitre II de l'accord du 22 juin 1999.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-17526
Date de la décision : 03/02/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 avril 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 fév. 2021, pourvoi n°19-17526


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.17526
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