La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2021 | FRANCE | N°19-16576

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 février 2021, 19-16576


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 174 F-D

Pourvoi n° K 19-16.576

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Lesieur Routour plomb

erie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 19-16.576 contre l'arrêt rendu le 21 février 2019 par la ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 174 F-D

Pourvoi n° K 19-16.576

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Lesieur Routour plomberie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 19-16.576 contre l'arrêt rendu le 21 février 2019 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. B... H..., domicilié [...] ,

2°/ à Pôle emploi Basse Normandie, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Lesieur Routour plomberie, de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. H..., après débats en l'audience publique du 9 décembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, M. Sornay, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il est donné acte à la société Lesieur Routour plomberie de son désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Pôle emploi.

2. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 21 février 2019), M. H... a été engagé le 4 février 2013 par la société Lesieur Routour plomberie en qualité de chargé d'affaires, avec la qualification d'agent de maîtrise niveau F de la grille de classification de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment du 12 juillet 2006. Le contrat de travail, qui contenait une clause de forfait en jours, a été rompu pour motif économique après acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle le 3 juillet 2014.

3. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié une indemnité pour contrepartie obligatoire en repos non prise, des sommes au titre des congés payés afférents et au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, alors « qu'aux termes de l'article 4.1.2 de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment, dans sa rédaction antérieure à l'avenant n° 4 du 7 mars 2018, ''les entreprises peuvent utiliser pendant l'année civile un contingent d'heures supplémentaires, sans avoir besoin de demander l'autorisation de l'inspection du travail, dans la limite de 145 heures. Ce contingent est augmenté de 35 heures par an et par salarié pour les salariés dont l'horaire n'est pas annualisé'', soit 180 heures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a écarté l'application de la convention de forfait jours, ce qui entraînait le retour à une durée du travail non annualisée de sorte que le contingent applicable était de 180 heures par an ; qu'en condamnant la société Lesieur Routour plomberie à lui payer une somme de 24 299 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos calculée au regard d'un contingent de 145 heures, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

6. Le salarié conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que devant la cour d'appel l'employeur ne prétendait pas qu'en application de la convention collective applicable, la contrepartie obligatoire en repos n'était due qu'à partir de la 181e heure dans la mesure où la remise en cause, par le juge, du forfait en jours conduirait à considérer rétrospectivement que le salarié n'était pas soumis à un « horaire annualisé ». Il en déduit que le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit.

7. Cependant, le moyen, ne se prévalant d'aucun fait qui n'ait été constaté par la cour d'appel, est de pur droit et peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation.

8. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l'article 4.1.2 de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment du 12 juillet 2006, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'avenant n° 4 du 7 mars 2018 :

9. Selon ce texte, les entreprises peuvent utiliser pendant l'année civile un contingent d'heures supplémentaires dans la limite de 145 heures. Ce contingent est augmenté de 35 heures par an et par salarié pour les salariés dont l'horaire n'est pas annualisé.

10. Pour condamner l'employeur au paiement d'une somme au titre de la contrepartie obligatoire en repos, l'arrêt, après avoir déclaré la convention de forfait en jours « inopposable » au salarié, retient que les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel ouvrent droit à un repos compensateur égal à 50 % de ces heures dans les entreprises de moins de vingt salariés et à 100 % de ces heures dans les entreprises de plus de vingt salariés, que la société a un effectif supérieur à vingt salariés, qu'au regard du contingent d'heures supplémentaires tel que prévu par la convention collective applicable, à savoir 145 heures, il est dû au salarié de ce chef la somme de 24 299 euros, laquelle comprend l'indemnité de congés payés afférente aux heures de repos non prises.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle avait dit que le salarié n'avait pas été valablement soumis à une convention de forfait en jours, ce dont il résultait qu'il pouvait prétendre au paiement d'heures supplémentaires décomptées par semaine civile, la cour d'appel, qui aurait dû en déduire que seules les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel conventionnel applicable aux salariés dont l'horaire n'est pas annualisé, soit 180 heures, ouvraient droit à une contrepartie obligatoire en repos, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

12. La cassation n'atteint pas les chefs du dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Lesieur Routour plomberie à verser à M. H... les sommes de 22 090 euros à titre d'indemnité pour contrepartie obligatoire en repos non prise et de 2 209 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 21 février 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;

Condamne M. H... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Lesieur Routour plomberie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Lesieur Routour Plomberie à verser à M. H... les sommes de 41 855 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de 4 185 € à titre d'indemnités de congés payés afférents, d'AVOIR dit que les sommes à caractère salarial produisaient intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire produisaient intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, d'AVOIR dit que l'employeur était tenu de présenter au salarié un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux termes de cette décision dans le délai de deux mois suivant la signification de l'arrêt, d'AVOIR condamné la société Lesieur Routour Plomberie à verser 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « II- Sur l'exécution du contrat de travail
A- sur la convention de forfait-jours
L'article L 3121-38 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, la durée du travail du salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois.
Aux termes de l'article 4-2-9 de la convention collective applicable, dont M. H... ne conteste pas la licéité, « l'organisation du travail des salariés [soumis au forfait jours], fait l'objet d'un suivi régulier par la hiérarchie qui veille notamment aux éventuelles surcharges de travail et respect des durées minimales de repos.
Un document individuel de suivi des journées et demi-journées travaillées, des jours de repos et jours de congés (...) sera tenu par l'employeur ou par le salarié sous la responsabilité de l'employeur.
L'entreprise fournira aux salariés un document permettant de réaliser ce décompte.
(...), la situation de l'ETAM ayant conclu une convention individuelle de forfait en jours sera examinée lors d'un entretien au moins annuel avec son supérieur hiérarchique. Cet entretien portera sur la charge de travail de l'ETAM et l'amplitude de ses journées d'activité qui doivent rester dans les limites raisonnables, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale ainsi que la rémunération du salarié. »
Or aucun des documents versés ne permet de considérer que l'employeur s'est soumis aux dispositions conventionnelles.

Ainsi quelle que soit par ailleurs l'analyse qui peut être faite du contenu de l'agenda électronique et des commentaires afférents, ces pièces ne constituent aucunement le document individuel de décompte du temps de travail permettant le suivi régulier exigé.
En effet, le contrat de travail de M. H... détermine les missions qui lui sont confiées de la manière suivante :
« - la conception d'installation et l'élaboration de solutions techniques,
- l'élaboration des descriptifs,
- l'étude de prix avec recherche de variantes,
- la consultation des fournisseurs et les achats,
- l'accompagnement commercial et vente aux clients de solutions techniques,
- le suivi des études techniques d'exécution des chantiers,
- les contacts avec les maîtrises d'ouvrage et maîtres d'oeuvres,
- le suivi de l'exécution du chantier,
- la gestion du personnel de chantier,
- l'élaboration de la facturation ».
Les mentions figurant aux plannings électroniques ne mettent pas la cour en mesure de considérer qu'y sont portés autre chose que les seuls rendez-vous, alors que les dispositions conventionnelles ci-dessus reproduites ne limitent pas à ce seul moyen l'exécution de l'ensemble des missions, ainsi par exemple l'élaboration de la facturation et l'étude de prix.
En outre, rien n'établit l'organisation d'un entretien annuel portant spécifiquement sur la charge de travail et l'organisation de cette dernière au regard de la vie personnelle et familiale de M H....
La convention de forfait doit être déclarée en conséquence, inopposable à ce dernier, le contrat de travail devant être soumis aux règles de droit commun régissant la durée du travail, le décompte et la rémunération des heures de travail effectif.
B- sur la durée du travail
L'article L. 3121-10 du code du travail dans sa rédaction applicable à l'espèce, fixe la durée légale du travail effectif à 35 heures par semaine civile, entendue au sens de l'article L. 3122- 1 du code du travail, c'est-à-dire du lundi 0 heures au dimanche 24 heures.
L'article L. 2121-22 du code du travail prévoit quant à lui que « les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée par l'article L. 3121-10 ou de la durée considérée comme équivalente, donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des huit premières heures supplémentaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50%. »
Une convention ou un accord de branche étendu ou une convention ou un accord d'entreprise ou d'établissement peut prévoir un taux de majoration différent. Ce taux ne peut être inférieur à 10%.
Enfin, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'article L. 3171-4 du code du travail impose au salarié d'étayer sa demande par des éléments suffisamment précis, puis à l'employeur de fournir tous éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié, le juge formant sa conviction au vu de l'ensemble des éléments apportés par les parties.
M. H... soutient qu'il a travaillé 230 jours et effectué 601 heures supplémentaires en 2013, 234 jours et effectué 650 heures supplémentaires en 2014 et 114 jours et effectué 288 heures supplémentaires en 2015, versant aux débats un tableau des heures hebdomadaires de travail et des agendas pour chaque périodes sur lesquels figurent jour par jour la mention des horaires effectifs de travail et les jours travaillés et les relevés de sa boîte électronique professionnelle mentionnant les heures d'envoi de courriels.
Ces éléments étayent la demande formée en ce que le calcul des sommes dues se fondent sur les heures comptabilisées à partir des mentions figurant sur les agendas non électroniques, peu important que ces derniers aient été ou non établis pour les besoins de l'instance.
Pour justifier d'autres horaires de travail effectif de M H..., l'employeur verse aux débats les agendas électroniques et compte-rendus afférents, soutenant que le croisement de ces documents avec ceux versés aux débats par le salarié et établis pour les besoins de la cause font apparaître des distorsions.
Mais la seule production d'un agenda électronique accompagné, pour partie seulement qui plus est, de fiches développant les mentions figurant dans ledit agenda électronique, est insuffisante à justifier des horaires effectifs de M. H..., alors que le rapprochement des documents établit que seuls les rendez-vous figuraient sur l'agenda électronique et les fiches de commentaires, la rédaction des devis ne faisant pas l'objet de mentions, ainsi par exemple pour le 20 janvier 2014, l'agenda électronique et l'agenda manuscrit font-ils référence aux mêmes horaires à des rendez-vous chez des dénommés Marciano ou Nissen, seul l'agenda manuscrit faisant état du temps consacré à l'élaboration des devis.
L'agenda électronique n'apparaît donc pas fiable pour déterminer le temps de travail, dès lors qu'il ne contient que les rendez-vous et ne fait référence à aucune des autres tâches exécutées par M. H....
S'agissant de l'arrivée du salarié à 7 heures, qu'il explique par la nécessité d'être présent à l'entreprise avant le départ des ouvriers sur les chantiers et la préparation de leurs plannings, outre que cette présence ne pourrait être notée sur l'agenda électronique dès lors qu'elle ne correspond pas à un rendez-vous clientèle ou fournisseur, il y a lieu de relever que l'employeur ne conteste pas le fait que les ouvriers de l'entreprise étaient présents à cet horaire pour s'apprêter à partir sur les chantiers, le contrat de travail de M. H... spécifiant qu'il doit gérer le personnel de chantier, le tout ne mettant pas la cour en mesure d'exclure la présence récurrente de M. H... à l'entreprise dès 7 heures.
Quant aux horaires de fin de travail que le salarié fixe en général à 18 heures, et plus exceptionnellement au-delà, le relevé des courriels professionnels ne fait que conforter des envois tardifs, par exemple le 24 octobre 2014 ou le 9 octobre suivant, l'hypothèse d'un envoi différé n'étant pas confirmée par la seule possibilité de réaliser cette manoeuvre avec le système existant, peu important que le courriel ait été ou non adressé de l'ordinateur de l'entreprise ou du téléphone portable du salarié.
En conséquence, faute de tout autre décompte des heures de travail effectif pouvant être retenues il sera fait droit aux demandes formées de ce chef, à savoir pour 601 heures supplémentaires en 2013, pour 650 heures supplémentaires en 2014 et pour 288 heures supplémentaires en 2015, l'entreprise Lesieur Routour Plomberie devant en conséquence être condamnée à verser de ce chef la somme de 41 855 € outre 4 185,50 € au titre des congés payés afférents, le jugement entrepris devant être infirmé sur ce point.
(
) En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à M. H... une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.
L'employeur sera tenu de présenter au salarié un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux termes de cette décision dans le délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt sans que soit à ce stade justifié le prononcé d'une astreinte » ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, l'agenda électronique complété au jour le jour par le salarié pour la période litigieuse comportait, outre la précision des rendez-vous effectués, les mentions « bureau » ou « pas de rdv » avec la plage horaire correspondante les jours où le salarié se consacrait à d'autres tâches que la présence auxdits rendez-vous (cf. production n° 9) ; qu'en jugeant ce document non fiable pour déterminer le temps du travail du salarié au prétexte qu'il ne faisait référence à aucune autre tâche exercée par le salarié que les seuls rendez-vous pris, la cour d'appel a dénaturé cette pièce et violé ce faisant le principe susvisé ;

2°) ALORS à tout le moins QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la société Lesieur Routour Plomberie faisait valoir, preuves à l'appui (cf. productions n° 4, n° 9, 10 et 11), que nombre des rendez-vous consignés par le salarié dans l'agenda manuscrit confectionné par ses soins étaient incompatibles avec les rendez-vous effectivement réalisés tels que relatés par l'agenda électronique réalisé à l'époque des faits (cf. production n° 16), le salarié invoquant l'existence de rendez-vous (généralement après les horaires normaux et habituels de l'entreprise) qui étaient absents des agendas officiels de l'entreprise (cf. le 6 janvier 2014, le 14 janvier 2014, le 16 janvier 2014 etc
) ou consignés sur ceux-ci mais à une date ou une heure différente (cf. le 11 mars 2013, le 1er avril 2013, le 13 mai 2013 le 3 octobre 2013, le 9 juillet 2013, le 11 février 2014, le 11 mars 2014, le 17 mars 2014 etc..- cf. production n° 17) ; qu'en outre, le rapprochement de ces éléments, confortés par d'autres pièces, révélait qu'à plusieurs occasions, le salarié se présentait, sur ses agendas manuscrits, faussement comme présent sur son lieu de travail alors qu'il était en déplacement à l'extérieur (comme le 25 octobre 2013 où le salarié, prétendument sur le lieu de travail, était à l'EIA à Pont l'Evêque afin de participer à un meeting de Karting, tout comme le 8 novembre 2013 où il était à un Salon du sanitaire à Paris, ou encore le 14 novembre 2013 où il se trouvait chez un client etc.. - cf. production n° 18), et que certaines des périodes de travail alléguées par lui correspondaient en réalité à des dates où il s'était consacré à des activités ludiques (cf. le 19 septembre 2014 où il s'était adonné, toute la journée, à des activités de canoë et d'accrobranche – cf. productions n° 19 et 20), à des jours fériés non travaillés (le 1er avril, le 8 mai, le 15 août, le 1er et le 11 novembre 2013, le 21 avril 2014 – cf. production n° 21), à des dates où il se trouvait en congé (cf. le 4 juin 2015 - cf. production n° 10) ou en arrêt de travail (cf. le 31 mars 2015 et le 13 juillet 2015 - cf. productions n° 10 et 15) (conclusions d'appel, p. 11 à 29) ; que pour faire droit à la demande du salarié au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel, après l'avoir jugée suffisamment étayée, s'est bornée à énoncer que faute de contenir d'autres tâches que les rendez-vous effectués par le salarié, l'agenda électronique produit par l'employeur n'était pas fiable pour déterminer le temps du travail ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si les contradictions existant entre ce document, dont les données étaient au surplus confirmées par d'autres pièces, et l'agenda manuscrit établi par le salarié pour ce qui concerne précisément les rendez-vous réalisés, n'avaient pas pour effet de priver les éléments du salarié de tout caractère sérieux relativement aux horaires effectivement réalisés par lui, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail ;

3°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, la société Lesieur Routour Plomberie faisait valoir que si, pour justifier un début de ses journées de travail à 7h du matin, le salarié se prévalait de la prétendue nécessité d'être présent avant le départ des ouvriers sur différents chantiers pour préparer et voir les plannings, il s'agissait d'une simple allégation dépourvue de toute offre probatoire (conclusions d'appel, p. 16) ; qu'en estimant qu'au regard des missions du salarié concernant la gestion du personnel de chantier dont la présence à 7 heures n'était pas contestée, il n'était pas permis d'exclure sa présence récurrente à l'entreprise à cette date, cependant qu'il appartenait au salarié de fournir des éléments de nature à justifier de l'effectivité de sa présence à cette heure et non à l'employeur de rapporter des éléments de nature à l'exclure, la cour d'appel a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;

4°) ALORS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir, preuves à l'appui (cf. productions n° 12 à 14), que pour justifier l'existence d'heures supplémentaires inexistantes, le salarié qui avait déjà engagé un précédent contentieux sur ce fondement, avait fait en sorte d'effacer l'intégralité de ses plannings de son ordinateur avant de quitter l'entreprise et de vider son smartphone afin de faire obstacle à toute réfutation de ses décomptes, qu'il avait par ailleurs remanié à plusieurs reprises ses conclusions, une fois mis en difficulté sur ses contradictions et invraisemblances, l'intéressé ayant encore dicté à des témoins, dont certains étaient depuis revenus sur leurs précédentes déclarations, le contenu de leurs attestations pour servir au mieux ses intérêts (conclusions d'appel, p. 20 à 22, 34-35) ; qu'en se bornant à admettre sans réserve les éléments du salarié destinés à étayer sa demande d'heures supplémentaires, sans s'expliquer sur les manoeuvres auxquelles s'était livré le salarié lesquelles étaient susceptibles de rejaillir sur la crédibilité desdits éléments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale l'article L. 3171-4 du code du travail ;

5°) ALORS QUE le salarié ne peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies qu'en cas d'accord au moins implicite de l'employeur ou s'il établit que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que, contrairement à ses affirmations, le salarié n'avait jamais eu besoin, ni été autorisé à travailler de nuit, que sa charge de travail ne justifiait pas l'exécution d'heures supplémentaires et qu'il n'établissait pas la réalité d'un travail expliquant le dépassement de 35 heures par semaine (conclusions d'appel, p. 30 à 32) ; qu'en faisant droit à la demande du salarié, sans constater que les heures supplémentaires éventuellement effectuées par lui, de nuit notamment, l'avait été avec l'accord au moins implicite de l'employeur ou qu'elles découlaient des missions confiées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Lesieur Routour Plomberie à verser à M. H... les sommes de 22 090 € à titre d'indemnité pour contrepartie obligatoire en repos non prise et de 2 209 € au titre des congés payés afférents, d'AVOIR dit que les sommes à caractère salarial produisaient intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire produisaient intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, d'AVOIR dit que l'employeur était tenu de présenter au salarié un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux termes de cette décision dans le délai de deux mois suivant la signification de l'arrêt, d'AVOIR condamné la société Lesieur-Routour Plomberie à verser 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

AUX MOTIFS QUE « C- sur les contreparties obligatoires en repos
Les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel ouvrent droit à un repos compensateur égal à 50% de ces heures dans les entreprises de moins de 20 salariés et à 100% de ces heures dans les entreprises de plus de 20 salariés.
La société Lesieur Routour Plomberie avait un effectif supérieur à 20 salariés.
Au regard du contingent d'heures supplémentaires tel que prévu par la convention collective applicable, à savoir 145 heures, il est dû à M. H... de ce chef la somme de 24 299 euros, laquelle comprend l'indemnité de congés payés afférente aux heures de repos non prises.
Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef.
(
) En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à M. H... une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.
L'employeur sera tenu de présenter au salarié un bulletin de paie récapitulatif, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi conformes aux termes de cette décision dans le délai de deux mois suivant la signification du présent arrêt sans que soit à ce stade justifié le prononcé d'une astreinte » ;

1°) ALORS QUE la cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société Lesieur-Routour Plomberie à payer au salarié la somme de 41 855 euros au titre des heures supplémentaires s'étendra au chef de dispositif l'ayant condamnée à lui payer la somme de 22 090 € à titre d'indemnité pour contrepartie obligatoire en repos non pris, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;

2°) ALORS subsidiairement QU'aux termes de l'article 4.1.2 de la convention collective nationale des employés, techniciens et agents de maîtrise du bâtiment, dans sa rédaction antérieure à l'avenant n° 4 du 7 mars 2018, « Les entreprises peuvent utiliser pendant l'année civile un contingent d'heures supplémentaires, sans avoir besoin de demander l'autorisation de l'inspection du travail, dans la limite de 145 heures. Ce contingent est augmenté de 35 heures par an et par salarié pour les salariés dont l'horaire n'est pas annualisé », soit 180 heures ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a écarté l'application de la convention de forfait jours, ce qui entraînait le retour à une durée du travail non annualisée de sorte que le contingent applicable était de 180 heures par an ; qu'en condamnant la société Lesieur Routour Plomberie à lui payer une somme de 24 299 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos calculée au regard d'un contingent de 145 heures, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-16576
Date de la décision : 03/02/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 21 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 fév. 2021, pourvoi n°19-16576


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (président)
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.16576
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award