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28/01/2021 | FRANCE | N°20-10871

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 28 janvier 2021, 20-10871


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 janvier 2021

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 117 F-D

Pourvoi n° E 20-10.871

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 JANVIER 2021

1°/ M. U... K...,

2°/ Mme S... X..., épouse K...,

do

miciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° E 20-10.871 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2019 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 28 janvier 2021

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 117 F-D

Pourvoi n° E 20-10.871

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 JANVIER 2021

1°/ M. U... K...,

2°/ Mme S... X..., épouse K...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° E 20-10.871 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2019 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige les opposant à M. O... I..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Béghin, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de M. et Mme K..., de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. I..., après débats en l'audience publique du 8 décembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Béghin, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 19 novembre 2019), M. et Mme K... ont, après expertise judiciaire, assigné M. I..., propriétaire d'une maison contigüe à la leur, en suppression d'un coude de gouttière surplombant leur fonds et y dirigeant les eaux pluviales du toit de sa maison, ainsi qu'en réparation de leur préjudice.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

2. M. et Mme K... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de suppression du coude de gouttière, alors « qu'il appartient à celui qui se prévaut d'une prescription trentenaire d'établir l'existence d'une possession utile durant trente années ; que la cour d'appel a énoncé, pour considérer que M. I... justifiait d'une prescription acquisitive trentenaire s'agissant d'une servitude de surplomb liée à la présence du coude, que « rien ne permet d'établir que le coude a été installé sur la propriété I... moins de trente années avant la demande de suppression formulée » ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel qui a mis à la charge des époux K... la charge d'établir que le coude n'était pas présent depuis trente ans, a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1353 du code civil (1315 ancien). »

Réponse de la Cour

3. Ayant retenu qu'il résultait des constatations de l'expert que la présence du coude litigieux depuis plus de trente ans était établie la cour d'appel a pu, sans inverser la charge de la preuve, constater l'acquisition d'une servitude de surplomb par prescription trentenaire.

4. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. M. et Mme K... font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors :

« 1°/ que le juge qui constate l'existence d'une situation illégale et les mesures de nature à y mettre un terme, est tenu de les ordonner lorsque les victimes de cette illégalité demandent à ce qu'ils soient mis fin aux conséquences préjudiciables en résultant ; qu'en refusant de condamner M. I... à réaliser les travaux décrits dans le devis technique joint au dire du 9 avril 2015 dont elle avait considéré qu'ils étaient de nature à mettre fin aux écoulements des eaux pluviales de son fonds directement sur celui des époux K..., pour la seule raison que ces derniers ne sollicitaient pas la réalisation de ces travaux, quand leurs demandes tendaient, comme les travaux non ordonnés, à ce qu'il soit mis fin au déversement, directement sur leur fonds, des eaux pluviales provenant de la maison de M. I... ainsi qu'à ses conséquences préjudiciables, la cour d'appel a commis un déni de justice en violation de l'article 4 du code civil ;

2°/ que le juge qui constate une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice, doit ordonner les mesures de nature à réparer le préjudice ; qu'après avoir constaté que M. I... n'était pas autorisé à faire écouler les eaux recueillies dans sa gouttière directement sur le fonds des époux K..., que ces derniers demandaient à ce qu'il soit mis fin à ce déversement qui provoquait le débordement du collecteur situé sur leur propriété et des infiltrations sur les murs de leur maison, la cour d'appel qui a refusé de condamner M. I... à faire réaliser des travaux dont elle avait constaté qu'ils étaient de nature à mettre fin au comportement fautif de ce dernier et au préjudice subi par les époux K..., a violé les articles 681 et 1382 du code civil ancien, 1240 nouveau du même code.

3°/ que les époux K... faisaient valoir que le déversement des eaux pluviales provenant de la maison de M. I... directement dans leur chêneau provoquait le débordement du collecteur situé sur leur propriété et des infiltrations sur les murs de leur maison ; qu'en énonçant cependant que les époux K... ne précisaient pas quel était leur préjudice, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

4°/ que les juges du fond ne peuvent statuer par des motifs contradictoires ; qu'en considérant que les époux K... ne justifiaient pas d'un préjudice du fait de l'écoulement des eaux pluviales provenant du fond de M. I... sur leur fond, pour la seule raison qu'ils avaient refusé la solution proposée par l'expert et acceptée par M. I... pour mettre fin à cet écoulement, après avoir cependant relevé que cette solution ajoutait au surplomb actuel sur leur fond, ce qu'ils pouvaient légitimement refuser, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction en méconnaissance des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. D'une part, ayant retenu que M. I... ne pouvait pas, au moyen du coude litigieux, faire écouler les eaux pluviales de son toit sur le fonds de ses voisins, mais que la servitude de surplomb retenue s'opposait à la suppression demandée du coude, que les travaux préconisés par l'expert ne pouvaient être ordonnés en ce qu'ils ajouteraient au surplomb actuel et que M. et Mme K... n'avaient pas demandé la condamnation de M. I... à exécuter les travaux décrits au devis joint au rapport d'expertise, la cour d'appel, qui a statué dans les limites des demandes des parties, n'a pas refusé de mettre fin à l'illégalité qu'elle avait constatée.

7. D'autre part, ayant retenu, sans modifier l'objet du litige, que M. et Mme K... ne précisaient pas le préjudice dont ils se prévalaient et, constaté que l'expert n'avait relevé aucun préjudice, la cour d'appel a pu, par ces seuls motifs, rejeter la demande de dommages et intérêts de M. et Mme K....

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme K... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. et Mme K....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR débouté les époux K... de leur demande de suppression du coude dirigeant les eaux pluviales du versant sur rue de son habitation dans le chêneau ;

AUX MOTIFS QUE « Considérant que les époux K... critiquent le rapport de l'expert qui n'a pas considéré les travaux réalisés par M. I... après la construction de son immeuble, notamment par la pose d'un bardage en ardoises fibrociment, qui n'a pas considéré le préjudice qui résulte pour eux du détournement des eaux de pluie du fonds I... sur leur propre fonds par les débordements qu'ils provoquent, Qu'ils contestent le fait volontaire de M. I... qui a décidé de faire écouler les eaux pluviales de son fonds sur leur fonds par la création d'un coude, invoquent les dispositions de l'article 681 du Code civil et refusent l'application erronée du premier juge des articles 640 et 641 du Code civil, qu'ils soutiennent qu'il n'y a ni servitude de surplomb, ni servitude d'écoulement ; que leur action destinée à faire cesser le fait de M. I... n'est pas prescrite ; Considérant que M. I... précise que, selon l'expertise, le coude de la gouttière dont les époux K... demandent la suppression est en place depuis la construction de la maison I... achevée le 5 juillet 1972 et qu'il ne résulte aucune gène ni désagrément pour les époux K..., qu'il peut légalement se prévaloir d'une servitude de surplomb pour l'écoulement des eaux pluviales sur le fonds des époux K... depuis trente ans et soutenir que, selon les dispositions de l'article 2227 du code civil, l'action réelle immobilière en suppression du coude est prescrite depuis le 5 juillet 2002 ; Mais considérant que l'expert commis a constaté (page 6 de son rapport) que "Le fonds K... recueille les eaux de pluie du versant avant de la propriété I... et que le fonds I... recueille les eaux pluviales du versant arrière de sa toiture ainsi que les eaux de ruissellement de partie sur cour du bardage amiante ciment" ; qu'il a rapporté que M. K... a déclaré avoir supprimé une canalisation d'évacuation pluviale en pignon de la propriété I... qui collectait les eaux pluviales du versant côté route pour les ramener sur la descente arrière ; qu'il a constaté que cette canalisation était alors posée sur le cabanon existant mitoyen du pignon I... que M. K... a surélevé de 40 à 50 cm, que cette canalisation était accrochée aux crochets de bardage, pour partie posée sur couverture appentis existant avant travaux de 2009, que "simultanément, les eaux du versant avant de la propriété I... sont venues de ce fait se déverser dans le chêneau encastré et donc sont reprises de ce fait par le regard arrière sur le fond K..., en modification de l'état existant depuis 1971", que l'expert a ajouté que "les eaux pluviales du fonds I... sont acheminées sur le fonds K... pour la partie versant avant de la toiture I... depuis les travaux réalisés par les époux K... qui ont modifié l'état existant depuis l'origine, antérieurs aux travaux K..."; que l'expert a précisé que " les travaux réalisés par M. K... en 2009 sont à l'origine de la modification de l'écoulement des eaux" et que répondant aux dires des époux K..., il a indiqué que " M. I... n'a pas modifié le coude, et sa datation repose sur les déclarations des parties. Nous avons constaté un coude d'existence ancienne, justifiant un écoulement anormal utilisant le chêneau de la propriété K..., en contradiction avec les règles de droit demandant que les propriétaires mitoyens ne renvoient pas leurs eaux de ruissellement sur le fonds voisin." et a précisé que "cette anomalie est corrigée par la solution qu'il a proposée" ; Considérant que les parties discutent l'époque à laquelle a été installé le coude ; que rien, notamment l'attestation de Mme B..., ne permet de soutenir que le coude a été installé sur la propriété I... moins de trente années avant la demande de suppression formulée par les époux K... et que les constatations de l'expert sont erronées; que la présence du coude depuis plus de 30 ans sans qu'il ne soit fait état du moindre incident lors de cette période par les parties, ou encore d'une quelconque interruption de la prescription est établie et le surplomb en résultant est manifeste au regard des constatations de l'expert et de la photographie versée aux débats ; que M. I... peut ainsi invoquer la prescription acquisitive trentenaire d'une servitude de surplomb ; que toutefois, une telle servitude ne lui permet pas de faire écouler grâce à ce coude les eaux recueillies sur le fonds voisin et qu'il doit lui être interdit de le faire ; Considérant que les époux K... demandent la suppression du coude renvoyant les eaux pluviales sur leur fonds ; qu'en raison de l'acquisition de la servitude de surplomb créée par ce coude, il ne peut être fait droit à une telle demande, Considérant en revanche qu'il y a lieu d'ordonner à M. I... non pas de réaliser une canalisation d'eaux pluviales en surplomb aérien préconisée par M. J... que les époux K... n'acceptent pas, quand bien même ce type de canalisation est communément accepté dans les règles de la construction mais qui ajoute au surplomb actuel ; qu'il incombe à M. I... de faire réaliser les travaux décrits selon le devis technique joint au dire du 9 avril 2015 et en annexe 2 du rapport de M. J... , d'un montant de 996, 63 Euros tout en précisant que la plus value ne peut être supportée par les époux K..., en raison des motifs ci-dessus exposés ; que toutefois, M. I... ne sera pas condamné à réaliser ces travaux que les époux K... ne demandent pas ;

Sur la demande de dommages et intérêts en cause d'appel des époux K... :

Considérant que les époux K... font état de l'existence d'un préjudice résultant du " refus de M. O... I... de dériver les eaux pluviales de la façade de sa maison de manière à ce qu'elles en s'écoulent plus sur le fonds de M. et Mme K...", et expliquent que leur demande de dommages-intérêts est recevable en cause d'appel en application des termes de l'article 566 du Code de procédure civile ; Considérant que M. I... expose que cette demande, nouvelle en cause d'appel, est irrecevable, et souligne que l'expert n'a retenu aucun préjudice, Mais considérant qu'aux termes de l' article 566 du code de procédure civile, "Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire." ; qu'en l'espèce, la demande de dommages-intérêts des époux K... est l'accessoire de leur demande initiale ; Considérant que les époux K... ne précisent pas quel est leur préjudice et n'ont d'ailleurs fait état d'aucun préjudice devant l'expert lequel n'en a constaté aucun ; qu'ils invoquent le refus de M. I... de dériver ses eaux pluviales mais la cour constate qu'ils ont eux-mêmes refusé la solution proposée par l'expert et acceptée par M. I... permettant de modifier l'écoulement des eaux pluviales sur leur fonds, Considérant qu'ils doivent être déboutés de leur demande ».

ALORS QU'il appartient à celui qui se prévaut d'une prescription trentenaire d'établir l'existence d'une possession utile durant trente années ; que la cour d'appel a énoncé, pour considérer que M. I... justifiait d'une prescription acquisitive trentenaire s'agissant d'une servitude de surplomb liée à la présence du coude, que « rien ne permet d'établir que le coude a été installé sur la propriété I... moins de trente années avant la demande de suppression formulée » ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel qui a mis à la charge des époux K... la charge d'établir que le coude n'était pas présent depuis trente ans, a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1353 du code civil (1315 ancien).

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué

D'AVOIR débouté les époux K... de leurs demandes

AUX MOTIFS QUE « Considérant que les époux K... critiquent le rapport de l'expert qui n'a pas considéré les travaux réalisés par M. I... après la construction de son immeuble, notamment par la pose d'un bardage en ardoises fibrociment, qui n'a pas considéré le préjudice qui résulte pour eux du détournement des eaux de pluie du fonds I... sur leur propre fonds par les débordements qu'ils provoquent, Qu'ils contestent le fait volontaire de M. I... qui a décidé de faire écouler les eaux pluviales de son fonds sur leur fonds par la création d'un coude, invoquent les dispositions de l'article 681 du Code civil et refusent l'application erronée du premier juge des articles 640 et 641 du Code civil, qu'ils soutiennent qu'il n'y a ni servitude de surplomb, ni servitude d'écoulement ; que leur action destinée à faire cesser le fait de M. I... n'est pas prescrite ; Considérant que M. I... précise que, selon l'expertise, le coude de la gouttière dont les époux K... demandent la suppression est en place depuis la construction de la maison I... achevée le 5 juillet 1972 et qu'il ne résulte aucune gène ni désagrément pour les époux K..., qu'il peut légalement se prévaloir d'une servitude de surplomb pour l'écoulement des eaux pluviales sur le fonds des époux K... depuis trente ans et soutenir que, selon les dispositions de l'article 2227 du code civil, l'action réelle immobilière en suppression du coude est prescrite depuis le 5 juillet 2002 ; Mais considérant que l'expert commis a constaté (page 6 de son rapport) que "Le fonds K... recueille les eaux de pluie du versant avant de la propriété I... et que le fonds I... recueille les eaux pluviales du versant arrière de sa toiture ainsi que les eaux de ruissellement de partie sur cour du bardage amiante ciment" ; qu'il a rapporté que M. K... a déclaré avoir supprimé une canalisation d'évacuation pluviale en pignon de la propriété I... qui collectait les eaux pluviales du versant côté route pour les ramener sur la descente arrière ; qu'il a constaté que cette canalisation était alors posée sur le cabanon existant mitoyen du pignon I... que M. K... a surélevé de 40 à 50 cm, que cette canalisation était accrochée aux crochets de bardage, pour partie posée sur couverture appentis existant avant travaux de 2009, que "simultanément, les eaux du versant avant de la propriété I... sont venues de ce fait se déverser dans le chêneau encastré et donc sont reprises de ce fait par le regard arrière sur le fond K..., en modification de l'état existant depuis 1971", que l'expert a ajouté que "les eaux pluviales du fonds I... sont acheminées sur le fonds K... pour la partie versant avant de la toiture I... depuis les travaux réalisés par les époux K... qui ont modifié l'état existant depuis l'origine, antérieurs aux travaux K..."; que l'expert a précisé que " les travaux réalisés par M. K... en 2009 sont à l'origine de la modification de l'écoulement des eaux" et que répondant aux dires des époux K..., il a indiqué que " M. I... n'a pas modifié le coude, et sa datation repose sur les déclarations des parties. Nous avons constaté un coude d'existence ancienne, justifiant un écoulement anormal utilisant le chêneau de la propriété K..., en contradiction avec les règles de droit demandant que les propriétaires mitoyens ne renvoient pas leurs eaux de ruissellement sur le fonds voisin." et a précisé que "cette anomalie est corrigée par la solution qu'il a proposée" ; Considérant que les parties discutent l'époque à laquelle a été installé le coude ; que rien, notamment l'attestation de Mme B..., ne permet de soutenir que le coude a été installé sur la propriété I... moins de trente années avant la demande de suppression formulée par les époux K... et que les constatations de l'expert sont erronées; que la présence du coude depuis plus de 30 ans sans qu'il ne soit fait état du moindre incident lors de cette période par les parties, ou encore d'une quelconque interruption de la prescription est établie et le surplomb en résultant est manifeste au regard des constatations de l'expert et de la photographie versée aux débats ; que M. I... peut ainsi invoquer la prescription acquisitive trentenaire d'une servitude de surplomb ; que toutefois, une telle servitude ne lui permet pas de faire écouler grâce à ce coude les eaux recueillies sur le fonds voisin et qu'il doit lui être interdit de le faire ; Considérant que les époux K... demandent la suppression du coude renvoyant les eaux pluviales sur leur fonds ; qu'en raison de l'acquisition de la servitude de surplomb créée par ce coude, il ne peut être fait droit à une telle demande, Considérant en revanche qu'il y a lieu d'ordonner à M. I... non pas de réaliser une canalisation d'eaux pluviales en surplomb aérien préconisée par M. J... que les époux K... n'acceptent pas, quand bien même ce type de canalisation est communément accepté dans les règles de la construction mais qui ajoute au surplomb actuel ; qu'il incombe à M. I... de faire réaliser les travaux décrits selon le devis technique joint au dire du 9 avril 2015 et en annexe 2 du rapport de M. J... , d'un montant de 996, 63 Euros tout en précisant que la plus value ne peut être supportée par les époux K..., en raison des motifs ci-dessus exposés ; que toutefois, M. I... ne sera pas condamné à réaliser ces travaux que les époux K... ne demandent pas ;

Sur la demande de dommages et intérêts en cause d'appel des époux K... :

Considérant que les époux K... font état de l'existence d'un préjudice résultant du " refus de M. O... I... de dériver les eaux pluviales de la façade de sa maison de manière à ce qu'elles en s'écoulent plus sur le fonds de M. et Mme K...", et expliquent que leur demande de dommages-intérêts est recevable en cause d'appel en application des termes de l'article 566 du Code de procédure civile ; Considérant que M. I... expose que cette demande, nouvelle en cause d'appel, est irrecevable, et souligne que l'expert n'a retenu aucun préjudice, Mais considérant qu'aux termes de l' article 566 du code de procédure civile, "Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire." ; qu'en l'espèce, la demande de dommages-intérêts des époux K... est l'accessoire de leur demande initiale ; Considérant que les époux K... ne précisent pas quel est leur préjudice et n'ont d'ailleurs fait état d'aucun préjudice devant l'expert lequel n'en a constaté aucun ; qu'ils invoquent le refus de M. I... de dériver ses eaux pluviales mais la cour constate qu'ils ont eux-mêmes refusé la solution proposée par l'expert et acceptée par M. I... permettant de modifier l'écoulement des eaux pluviales sur leur fonds, Considérant qu'ils doivent être déboutés de leur demande ».

1°) ALORS QUE le juge qui constate l'existence d'une situation illégale et les mesures de nature à y mettre un terme, est tenu de les ordonner lorsque les victimes de cette illégalité demandent à ce qu'ils soient mis fin aux conséquences préjudiciables en résultant ; qu'en refusant de condamner M. I... à réaliser les travaux décrits dans le devis technique joint au dire du 9 avril 2015 dont elle avait considéré qu'ils étaient de nature à mettre fin aux écoulements des eaux pluviales de son fonds directement sur celui des époux K..., pour la seule raison que ces derniers ne sollicitaient pas la réalisation de ces travaux, quand leurs demandes tendaient, comme les travaux non ordonnés, à ce qu'il soit mis fin au déversement, directement sur leur fonds, des eaux pluviales provenant de la maison de M. I... ainsi qu'à ses conséquences préjudiciables, la cour d'appel a commis un déni de justice en violation de l'article 4 du code civil ;

2°) ET ALORS QUE le juge qui constate une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice, doit ordonner les mesures de nature à réparer le préjudice ; qu'après avoir constaté que M. I... n'était pas autorisé à faire écouler les eaux recueillies dans sa gouttière directement sur le fonds des époux K..., que ces derniers demandaient à ce qu'il soit mis fin à ce déversement qui provoquait le débordement du collecteur situé sur leur propriété et des infiltrations sur les murs de leur maison, la cour d'appel qui a refusé de condamner M. I... à faire réaliser des travaux dont elle avait constaté qu'ils étaient de nature à mettre fin au comportement fautif de ce dernier et au préjudice subi par les époux K..., a violé les articles 681 et 1382 du code civil ancien, 1240 nouveau du même code.

3°) ET ALORS QUE les époux K... faisaient valoir que le déversement des eaux pluviales provenant de la maison de M. I... directement dans leur chêneau provoquait le débordement du collecteur situé sur leur propriété et des infiltrations sur les murs de leur maison ; qu'en énonçant cependant que les époux K... ne précisaient pas quel était leur préjudice, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

ET ALORS QUE les juges du fond ne peuvent statuer par des motifs contradictoires ; qu'en considérant que les époux K... ne justifiaient pas d'un préjudice du fait de l'écoulement des eaux pluviales provenant du fond de M. I... sur leur fond, pour la seule raison qu'ils avaient refusé la solution proposée par l'expert et acceptée par M. I... pour mettre fin à cet écoulement, après avoir cependant relevé que cette solution ajoutait au surplomb actuel sur leur fond, ce qu'ils pouvaient légitimement refuser, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction en méconnaissance des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 20-10871
Date de la décision : 28/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 19 novembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 28 jan. 2021, pourvoi n°20-10871


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.10871
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