LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 20-80.123 F-D
N° 106
EB2
27 JANVIER 2021
CASSATION PARTIELLE
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 27 JANVIER 2021
M. G... Y... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 28 novembre 2019, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis, a prononcé l'inscription au FIJAIS, rejeté une demande d'exclusion du bulletin n°2 du casier judiciaire, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires en demande et en défense ont été produits.
Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. G... Y..., les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat du centre hospitalier de Valence, partie civile, Mme U... T..., partie civile et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l'audience publique du 16 décembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 8 janvier 2019, le tribunal correctionnel, après l'avoir reconnu coupable d'agressions sexuelles aggravées, commises dans l'exercice de ses fonctions de médecin hospitalier, a notamment condamné M. G... Y... à quatre mois d'emprisonnement avec sursis.
3. Le prévenu, le ministère public, l'une des parties civiles et le centre hospitalier de Valence ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
4. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. G... Y... à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a ordonné son inscription au FIJAIS, alors « que toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; se bornant à se référer à la gravité des faits et à l'absence d'antécédent judiciaire du prévenu, sans s'expliquer sur sa personnalité ni sur sa situation personnelle, la cour d'appel a méconnu l'article 132-19 du code pénal et l'article 485 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 132-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
6. Selon le premier de ces textes, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle.
7. Il résulte du second que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision, que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
8. Pour condamner le prévenu à quatre mois d'emprisonnement avec sursis, l'arrêt attaqué retient que la gravité des faits, s'agissant de deux agressions sexuelles aggravées, passibles de sept années d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende, et la personnalité de M. Y... dont le casier judiciaire est vierge, justifient la peine d'avertissement de quatre mois d'emprisonnement avec sursis prononcée par les premiers juges.
9. En prononçant ainsi, sans s'expliquer sur la personnalité du prévenu et sa situation personnelle, autrement qu'en mentionnant l'absence de condamnation au casier judiciaire de l'intéressé, qui était présent à l'audience, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
10. La cassation est par conséquent encourue ; elle sera limitée aux peines, la décision sur la culpabilité n'encourant pas la censure.
Portée et conséquences de la cassation
11. L'affaire sera renvoyée devant une cour d'appel pour qu'il soit à nouveau statué dans les limites de la cassation ainsi prononcée, conformément à la loi, et, le cas échéant, aux dispositions des articles 132-19 et 132-25 du code pénal et 464-2 du code de procédure pénale, dans leur rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, applicables à partir du 24 mars 2020.
12. Les dispositions de l'article 618-1 du code de procédure pénale sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité du chef d'agressions sexuelles aggravées étant devenue définitive, par suite du rejet du premier moyen de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de la partie civile.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE et ANNULE, mais ses seules dispositions relatives aux peines, l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble susvisé, en date du 28 novembre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. G... Y... devra verser au centre hospitalier de Valence en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Grenoble et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept janvier deux mille vingt et un.