LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 janvier 2021
Rejet
Mme BATUT, président
Arrêt n° 96 F-D
Pourvoi n° N 19-24.582
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 27 JANVIER 2021
1°/ M. O... E..., domicilié [...] ,
2°/ l'établissement MSA 3A, dont le siège est [...] , en qualité de curateur de M. E...,
ont formé le pourvoi n° N 19-24.582 contre l'arrêt rendu le 26 septembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige les opposant :
1°/ à M. T... X..., domicilié [...] ,
2°/ à la société Lyona, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Cotty, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. E... et de la MSA 3A, ès qualités, de la SARL Corlay, avocat de M. X... et de la société Lyona, et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er décembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Cotty, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 septembre 2019), par acte authentique du 20 décembre 2013, M. E... a donné à bail commercial à la société Lyona, dont le gérant est M. X..., des locaux et équipements situés à [...]. Le bail a été consenti pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2014, moyennant le versement d'une somme de 30 000 euros à titre de pas-de-porte et d'un loyer annuel de 47 840 euros TTC. Le 18 décembre 2015, M. E..., assisté de son curateur, a assigné la société Lyona et M. X... aux fins d'annulation du bail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
3. M. E... et la MSA 3A, son curateur, font grief à l'arrêt de rejeter les demandes de M. E... en annulation du bail commercial du 20 décembre 2013 et en expulsion de la société Lyona, alors :
« 1°/ qu'un contrat à titre onéreux est nul pour absence de cause lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire ; que, dans ses écritures d'appel, M. E..., assisté de son curateur, a fait valoir que le pas-de-porte versé, d'un montant de 30 000 euros, était dérisoire, en présence d'un bail commercial portant sur un bien exceptionnel, telle une plage privée à [...], sa valeur, dans la pratique, s'élevant à plus de dix fois la valeur locative du bien loué, de sorte qu'en l'espèce, le droit au bail avait une valeur supérieure à 400 000 euros ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas-de-porte (qui n'est pas un élément obligatoire dans le cadre d'un bail commercial) aurait un montant dérisoire, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions établissant le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ qu'en toute hypothèse, le versement d'un pas-de-porte que ne prohibe aucune disposition des textes régissant les baux commerciaux, peut être, dans l'intention des parties, soit un supplément de loyers payé d'avance, soit la contrepartie d'éléments de nature diverse, notamment d'avantages commerciaux, sans rapport avec le loyer ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas-de-porte (qui n'est pas un élément obligatoire dans le cadre d'un bail commercial) aurait un montant dérisoire, sans rechercher quelle était sa nature, pour vérifier si les engagements pris par M. E... n'avaient pas une contrepartie dérisoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
4. L'arrêt relève que le bail commercial du 20 décembre 2013 prévoit un pas-de-porte de 30 000 euros, un loyer annuel hors taxe de 40 000 euros, et que le prix du bail est ainsi un peu plus élevé que celui des baux saisonniers successifs précédemment conclus entre les mêmes parties sur les mêmes locaux et équipements. Il ajoute qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas-de-porte aurait un montant dérisoire. Il constate encore que les travaux et démarches auxquels s'est engagé le bailleur sont de sa responsabilité de propriétaire et ne sont pas des clauses exorbitantes du droit commun, et ce, d'autant que le contrat de bail prévoit que les autres réparations, grosses ou menues, restent à la charge du preneur. Il précise que l'absence de versement d'un dépôt de garanties'explique par le contexte des relations établies depuis plusieurs années entre M. E... et M. X... et n'est pas, à elle seule, suffisante pour dire que le contrat de bail serait dépourvu de cause.
5. La cour d'appel, qui a ainsi apprécié les contreparties au jour de la formation du contrat, a souverainement estimé, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à la recherche invoquée par la seconde branche, qui ne lui était pas demandée, que l'engagement pris par le preneur n'était pas dérisoire et en a justement déduit que le contrat litigieux n'était pas nul pour absence de cause.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. E... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. E... et la MSA 3 A, ès qualités, et les condamne in solidum à payer à M. X... et à la société Lyona la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par Mme Auroy, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. E... et la MSA 3A, ès qualités.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR rejeté les demandes de M. E... en annulation du bail commercial du 20 décembre 2013 et expulsion de la société Lyona,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la demande d'annulation du bail commercial en raison d'un trouble mental, en vertu des dispositions de l'article 414-1 du code civil, il faut être sain d'esprit pour faire un acte valable ; que c'est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l'existence d'un trouble mental au moment de l'acte ; que M. E..., assisté de son curateur, ne démontre pas qu'au moment de la signature du bail commercial du 20 décembre 2013, il aurait été affecté d'une insanité d'esprit qui rendrait cet acte nul ; que, comme l'ont indiqué avec pertinence les premiers juges, l'ouverture d'une mesure de sauvegarde de justice le 12 juin 2015 suivie d'une mesure de curatelle renforcée prononcée le 26 novembre 2015 ne vaut pas preuve d'une insanité d'esprit en décembre 2013 ; que, de la même manière, ni l'hospitalisation de septembre 2013 pour une occlusion intestinale, ni le certificat médical trop peu étayé de M. B..., psychiatre, qui ne suit M. E... que depuis le 27 juillet 2017 et dont l'écrit, daté du 24 février 2018, relate "qu'on peut affirmer que M. E... se trouvait en état de faiblesse caractérisée depuis plus de dix ans au minimum" ne démontrent l'existence de l'insanité d'esprit de M. E... lors de la conclusion du bail commercial le 20 décembre 2013 ; que les autres pièces produites sont en lien avec des pathologies sans rapport avec une insanité d'esprit et ne démontrent rien ; qu'en conséquence, M. E..., assisté de son curateur, ne rapporte pas la preuve de son insanité d'esprit lors de la conclusion du bail commercial et ne peut sur ce fondement en solliciter la nullité ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;
qu'en vertu de l'article 464 du code civil, les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l'altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant à l'époque où les actes ont été passés ; que ces actes peuvent, dans les mêmes conditions, être annulés s'il est justifié d'un préjudice subi par la personne protégée ; qu'ainsi que le soulignent très justement les premiers juges, M. E..., assisté de son curateur, ne peut s'appuyer sur cet article pour solliciter la nullité du bail commercial, puisqu'il ne justifie pas de la publicité du jugement de curatelle renforcée moins de deux ans après la conclusion du bail commercial ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ; [
] ;
que M. E... a été débouté de sa demande tendant à voir déclarer nul le bail commercial conclu le 20 décembre 2013 ; que la SARL Lyona n'est donc pas occupante sans droit ni titre du bien loué ; qu'il sera débouté en conséquence de sa demande d'expulsion ; [
] » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur la demande d'annulation du bail fondée sur l'insanité d'esprit, la personne qui a passé un acte alors qu'elle n'était pas saine d'esprit ou ses héritiers disposent d'un délai de cinq ans à compter de l'acte pour en solliciter l'annulation ; que l'article 464 du code civil prévoit aussi que : « Les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l'altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant à l'époque où les actes ont été passés. Ces actes peuvent, dans les mêmes conditions, être annulés s'il est justifié d'un préjudice subi par la personne protégée. Par dérogation à l'article 2252, l'action doit être introduite dans les cinq ans de la date du jugement d'ouverture de la mesure. » ; qu'en l'espèce, il n'est pas justifié de la publicité du jugement d'ouverture de la mesure de curatelle dont bénéficie M. E... moins de deux ans après le contrat de bail commercial. Les dispositions de ce texte ne sont donc pas applicables ;
qu'en ce qui concerne la demande de nullité pour insanité d'esprit, il appartient au demandeur de prouver que le trouble mental existait au moment même de la signature de l'acte contesté ; que l'ouverture d'une mesure de protection au profit du demandeur dans un temps proche de la date de l'acte ne suffit pas à faire la preuve de l'insanité d'esprit lors de la signature de l'acte ; qu'en l'espèce, M. E... a été placé sous sauvegarde de justice le 12 juin 2015 sur la base d'un certificat médical du docteur H... du 19 mai 2015 ; que le médecin gériatre indique que M. E... se sent persécuté et abusé par sa banque et qu'il présente des idées fixes et une logorrhée verbale ; que le 2 juin 2015, il avait porté plainte une nouvelle fois à la gendarmerie contre M. X... en indiquant que ce dernier l'avait fait sortir de ses gonds à propos de la gestion de la plage des [...] et en émettant des doutes sur la provenance de ses revenus ; que ces éléments postérieurs de près de deux ans à l'acte litigieux ne permettent pas d'établir l'insanité d'esprit du demandeur le jour de l'acte ; que M. E... invoque une hospitalisation au mois de septembre 2013 pour une occlusion intestinale et une autre au mois d'avril 2014 pour une intervention cardiaque ; que toutefois ces pathologies ne sont pas d'une gravité suffisante pour avoir amenuiser la faculté de réflexion et de décision de M. E... le 20 décembre 2013 ; que le docteur B... fait état dans un certificat du 24 février 2018 d'un trouble psychique dont M. E... est porteur depuis plus de 10 ans qui n'a pas été diagnostiqué à l'époque car M. E... ne se savait pas malade et ne consultait pas de médecin ; qu'il diagnostique une psychose maniaco-dépressive et indique que le perpétuel déséquilibre de son état psychique ne lui permettait pas, depuis plus de 10 ans, d'assurer la gestion très compliquée de ses biens et ses obligations administratives ; que ce certificat ne suffit toutefois pas à établir que le jour de l'acte, le 20 décembre 2013, M. E... était atteint d'un trouble mental qui ne lui permettait pas d'appréhender la portée de l'acte qu'il signait et des engagements qu'il prenait ; qu'il convient de rappeler que l'acte a été signé en présence d'un notaire et dans son étude ; que cet officier ministériel est tenu de vérifier que les personnes qui signent un acte sont en possession de leurs facultés du moins en apparence. Si le notaire avait décelé que M. E... n'avait pas la faculté de connaître la portée de l'acte qu'il signait, il n'aurait pas pu recevoir sa signature ; qu'il convient en conséquence de juger que M. E... ne rapporte pas la preuve d'avoir été atteint le jour de l'acte d'une insanité d'esprit viciant son consentement » ;
1°) ALORS QUE, pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit ; que, pour rapporter le trouble mental de M. E... au moment de la conclusion du bail commercial litigieux, ce dernier, assisté de son curateur, a invoqué le certificat du docteur U..., du 26 août 2006 (pièce n° 7) constatant « chez M. E... une réaction dépressive sévère avec ruminations morbides, nécessitant une prise en charge psychologique », l'examen médical du docteur H..., le 19 mai 2015 (pièce n° 17), faisant remonter cette dépression à 2005, un certificat médical du 24 février 2018 (pièce n° 20), du docteur B..., posant un « diagnostic du trouble psychique dont il est porteur depuis plus de 10 ans », son hospitalisation, en avril 2014, pour menace de syndrome coronarien, ainsi que les décisions des 12 juin 2015 et 26 novembre 2015, ayant prononcé une mesure de sauvegarde de justice, puis sous curatelle renforcée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher s'il ne résultait pas de la conjonction de ces éléments qu'au moment de la conclusion du bail commercial du 20 décembre 2013 que M. E... ne pouvait être sain d'esprit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 414-1 du code civil ;
2°) ALORS QUE pour faire un acte valable, il faut être sain d'esprit ; que, pour écarter l'insanité d'esprit de M. E..., la cour d'appel, par motifs adoptés des premiers juges, a énoncé que si le notaire instrumentaire avait décelé que M. E... n'avait pas la faculté de connaître la portée de l'acte, il n'aurait pas pu recevoir sa signature ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, impropre à écarter l'insanité d'esprit de M. E... au moment de la conclusion du bail commercial litigieux, la cour d'appel a violé l'article 414-1 du code civil ;
3°) ALORS QUE le juge ne peut refuser de statuer en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies ; qu'en énonçant que, M. E..., assisté de son curateur, ne peut s'appuyer sur l'article 464 du code civil puisqu'il ne justifie pas de la publicité du jugement de curatelle renforcée moins de deux ans après la conclusion du bail commercial, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR rejeté les demandes de M. E... en annulation du bail commercial du 20 décembre 2013 et expulsion de la société Lyona,
AUX MOTIFS PROPRES QUE « sur la demande de nullité du bail pour cause de contrepartie dérisoire, aux termes de l'article 1108 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, une cause licite dans l'obligation est une des conditions essentielles pour la validité d'une convention ; que l'article 1131 du même code énonce que l'obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet ; que le bail commercial du 20 décembre 2013, qui prévoit un pas-de-porte de 30 000 euros, un loyer annuel hors taxe de 40 000 euros, qui ne prévoit aucun dépôt de garantie et qui met à la charge du bailleur les réparations afférentes aux gros murs et voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures, celui des digues, des murs de soutènement et de clôture, la charge de construction d'un mur de soutènement pour établir la limite séparative entre différentes parcelles et la réalisation d'un branchement définitif à EDF ne peut être considéré comme un contrat dépourvu de cause ; qu'en effet, il n'est pas démontré par M. E... qu'au moment de la formation du contrat, le prix aurait été dérisoire ni que les travaux et réparations mis à sa charge seraient sans commune mesure avec ses obligations de bailleur ; que le prix du bail est ainsi un peu plus élevé que celui des baux saisonniers successifs ; qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas de porte (qui n'est pas un élément obligatoire dans le cadre d'un bail commercial) aurait un montant dérisoire et serait un élément permettant de dire que le contrat serait dépourvu de cause ; que les travaux et démarches auxquels s'est engagé le bailleur sont de sa responsabilité de propriétaire et ne sont pas des clauses exorbitantes de droit commun (d'autant plus que le contrat de bail prévoit que les autres réparations, grosses ou menues, restent à la charge du preneur) ; que seule l'absence de versement d'un dépôt de garantie peut apparaître étonnante mais doit être intégrée dans le contexte des relations établies depuis plusieurs années entre M. E... et M. X... ; qu'en tout état de cause, la seule absence du versement d'un dépôt de garantie n'est pas suffisante pour dire que le contrat de bail était dépourvu de cause lors de sa conclusion ; que M. E... sera débouté de sa demande de nullité du bail sur ce fondement ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce point ;
[
] ;
que M. E... a été débouté de sa demande tendant à voir déclarer nul le bail commercial conclu le 20 décembre 2013 ; que la SARL Lyona n'est donc pas occupante sans droit ni titre du bien loué ; qu'il sera débouté en conséquence de sa demande d'expulsion ; [
] » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « sur la demande d'annulation du contrat fondée sur l'absence de cause pour absence de contrepartie, le contrat ayant été signé avant l'entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats, les anciens articles du code civil sont applicables, notamment les articles 1131 et suivants ancien du code civil ; qu'ils prévoient que l'obligation sans cause ou avec une cause illicite ne peut avoir aucun effet et que la cause peut exister quoiqu'elle n'ait pas été exprimée dans l'acte ; que, dans les contrats synallagmatiques, la cause de l'obligation de l'un est l'obligation de l'autre ; qu'en l'espèce, M. E... a transféré à la SARL Lyona, par le bail du 20 décembre 2013, la jouissance d'un ensemble de locaux et autres équipements et terrain attenant sur une plage privée pour une durée de neuf ans avec droit au renouvellement à l'issue de ce délai ; qu'en contrepartie, la SARL Lyona s'est engagée à payer un loyer annuel de 40 000 euros HT outre la TVA, qui pourra être porté à 70 000 euros en cas de réalisation par le preneur à ses frais d'une construction de 40 mètres carrés sur l'une des dalles existantes ; qu'il est précisé que dans ce cas le loyer ne serait augmenté qu'après amortissement du coût des travaux par le preneur sur la base de la différence entre le loyer de base et le nouveau loyer ; qu'il est indiqué que si le bailleur rembourse au preneur le coût des travaux ou, si il les finance lui-même, l'augmentation du loyer s'appliquerait immédiatement ; qu'ainsi, le coût de ces travaux est à la charge effective du bailleur mais la nouvelle construction permet d'augmenter l'attraction des locaux pour un preneur et le montant du loyer ; qu'aucun dépôt de garantie n'a été stipulé ; que cette somme est destinée à compenser les dégradations éventuelles lors de la cessation du bail ; qu'il convient de rappeler que les parties étaient liées par des relations commerciales anciennes et que M. X..., le gérant de la SARL Lyona gérait la plage privée des [...] depuis de nombreuses années ; qu'en outre, le bailleur a consenti une « servitude de passage » sur des parcelles permettant l'accès aux deux dalles en béton constituant le fondations des locaux de la plage et il s'est engagé à ses seuls frais à faire réaliser, avant l'ouverture de la saison 2017 au plus tard, un mur de soutènement permettant de marquer définitivement la limite séparative entre les parcelles accueillant la plage et l'accotement ; qu'il s'agit de travaux d'importance selon les stipulations du bail ; qu'en outre, le bailleur s'est engagé à améliorer les aires de stationnement et à autoriser le stationnement sur d'autres parcelles ; que ces travaux d'importance sont à la charge exclusive du bailleur sans augmentation du loyer prévue ; que, toutefois, leur montant n'est pas justifié ni précisé et il n'est pas établi qu'ils soient hors de proportion avec le montant du loyer ; que M. E... n'a pas fait la preuve de s'être trouvé, le jour de la signature de l'acte, dans un état d'insanité d'esprit et il a été jugé que son consentement n'a pas été vicié ; qu'ainsi, il a accepté ces conditions sciemment et toute connaissance de cause ; que le mur de soutènement n'est pas utile seulement pour l'activité commerciale sur les parcelles concernées mais aussi pour la sauvegarde de ces parcelles afin de les séparer de la voie publique ; qu'en outre, il a écrit de sa main le projet de bail commercial contenant le détail des travaux envisagés notamment le mur de soutènement à monter ; qu'il convient en conséquence de juger que l'absence de cause ou la contrepartie dérisoire n'est pas établie de sorte que le bail commercial souscrit le 20 décembre 2013 par les parties ne sera pas annulé » ;
1°) ALORS QU' un contrat à titre onéreux est nul pour absence de cause lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 13-14), M. E..., assisté de son curateur, a fait valoir que le pas de porte versé, d'un montant de 30 000 euros, était dérisoire, en présence d'un bail commercial portant sur un bien exceptionnel, telle une plage privée à [...], sa valeur, dans la pratique, s'élevant à plus de dix fois la valeur locative du bien loué, de sorte qu'en l'espèce, le droit au bail avait une valeur supérieure à 400 000 euros ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas de porte (qui n'est pas un élément obligatoire dans le cadre d'un bail commercial) aurait un montant dérisoire, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions établissant le contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE le versement d'un pas de porte que ne prohibe aucune disposition des textes régissant les baux commerciaux, peut être, dans l'intention des parties, soit un supplément de loyers payé d'avance, soit la contrepartie d'éléments de nature diverse, notamment d'avantages commerciaux, sans rapport avec le loyer ; qu'en se bornant à énoncer qu'aucun élément probant ne permet d'affirmer que le pas de porte (qui n'est pas un élément obligatoire dans le cadre d'un bail commercial) aurait un montant dérisoire, sans rechercher quelle était sa nature, pour vérifier si les engagements pris par M. E... n'avaient pas une contrepartie dérisoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.