LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 27 janvier 2021
Rejet
M. CATHALA, président
Arrêt n° 140 FP-P+R+I
Pourvoi n° D 18-23.535
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 27 JANVIER 2021
1°/ M. T... Q..., domicilié [...] ,
2°/ M. S... C..., domicilié [...] ,
3°/ Mme Lb... N..., domiciliée [...] ,
4°/ M. W... Y..., domicilié [...] ,
5°/ M. F... J..., domicilié [...] ,
6°/ Mme D... H..., épouse I..., domiciliée [...] ,
7°/ M. JM... G..., domicilié [...] ,
8°/ M. JC... X..., domicilié [...] ,
9°/ M. JC... M..., domicilié [...] ,
10°/ Mme L... R..., épouse O..., domiciliée [...] ,
11°/ M. V... U..., domicilié [...] ,
12°/ Mme P... K..., épouse A..., domiciliée [...] , prise en qualité d'ayant droit de E... A..., décédé,
13°/ Mme EW... JZ..., épouse JH..., domiciliée [...] ,
14°/ M. EY... YH..., domicilié [...] ,
15°/ M. F... CC..., domicilié [...] ,
16°/ M. La... ST..., domicilié [...] ,
17°/ M. DG... IA..., domicilié [...] ,
18°/ M. F... JF..., domicilié [...] ,
19°/ M. V... XX..., domicilié [...] ,
20°/ M. VF... WI..., domicilié [...] ,
21°/ M. T... HL..., domicilié [...] ,
22°/ M. F... SG..., domicilié [...] ,
23°/ Mme DC... WA..., épouse ET..., domiciliée [...] ,
24°/ M. JC... JY..., domicilié [...] ,
25°/ M. JR... SQ..., domicilié [...] ,
26°/ M. JP... QW..., domicilié [...] ,
27°/ M. HF... RP..., domicilié [...] ,
28°/ Mme Gi... NG..., épouse BF..., domiciliée [...] ,
29°/ Mme BV... BI..., domiciliée [...] ,
30°/ M. IL... BI..., demeurant [...] ,
tous deux pris en qualité d'ayants droit de AP... BI..., décédé,
31°/ M. WN... HJ..., domicilié [...] ,
32°/ M. NK... BU..., domicilié [...] ,
33°/ M. IL... KY..., domicilié [...] ,
34°/ M. V... WR..., domicilié [...] ,
35°/ M. JB... TA..., domicilié [...] ,
36°/ Mme TF... UE... épouse TJ..., domiciliée [...] ,
37°/ M. EY... CP..., domicilié [...] ,
ont formé le pourvoi n° D 18-23.535 contre l'arrêt rendu le 21 juin 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant :
1°/ à M. AF... AR..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire ad hoc de la société General Trailers,
2°/ à la société AetM AJ associés Avezou Mancel, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est 5 boulevard de l'Europe, 91050 Évry, prise en la personne de M. WV..., en qualité de mandataire ad hoc de la société General Trailers,
3°/ à la société Bank of Scotland PLC, dont le siège est 10 rue Lyz Ecosse, The Mound, EHI Edinburgh (Royaume-Uni),
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Le Corre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. Q... et des trente-six autres demandeurs au pourvoi, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Bank of Scotland PLC, les plaidoiries de Me Didier et celles de Me Piwnica, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 décembre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, M. Le Corre, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, Richard, conseillers, Mme Chamley-Coulet, M. Duval, Mme Prieur, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Désistements partiels
1. Il est donné acte à M. Q... et trente-six autres demandeurs du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre MM. AR... et WV..., ès qualités.
2. Il est donné acte à M. X... du désistement de son pourvoi en ce
qu'il est dirigé contre la société Bank of Scotland PLC.
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 juin 2018), rendu sur renvoi après cassation (Com., 2 juin 2015, pourvoi n° 13-24.714, Bull. 2015, IV, n° 94), la société General Trailers France, appartenant au groupe General Trailers spécialisé dans la construction, vente ou location de remorques et grands containers, a été acquise au mois d'août 2000 par la société Apax Partners, qui au moyen d'un montage financier (« leverage buy-out », LBO) a pris le contrôle de la société General Trailers France via sa filiale Société Européenne Boissière (SEB). Pour le financement de cette acquisition, a notamment été conclu un contrat entre les sociétés General Trailers France, SEB et Bank of Scotland prévoyant l'octroi à la société General Trailers France de divers crédits.
4. Après le redressement judiciaire, ouvert le 24 novembre 2003, de la société General Trailers France, un plan de cession partielle a été arrêté, prévoyant le licenciement de six cent cinq salariés. Certains d'entre eux, licenciés pour motif économique le 29 avril 2004, ont saisi la juridiction prud'homale, et par arrêts des 29 janvier et 19 mars 2009, la cour d'appel a considéré que les licenciements économiques des salariés demandeurs au présent pourvoi étaient sans cause réelle et sérieuse dès lors que l'actionnaire de la société General Trailers France, la société SEB, disposait de moyens financiers conséquents au regard desquels le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant. La cour d'appel a également relevé que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement. Des créances de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ont été fixées dans la procédure collective de la société General Trailers France.
5. Dans le même temps, MM. WV... et AR..., désignés commissaires à l'exécution du plan de la société General Trailers France, ont assigné la société Bank of Scotland en responsabilité pour octroi de crédits ruineux et les salariés licenciés, demandeurs au présent pourvoi, sont intervenus volontairement à l'instance en réparation de leurs préjudices consécutifs à la perte de leur emploi, soit la perte pour l'avenir des rémunérations qu'ils auraient pu percevoir et le préjudice moral né de la perte de leur emploi et de leurs conditions de travail depuis le licenciement ainsi que la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé ou équivalent.
6. Par arrêt du 18 juillet 2013, la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'intervention volontaire des salariés. Elle l'a infirmé pour le surplus et a jugé que la responsabilité de la société Bank of Scotland, qui avait accordé des crédits ruineux à la société General Trailers France, était engagée envers la collectivité des créanciers.
7. Par arrêt du 2 juin 2015, la chambre commerciale de la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt du 18 juillet 2013, mais seulement en ce qu'il avait déclaré irrecevable l'intervention volontaire des salariés.
8. Par arrêt du 21 juin 2018, statuant sur renvoi, la cour d'appel a déclaré recevable l'intervention des salariés mais les a déboutés de leurs demandes.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
9. Les salariés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir condamner la société Bank of Scotland à leur verser, à chacun, une somme à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices liés à la perte d'emploi au sein de la société General Trailers France et à la perte de chance de retrouver à court terme un emploi optimisé ou équivalent, alors :
« 1°/ qu'en application du principe de la réparation intégrale, les salariés licenciés pour motif économique et qui ont perçu de leur employeur une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sont fondés à demander réparation des préjudices constitués par la perte de leur emploi et par la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé au tiers au contrat de travail ayant commis une faute ayant concouru aux difficultés économiques rencontrées par l'employeur, au prononcé des licenciements économiques et à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi insuffisant ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240 du code civil ;
2°/ que si l'indemnité de licenciement n'a pas la nature juridique d'un salaire mais de dommages et intérêts qui ont vocation à indemniser le salarié du préjudice causé par l'employeur par la perte de l'emploi, elle ne l'indemnise nullement du préjudice distinct, causé par la perte de son emploi (perte des rémunérations qu'il aurait dû percevoir dans le futur et préjudice moral) et découlant de la faute commise par un tiers au contrat de travail (la Bank of Scotland) ayant concouru à la réalisation du dommage, à savoir son licenciement économique ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240 du code civil ;
3°/ qu'en constatant que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alloués aux salariés licenciés pour motif économique par la cour d'appel de Paris avaient été versés aux seuls motifs que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant et que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement tant interne qu'externe,- ce dont il résultait que les salariés étaient fondés à solliciter également la condamnation d'un tiers au contrat de travail (la Bank of Scotland), dont la faute avait concouru à la réalisation du dommage, à savoir leurs licenciements économiques, à les indemniser du préjudice causé par tant la perte de leur emploi (perte des rémunérations qu'ils auraient dû percevoir dans le futur et préjudice moral) que par la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé en raison d'un plan de sauvegarde de l'emploi non proportionné aux moyens financiers du groupe d'appartenance de la société Général Trailers France - , et en déboutant les salariés exposants de leurs demandes, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;
4°/ qu'en affirmant que le préjudice, conséquence de la rupture du contrat de travail, avait été réparé par l'allocation d'indemnités de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte que les salariés étaient mal fondés à demander réparation une seconde fois de ces préjudices, sans répondre aux conclusions des exposants qui faisaient valoir qu'ils avaient pris le soin de solliciter, à titre de dommages et intérêts, une somme équivalente aux rémunérations qu'ils auraient dû percevoir depuis leur licenciement, auxquelles s'ajoutait un montant devant couvrir le préjudice lié à la perte des conditions de travail et d'évolution de leur rémunération en raison de leurs ancienneté et compétences (15 000 euros), de laquelle étaient retranchée 24 mois de droits Pôle emploi, outre les dommages et intérêts perçus en suite des arrêts rendus par la chambre sociale de la cour d'appel de Paris, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
10. Il résulte de l'article L. 1234-9 du code du travail que l'indemnité de licenciement, dont les modalités de calcul sont forfaitaires, est la contrepartie du droit de l'employeur de résiliation unilatérale du contrat de travail.
11. Il résulte par ailleurs de l'article L. 1235-3 du même code que l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse répare le préjudice résultant du caractère injustifié de la perte de l'emploi.
12. Ayant constaté que les salariés licenciés pour motif économique avaient bénéficié d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi et du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la cour d'appel, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants relatifs à l'indemnité de licenciement, en a justement déduit, sans être tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, que les préjudices allégués par les salariés résultant de la perte de leur emploi et de la perte d'une chance d'un retour à l'emploi optimisé en l'absence de moyens adéquats alloués au plan de sauvegarde de l'emploi avaient déjà été indemnisés.
13. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les demandeurs, à l'exception de M. X..., aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept janvier deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour les demandeurs au pourvoi, à l'exception de M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté les exposants de leurs demandes tendant à voir condamner la société Bank of Scotland à leur verser, à chacun, une somme à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices liés à la perte d'emploi au sein de la société General Trailers France et à la perte de chance de retrouver à court terme un emploi optimisé ou équivalent ;
AUX MOTIFS QUE les salariés font valoir que leur préjudice est constitué par la perte de leur emploi et par la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé ; qu'au titre du premier poste de préjudice, ils demandent réparation de la perte de leur rémunération depuis leur licenciement ainsi que du préjudice moral constitué par la perte de leur emploi ; qu'ils soutiennent que la chambre sociale de la cour d'appel de Paris n'a statué que sur le caractère injustifié des licenciements au regard des obligations légales pesant sur la société General Trailers France ; que selon eux, la société Bank of Scotland, qui n'était pas présente dans cette instance, leur a causé un préjudice distinct puisque sans la faute de celle-ci, ils n'auraient jamais été privés de leur emploi ; qu'ils évaluent ce préjudice au montant des rémunérations qu'ils auraient dû percevoir depuis leur licenciement, auquel s'ajoute un montant de 15.000 euros « lié à la perte des conditions de travail et d'évolution de leur rémunération en raison de leur ancienneté et compétences », moins les 24 mois de droits perçus par Pôle emploi et moins le montant des dommages et intérêts perçus à la suite de de l'arrêt de la chambre sociale de la cour d'appel de Paris ; qu'au titre du second poste de préjudice, les salariés soutiennent qu'ils n'ont pas pu bénéficier d'un plan de sauvegarde de l'emploi proportionné aux moyens financiers du groupe d'appartenance de General Trailers France ; que la société Bank of Scotland soutient là encore que les préjudices invoqués par les salariés ont déjà été intégralement réparés ; qu'elle ajoute, si la cour estimait que les préjudices n'ont pas été réparés, que les salariés ne justifient pas du montant des dommages et intérêts qu'ils sollicitent ; qu'elle relève que l'évaluation du second poste de préjudice, la perte de chance de retrouver un emploi, est intégrée dans le premier poste, que les pièces produites ne permettent pas de connaître la rémunération de tous les salariés, alors qu'est demandé paiement d'une somme équivalente aux rémunérations qu'ils auraient dû toucher depuis leur licenciement, que par ailleurs certains salariés reconnaissent avoir trouvé un emploi ou fait valoir leurs droit à la retraite et enfin que la somme de 15.000 euros demandée au titre du préjudice moral n'est pas justifiée ; qu'en tout état de cause, la Bank of Scotland soutient que rien ne permet d'affirmer que les salariés auraient conservé leur emploi au sein de General Trailers France jusqu'au jour de l'arrêt à intervenir, de sorte que leur prétendu préjudice lié à la perte d'emploi n'est en réalité que la perte de chance de ne pas avoir pu conserver leur emploi ; que la cour relève que les salariés ont fait l'objet d'un licenciement pour motif économique le 29 avril 2004 ; qu'ils ont chacun saisi le conseil de prud'hommes afin de voir annuler leur licenciement, et obtenir des dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la violation de la procédure de licenciement et pour défaut de proposition au plan social d'une convention de conversion et à titre subsidiaire de dire leur licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de la méconnaissance par l'employeur de son obligation de reclassement et au titre du défaut de proposition au plan social d'une convention de conversion ; que par arrêts devenus définitifs en date du 29 janvier et 19 mars 2009 la cour d'appel de Paris a considéré que les licenciements étaient sans cause réelle et sérieuse dès lors que l'actionnaire de la société General Trailers, la société SEB, disposait de moyens financiers conséquents rendant le plan de sauvegarde de l'emploi proposé aux salariés insuffisant alors que la pertinence d'un plan de sauvegarde de l'emploi doit s'apprécier en fonction des moyens dont dispose l'entreprise et le groupe pour faciliter le reclassement des salariés ; que la cour a relevé également que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement interne ni à son obligation de reclassement externe ; que des dommages et intérêts ont été alloués aux salariés sur ces fondements ; que pour ce qui concerne des préjudices invoqués, ceux nés de la perte des rémunérations qu'ils auraient pu percevoir dans le futur et le préjudice moral né de la perte de leur emploi et de leurs conditions de travail depuis le licenciement, la cour relève que l'indemnité de licenciement allouée aux salariés pour la rupture de leur contrat de travail a justement pour vocation de réparer le préjudice subi du fait de la rupture du contrat de travail et prend nécessairement en compte ces préjudices ; qu'elle n'a pas le caractère d'une créance salariale mais d'une créance de dommages et intérêts qui répare les conséquences de la perte de l'emploi ; que de plus l'indemnité légale de licenciement perçue par les salariés a été en l'espèce complétée par des dommages et intérêts à la suite de l'arrêt de la cour d'appel ayant considéré que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que ces dommages et intérêts réparent le préjudice qui est invoqué par les salariés dans le second poste de préjudice, soit l'absence de moyens adéquats alloués au plan de sauvegarde de l'emploi ; que les salariés dont le préjudice a été déjà réparé par l'allocation d'indemnités de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sont donc mal fondés à demander réparation une seconde fois de ces préjudices ; que dès lors la cour les déboutera de leurs demandes ;
1°) ALORS QU'en application du principe de la réparation intégrale, les salariés licenciés pour motif économique et qui ont perçu de leur employeur une indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sont fondés à demander
réparation des préjudices constitués par la perte de leur emploi et par la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé au tiers au contrat de travail ayant commis une faute ayant concouru aux difficultés économiques rencontrées par l'employeur, au prononcé des licenciements économiques et à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi insuffisant ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240 du code civil ;
2°) ALORS QUE si l'indemnité de licenciement n'a pas la nature juridique d'un salaire mais de dommages et intérêts qui ont vocation à indemniser le salarié du préjudice causé par l'employeur par la perte de l'emploi, elle ne l'indemnise nullement du préjudice distinct, causé par la perte de son emploi (perte des rémunérations qu'il aurait dû percevoir dans le futur et préjudice moral) et découlant de la faute commise par un tiers au contrat de travail (la Bank of Scotland) ayant concouru à la réalisation du dommage, à savoir son licenciement économique ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240 du code civil ;
3°) ALORS QU'en constatant que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alloués aux salariés licenciés pour motif économique par la cour d'appel de Paris avaient été versés aux seuls motifs que le plan de sauvegarde de l'emploi était insuffisant et que l'employeur n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement tant interne qu'externe, - ce dont il résultait que les salariés étaient fondés à solliciter également la condamnation d'un tiers au contrat de travail (la Bank of Scotland), dont la faute avait concouru à la réalisation du dommage, à savoir leurs licenciements économiques, à les indemniser du préjudice causé par tant la perte de leur emploi (perte des rémunérations qu'ils auraient dû percevoir dans le futur et préjudice moral) que par la perte de chance d'un retour à l'emploi optimisé en raison d'un plan de sauvegarde de l'emploi non proportionné aux moyens financiers du groupe d'appartenance de la société Général Trailers France - , et en déboutant les salariés exposants de leurs demandes, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 1382, devenu, 1240 du code civil ;
4°) ALORS QU'en affirmant que le préjudice, conséquence de la rupture du contrat de travail, avait été réparé par l'allocation d'indemnités de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte que les salariés étaient mal fondés à demander réparation une seconde fois de ces préjudices, sans répondre aux conclusions des exposants (cf. p. 26, productions) qui faisaient valoir qu'ils avaient pris le soin de solliciter, à titre de dommages et intérêts, une somme équivalente aux rémunérations qu'ils auraient dû percevoir depuis leur licenciement, auxquelles s'ajoutait un montant devant couvrir le préjudice lié à la perte des conditions de travail et d'évolution de leur rémunération en raison de leurs ancienneté et compétences (15.000 euros), de laquelle étaient retranchée 24 mois de droits Pôle emploi, outre les dommages et intérêts perçus en suite des arrêts rendus par la chambre sociale de la cour d'appel de Paris, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.