LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 janvier 2021
Cassation
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 71 F-D
Pourvoi n° Y 19-19.164
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 JANVIER 2021
M. L... C..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-19.164 contre l'arrêt rendu le 15 avril 2019 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à M. W... A..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. C..., de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. A..., après débats en l'audience publique du 24 novembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 15 avril 2019), M. C... a assigné M. A... devant la juridiction des référés en expulsion d'un terrain cadastré [...] , issu, selon lui de la division de parcelles qui avaient été acquises par son arrière-grand-père et dont il est désormais propriétaire indivis, en démolition de la construction édifiée par l'occupant et en paiement d'une indemnité d'occupation.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
2. M. C... fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes, alors « que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès ; que la preuve de l'occupation irrégulière de la parcelle par M. A... n'était pas une condition de recevabilité des demandes formées par M. C... mais de leur succès ; qu'en déclarant néanmoins M. C... irrecevable, faute d'intérêt, en sa demande, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 31 du code de procédure civile :
3. Aux termes de ce texte, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
4. Pour déclarer irrecevables les demandes, faute d'intérêt à agir, l'arrêt retient que la preuve de l'occupation de la parcelle [...] par M. A... n'est pas rapportée, en se fondant sur un constat d'huissier de justice des 10 juillet et 14 octobre 2015 mentionnant les déclarations de M. C... aux termes desquelles la construction édifiée par V... A..., depuis lors décédé, était actuellement occupée par Mme E... , sa fille, ses fils et son petit-fils.
5. En statuant ainsi, alors que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 avril 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne M. A... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. L... C...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré M. C... irrecevable en sa demande ;
AUX MOTIFS QUE « L'appelant soutient être propriétaire indivis de la parcelle et prétend que l'intimé ne peut justifier d'aucun titre de propriété, d'autant que par jugement du 11 avril 1991, publié à la conservation des hypothèques le 11 octobre 1996, le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre a annulé l'acte de notoriété acquisitive dressé le 10 décembre 1982 par Maître B... au profit de M. V... A... sur la parcelle [...] et, retenant que cette parcelle se confondait avec celle acquise par M. O... F... en 1884, a reconnu la qualité de propriétaire indivis aux consorts F..., P... et J..., ayants droit de O... F.... Il ajoute que par arrêt rendu le 10 mai 1993, notre cour a prononcé la radiation de l'instance d'appel portant sur le jugement du 11 avril 1991, ce jugement a force de chose jugée même s'il n'a pas été publié, la péremption de l'instance étant acquise et que l'intimée ne peut valablement se prévaloir d'une propriété par prescription et considère qu'elle est occupante sans droit ni titre.
L'intimé fait valoir que selon acte reçu le 30 avril 1986 par Maître B... M. V... D... A... a cédé la parcelle aux consorts E... , dont Mme Y... I... E... . Il nie toute occupation de la parcelle et, reprenant ses moyens de première instance, il demande de déclarer l'appelant irrecevable en sa demande.
La preuve de l'occupation de la parcelle [...] n'étant pas rapportée, le constat d'huissier des 10 juillet et 14 octobre 2015, pièce appelant n° 3, mentionnant en page 5 que M. C... déclare que la maison en dur au toit gris avec bandeaux blancs appartenait à feu A... V... et qu'elle est actuellement occupée par Mme E... , sa fille A... U..., ses fils A... W..., A... H... et A... T... fils de H..., l'acte de vente précité étant versé au débat, il y a lieu, infirmant la décision de déclarer M. C... irrecevable en sa demande, faute d'intérêt » ;
ALORS QUE l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action et que l'existence du droit invoqué par le demandeur n'est pas une condition de recevabilité de son action mais de son succès ; que la preuve de l'occupation irrégulière de la parcelle par M. A... n'était pas une condition de recevabilité des demandes formées par M. C... mais de leur succès ; qu'en déclarant néanmoins M. C... irrecevable, faute d'intérêt, en sa demande, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile.