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20/01/2021 | FRANCE | N°19-20072

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 janvier 2021, 19-20072


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 96 F-D

Pourvoi n° K 19-20.072

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 JANVIER 2021

La société Captain Tortue France, société par a

ctions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 19-20.072 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2019 par la cour d'appel de Colmar (c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 janvier 2021

Rejet

M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 96 F-D

Pourvoi n° K 19-20.072

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 20 JANVIER 2021

La société Captain Tortue France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° K 19-20.072 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à Mme T... Y..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Mariette, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Captain Tortue France, de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme Y..., après débats en l'audience publique du 25 novembre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Mariette, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 28 mai 2019), Mme Y... a été engagée par la société Captain Tortue France en qualité de représentante-démonstratrice le 5 avril 1996 moyennant une rémunération à la commission, d'abord sous le statut de vendeur à domicile indépendant (VDI) puis à compter du 3 janvier 2000, celui de voyageur représentant placier (VRP).

2. Invoquant des irrégularités relatives au paiement de ses congés payés, elle a saisi, le 23 juin 2015, la juridiction prud'homale d'une demande de rappel de salaires au titre des congés payés et de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

3. Elle a pris sa retraite avec effet au 30 juin 2015.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés pour la période de juin 2010 à juin 2015, alors « que toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'antérieurement à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, cette action était soumise à un délai de prescription de cinq ans ; que porte sur l'exécution du contrat de travail, et non sur le paiement d'une créance salariale, et est soumise en conséquence aux délais de prescription précités à compter de la signature du contrat, l'action qui tend à contester la licéité d'une clause contractuelle en raison de son caractère inintelligible ; que pour rejeter en l'espèce la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Captain Tortue, la cour d'appel a jugé que le fait que la salariée remette en cause un avenant antérieur à juin 2010 ne la privait pas de la possibilité de réclamer des indemnités de congés payés pour la période non prescrite s'il était avéré que ces indemnités auraient dû lui être payées et que la salariée ne contestait pas l'avenant signé en 2005 mais les conséquences de cet avenant sur sa rémunération ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait expressément, pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de congés payés, que le nouveau système mis en place par l'employeur s'agissant de l'indemnité de congés payés manquait d'intelligibilité, ce dont il se déduisait bien que l'action de Mme Y... portait, non pas sur le paiement des congés payés, mais sur la rédaction et la validité de l'avenant signée le 25 juin 2005 qui manquait selon elle de clarté et était en conséquence prescrite au jour où Mme Y... a saisi la juridiction prud'homale le 23 juin 2015, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1471-1 du code du travail et 2224 du code civil, par refus d'application, et l'article L. 3245-1 du code du travail, par fausse application. »

Réponse de la Cour

5. Le salarié, dont la demande de rappel d'indemnités de congés payés n'est pas prescrite, est recevable à contester la validité de la clause prévoyant l'inclusion de l'indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire.

6. Ayant constaté que la demande de rappel d'indemnité de congés payés se rapportait à une période non prescrite, la cour d'appel en a exactement déduit que la salariée était recevable à contester la validité de la clause contenue dans l'avenant signé le 25 juin 2005 prévoyant l'inclusion de l'indemnité de congés payés dans le taux de ses commissions.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que les parties peuvent convenir d'une rémunération forfaitaire incluant les congés payés à la double condition que cette convention soit expresse et que ses modalités n'aboutissent pas, pour le salarié, à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales ou conventionnelles ; que pour le condamner à verser à la salariée la somme de 29.987,50 euros brut à titre de congés payés, la cour d'appel a jugé qu'un avenant stipulant l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les taux de commissions doit s'accompagner d'une augmentation de ces derniers, que le salarié ne peut se voir opposer un contrat ou un avenant ne faisant mention d'aucune majoration distincte du taux des commissions lui permettant de vérifier qu'il a été rempli de ses droits au titre des congés payés, que la salariée n'était pas en mesure de vérifier que la modification des taux de commissions incluait ou non les congés payés et que la comparaison des taux de commissions antérieurs et postérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 fait ressortir que certains taux n'ont pas évolué de 10 % ou plus et que certains ont même diminué ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier la condamnation de l'employeur, quand il était constant que l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les commissions était prévue par l'avenant du 29 juin 2005 et qu'elle constatait expressément que les tableaux dressés par l'employeur à partir des bulletins de paie de la salariée établissaient que son salaire était globalement supérieur de plus de 10 % à ce qu'il aurait été en application des dispositions contractuelles antérieures au 29 juin 2005, ce dont il se déduisait que les modalités d'intégration des congés payés aux commissions et bonus de la salariée n'avaient pas abouti à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales pour la salariée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige ;

2°/ que lorsque l'inclusion des congés payés dans les commissions perçues par le salarié s'accompagne d'une modification de toute la structure de la rémunération par l'ajout de nouveaux modes de commissionnement, la fusion des anciens et la modification des tranches de chiffre d'affaires pris en compte, le juge ne peut apprécier la demande du salarié en vérifiant si chaque taux de commissions a augmenté ligne par ligne et doit rechercher au contraire si la rémunération d'ensemble du salarié a augmenté d'au moins 10 % pour tenir compte de l'inclusion des congés payés litigieux ; que pour le condamner à verser à la salariée la somme de 29 987,50 euros brut à titre de congés payés, la cour d'appel s'est bornée à relever que certains taux de commission antérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 n'avaient pas évolué de 10 % ou plus et que certains avaient même diminué ; qu'en procédant ainsi à une analyse taux par taux, sans tenir compte de l'ensemble de la rémunération de l'intéressée et de tous les taux de commissionnement contractuels, notamment les nouvelles modalités mises en place par l'avenant du 25 juin 2015 qui modifiait structurellement l'ensemble de la rémunération et alors que la société Captain Tortue produisait, sur plusieurs années postérieures à l'avenant litigieux, des tableaux comparatifs entre l'ancien et le nouveau système de rémunération établissant que la rémunération de la salariée avait augmenté de largement plus de 10 % liés à l'inclusion des congés payés dans la rémunération, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et violé les articles L. 3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige ;

3°/ que la cour d'appel a également relevé, pour le condamner à verser à la salariée la somme de 29 987,50 euros brut à titre de congés payés, "l'absence de toute précision sur le montant exact de l'indemnité de congés payés incluse dans les versements de l'employeur" ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait pourtant expressément qu'il résultait des avenants au contrat de travail, des annexes financières et des bulletins de salaire de la salariée que l'inclusion de l'indemnité de congés payés dans les commissions était expressément mentionnée comme s'effectuant à hauteur de 10 %, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige. »

Réponse de la Cour

9. S'il est possible d'inclure l'indemnité de congés payés dans la rémunération forfaitaire lorsque des conditions particulières le justifient, cette inclusion doit résulter d'une clause contractuelle transparente et compréhensible, ce qui suppose que soit clairement distinguée la part de rémunération qui correspond au travail, de celle qui correspond aux congés, et que soit précisée l'imputation de ces sommes sur un congé déterminé, devant être effectivement pris. Pour un voyageur représentant placier payé à la commission, il faut en outre que soit prévue une majoration du taux desdites commissions.

10. La cour d'appel, qui a relevé que si l'avenant signé par les parties le 25 juin 2005 stipulait l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les taux des commissions, il ne prévoyait en revanche aucune mention relative à la majoration distincte du taux de commissions, en sorte que la clause litigieuse n'était ni transparente ni compréhensible, en a exactement déduit que cette clause n'était pas opposable à la salariée qui n'était pas en mesure de vérifier que la modification des taux de commissions incluait ou non les congés payés et était fondée à réclamer le paiement de l'indemnité de congés payés en sus de ses commissions.

11. Le moyen n'est dont pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Captain Tortue France aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Captain Tortue France et la condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Captain Tortue France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Captain Tortue à payer à Mme Y... un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés de 29.987,50 euros pour la période de juin 2010 à juin 2015 avec intérêts au taux légal à compter du 15 juillet 2015 ;

AUX MOTIFS QUE « sur la prescription ; la SAS Captain Tortue France invoque les dispositions de l'article L 1471-1 du Code du travail en faisant valoir que l'action de la salariée revient à remettre en cause un avenant du 25 juin 2005, l'action étant prescrite le 23 juin 2010 alors que, pour Madame Y..., sa demande ne porte pas sur le bien-fondé de l'avenant mais sur l'application qui en a été faite, le délai de prescription commençant à courir, s'agissant des congés payés, à l'expiration de la période à l'issue de laquelle ils auraient dû être pris ; l'article L 3245-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, dispose que « l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour » ; l'article 21-V de la loi prévoit que ces dispositions « s'appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure » ; il résulte de ces textes que lorsque la prescription quinquennale a commencé à courir antérieurement à la date de promulgation de la loi, les nouveaux délais de prescription s'appliquent à compter de la date de promulgation, sans que le délai total de prescription ne puisse excéder cinq ans ; dans le cas présent, Madame Y... a saisi le conseil de prud'hommes le 23 juin 2015, soit dans le délai de trois ans à compter du 17 juin 2013 sans qu'il n'excède 5 ans ; le fait que la salariée remette en cause un avenant antérieur à juin 2010 ne la prive pas de la possibilité de réclamer des indemnités de congés payés pour la période non prescrite s'il est avéré que ces indemnités auraient dû lui être payées ; le jugement sera confirmé sur ce point ; Sur le droit à l'indemnité de congés payés ; Madame Y... explique que l'inclusion des congés payés dans la rémunération n'est licite que si elle est prévue par le contrat de travail et ne lèse pas le salarié, c'est-à-dire si le taux de commissionnement est augmenté d'au moins 10%, elle ajoute que l'inclusion des congés payés dans ses commissions a été introduite de manière insidieuse par l'avenant du 29 juin 2005, lequel a modifié la pratique antérieure, une telle inclusion supposant une augmentation corrélative au taux de commissions, ce qui n'a pas été le cas ; pour la SAS Captain Tortue France, en revanche, le tableau qu'elle a élaboré démontre que Madame Y... n'a subi aucune perte de salaire du fait du nouveau système intégrant les congés payés d'autant que de nouvelles formes de rémunération ont été ajoutées par l'avenant de 2005, augmentant, dans sa globalité, la rémunération de l'intéressé, critère qui seul doit être examiné, cette augmentation ayant atteint, certains semestres 40%, ce qui inclut très largement les congés payés, elle rappelle qu'a été modifiée la commission différenciée selon que l'équipe est directe ou indirecte et qu'ont été instaurées une nouvelle commission sur équipe détachée de 3%, un bonus saison et une nouvelle tranche de commission de 30% ; il est de droit que, s'il n'est pas interdit aux parties de convenir d'un salaire forfaitaire incluant l'indemnité de congés payés, cette convention doit être expresse et ses modalités ne peuvent avoir pour effet, pour le salarié, d'aboutir à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales ou conventionnelles ; ainsi, un avenant stipulant l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les taux de commissions doit s'accompagner d'une augmentation de ces derniers ; le salarié ne peut se voir opposer un contrat ou un avenant ne faisant mention d'aucune majoration distincte du taux des commissions lui permettant de vérifier qu'il a été rempli de ses droits au titre des congés payés ; autrement dit, la clause du contrat doit être transparente et compréhensible ; dans le cas présent, Madame Y... n'était pas en mesure de vérifier que la modification des taux de commissions incluait ou non les congés payés, vérification qui n'a été possible que par le recours à une procédure judiciaire et qui demeure litigieuse, les calculs des parties étant discordants ; en outre, et en tout état de cause, force est de constater, en comparant les taux de commissions antérieurs et postérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 que certains taux n'ont pas évolué de 10% ou plus et que certains ont même diminué ; ainsi : - sur les produits Captain Tortue, le taux de commissions sur ventes personnelles est passé de 27,5% à 30% en cas de chiffre d'affaires supérieur à 5.000 HT et a diminué de 20,5% à 20% sur la tranche comprise de 2.000 à 2.500 euros ; - sur la gamme Miss Captain : - le taux de commissions sur vente personnelles est passé, - pour le chiffre d'affaires compris entre 5.000 et 7.000 euros, de 23,5 à 25%, - pour le chiffre d'affaires compris entre 3.000 et 4.000 euros de 20,5 à 20%, - le taux des commissions sur le chiffre d'affaires démonstratrices directes est passé de 5 à 4,5% et est resté fixé à 3% sur les démonstratrices indirectes ; il est certes établi par les tableaux dressés par l'employeur à partir des bulletins de paie de l'intéressée, que son salaire a été globalement supérieur de plus de 10% à ce qu'il aurait été en application des avenants antérieurs au 29 juin 2015, mais Madame Y... est en droit, eu égard au manque d'intelligibilité du nouveau système s'agissant de l'indemnité de congés payés, en l'absence de toute précision sur le montant exact de l'indemnité de congés payés incluse dans les versements de l'employeur, d'en réclamer le paiement en sus des commissions perçues ; il convient dès lors d'infirmer le jugement et de condamner la SAS Captain Tortue France à payer à Madame Y... la somme qu'elle réclame, soit 29.987,50 euros brut » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la prescription : la société Captain Tortue fait valoir que la prescription de l'action de Mme Y... serait acquise aux termes de l'article L.174-1 du code du travail ; Mme Y... ne conteste pas l'avenant signé en 2005 mais les conséquences de cet avenant sur sa rémunération ; son action n'est par conséquent pas prescrite dans les limites de l'article L3245-1 du code du travail qui prévoit que la prescription en paiement du salaire ou en répétition est de cinq ans ; les commissions dues à un VRP sont concernées par cette prescription qui court à compter de l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu être pris ; Mme Y... est dès lors fondée à réclamer des commissions quant aux congés payés depuis juin 2010 comme ayant saisi le conseil de prudhommes le 23 juin 2015 » ;

ALORS QUE toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'antérieurement à la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, cette action était soumise à un délai de prescription de cinq ans ; que porte sur l'exécution du contrat de travail, et non sur le paiement d'une créance salariale, et est soumise en conséquence aux délais de prescription précités à compter de la signature du contrat, l'action qui tend à contester la licéité d'une clause contractuelle en raison de son caractère inintelligible ; que pour rejeter en l'espèce la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la société Captain Tortue, la cour d'appel a jugé que le fait que la salariée remette en cause un avenant antérieur à juin 2010 ne la privait pas de la possibilité de réclamer des indemnités de congés payés pour la période non prescrite s'il était avéré que ces indemnités auraient dû lui être payées et que la salariée ne contestait pas l'avenant signé en 2005 mais les conséquences de cet avenant sur sa rémunération ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait expressément, pour condamner l'employeur au paiement d'un rappel de congés payés, que le nouveau système mis en place par l'employeur s'agissant de l'indemnité de congés payés manquait d'intelligibilité, ce dont il se déduisait bien que l'action de Mme Y... portait, non pas sur le paiement des congés payés, mais sur la rédaction et la validité de l'avenant signée le 25 juin 2005 qui manquait selon elle de clarté et était en conséquence prescrite au jour où Mme Y... a saisi la juridiction prud'homale le 23 juin 2015, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.1471-1 du code du travail et 2224 du code civil, par refus d'application, et l'article L.3245-1 du code du travail, par fausse application.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Captain Tortue à payer à Mme Y... un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés de 29.987,50 euros pour la période de juin 2010 à juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le droit à l'indemnité de congés payés ; Madame Y... explique que l'inclusion des congés payés dans la rémunération n'est licite que si elle est prévue par le contrat de travail et ne lèse pas le salarié, c'est-à-dire si le taux de commissionnement est augmenté d'au moins 10%, elle ajoute que l'inclusion des congés payés dans ses commissions a été introduite de manière insidieuse par l'avenant du 29 juin 2005, lequel a modifié la pratique antérieure, une telle inclusion supposant une augmentation corrélative au taux de commissions, ce qui n'a pas été le cas ; pour la SAS Captain Tortue France, en revanche, le tableau qu'elle a élaboré démontre que Madame Y... n'a subi aucune perte de salaire du fait du nouveau système intégrant les congés payés d'autant que de nouvelles formes de rémunération ont été ajoutées par l'avenant de 2005, augmentant, dans sa globalité, la rémunération de l'intéressé, critère qui seul doit être examiné, cette augmentation ayant atteint, certains semestres 40%, ce qui inclut très largement les congés payés, elle rappelle qu'a été modifiée la commission différenciée selon que l'équipe est directe ou indirecte et qu'ont été instaurées une nouvelle commission sur équipe détachée de 3%, un bonus saison et une nouvelle tranche de commission de 30% ; il est de droit que, s'il n'est pas interdit aux parties de convenir d'un salaire forfaitaire incluant l'indemnité de congés payés, cette convention doit être expresse et ses modalités ne peuvent avoir pour effet, pour le salarié, d'aboutir à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales ou conventionnelles ; ainsi, un avenant stipulant l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les taux de commissions doit s'accompagner d'une augmentation de ces derniers ; le salarié ne peut se voir opposer un contrat ou un avenant ne faisant mention d'aucune majoration distincte du taux des commissions lui permettant de vérifier qu'il a été rempli de ses droits au titre des congés payés ; autrement dit, la clause du contrat doit être transparente et compréhensible ; dans le cas présent, Madame Y... n'était pas en mesure de vérifier que la modification des taux de commissions incluait ou non les congés payés, vérification qui n'a été possible que par le recours à une procédure judiciaire et qui demeure litigieuse, les calculs des parties étant discordants ; en outre, et en tout état de cause, force est de constater, en comparant les taux de commissions antérieurs et postérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 que certains taux n'ont pas évolué de 10% ou plus et que certains ont même diminué ; ainsi : - sur les produits Captain Tortue, le taux de commissions sur ventes personnelles est passé de 27,5% à 30% en cas de chiffre d'affaires supérieur à 5.000 HT et a diminué de 20,5% à 20% sur la tranche comprise de 2.000 à 2.500 euros ; - sur la gamme Miss Captain : - le taux de commissions sur vente personnelles est passé, - pour le chiffre d'affaires compris entre 5.000 et 7.000 euros, de 23,5 à 25%, - pour le chiffre d'affaires compris entre 3.000 et 4.000 euros de 20,5 à 20%, - le taux des commissions sur le chiffre d'affaires démonstratrices directes est passé de 5 à 4,5% et est resté fixé à 3% sur les démonstratrices indirectes ; il est certes établi par les tableaux dressés par l'employeur à partir des bulletins de paie de l'intéressée, que son salaire a été globalement supérieur de plus de 10% à ce qu'il aurait été en application des avenants antérieurs au 29 juin 2015, mais Madame Y... est en droit, eu égard au manque d'intelligibilité du nouveau système s'agissant de l'indemnité de congés payés, en l'absence de toute précision sur le montant exact de l'indemnité de congés payés incluse dans les versements de l'employeur, d'en réclamer le paiement en sus des commissions perçues ; il convient dès lors d'infirmer le jugement et de condamner la SAS Captain Tortue France à payer à Madame Y... la somme qu'elle réclame, soit 29.987,50 euros brut » ;

1°) ALORS QUE les parties peuvent convenir d'une rémunération forfaitaire incluant les congés payés à la double condition que cette convention soit expresse et que ses modalités n'aboutissent pas, pour le salarié, à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales ou conventionnelles ; que pour condamner en l'espèce la société Captain Tortue à verser à Mme Y... la somme de 29.987,50 euros brut à titre de congés payés, la cour d'appel a jugé qu'un avenant stipulant l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les taux de commissions doit s'accompagner d'une augmentation de ces derniers, que le salarié ne peut se voir opposer un contrat ou un avenant ne faisant mention d'aucune majoration distincte du taux des commissions lui permettant de vérifier qu'il a été rempli de ses droits au titre des congés payés, que Mme Y... n'était pas en mesure de vérifier que la modification des taux de commissions incluait ou non les congés payés et que la comparaison des taux de commissions antérieurs et postérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 fait ressortir que certains taux n'ont pas évolué de 10% ou plus et que certains ont même diminué ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à justifier la condamnation de l'employeur, quand il était constant que l'intégration de l'indemnité de congés payés dans les commissions était prévue par l'avenant du 29 juin 2005 et qu'elle constatait expressément que les tableaux dressés par l'employeur à partir des bulletins de paie de la salariée établissaient que son salaire était globalement supérieur de plus de 10% à ce qu'il aurait été en application des dispositions contractuelles antérieures au 29 juin 2005, ce dont il se déduisait que les modalités d'intégration des congés payés aux commissions et bonus de la salariée n'avaient pas abouti à un résultat moins favorable que la stricte application des dispositions légales pour Mme Y..., la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige ;

2°) ALORS QUE lorsque l'inclusion des congés payés dans les commissions perçues par le salarié s'accompagne d'une modification de toute la structure de la rémunération par l'ajout de nouveaux modes de commissionnement, la fusion des anciens et la modification des tranches de chiffre d'affaires pris en compte, le juge ne peut apprécier la demande du salarié en vérifiant si chaque taux de commissions a augmenté ligne par ligne et doit rechercher au contraire si la rémunération d'ensemble du salarié a augmenté d'au moins 10% pour tenir compte de l'inclusion des congés payés litigieux ; que pour condamner en l'espèce la société Captain Tortue à verser à Mme Y... la somme de 29.987,50 euros brut à titre de congés payés, la cour d'appel s'est bornée à relever que certains taux de commission antérieurs à l'avenant du 29 juin 2005 n'avaient pas évolué de 10% ou plus et que certains avaient même diminué ; qu'en procédant ainsi à une analyse taux par taux, sans tenir compte de l'ensemble de la rémunération de Mme Y... et de tous les taux de commissionnement contractuels, notamment les nouvelles modalités mises en place par l'avenant du 25 juin 2015 qui modifiait structurellement l'ensemble de la rémunération et alors que la société Captain Tortue produisait, sur plusieurs années postérieures à l'avenant litigieux, des tableaux comparatifs entre l'ancien et le nouveau système de rémunération établissant que la rémunération de Mme Y... avait augmenté de largement plus de 10 % liés à l'inclusion des congés payés dans la rémunération, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et violé les articles L.3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige ;

3°) ALORS QUE la cour d'appel a également relevé, pour condamner la société Captain Tortue à verser à Mme Y... la somme de 29.987,50 euros brut à titre de congés payés, « l'absence de toute précision sur le montant exact de l'indemnité de congés payés incluse dans les versements de l'employeur » ; qu'en statuant ainsi, quand elle constatait pourtant expressément qu'il résultait des avenants au contrat de travail, des annexes financières et des bulletins de salaire de la salariée que l'inclusion de l'indemnité de congés payés dans les commissions de Mme Y... était expressément mentionnée comme s'effectuant à hauteur de 10%, la cour d'appel a violé les articles L.3141-22 du code du travail et 1134 du code civil dans leur rédaction applicable au litige.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-20072
Date de la décision : 20/01/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 28 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 jan. 2021, pourvoi n°19-20072


Composition du Tribunal
Président : M. Schamber (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.20072
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