LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 janvier 2021
Cassation partielle déchéance partielle et annulation
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 36 F-P
Pourvois n°
M 18-24.853
C 19-11.302 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 13 JANVIER 2021
I - La société Cofical - Compagnie financière calédonienne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° M 18-24.853 contre deux arrêts n° RG : 17/00134 rendus les 14 mai 2018 et 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de M. W... U..., en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal,
3°/ à l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal, dont le siège est [...] ,
4°/ à M. W... U..., domicilié [...] , pris tant en son nom personnel qu'en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal,
défendeurs à la cassation.
EN PRESENCE DE :
- Mme G... H..., domiciliée [...] , prise en qualité d'ancienne présidente du conseil d'administration de la société Figesbal,
- M. P... D..., domicilié [...] , pris en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal,
II - 1°/ M. P... D..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal,
2°/ la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] , en la personne de M. P... D..., agissant en qualité de directeur général,
ont formé le pourvoi n° C 19-11.302 contre l'arrêt n° RG : 18/00099 rendu le 29 novembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa (chambre commerciale), dans le litige les opposant :
1°/ à M. W... U..., domicilié [...] ,
2°/ à l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal,
3°/ à la société Figesbal, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse au pourvoi n° M 18-24.853 invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi n° C 19-11.302 invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Cofical - Compagnie financière calédonienne, de M. D..., agissant en son nom personnel et en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal, de la société Figesbal, prise en la personne de M. D..., en sa qualité de directeur général, de la SCP Richard, avocat de la société Figesbal et de M. U..., tant à titre personnel et en qualité de président du conseil d'administration de la société Figesbal, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présentes Mme Mouillard, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° M 18-24.853 et C 19-11.302 sont joints.
Déchéance partielle du pourvoi n° M 18-24.853
Vu l'article 978 du code de procédure civile :
2. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il serait fait application du texte susvisé.
3. En vertu de ce texte, à peine de déchéance, le demandeur doit, au plus tard dans le délai de quatre mois à compter du pourvoi, remettre au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée.
4. Aucun grief n'étant formulé contre l'arrêt du 14 mai 2018, il y a lieu de constater la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé contre cet arrêt.
Faits et procédure
5. Selon les arrêts attaqués(Nouméa, 14 mai 2018, 27 septembre 2018 et 29 novembre 2018), rendus en matière de référé, les sociétés Ficbal, FP Invest, [...] et Figespart sont associés et cogérants de la société Compagnie financière calédonienne (la société Cofical), qui détient 55 % du capital de la société anonyme Figesbal.
6. Le 29 juin 2017, l'assemblée générale mixte de la société Figesbal a adopté des résolutions par lesquelles quitus a été donné aux administrateurs de leur gestion pour l'exercice 2016, le résultat de l'exercice 2016 a été affecté et M. U... a été renouvelé dans ses fonctions d'administrateur pour une période de six exercices.
7. La société Cofical a assigné en référé la société Figesbal et M. U... afin d'obtenir, sur le fondement de l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce, la désignation d'un mandataire ad hoc de la société Figesbal, chargé de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. U... et E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société pour désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général.
8. Le mandataire ad hoc de la société Figesbal, désigné par une ordonnance du 4 décembre 2017, a convoqué l'assemblée générale de cette société, qui a révoqué M. U... de ses fonctions de directeur général et nommé M. D... pour le remplacer.
9. Par le premier arrêt attaqué, la cour d'appel a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 et rejeté les demandes de la société Cofical. Elle a également déclaré recevable l'intervention volontaire de l'association d'actionnaires minoritaires de la société Figesbal.
10. Par le second arrêt attaqué, elle a dit que, par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. U... était remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, et a ordonné en conséquence la suspension des effets des assemblées générales et conseils d'administration postérieurs à la nomination d'un administrateur en application de l'ordonnance du 4 octobre 2017.
Recevabilité du pourvoi n° C 19-11.302, en ce qu'il est formé par M. D... au nom de la société Figesbal, contestée par la défense
11. M. U... et la société Figesbal soutiennent que M. D... est sans qualité pour se pourvoir en cassation au nom de la société, dès lors que l'arrêt attaqué dit, dans son dispositif, que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Nouméa, M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal.
12. M. D... ayant eu, devant les juges du fond, la qualité dont il se prévaut pour se pourvoir en cassation, son pourvoi est recevable en tant qu'il agit au nom de la société Figesbal.
Recevabilité du même pourvoi n° C 19-11.302, en ce qu'il est formé par M. D... en son nom personnel, examinée d'office
Vu l'article 609 du code de procédure civile :
13. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il serait fait application du texte susvisé.
14. Selon ce texte, toute partie qui y a intérêt est recevable à se pourvoir en cassation même si la disposition qui lui est défavorable ne profite pas à son adversaire.
15. M. D... ayant agi, devant les juges du fond, uniquement au nom de la société Figesbal, son pourvoi n'est pas recevable en ce qu'il est formé en son nom personnel, faute d'avoir été partie en cette qualité à la décision attaquée.
Examen des moyens
Sur le moyen, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° M 18-24.853, en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 27 septembre 2018
Enoncé du moyen
16. La société Cofical fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à la désignation d'un mandataire ad hoc, alors « que la désignation d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II, 2°, du code de commerce, en vue de faire convoquer l'assemblée générale d'une société anonyme, suppose uniquement, lorsqu'elle est demandée par un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, qu'elle tende à des fins légitimes conformes à l'intérêt social, et non à la satisfaction de fins personnelles ; que les conditions propres à la désignation d'un administrateur provisoire, tenant à l'existence de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, n'ont en revanche pas à être remplies pour ce qui concerne la désignation d'un mandataire ad hoc ; que, pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc formée par la société Cofical aux fins de faire convoquer l'assemblée générale de la société Figesbal, la cour d'appel a jugé qu'une telle désignation ne serait "prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société" et serait "toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite" et non, comme l'avait retenu le premier juge, à la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce et par fausse application les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce :
17. Selon ce texte, à défaut de convocation par le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, l'assemblée générale d'une société anonyme peut être convoquée par un mandataire ad hoc, désigné en justice, à la demande, soit de tout intéressé en cas d'urgence, soit d'un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, soit d'une association d'actionnaires répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 du même code.
18. Pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc de la société Figesbal avec mission restreinte de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. U... et E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société à l'effet d'y voir désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général, l'arrêt retient que la désignation d'un mandataire par le juge des référés, qui est toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite, n'est prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société.
19. En statuant ainsi, alors que la désignation d'un mandataire ad hoc en application sur l'article L. 225-103, II, 2° du code de commerce n'est subordonnée ni au fonctionnement anormal de la société, ni à la menace d'un péril imminent ou d'un trouble manifestement illicite, mais seulement à la démonstration de sa conformité à l'intérêt social, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° C 19-11.302
Enoncé du moyen
20. M. D..., en tant qu'il agit au nom de la société Figesbal, fait grief à l'arrêt de dire que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, d'ordonner en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et de dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de deux mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés, alors « que pour ordonner la suspension des effets de l'assemblée générale et du conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018, convoqués par le mandataire ad hoc désigné par l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, et des effets des conseils d'administration et assemblée générale qui s'en sont suivis, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 qui a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 ; que la cour d'appel a en effet considéré que cet arrêt infirmatif aurait eu pour effet de "remettre" M. W... U... en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal et que la "dyarchie" qui en résulterait au sein de la société Figesbal serait génératrice d'un trouble manifestement illicite justifiant les mesures de suspension ordonnées ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi dans la dépendance directe de celui rendu le 27 septembre 2018 ; que dès lors, par application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi n° M 18-24.853 formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt attaqué. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 625 du code de procédure civile :
21. Selon ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
22. Pour dire que M. U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal, ordonner en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de deux mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés, l'arrêt se fonde sur le seul effet du dispositif de l'arrêt infirmatif rendu le 27 septembre 2018.
23. La cassation de ce dernier arrêt sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, du pourvoi n° M 18-24.853 entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt du 29 novembre 2018, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
Sur le pourvoi n° M 18-24.853
CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 14 mai 2018 ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par la société Compagnie financière calédonienne et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 27 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;
Sur le pourvoi n° C 19-11.302
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est formé par M. D... en son nom personnel ;
CONSTATE l'annulation de l'arrêt rendu le 29 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ;
Remet, sur les points cassés et annulés, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa autrement composée ;
Condamne M. U... et la société Figesbal aux dépens des pourvois ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. U... et la société Figesbal à payer à la société Compagnie financière calédonienne la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés et annulés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi n° M 18-24.853 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Cofical - Compagnie financière calédonienne.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait désigné un mandataire ad hoc de la société Figesbal avec mission restreinte de convoquer l'assemblée générale des actionnaires de la société ayant pour ordre du jour la révocation de MM. W... U... et O... E... de leurs mandats d'administrateurs et leur remplacement par les sociétés Figespart et Cofical et de convoquer le conseil d'administration de cette société à l'effet d'y voir désigner son nouveau président et, le cas échéant, un directeur général, et d'avoir rejeté la demande de la société Cofical tendant à la désignation d'un tel mandataire ad hoc ;
Aux motifs que les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile applicables en Nouvelle-Calédonie disposent que "le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite" ; que par ailleurs les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie prévoient que "I.- L'assemblée générale est convoquée par le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas. II.- A défaut, l'assemblée générale peut être également convoquée : 1° Par les commissaires aux comptes ; 2° Par un mandataire, désigné en justice, à la demande, soit de tout intéressé en cas d'urgence, soit d'un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5 % du capital social, soit d'une association d'actionnaires répondant aux conditions fixées à l'article L. 225-120 (
)" ; que ces dispositions, interprétées ensemble par la jurisprudence, limitent la désignation d'un administrateur provisoire aux cas d'absence ou de vacance des organes sociaux (Com., 22 juillet 1986, Bull. 1986 n°289), à raison d'un péril menaçant une société dont le gérant se voit imputer de graves détournements (Com., 17 octobre 1989 Bull civ. IV n°250) ou en cas de mésentente rendant anormal le fonctionnement de la société (Com., 17 janvier 1989, JCP E 1989 II 15517) ; qu'il s'en déduit que la désignation d'un mandataire par le juge des référés, qui est toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite, n'est prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société ; que la cour constate qu'en l'espèce l'assemblée générale des actionnaires de la société Figesbal a été régulièrement convoquée, s'est tenue le 29 juin 2017 à 10 heures en son siège social à Nouméa et que le différend qui a opposé M. W... U... aux associés de la société Cofical relativement à la représentation de cette société, qui a été consigné au procès-verbal de séance, n'a pas empêché l'assemblée générale de se poursuivre en présence des associés de Cofical, de procéder à la composition de son bureau et de délibérer sur les résolutions ; que l'assemblée générale a donné quitus aux administrateurs de leur gestion pour l'exercice 2016 à l'unanimité des voix, a approuvé l'affectation du résultat de l'exercice 2016 et approuvé, à la majorité des voix des actionnaires présents, le renouvellement de M. W... U... dans ses fonctions d'administrateur pour une période de 6 exercices jusqu'en 2022 ; que le juge des référés, en fondant sa décision sur la jurisprudence au visa "des conditions purement prétoriennes non prévues par le texte, celles de la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social et non point à la satisfaction de fins propres de ce demandeur", en ajoutant à ce texte des conditions supplémentaires, en a dénaturé le sens et la portée ; qu'en effet, ce texte n'impose nullement au juge saisi de s'interroger sur la légitimité de la fin poursuivie par l'actionnaire demandeur et sur sa conformité à l'intérêt social mais lui impose seulement de vérifier la réalité d'un dysfonctionnement né d'une carence ou d'un fonctionnement anormal des organes de la société, caractérisant l'imminence d'un dommage ou établissant un trouble manifestement illicite ; qu'en l'espèce l'existence d'une carence ou d'un fonctionnement anormal de la société est à l'évidence contredite par la tenue de l'assemblée générale et son exécution, constatations qui font échec à l'application des dispositions de l'article L. 225-103 II 2° du code de commerce ; qu'il s'ensuit que l'ordonnance doit être infirmée en toutes ses dispositions et la SARL Cofical déboutée de l'intégralité de ses demandes ;
Alors 1°) que les juges ne peuvent relever d'office un moyen de droit sans avoir préalablement invité les parties à conclure sur ce point ; qu'en relevant que les conditions prévues par l'article 809 du code de procédure civile n'étaient pas réunies pour refuser de désigner un mandataire ad hoc, quand cette disposition n'était dans le débat, la cour d'appel, qui a relevé d'office ce moyen sans inviter les parties à conclure, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que les termes du litige sont déterminés par les écritures respectives des parties ; qu'en relevant, pour refuser de désigner un mandataire ad hoc, que les conditions de l'article 809 du code de procédure pénale n'étaient pas réunies, quand la demande ne portait pas sur la désignation d'un administrateur provisoire sur le fondement de l'article 809 du code de procédure civile mais d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II 2° du code de commerce, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Alors 3°) et en tout état de cause que la désignation d'un mandataire ad hoc sur le fondement de l'article L. 225-103 II, 2°, du code de commerce, en vue de faire convoquer l'assemblée générale d'une société anonyme, suppose uniquement, lorsqu'elle est demandée par un ou plusieurs actionnaires réunissant au moins 5% du capital social, qu'elle tende à des fins légitimes conformes à l'intérêt social, et non à la satisfaction de fins personnelles ; que les conditions propres à la désignation d'un administrateur provisoire, tenant à l'existence de circonstances rendant impossible le fonctionnement normal de la société et la menaçant d'un péril imminent, n'ont en revanche pas à être remplies pour ce qui concerne la désignation d'un mandataire ad hoc ; que, pour rejeter la demande de désignation d'un mandataire ad hoc formée par la société Cofical aux fins de faire convoquer l'assemblée générale de la société Figesbal, la cour d'appel a jugé qu'une telle désignation ne serait « prévue de manière supplétive que dans l'hypothèse d'un dysfonctionnement avéré au sein de la société » et serait « toujours subordonnée soit à l'imminence d'un dommage soit à la démonstration d'un trouble manifestement illicite » et non, comme l'avait retenu le premier juge, à la démonstration par l'actionnaire demandeur de la poursuite de fins légitimes qui soient conformes à l'intérêt social ; que ce faisant, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 225-103 du code de commerce et par fausse application les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° C 19-11.302 par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. D..., agissant en son nom personnel et en qualité d'ancien directeur général de la société Figesbal, de la société Figesbal, prise en la personne de M. D..., en sa qualité de directeur général.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que par l'effet du dispositif de l'arrêt infirmatif prononcé le 27 septembre 2018, M. W... U... était remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal, d'avoir ordonné en conséquence la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018, des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018 et de l'assemblée générale du 26 juin 2018, et de ces conseils d'administration et assemblées générales des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, et d'avoir dit que ces suspensions prendraient effet au jour de la signification de l'arrêt à la société Figesbal, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de 2 mois à compter de ladite signification aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés ;
Aux motifs qu' « il convient de constater à titre préliminaire que par l'effet du dispositif de l'arrêt prononcé le 27 septembre 2018 par cette cour, l'ordonnance du juge des référés en date du 4 décembre 2017 a été mise à néant et que par voie de conséquence les parties se retrouvent dans la situation où elles se trouvaient antérieurement à la saisine du juge des référés diligentée le 12 septembre 2017 de sorte que W... U... est remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal ; (
) que selon les dispositions de l'article 809 du code de procédure civile applicables en Nouvelle-Calédonie : "Le président peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite" ; qu'il apparait en l'espèce :
- que l'assemblée générale du 16 mars 2018 a révoqué W... U... de son mandant d'administrateur et nommé à cette fonction la SC Figespart représentée par L... U... ;
- que le conseil d'administration du 16 mars 2018 a élu G... H... en qualité de présidente du conseil d'administration de la SA Figesbal et P... D... en qualité de directeur général de cette société ;
- que l'assemblée générale du 26 juin 2018 a conduit au vote, sur proposition de la présidente du conseil d'administration, d'une première résolution destinée, ainsi qu'en fait foi le procès-verbal de cette assemblée générale versé aux débats "à ratifier la composition actuelle du conseil d'administration de la société, de la nomination de sa nouvelle présidente et de son nouveau directeur général, dans l'hypothèse où l'action engagée devant la cour d'appel conduirait à une remise en cause des décisions prises par l'assemblée du 16 mars" ;
qu'il est évident que le maintien en place de la gouvernance désignée en conséquence de l'ordonnance de référé anéantie est objectivement génératrice d'un trouble illicite dont pâtit l'intérêt social par le fait de la dyarchie qu'elle entraîne au sein de la société Figesbal qui ne peut être valablement représentée par deux présidents différents ; que le défaut de justification du "fonctionnement nocif" de la société retenu par le juge des référés pour écarter le trouble manifestement illicite est étranger aux débats dès lors que les critères d'application des dispositions de l'article 809 du code de procédure civile sont caractérisés par le constat du trouble illicite manifeste né de la représentation antinomique de la société ; que la volonté réaffirmée de l'associée majoritaire Cofical de bouleverser les modalités de gouvernance de Figesbal, également retenue par le juge des référés et rappelée par la société intimée, au soutien de sa demande tendant à la confirmation de l'ordonnance, est également inopérante dès lors que cette volonté, manifestée par les actes des conseils d'administration et des assemblées générales de la société Figesbal est la conséquence directe de la convocation d'une assemblée générale ordonnée par le dispositif de l'ordonnance de référé dont tous les effets sont anéantis ; qu'en qualifiant de "précaution" ce qui n'est qu'une stratégie ouvertement assumée par la nouvelle gouvernance de la société pour tenter de contourner les conséquences de l'arrêt du 27 septembre 2018, par une ratification a posteriori des décisions prises en conséquence de l'ordonnance infirmée, le juge des référés ne tire pas les conséquences de l'infirmation prononcée par cet arrêt ; que dès lors qu'aucune action au fond tendant à la constatation de la fraude aux droits de vote des associés lors de l'assemblée générale du 29 juin 2017 et à l'annulation de cette même assemblée générale, n'a été diligentée par les dits associés, il ne saurait être préjugé d'une situation illicite résultant d'une fraude dont à l'évidence ceux-là même qui l'invoquent se sont parfaitement accommodés, comme le démontre l'exécution à leur profit de l'ensemble des résolutions votées ; qu'il importe peu enfin que l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance du 7 [lire 4] décembre 2017 ait fondé en son temps la régularité de la tenue des actes et des assemblées dont la suspension des effets est demandée, dès lors que par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 qui a remis W... U... dans l'exercice de ses mandats antérieurs, ces actes et assemblées sont devenus irréguliers ; que la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait du dirigeant irrégulièrement désigné est reconnue par la jurisprudence (Cass. Com. 24/04/1990 et Cass. Com. 27/01/2009, n°07-20402) ; que les nullités qui sont encourues en chaîne par les actes et délibérations des organes sociaux, dont la nomination ou la composition est devenue irrégulière par le fait de l'arrêt précité, doivent être appréciées au fond au regard de chacun de ces actes ; que c'est donc avec raison que les appelants ont saisi le juge des référés aux fins que soit ordonné :
- la suspension des effets de l'assemblée générale du 16 mars 2018 et du conseil d'administration du 16 mars 2018 ;
- la suspension des effets des convocations du conseil d'administration des 27 avril, 21 mai et 26 juin 2018, de l'assemblée générale du 26 juin 2018 et des effets de ces conseils d'administration et assemblées générales ;
qu'il convient de dire que ces suspensions prendront effet au jour de la signification à l'intimée du présent arrêt, à charge pour l'une ou l'autre des parties de saisir le juge du fond au maximum dans un délai de 2 mois à compter de la dite signification, aux fins qu'il soit statué, le cas échéant, sur la nullité encourue par chacun des actes accomplis sous l'influence ou par le fait des administrateurs et dirigeants désignés en conséquence des assemblées générales et conseils d'administration susvisés ; qu'il ne peut en revanche être fait droit à une demande de suspension des effets autres que celle résultant de convocations ou d'actes précisément définis et datés de manière certaines ; que les appelants seront donc déboutés du surplus de leurs demandes de suspension » ;
Alors 1°) que pour ordonner la suspension des effets de l'assemblée générale et du conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018, convoqués par le mandataire ad hoc désigné par l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, et des effets des conseils d'administration et assemblée générale qui s'en sont suivis, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 qui a infirmé l'ordonnance du 4 décembre 2017 ; que la cour d'appel a en effet considéré que cet arrêt infirmatif aurait eu pour effet de « remettre » M. W... U... en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal et que la « dyarchie » qui en résulterait au sein de la société Figesbal serait génératrice d'un trouble manifestement illicite justifiant les mesures de suspension ordonnées ; que l'arrêt attaqué se trouve ainsi dans la dépendance directe de celui rendu le 27 septembre 2018 ; que dès lors, par application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation à intervenir sur le pourvoi n° M 18-24.853 formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa du 27 septembre 2018 entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt attaqué ;
Alors 2°) que le juge ne peut modifier l'objet du litige, tel que déterminé par les conclusions des parties ; que le trouble manifestement illicite invoqué par M. W... U... et l'Association d'actionnaires minoritaires de Figesbal à l'appui de leurs demandes de suspension résidait dans la nullité qui entacherait l'assemblée générale et le conseil d'administration de la société Figesbal du 16 mars 2018 et les conseils d'administration et l'assemblée générale qui s'en sont suivis, par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 ; qu'ils ne soutenaient en revanche nullement que ce trouble résiderait dans une représentation de la société Figesbal par deux présidents différents, en raison d'une supposée reprise par M. W... U... de ses qualités d'administrateur et de président du conseil d'administration à la suite de l'arrêt du 27 septembre 2018 ; qu'en se fondant pourtant sur un trouble manifestement illicite né d'une prétendue dyarchie au sein de la société Figesbal, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 3°), en outre, que le juge ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur celui-ci ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de l'existence d'une prétendue représentation antinomique de la société Figesbal par deux présidents différents, sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction, en violation de l'article 16 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 4°), en tout état de cause, que les actes ou délibérations pris par les organes d'une société s'imposent tant que leur nullité n'a pas été judiciairement prononcée ; que la cour d'appel a constaté que l'assemblée générale de la société Figesbal du 16 mars 2018 avait révoqué le mandat d'administrateur de M. W... U..., que le conseil d'administration du même jour avait élu Mme G... H... en qualité de présidente en remplacement de M. W... U..., et que l'assemblée générale du 26 juin 2018 avait ensuite ratifié la nouvelle composition du conseil d'administration et la nomination de la nouvelle présidente (arrêt attaqué, p. 9 § 8 à 10) ; qu'il résultait nécessairement de ces constatations que M. W... U... ne pouvait « récupérer » ses mandats d'administrateur et de président du conseil d'administration tant que les décisions prises par les assemblées générales et le conseil d'administration des 16 mars et 26 juin 2018 n'étaient pas judiciairement annulées ; qu'en jugeant néanmoins que, par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 ayant mis à néant l'ordonnance de référé du 4 décembre 2017, M. W... U... serait « remis en sa qualité d'administrateur et de président du conseil d'administration de la SA Figesbal », et en en déduisant l'existence d'un trouble manifestement illicite né d'une représentation de la société par deux présidents différents, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article L. 235-1 du code de commerce, ensemble l'article 809 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie ;
Alors 5°), au surplus, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en jugeant, d'un côté, que par l'effet de l'arrêt du 27 septembre 2018 les parties étaient replacées dans la situation où elle se trouvaient avant la saisine du juge des référés du 12 septembre 2017, et donc que M. W... U... serait « remis » en ses qualités d'administrateur et de président du conseil d'administration de la société Figesbal (p. 9 § 2 de l'arrêt attaqué), et, de l'autre, qu'était maintenue la nouvelle gouvernance désignée le 16 mars 2018, de sorte que la société Figesbal serait également présidée par Mme G... H... (p. 9 dernier §), la cour d'appel s'est contredite, et n'a donc pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie.