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06/01/2021 | FRANCE | N°19-10753

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 06 janvier 2021, 19-10753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 7 F-D

Pourvoi n° F 19-10.753

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 6 JANVIER 2021

La société Banque populaire Auvergne Rhône Alp

es, société coopérative de banque à forme anonyme et capital variable, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 19-10.753 contre le juge...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 janvier 2021

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 7 F-D

Pourvoi n° F 19-10.753

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 6 JANVIER 2021

La société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, société coopérative de banque à forme anonyme et capital variable, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° F 19-10.753 contre le jugement rendu le 7 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Lyon, dans le litige l'opposant à la société Thelem, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Fèvre, conseiller, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 10 novembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fèvre, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal de commerce de Lyon, 7 novembre 2018), rendu en dernier ressort, et les productions, la société Thelem a émis, le 16 mars 2017, un chèque à l'ordre de la société Quartese, d'un montant de 2 400 euros, lequel a été débité de son compte ouvert dans les livres de la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes (la banque) au profit de « M. N... T... » à la suite d'une falsification du nom du bénéficiaire.

2. Se prévalant d'un manquement de la banque tirée à ses obligations, la société Thelem l'a assignée en réparation de son préjudice.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La banque fait grief au jugement de dire qu'elle a manqué à son obligation de vigilance, que sa responsabilité est engagée, de la condamner à payer à la société Thelem la somme de 2 400 euros en réparation de son préjudice, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2017 et celle de 500 euros pour résistance abusive, alors « que constitue un paiement libératoire le paiement effectué par le banquier tiré sur présentation d'un chèque émis par son client, ne présentant aucune anomalie apparente ; que la banque tirée est seulement tenue de détecter la régularité formelle d'un chèque et ne peut voir sa responsabilité retenue en l'absence d'anomalie grossière décelable par un employé normalement diligent ; qu'en se bornant, pour dire que la banque tirée avait manqué à son obligation de vigilance et engagé de ce fait sa responsabilité, que le chèque litigieux avait été falsifié au profit de M. U... T..., que la banque ne produisait pas l'original ou la copie du chèque, qu'elle ne rapportait pas la preuve d'une quelconque diligence en régularisation auprès de la banque présentatrice ni auprès de la société Thelem, sans faire apparaître en quoi la mention du bénéficiaire apposée sur le chèque présentait, en l'espèce, des anomalies apparentes et en quoi elles auraient dû alerter la banque tirée, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 et 1937 du même code :

4. Tenue de vérifier la régularité formelle du titre qui lui est présentée, engage sa responsabilité la banque tirée qui paye un chèque affecté d'une anomalie apparente.

5. Pour retenir un manquement de la banque à son obligation de vigilance et la condamner à payer le chèque litigieux, le jugement, après avoir constaté qu'il n'était pas contesté que le nom du bénéficiaire du chèque litigieux avait été falsifié, relève que la banque refuse d'en produire l'original ou une copie en couleur, empêchant les juges de vérifier s'il est affecté d'anomalies apparentes, et qu'elle doit en assumer les conséquences.

6. En se déterminant ainsi, sans avoir constaté l'existence d'une anomalie apparente et alors que le défaut de production spontanée par la banque tirée du chèque litigieux ne pouvait y suppléer, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 novembre 2018, entre les parties, par le tribunal de commerce de Lyon ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état dans où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de commerce de Lyon autrement composé ;

Condamne la société Thelem aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Thelem à payer à la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six janvier deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes.

Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a manqué à son obligation de vigilance, d'AVOIR dit qu'elle engage de ce fait sa responsabilité, d'AVOIR condamné la banque à payer à la société Thelem la somme de 2.400 € en réparation de son préjudice, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2017 et celle de 500 € pour résistance abusive ;

AUX MOTIFS QUE l'analyse approfondie des pièces et écritures des parties permettent au tribunal de relever que le chèque de 2 400 € a bien été tiré sur le compte de la société Thelem auprès de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes ; que la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes ne conteste pas le fait que le chèque ait été falsifié au profit de M. U... T... ; que la banque refuse de transmettre l'original du chèque pouvant permettre au tribunal de relever les anomalies apparentes du chèque présenté ; que la banque ne rapporte pas la preuve d'une quelconque diligence en régularisation auprès de l'établissement bancaire ayant encaissé ce chèque ; qu'elle ne rapporte pas la preuve de vigilance ou d'alerte faite auprès du tiré au moment de la présentation du chèque falsifié ; que le tribunal considère que la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a manqué à son obligation de vigilance lors de la présentation du chèque falsifié en paiement ; qu'elle doit assumer l'entière responsabilité de la non-présentation du chèque original ou une copie couleur à la présente audience, ce qui aurait permis au tribunal de s'assurer de la réalité des dires de la société Thelem ; qu'en conséquence le tribunal dira que la banque a manqué à son obligation de vigilance, qu'elle engage de ce fait sa responsabilité et le tribunal la condamnera à payer à la société Thelem la somme de 2 400 € en réparation de son préjudice, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 8 novembre 2017 ;

1/ ALORS QUE constitue un paiement libératoire le paiement effectué par le banquier tiré sur présentation d'un chèque émis par son client, ne présentant aucune anomalie apparente ; que la banque tirée est seulement tenue de détecter la régularité formelle d'un chèque et ne peut voir sa responsabilité retenue en l'absence d'anomalie grossière décelable par un employé normalement diligent ; qu'en se bornant, pour dire que la banque tirée avait manqué à son obligation de vigilance et engagé de ce fait sa responsabilité, que le chèque litigieux avait été falsifié au profit de M. U... T..., que la banque ne produisait pas l'original ou la copie du chèque, qu'elle ne rapportait pas la preuve d'une quelconque diligence en régularisation auprès de la banque présentatrice ni auprès de la société Thelem, sans faire apparaître en quoi la mention du bénéficiaire apposée sur le chèque présentait, en l'espèce, des anomalies apparentes et en quoi elles auraient dû alerter la banque tirée, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article de 1147 du code civil, devenu 1231-1 du même code ;

2/ ALORS QUE le juge ne peut dénaturer par omission les documents de la cause ; qu'en l'espèce, il ressortait clairement et précisément de la copie du recto du chèque versée aux débats que le chèque ne comportait aucune anomalie apparente décelable par un employé normalement diligent ; qu'en jugeant qu'il n'était pas en mesure de relever les anomalies apparentes du chèque invoquées par la société Thelem, le tribunal a dénaturé la copie recto du chèque litigieux, en violation de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;

3/ ALORS QU'en retenant, pour dire que la banque a manqué à son obligation de vigilance et engagé de ce fait sa responsabilité, qu'elle refuse de produire l'original du chèque ou une copie couleur, quand la banque, tenue au secret professionnel, ne pouvait produire le chèque sous peine de divulguer des informations relatives à un tiers, figurant au verso dudit chèque, le tribunal a violé l'article L. 511-13 du code monétaire et financier, ensemble l'article 10 et 1147 (devenue 1231-1) du code civil, et 11 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-10753
Date de la décision : 06/01/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Lyon, 07 novembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 06 jan. 2021, pourvoi n°19-10753


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Marc Lévis

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.10753
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