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16/12/2020 | FRANCE | N°18-25384

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 décembre 2020, 18-25384


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 791 F-D

Pourvoi n° P 18-25.384

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEM

BRE 2020

La société d'Arsine, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° P 18-25.384 contre l'arrêt r...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation partielle

Mme DARBOIS, conseiller le plus
ancien faisant fonction de président

Arrêt n° 791 F-D

Pourvoi n° P 18-25.384

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

La société d'Arsine, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° P 18-25.384 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société L'YD gourmande, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de la société d'Arsine, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2020 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué, (Grenoble, 6 septembre 2018), la société d'Arsine a donné en location-gérance son fonds de commerce de pizzeria-bar à la société L'YD gourmande à compter du 1er novembre 2008. Un dépôt de garantie de 30 000 euros a été versé. Le locataire-gérant, après avoir notifié son intention de ne pas reconduire le contrat, a rendu les clés le 5 novembre 2010.

2. N'obtenant pas restitution du dépôt de garantie, la société L'YD gourmande a assigné la société d'Arsine, qui lui a réclamé des indemnités en invoquant des dégradations portées aux locaux et au matériel le garnissant.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société d'Arsine fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer à la société L'YD gourmande la somme de 30 000 euros versée à titre de dépôt de garantie et de rejeter ses demandes en paiement, alors « que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant qu'il n'était pas établi que le mauvais état des lieux lors de leur restitution était imputable à la société L'YD gourmande sans procéder à l'examen de l'état des lieux d'entrée établi le 30 octobre 2008, qui faisait état d'un bon état général, et le comparer aux deux constats d'huissier établis lors de la restitution des lieux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. L'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'un inventaire et état des lieux réalisé en 2003 décrit des crépis vieux et des traces d'humidité, des murs craquelés, des trous et un sol fendu, que la visite des services vétérinaires en 2006 fait déjà apparaître de nombreuses irrégularités et notamment une peinture du plafond détériorée et une plaque se décollant au-dessus du plan de travail, que l'attestation du précédent locataire-gérant mentionne que les locaux et le matériel garnissant le fonds n'ont pas changé entre 2006 et 2008, et que, si l'état des lieux signé entre les parties le 27 novembre 2008 ne fait pas état de la vétusté des lieux, celui qui a été réalisé le 28 octobre 2010 et les photos produites montrent un établissement dont la rénovation est manifestement ancienne. Ayant ainsi examiné l'ensemble des pièces qui avaient été soumises aux juges du fond, c'est par une appréciation souveraine des faits de la cause que la cour d'appel a retenu que les dégradations affectant les locaux loués n'étaient pas imputables au locataire-gérant.

5. Le moyen, qui manque ainsi en fait, n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. La société d'Arsine fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer à la société L'YD gourmande la somme de 30 000 euros versée à titre de dépôt de garantie et de rejeter ses demandes en paiement, alors « que, dans ses conclusions d'appel, la société d'Arsine faisait valoir, non seulement que les lieux loués avaient été dégradés pendant la période d'occupation, mais également que du matériel avait été détourné et que certains appareils, en bon état de fonctionnement lors de l'entrée dans les lieux, avaient été dégradés ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 455 du code de procédure civile :

7. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé à peine de nullité et le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

8. En laissant sans réponse les conclusions de la société d'Arsine qui soutenait que du matériel avait été détourné, et que certains appareils, qui fonctionnaient lors de l'entrée dans les lieux de la société L'YD gourmande ne fonctionnaient plus lors de son départ, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé.

Et sur le second moyen

Enoncé du moyen

9. La société d'Arsine fait encore grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en paiement, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, dans la mesure où les attestations en cause présentaient expressément B... et H... comme les gérants de la pizzeria La Brasera exploitée par la société L'YD Gourmande, la cour d'appel les a dénaturées, en violation du principe susvisé. »

Réponse de la Cour

10. Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :

11. Pour débouter la société d'Arsine de sa demande au titre de l'atteinte à son image et à sa notoriété, l'arrêt retient que les attestations produites faisant état de propos désagréables de B... et H... ne peuvent être imputables à la société L'YD gourmande.

12. En statuant ainsi, alors que ces attestations mentionnaient que B... et H... se présentaient comme les gérants de la société L'YD gourmande, la cour d'appel a dénaturé ces documents, clairs et précis sur ce point.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes indemnitaires de la société d'Arsine au titre du détournement et de la dégradation de matériels, et au titre de l'atteinte à son image et à sa notoriété, l'arrêt rendu le 6 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;

Condamne la société L'YD gourmande aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société L'YD gourmande à payer à la société d'Arsine la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société d'Arsine.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société D'Arsine à restituer à la société L'YD Gourmande la somme de 30 000 euros versée à titre de dépôt de garantie et D'AVOIR rejeté l'ensemble des demandes en paiement de la société D'Arsine ;

AUX MOTIFS QUE la nullité du contrat de location-gérance oblige à la remise des parties en l'état précédant sa conclusion, soit la restitution de la somme de 30 000 euros par la société D'Arsine puisque versée par la société L'YD Gourmande lors de son entrée dans les lieux et la restitution des lieux ; qu'il est constant que les lieux loués ont été restitués mais pas le dépôt de garantie de 30 000 euros ; que la société D'Arsine ne peut valablement prétendre au non-respect d'obligations contractuelles par la société L'YD Gourmande compte tenu de la nullité du contrat de location-gérance ; que, par ailleurs, l'inventaire et l'état des lieux du 20 juin 2003 relatifs aux lieux en cause décrivent des crépis vieux et des traces d'humidité (des murs craquelés et des trous, sol fendu
) ; que, dans ces circonstances, les nombreuses pièces versées aux débats par la société D'Arsine (attestations, procès-verbaux de constat d'huissier, factures, courriers
) de nature à justifier du mauvais état des lieux ne sont pas de nature à démontrer l'imputabilité de cet état à la société L'YD Gourmande, suite à son occupation des lieux du 1er novembre 2008 au 5 novembre 2010 ;

ALORS, 1°), QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant qu'il n'était pas établi que le mauvais état des lieux lors de leur restitution était imputable à la société L'YD Gourmande sans procéder à l'examen de l'état des lieux d'entrée établi le 30 octobre 2008 (pièce d'appel n° 2 de la société D'Arsine), qui faisait état d'un bon état général, et le comparer aux deux constats d'huissier établis lors de la restitution des lieux, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, 2°), QUE, dans ses conclusions d'appel (pp. 18 et 19), la société D'Arsine faisait valoir, non seulement que les lieux loués avaient été dégradés pendant la période d'occupation, mais également que du matériel avait été détourné et que certains appareils, en bon état de fonctionnement lors de l'entrée dans les lieux, avaient été dégradés ; qu'en laissant sans réponse ces conclusions, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté l'ensemble des demandes en paiement de la société D'Arsine ;

AUX MOTIFS QUE les attestations produites faisant état de propos désagréables de B... et H... ne peuvent dès lors être imputables à la société L'YD Gourmande et justifier une demande d'indemnisation de la société D'Arsine à son encontre ;

ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que, dans la mesure où les attestations en cause (pièces d'appel de la société D'Arsine n° 85, 86 et 92) présentaient expressément B... et H... comme les gérants de la pizzeria la Brasera exploitée par la société L'YD Gourmande, la cour d'appel les a dénaturées, en violation du principe susvisé.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 18-25384
Date de la décision : 16/12/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 06 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 déc. 2020, pourvoi n°18-25384


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.25384
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