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10/12/2020 | FRANCE | N°19-14596

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 décembre 2020, 19-14596


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 décembre 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1390 F-P+B+I

Pourvoi n° G 19-14.596

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 DÉCEMBRE 2020

M. Y... H... B... P... , domicilié [...] , Tahi

ti (Polynésie française), a formé le pourvoi n° G 19-14.596 contre le jugement rendu le 16 janvier 2019 par le tribunal civil de première instanc...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 décembre 2020

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1390 F-P+B+I

Pourvoi n° G 19-14.596

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 DÉCEMBRE 2020

M. Y... H... B... P... , domicilié [...] , Tahiti (Polynésie française), a formé le pourvoi n° G 19-14.596 contre le jugement rendu le 16 janvier 2019 par le tribunal civil de première instance de Papeete - Ile de Papeete (2e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme K... R...,

2°/ à M. L... R...,

domiciliés [...] , Tahiti (Polynésie française)

3°/ à M. Y... P..., domicilié [...] )

4°/ à Mme W... A..., épouse P..., domiciliée [...] a (98703), Tahiti (Polynésie française)

5°/ à M. C... S..., domicilié [...] (Polynésie française)

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de M. Y... H... B... P..., de Me Balat, avocat de M. et Mme R..., et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 novembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal de première instance de Papeete, 16 janvier 2019), rendu en dernier ressort, et les productions, sur des poursuites de saisie immobilière engagées par M. et Mme R... à l'encontre de M. Y... H... B... P..., né le [...] , et de Mme A..., le bien saisi a été adjugé le 29 août 2018 à M. S....

2. Par requête enregistrée le 7 septembre 2018, M. Y... H... B... P..., né le [...] , a formé une surenchère, du dixième au moins du prix principal, dont la validité a été contestée par l'adjudicataire.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. M. P... fait grief au jugement de juger irrecevable sa requête en surenchère, alors « qu'aux termes de l'article 884 du code de procédure civile de Polynésie française toute personne peut, dans les dix jours qui suivent l'adjudication, faire une surenchère, pourvu qu'elle soit du dixième au moins du prix principal de la vente ; qu'il en résulte que le surenchérisseur, dès lors qu'il porte l'enchère à un dixième en sus du prix principal, n'est pas obligé d'indiquer en chiffres ou en lettres la somme qu'il offre et qui forme le montant de la surenchère ; qu'en retenant, pour juger irrecevable la déclaration de surenchère de M. P... pour le dixième au moins du prix, que « la surenchère qui est faite dans les dix jours qui suivent l'adjudication doit être précisément fixée en son montant », le tribunal, qui a ajouté une condition à la loi, a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 884 du code de procédure civile de la Polynésie française :

4. Il résulte de ce texte, que toute personne peut, dans les dix jours qui suivent l'adjudication, faire une surenchère, pourvu qu'elle soit du dixième au moins du prix principal de la vente, cette surenchère ne pouvant être rétractée. La déclaration, qui doit être formée par un avocat inscrit au barreau de Papeete, n'est pas reçue après l'heure fixée pour la fermeture du greffe.

5. Pour déclarer irrecevable la requête en surenchère, le jugement retient qu'il est constant que la surenchère qui est faite dans les dix jours qui suivent l'adjudication doit être précisément fixée en son montant, qu'il s'agit en effet, non pas de trancher un litige entre parties, mais d'organiser la vente publique sous l'autorité de l'institution judiciaire d'un bien immobilier et d'en retirer, grâce à la publicité qui lui en est donnée, le meilleur prix dans l'intérêt des créanciers et éventuellement du débiteur. Le tribunal ajoute qu'il ne peut être satisfait à cette obligation de publicité si l'offre n'est pas précise et qu'à cet égard, le texte ouvre un large choix au surenchérisseur qui n'est pas tenu de se contenter de faire une offre minimum mais peut dépasser le seuil plancher du dixième. Il en conclut qu'en ne précisant pas le montant de sa surenchère, et en se contentant de paraphraser l'article 884 du code de procédure civile de la Polynésie française, l'offre de M. P... n'est pas régulière.

6. En statuant ainsi, alors, d'une part, que l'article 884 du code de procédure civile de la Polynésie française n'exige pas que la déclaration de surenchère énonce une somme déterminée et, d'autre part, que la déclaration de surenchère du dixième au moins du prix principal doit, à défaut d'indication contraire, être regardée comme une surenchère du dixième, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a jugé irrecevable la requête en surenchère de M. P..., le jugement rendu le 16 janvier 2019, entre les parties, par le tribunal de première instance de Papeete ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de première instance de Papeete, autrement composé.

Condamne M. et Mme R... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix décembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. Y... H... B... P...

Il est fait grief au jugement attaqué, statuant en dernier ressort, d'avoir jugé irrecevable la requête en surenchère de M. B... P... ;

AUX MOTIFS QU'« il est constant que la surenchère qui est faite dans les dix jours qui suivent l'adjudication doit être précisément fixée en son montant. Il s'agit en effet, non pas de trancher un litige entre parties, mais d'organiser la vente publique sous l'autorité de l'institution judiciaire d'un bien immobilier et d'en retirer, grâce à la publicité qui lui en est donnée, le meilleur prix dans l'intérêt des créanciers et éventuellement du débiteur. Il ne peut être satisfait à cette obligation de publicité si l'offre n'est pas précise. D'ailleurs, le texte ouvre un large choix au surenchérisseur qui n'est pas tenu de se contenter de faire une offre minimum mais peut dépasser le seuil plancher du dixième (« pourvu qu'elle soit du dixième au moins du prix principal de la vente ») ;
Qu'en l'espèce, en ne précisant pas le montant de sa surenchère, en se contentant de paraphraser l'article 884 du code de procédure civile, l'offre de M. B... P... n'est pas régulière.
Qu'il n'est pas prévu de corriger ce défaut rédhibitoire ultérieurement. Le surenchérisseur ne peut en effet retarder l'issue d'une procédure dont les créanciers attendent la résolution, sachant qu'il disposait de dix jours qui suivent l'adjudication pour rédiger son offre. Dans le cas contraire, ce serait admettre que le surenchérisseur viendrait compléter, au gré de la procédure, son offre initiale par des propositions qui pourraient préciser l'offre initiale mais aussi, pourquoi pas, qui la compléteraient ou la modifieraient.
Que la sécurité juridique et la transparence de la procédure ne sauraient admettre de tels arrangements » ;

1) ALORS QU'aux termes de l'article 884 du code de procédure civile de Polynésie française toute personne peut, dans les dix jours qui suivent l'adjudication, faire une surenchère, pourvu qu'elle soit du dixième au moins du prix principal de la vente ; qu'il en résulte que le surenchérisseur, dès lors qu'il porte l'enchère à un dixième en sus du prix principal, n'est pas obligé d'indiquer en chiffres ou en lettres la somme qu'il offre et qui forme le montant de la surenchère ; qu'en retenant, pour juger irrecevable la déclaration de surenchère de M. P... pour le dixième au moins du prix, que « la surenchère qui est faite dans les dix jours qui suivent l'adjudication doit être précisément fixée en son montant » (jugement, p. 3 § 4), le tribunal, qui a ajouté une condition à la loi, a violé le texte susvisé ;

2) ALORS QU'en vertu de l'article 886 du code de procédure civile de Polynésie française, ce n'est que si la surenchère n'est pas contestée, ou si elle est validée, qu'il est procédé à la publicité dans les mêmes conditions que pour la première adjudication ; qu'il s'ensuit qu'au stade de la publicité, la phase préparatoire est clôturée et la mise à prix est nécessairement fixée ; qu'en relevant, pour juger irrecevable la déclaration de surenchère de M. P..., qu'il ne peut être satisfait à cette obligation de publicité si l'offre n'est pas précise, cependant que cette circonstance était indifférente, le tribunal a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et a violé les articles 884 et 886 du code de procédure civile de Polynésie française ;

3) ALORS QU'en toute hypothèse, l'erreur affectant la surenchère peut être réparée, soit par des conclusions, soit par voie d'incident, avant l'ouverture des nouvelles enchères ; qu'il s'ensuit que dès lors que le surenchérisseur a expressément offert un dixième au moins en sus du prix principal, la somme formant le montant de la surenchère peut être précisée postérieurement ou rectifiée ; qu'en l'espèce, il est constant que la déclaration de surenchère formalisée le 29 août 2018 pour le dixième au moins du prix avait été précisée quant à son montant exact le 3 octobre 2018, soit avant l'accomplissement des formalités de publicités et l'audience d'adjudication prévue initialement le 7 novembre ; qu'en retenant, pour juger pourtant irrecevable la déclaration de surenchère de M. P..., qu'il n'aurait pas été possible de préciser ultérieurement le montant exact de la surenchère, aux motifs inopérants que « le surenchérisseur ne peut retarder l'issue d'une procédure dont les créanciers attendent la résolution » et que « la sécurité juridique et la transparence de la procédure ne sauraient admettre de tels arrangements » (jugement, p. 3 § 5), le tribunal a violé l'article 884 du code de procédure civile de Polynésie française.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-14596
Date de la décision : 10/12/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

DEPARTEMENTS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER (y compris les collectivités territoriales) - Territoires - Polynésie - Saisie immobilière - Adjudication - Surenchère - Recevabilité - Conditions - Somme déterminée (non)

Il résulte de l'article 884 du code de procédure civile de la Polynésie française que toute personne peut, dans les dix jours qui suivent l'adjudication, faire une surenchère, pourvu qu'elle soit du dixième au moins du prix principal de la vente, cette surenchère ne pouvant être rétractée. La déclaration, qui doit être formée par un avocat inscrit au barreau de Papeete, n'est pas reçue après l'heure fixée pour la fermeture du greffe. Cet article n'exige pas que la déclaration de surenchère énonce une somme déterminée et la déclaration de surenchère du dixième au moins du prix principal doit, à défaut d'indication contraire, être regardée comme une surenchère du dixième


Références :

article 884 du code de procédure civile de la Polynésie française.

Décision attaquée : Tribunal de première instance de Papeete, 16 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 déc. 2020, pourvoi n°19-14596, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14596
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