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26/11/2020 | FRANCE | N°18-26402

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 26 novembre 2020, 18-26402


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 novembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 904 F-D

Pourvoi n° V 18-26.402

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020

M. K... N... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 18-26.4

02 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Sebaco, so...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 novembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 904 F-D

Pourvoi n° V 18-26.402

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 26 NOVEMBRE 2020

M. K... N... , domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 18-26.402 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Sebaco, société coopérative ouvrière de production, dont le siège est [...] ,

2°/ à M. H... I... ,

3°/ à Mme S... G..., épouse I... ,

tous deux domiciliés [...] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Georget, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boulloche, avocat de M. N... , de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. et Mme I... , après débats en l'audience publique du 13 octobre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Georget, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 27 septembre 2018), M. et Mme I... ont confié à M. N... une mission de maîtrise d'oeuvre complète pour la construction d'une maison.

2. Le lot « gros oeuvre » a été confié à la société Sebaco.

3. M. et Mme I... ont dénoncé des inondations dans le sous-sol.

4. La société Sebaco a assigné M. et Mme I... et M. N... aux fins de voir prononcer la réception judiciaire des travaux et la condamnation des maîtres de l'ouvrage à lui payer le solde des factures.

5. M. et Mme I... ont sollicité, à titre reconventionnel, la condamnation de M. N... et de la société Sebaco en indemnisation des préjudices nés des désordres affectant le sous-sol.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et le second moyen, pris en sa seconde branche, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, le premier n'étant manifestement pas de nature à entraîner la cassation et le second étant irrecevable.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. M. N... fait grief à l'arrêt de déclarer les demandes de M. et Mme I... recevables, alors « que la clause d'un contrat prévoyant la saisine d'un conseil de l'ordre avant toute procédure judiciaire, en cas de litige sur le respect des clauses de ce contrat, institue une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge ; que l'action en justice engagée sans mise en oeuvre préalable de cette clause est irrecevable; qu'en l'espèce, M. N... a invoqué l'irrecevabilité de l'action des maîtres d'ouvrage qui n'ont pas mis en oeuvre la procédure de conciliation préalable prévue par le contrat, prévoyant qu'« en cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'Ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire » ; que pour écarter ce moyen, la cour a jugé que cette clause ne faisait pas de la saisine du conseil de l'ordre une condition préalable à une procédure judiciaire à peine d'irrecevabilité ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ainsi que les articles 122 et 124 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

9. La clause suivant laquelle, en cas de litige portant sur l'exécution du contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire, qui institue une procédure de conciliation, obligatoire et préalable à la saisine du juge, n'est pas applicable lorsque la demande est fondée, même à titre subsidiaire, sur l'article 1792 du code civil.

10. La cour d'appel a constaté que M. et Mme I... ont fondé leurs demandes, à titre subsidiaire, sur l'article 1792 du code civil.

11. Il en résulte que la demande formée par M. et Mme I... était recevable.

12. Par ce motif de pur droit, suggéré par la défense et substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié de ce chef.

Sur le second moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

13. M. N... fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec la société Sebaco, à payer à M. et Mme I... la somme de 108 419 euros, dans la limite de 50 % à l'encontre de M. N... , alors que « les dommages-intérêts doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour la victime ni perte ni profit ; qu'en l'espèce, l'expert a conclu que le cuvelage, qui a été prévu en option dans le devis descriptif quantitatif rédigé par M. N... mais n'a pas été prévu dans le marché de travaux du lot gros-oeuvre et n'a pas été réalisé, était indispensable à l'étanchéité du sous-sol de la maison ; que dans ses conclusions d'appel, M. N... a fait valoir que le coût de ce cuvelage devait être supporté par M. et Mme I... , sauf à ce qu'ils s'enrichissent sans cause ; qu'en mettant la coût de réalisation de ce cuvelage à la charge de M. N... et de la Sebaco, la cour a violé l'article 1149 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

14. Après avoir retenu que M. N... ne démontrait pas avoir suffisamment informé M. et Mme I... , avant les travaux, des risques induits par l'abandon de la structure en coque, la cour d'appel a relevé que, s'agissant des mesures réparatoires, l'expert préconisait la réalisation d'un cuvelage général.

14. Elle a pu en déduire que la notion d'enrichissement sans cause ne trouvait pas à s'appliquer, M. et Mme I... ayant droit à l'indemnisation totale de leurs préjudices par la remise en état de l'ouvrage afin qu'il soit exempt de vice et conforme aux dispositions contractuelles.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. N... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. N... et le condamne à payer à M. et Mme I... la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour M. N...

Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir jugé recevable l'action des époux I... à l'encontre de Monsieur N... et d'avoir en conséquence condamné ce dernier à payer diverses sommes aux époux I... ,

Aux motifs qu'« une clause contractuelle prévoyant la saisine préalable du conseil de l'Ordre des architectes, non assortie de conditions particulières de mise en oeuvre et par suite de sanction en cas d'inobservation, ne saurait être analysée en une procédure de conciliation obligatoire préalable à la saisine du juge dont le non-respect caractérise une fin de non-recevoir.

En l'espèce, le cahier des clauses générales du contrat d'architecte prévoit la clause suivante en son article 5-2 : « en cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'Ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire ».

Force est de constater que le libellé de cette clause ne fait pas de la saisine du conseil de l'Ordre des architectes une condition préalable à l'introduction de la procédure judiciaire, et ce, à peine d'irrecevabilité.

En conséquence, nonobstant l'absence de saisine du conseil régional de l'Ordre des architectes, l'action des époux I... à l'encontre de Monsieur N... est recevable » (arrêt p. 6, § 8 à 12) ;

1/ Alors que la clause d'un contrat prévoyant la saisine d'un conseil de l'ordre avant toute procédure judiciaire, en cas de litige sur le respect des clauses de ce contrat, institue une procédure de conciliation obligatoire et préalable à la saisine du juge ; que l'action en justice engagée sans mise en oeuvre préalable de cette clause est irrecevable; qu'en l'espèce, M. N... a invoqué l'irrecevabilité de l'action des maîtres d'ouvrage qui n'ont pas mis en oeuvre la procédure de conciliation préalable prévue par le contrat, prévoyant qu'« en cas de litige portant sur l'exécution du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'Ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire, sauf conservatoire » ; que pour écarter ce moyen, la cour a jugé que cette clause ne faisait pas de la saisine du conseil de l'ordre une condition préalable à une procédure judiciaire à peine d'irrecevabilité ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ainsi que les articles 122 et 124 du code de procédure civile ;

2/ Alors que, en toute hypothèse, le juge ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur leur mérite ; qu'en l'espèce, pour déclarer recevable l'action des maîtres d'ouvrage dirigée contre M. N... , malgré l'absence de conciliation préalable obligatoire prévue au contrat, la cour a relevé d'office que cette clause ne faisait pas de la saisine du conseil de l'ordre une condition préalable à une procédure judiciaire à peine d'irrecevabilité ; qu'en se fondant sur ce motif, sans avoir invité les parties à présenter leurs observations sur son mérite, la cour a violé l'article 16 code de procédure civile.

Le second moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. N... , in solidum avec la Scop Sebaco, à payer aux époux I... la somme de 108 419 euros, outre la TVA en vigueur au jour de l'arrêt et indexation sur l'indice INSEE du coût de la construction depuis le 29 novembre 2010, ce dans la limite de 50 % à l'encontre de M. N... ,

Aux motifs que « s'agissant des mesures réparatoires, l'expert C... préconise la réalisation d'un radier général solidarisé aux murs extérieurs et d'un cuvelage général jusqu'au niveau des allèges des soupiraux du sous-sol sur une hauteur d'environ 1,20 m.

Il évalue ces travaux à la somme totale de 108 419 euros HT (travaux, frais de maîtrise d'oeuvre et fourniture d'eau et d'électricité).

En l'état, alors qu'aucune autre solution réparatoire efficiente n'est proposée par l'expert, elle doit être retenue. La notion d'enrichissement sans cause ne trouve pas à s'appliquer, les époux I... ayant droit à l'indemnisation totale de leurs préjudices et en premier lieu à la remise en l'état de l'ouvrage afin qu'il soit exempt de vice et conforme aux dispositions contractuelles » (arrêt page 9, in fine, et p. 10, § 1er et 2) ;

Et aux motifs, adoptés du jugement, que « le devis discuté contradictoirement établit à 93 843 euros le coût de la réparation du désordre outre 14 076 € au titre des frais de maîtrise d'oeuvre et 500 € au titre des frais liés à la fourniture d'eau et d'électricité.

Il y a lieu de condamner les deux constructeurs in solidum à payer la somme de 108 419 euros aux époux I... , outre la TVA en vigueur au jour du jugement, avec indexation sur l'indice Insee du coût de la construction depuis le jour de l'établissement du devis (29 novembre 2010) » (jug. p. 6, § 7 et 8) ;

1/ Alors que les dommages-intérêts doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour la victime ni perte ni profit ; qu'en l'espèce, l'expert a conclu que le cuvelage, qui a été prévu en option dans le devis descriptif quantitatif rédigé par M. N... mais n'a pas été prévu dans le marché de travaux du lot gros-oeuvre et n'a pas été réalisé, était indispensable à l'étanchéité du sous-sol de la maison ; que dans ses conclusions d'appel (p. 15 § 2), M. N... a fait valoir que le coût de ce cuvelage devait être supporté par les époux I... , sauf à ce qu'ils s'enrichissent sans cause ; qu'en mettant la coût de réalisation de ce cuvelage à la charge de M. N... et de la Scop Sebaco, la cour a violé l'article 1149 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

2/ Alors que les dommages-intérêts doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte ni perte ni profit pour la victime ; qu'en l'espèce, l'expert a conclu que le montant des travaux de reprise s'élevait à 93 843 €, outre la TVA à 5,5 %, soit 99 004 € arrondie à la somme de 99 500 € T.T.C., et a chiffré les frais annexes aux sommes de 500 euros T.T.C. correspondant à 416,67 € T.T.C. (électricité et eau) et de 12 375 € H.T., soit 14 850 € T.T.C. (maîtrise d'oeuvre, assurances dommages-ouvrage) ; qu'en accordant aux époux I... la somme totale de 108 419 € H.T., outre la TVA en vigueur au jour de l'arrêt, la cour a additionné des sommes HT et TTC et leur a octroyé un profit de 1 784,33 € H.T., violant ainsi le principe de la réparation intégrale et l'article 1149 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 18-26402
Date de la décision : 26/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 27 septembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 26 nov. 2020, pourvoi n°18-26402


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.26402
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