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19/11/2020 | FRANCE | N°19-12673

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 19 novembre 2020, 19-12673


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 novembre 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1267 F-D

Pourvoi n° T 19-12.673

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020

La société civile immobilière Monoï, dont le siège est [...] ,

a formé le pourvoi n° T 19-12.673 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Colmar (12e chambre civile), dans le litige l'opp...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 19 novembre 2020

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1267 F-D

Pourvoi n° T 19-12.673

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 NOVEMBRE 2020

La société civile immobilière Monoï, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° T 19-12.673 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Colmar (12e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de la société civile immobilière Monoï, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Maunand, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 20 décembre 2018), par un acte notarié en date du 29 janvier 2009, la Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne (la banque) a consenti à la société civile immobilière Monoï (la SCI Monoï) un prêt immobilier d'un montant en principal de 625 000 euros, garanti par l'inscription d'une hypothèque sur un immeuble situé à [...] ainsi que par le cautionnement solidaire de MM. Q... et O....

2. Par un acte notarié en date du 21 décembre 2012, les conditions du prêt ont été modifiées. La durée du prêt a été allongée de quarante mois, avec l'application d'une franchise en capital sur les douze premiers mois à compter de l'effet de l'avenant, la modification du taux fixe en taux variable, la reprise de la totalité des échéances impayées au nominal du prêt au jour de la signature de l'avenant, la modification des garanties et l'ajout de clauses particulières.

3. Se prévalant de mensualités impayées, la banque a sollicité la vente par adjudication de l'immeuble hypothéqué.

4. Par une ordonnance du 9 septembre 2014, un tribunal d'instance, statuant comme tribunal de l'exécution forcée immobilière, a ordonné la vente forcée de l'immeuble appartenant à la SCI Monoï.

5. Cette dernière a formé un pourvoi immédiat à l'encontre de cette décision.

6. Par une décision du 22 juin 2015, le tribunal d'instance a maintenu sa décision ayant ordonné l'exécution forcée immobilière, a fixé la somme restant due à 627 860 euros et a transmis le dossier à une cour d'appel pour compétence.

7. Par un arrêt du 22 septembre 2016, cette cour d'appel a confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance du 22 juin 2015.

8. Cet arrêt a été cassé par un arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 19 octobre 2017 (2e Civ., 19 octobre 2017, pourvoi n° 16-26.413), qui a renvoyé l'affaire à une autre cour d'appel.

9. Par un arrêt en date du 20 décembre 2018, cette cour d'appel, statuant sur renvoi de cassation, a déclaré le pourvoi de la SCI Monoï mal fondé, a confirmé l'ordonnance du tribunal de Saint-Avold du 22 juin 2015 en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, et statuant à nouveau, a dit que les dispositions invoquées ne s'appliquent pas aux crédits immobiliers souscrits par la SCI Monoï, dit n'y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts, et y ajoutant, condamné la SCI Monoï aux dépens et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

10. Par déclaration du 19 février 2019, la SCI Monoï a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

11. La SCI Monoï fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du 22 juin 2015 qui a maintenu la décision du 9 septembre 2014 ayant ordonné l'exécution forcée de l'immeuble lui appartenant, de dire que la somme restant due était de 627 860 euros et de l'avoir infirmée en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts alors qu'il résulte de l'article 794-5 du code de procédure civile locale applicable en Alsace-Moselle, devenu L. 111-5 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction applicable au litige, que les actes notariés ne peuvent servir de titre exécutoire que s'ils ont pour objet le paiement d'une somme déterminée, et non pas seulement déterminable, et si le débiteur consent à l'exécution forcée immédiate, comme l'exige l'article 794-5 du code local de procédure civile ; qu'en se bornant à relever que l'acte comportait l'ensemble des caractéristiques du prêt litigieux, dont le montant du capital emprunté, et qu'il était remboursable selon des échéances mensuelles déterminées, et à indiquer que l'arrêté de compte devant être établi par le notaire pour déterminer le solde restant dû était facultatif, sans constater que l'acte portait mention d'une somme déterminée correspondant au solde de la dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé.

Réponse de la Cour

12. Aux termes de l'article L. 111-5, 1°, du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, « dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, constituent des titres exécutoires les actes établis par un notaire de ces trois départements ou du ressort des cours d'appel de Colmar et de Metz lorsqu'ils sont dressés au sujet d'une prétention ayant pour objet le paiement d'une somme d'argent déterminée ou la prestation d'une quantité déterminée d'autres choses fongibles ou de valeurs mobilières et que le débiteur consent dans l'acte à l'exécution forcée immédiate. »

13. Il en résulte que constitue un titre exécutoire un acte notarié de prêt qui mentionne, au jour de sa signature, outre le consentement du débiteur à son exécution forcée immédiate, le montant du capital emprunté et ses modalités de remboursement permettant, au jour des poursuites, d'évaluer la créance dont le recouvrement est poursuivi.

14. Après avoir constaté que l'emprunteur s'est soumis à l'exécution forcée immédiate, l'arrêt relève, d'une part, que l'acte notarié du 29 janvier 2009 mentionne les montants du prêt et des intérêts outre les frais d'hypothèque et de dossier et, d'autre part, que dans l'avenant notarié du 21 décembre 2012, les conditions particulières ont été modifiées et indiquent les montants de l'échéance mensuelle de remboursement pendant et après la franchise, des frais de dossier et du capital restant dû à la date effective de la mise en place de l'avenant et après intégration des échéances impayées au taux nominal du prêt.

15. L'arrêt en a exactement déduit que le prêt avait pour objet le paiement d'une somme déterminée et que l'avenant notarié constituait un titre exécutoire.

16. La cour a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.

17. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société civile immobilière Monoï aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société civile immobilière Monoï à payer à la Banque populaire Alsace-Lorraine-Champagne la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Maunand, conseiller faisant fonction de doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société civile immobilière Monoï

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du 22 juin 2015 ayant maintenu la décision du 9 septembre 2014 ayant ordonné l'exécution forcée de l'immeuble appartenant à la SCI Monoi et d'avoir dit que la somme restant due était de 627.860 euros, et de l'avoir infirmé en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts,

AUX MOTIFS QUE l'article 794-5 du code de procédure civile locale applicable en Alsace-Moselle, devenu l'article L. 111-5 du code des procédures civiles d'exécution, dispose que les actes notariés ne peuvent servir de titre exécutoire que s'ils ont pour objet le paiement d'une somme déterminée, et non pas seulement déterminable ; que par acte notarié du 29 janvier 2009, la banque populaire a consenti un prêt de 625.000 euros à la SCI Monoi ; qu'il était indiqué dans l'acte le montant du prêt soit 625.000 euros, les intérêts de 346.033,48 euros, outre les frais d'hypothèque de 9.800 euros et de dossier pour 200 euros ; que dès lors que la SCI Monoi se soumettait à l'exécution forcée et que le contrat de prêt comportait une somme déterminée, la banque disposait d'un titre exécutoire au sens de l'article L. 111-5 du code des procédures civiles d'exécution ; que par avenant notarié du 21 décembre 2012, la banque populaire modifiait les caractéristiques du prêt en allongeant la durée de celui-ci de 40 mois, avec l'application d'une franchise en capital sur les douze premiers mois à compter de l'effet de l'avenant, la modification du taux en fixe en taux variable euribor 3 mois + 1,60%, la reprise de la totalité des échéances impayées au nominal du prêt au jour de la signature de l'avenant, la modification des garanties et l'ajout de clauses particulière ; qu'ainsi, les conditions particulières étaient modifiées et stipulaient un montant de l'échéance mensuelle de remboursement de 1.030,86 euros pendant la franchise puis 4.100,59 euros, de frais de dossier de 2,15% et un capital restant dû de 640.242,32 euros à la date effective de la mise en place de l'avenant et après intégration des échéances impayées au nominal du prêt ; que l'emprunteur se soumettait à l'exécution forcée immédiate ; qu'il s'agit donc d'un prêt aux échéances déterminées, qui s'il comporte une affectation hypothécaire, ne constitue pas un acte constituant uniquement une hypothèque mais ayant pour objet le paiement d'une somme déterminée concernant le capital de 640.242,32 euros, lequel est remboursable selon des échéances mensuelles de remboursement déterminées à hauteur de 1.030,86 euros pendant 12 mois puis 4.100,59 euros pendant 190 mois ; que l'avenant par acte notarié constitue dès lors lui aussi un titre exécutoire au sens de l'article L. 111-5 du code de procédure civile local, étant relevé que la possibilité « pour l'emprunteur de donner mandat à un représentant habilité de la banque à l'effet de, en son nom et pour son compte, reconnaître le solde de la dette par acte authentique en l'étude du notaire soussigné, l'obliger au remboursement avec tous intérêts, frais et accessoires en le soumettant à l'exécution forcée immédiate dans tous ses biens meubles et immeubles à présent et à venir conformément aux dispositions légales », soit l'établissement par le notaire d'un arrêté de compte ne saurait constituer une condition supplémentaire pour caractériser l'existence d'un titre exécutoire de droit local ; qu'en conséquence, le moyen tiré de l'inexistence d'un titre exécutoire est écarté ;

ALORS QU'il résulte de l'article 794-5 du code de procédure civile locale applicable en Alsace-Moselle, devenu L. 111-5 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction applicable au litige, que les actes notariés ne peuvent servir de titre exécutoire que s'ils ont pour objet le paiement d'une somme déterminée, et non pas seulement déterminable et si le débiteur consent à l'exécution forcée immédiate, comme l'exige l'article 794-5 du code local de procédure civile ; qu'en se bornant à relever que l'acte comportait l'ensemble des caractéristiques du prêt litigieux, dont le montant du capital emprunté, et qu'il était remboursable selon des échéances mensuelles déterminées, et à indiquer que l'arrêté de compte devant être établi par le notaire pour déterminer le solde restant dû était facultatif, sans constater que l'acte portait mention d'une somme déterminée correspondant au solde de la dette, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-12673
Date de la décision : 19/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 20 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 19 nov. 2020, pourvoi n°19-12673


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12673
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