LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 18 novembre 2020
Rejet
Mme BATUT, président
Arrêt n° 705 F-D
Pourvoi n° S 19-13.362
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 NOVEMBRE 2020
M. X... H..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° S 19-13.362 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre D), dans le litige l'opposant :
1°/ à O... T..., veuve H..., ayant été domiciliée [...] , décédée en cours d'instance,
2°/ à M. Jean X... F..., domicilié [...] ,
3°/ à M. R... F..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme S... F..., domiciliée [...] ,
pris tous trois en qualité d'héritiers de O... T...,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. H..., de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de MM. B..., R... et Mme S... F..., ès qualitès, après débats en l'audience publique du 29 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Mouty-Tardieu, conseiller référendaire rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à M. B... F..., M. R... F... et Mme S... F... de la reprise de l'instance après le décès de O... T... survenu le 3 août 2019.
Faits et procédure
2.Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 novembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 27 septembre 2017, pourvoi n° 16-22.150, Bull. 2017, I, n° 207), Y... H... est décédé le 13 mars 2002, laissant pour lui succéder O... T..., son épouse commune en biens, et M. X... H..., son fils issu d'une première union.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. M. H... fait grief à l'arrêt de dire que le legs consenti à O... T... le 28 mars 2000 doit se cumuler avec son droit légal en usufruit, alors « que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; qu'elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'en l'espèce, dans son arrêt du 25 mai 2016, la cour d'appel avait « débouté Mme O... T..., veuve H... de ses autres demandes », comprenant notamment sa demande de condamnation de M. H... à lui payer la libéralité qui lui avait été consentie par son mari sans imputation préalable de son droit d'usufruit légal ; que par arrêt du 27 septembre 2017, la première chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé « mais seulement en ce qu'il dit que Mme T... a recelé le solde, au décès d'Y... H..., des fonds placés sur le livret A n° [...], ouvert à la Caisse d'épargne, agence de [...], transformé le 1er janvier 2002 et clôturé le 4 juin 2003, et en conséquence qu'elle ne peut prétendre à aucune part dans les fonds recelés, dont le montant n'est pas connu, faute d'avoir été communiqué par cette dernière, l'arrêt rendu le 25 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de renvoi » ; qu'il en résulte que le chef de dispositif de l'arrêt du 25 mai 2016 ayant débouté Mme T..., veuve H... de sa demande en paiement de son legs sans imputation préalable du droit légal en usufruit d'un quart lui revenant, qui n'a aucun lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire avec le chef de dispositif cassé, est devenu définitif ; qu'en jugeant néanmoins que « la libéralité qui lui a été consentie s'ajoute à son usufruit légal », la cour d'appel a violé les articles 623, 624 et 625 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de M. H... que celui-ci ait soutenu devant la cour d'appel que la question de l'imputation du droit légal de O... T... au legs que lui avait consenti Y... H... avait été irrévocablement jugée.
6. Le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est donc pas recevable.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. H... aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. H... et le condamne à payer à M. B... F..., M. R... F... et Mme S... F... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille vingt.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour M. H....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le legs consenti à Mme O... T... le 28 mars 2000 devait se cumuler avec son droit légal en usufruit ;
AUX MOTIFS QUE le legs est ainsi rédigé : « Je soussigné H... Y... K... déclare prendre les dispositions testamentaires suivantes : J'avais souscrit, du temps où j'étais gérant de société une assurance d'invalidité au profit de mon épouse T... G.... Ce contrat est maintenant caduc. C'est pourquoi je lègue à mon épouse afin d'assurer sa subsistance et d'éviter tout litige avec mon fils une rente annuelle de 60 000 frs qui sera payable sans retenue mensuellement à partir du jour de mon décès. Telles sont mes volontés. Fait à Bastia le 28 mars 2000 » ; que l'article 767 ancien du code civil applicable aux faits de la cause compte tenu de la date de décès de M. H... dispose que « Le conjoint survivant non divorcé, qui ne succède pas à la pleine propriété, et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée a, sur la succession du prédécédé, un droit d'usufruit qui est : - un quart, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants soit légitimes, issus ou non du mariage ; - de moitié, si le défunt laisse des frères et soeurs, des descendants de frères et soeurs, des ascendants ou des enfants naturels conçus pendant le mariage ; le calcul sera opéré sur une masse faites de tous les biens existants au décès du de cujus, auxquels seront réunies fictivement ceux dont il aurait disposé soit par acte entre vifs soit par acte testamentaire, au profit de successibles sans dispense de rapport ; Mais l'époux survivant ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le prédécédé n'aura disposé ni par acte entre vifs ni par acte testamentaire, et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour. Il cessera de l'exercer dans le cas où il aura reçu du défunt des libéralités, même faites par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que la présente loi lui attribue et, si, ce montant était inférieur, il ne pourrait réclamer que le montant de son usufruit. Jusqu'au partage définitif, les héritiers peuvent exiger, moyennant sûretés suffisantes, et garantie de maintien de l'équivalence initiale, que l'usufruit de l'époux survivant soit converti en une rente viagère équivalente. S'ils sont en désaccord, la conversion sera facultative pour les tribunaux » ; que le texte en cause dans le présent litige est l'alinéa 6 de l'article susvisé ; que Mme T... fait valoir que, par un précédent testament en date du 30 avril 1995, M. Y... H... indiquait qu'il était titulaire d'un contrat d'assurance « d'un montant à ce jour de 465 480 frs souscrit au bénéfice de son épouse qui touchera le montant total à son décès » ; qu'il ajoutait « qu'aucune attestation que ce soit ne pourra annuler cette assurance qui ne pourra sous aucun prétexte être transférée sur une autre tête avant le décès de ma femme. J'ajoute qu'un quelconque papier écrit de ma main ne pourrait avoir été rédigé que sous la contrainte ou si j'étais atteint d'une maladie cérébrale sénilité ou alzheimer » ; qu'elle ajoute que, le contrat étant caduc, le défunt a pris de nouvelles dispositions testamentaires le 28 mars 2000, lui léguant la rente viagère de 60 000 Frs par an, correspondant aux 5 000 Frs par mois qu'il lui versait chaque mois de son vivant ; qu'en en déduit qu'en lui consentant par deux fois une libéralité d'abord par le versement d'un contrat d'assurance d'un montant de 465 480 Frs, puis, ce contrat étant caduc, par le versement d'une rente mensuelle de 5000 Frs, son conjointa incontestablement entendu la faire bénéficier de ces libéralités en sus de son usufruit légal ; que le testament du 28 mars 2000 a tiré les conséquences de la caducité du contrat d'assurance-vie n° 895 520 013 dont la bénéficiaire était Mme T... et qui figurait dans le legs de M. Y... H... du 30 avril 1955 pour un montant de 465 480 Frs ; qu'en insérant ledit contrat dans le testament de 1995, il apparait que M. H... n'a pas entendu le rendre imputable sur le droit d'usufruit de son conjoint ; que même s'il serait en effet possible de penser que cette clause du testament de 1995 n'a en effet d'intérêt que dans l'optique de rendre imputable la somme de 465 480 Frs sur le droit en usufruit de Mme T..., puisque, sinon, par principe, un contrat d'assurance-vie échappe à la succession de celui que le souscrit, la suite du testament permet de dire que tel n'a pas été la volonté du de cujus ; qu'il a surtout souhaité faire en sorte que, par une modification du nom du bénéficiaire qui pourrait lui échapper, cette somme de 465 480 Frs revienne en tout état de cause de manière pleine et entière à Mme T... ; que ce contrat étant caduc, ce qui privait son épouse de cette somme, M. Y... H... a pris les dispositions testamentaires objet du présent litige ; qu'en indiquant que la somme de 60 000 Frs avait pour objet d'assurer la subsistance de Mme T... après son décès, M. H... a entendu qu'elle puisse en bénéficier même si son droit d'usufruit d'un quart lui était inférieur ; que le fait qu'il ait entendu assurer sa subsistance pour éviter tout litige avec son fils va également dans ce sens ; qu'il est donc possible de dire qu'il a entendu gratifier sa conjointe au-delà de son droit légal ; qu'il y a donc lieu de dire que la libéralité qui lui a été consentie s'ajoute à son usufruit légal ;
ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; qu'elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire; qu'en l'espèce, dans son arrêt du 25 mai 2016, la cour d'appel avait « débouté Mme O... T... veuve H... de ses autres demandes » (arrêt du 25 mai 2016, p. 23), comprenant notamment sa demande de condamnation de M. H... à lui payer la libéralité qui lui avait été consentie par son mari sans imputation préalable de son droit d'usufruit légal ; que par arrêt du 27 septembre 2017, la première chambre civile de la Cour de cassation a cassé et annulé « mais seulement en ce qu'il dit que Mme T... a recelé le solde, au décès d'Y... H..., des fonds placés sur le livret A n°[...], ouvert à la Caisse d'épargne, agence de [...], transformé le 1er janvier 2002 et clôturé le 4 juin 2003, et en conséquence qu'elle ne peut prétendre à aucune part dans les fonds recelés, dont le montant n'est pas connu, faute d'avoir été communiqué par cette dernière, l'arrêt rendu le 25 mai 2016, entre les parties, par la cour d'appel de renvoi » ; qu'il en résulte que le chef de dispositif de l'arrêt du 25 mai 2016 ayant débouté Mme T... veuve H... de sa demande en paiement de son legs sans imputation préalable du droit légal en usufruit d'un quart lui revenant, qui n'a aucun lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire avec le chef de dispositif cassé, est devenu définitif ; qu'en jugeant néanmoins que « la libéralité qui lui a été consentie s'ajoute à son usufruit légal » (arrêt, p. 11), la cour d'appel a violé les articles 623, 624 et 625 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que le legs consenti à Mme O... T... le 28 mars 2000 devait se cumuler avec son droit légal en usufruit ;
AUX MOTIFS QUE le legs est ainsi rédigé : « Je soussigné H... Y... K... déclare prendre les dispositions testamentaires suivantes : J'avais souscrit, du temps où j'étais gérant de société une assurance d'invalidité au profit de mon épouse T... G.... Ce contrat est maintenant caduc. C'est pourquoi je lègue à mon épouse afin d'assurer sa subsistance et d'éviter tout litige avec mon fils une rente annuelle de 60 000 frs qui sera payable sans retenue mensuellement à partir du jour de mon décès. Telles sont mes volontés. Fait à Bastia le 28 mars 2000 » ; que l'article 767 ancien du code civil applicable aux faits de la cause compte tenu de la date de décès de M. H... dispose que « Le conjoint survivant non divorcé, qui ne succède pas à la pleine propriété, et contre lequel n'existe pas de jugement de séparation de corps passé en force de chose jugée a, sur la succession du prédécédé, un droit d'usufruit qui est : - un quart, si le défunt laisse un ou plusieurs enfants soit légitimes, issus ou non du mariage ; - de moitié, si le défunt laisse des frères et soeurs, des descendants de frères et soeurs, des ascendants ou des enfants naturels conçus pendant le mariage ; le calcul sera opéré sur une masse faites de tous les biens existants au décès du de cujus, auxquels seront réunies fictivement ceux dont il aurait disposé soit par acte entre vifs soit par acte testamentaire, au profit de successibles sans dispense de rapport ; Mais l'époux survivant ne pourra exercer son droit que sur les biens dont le prédécédé n'aura disposé ni par acte entre vifs ni par acte testamentaire, et sans préjudicier aux droits de réserve ni aux droits de retour. Il cessera de l'exercer dans le cas où il aura reçu du défunt des libéralités, même faites par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que la présente loi lui attribue et, si, ce montant était inférieur, il ne pourrait réclamer que le montant de son usufruit. Jusqu'au partage définitif, les héritiers peuvent exiger, moyennant sûretés suffisantes, et garantie de maintien de l'équivalence initiale, que l'usufruit de l'époux survivant soit converti en une rente viagère équivalente. S'ils sont en désaccord, la conversion sera facultative pour les tribunaux » ; que le texte en cause dans le présent litige est l'alinéa 6 de l'article susvisé ; que Mme T... fait valoir que, par un précédent testament en date du 30 avril 1995, M. Y... H... indiquait qu'il était titulaire d'un contrat d'assurance « d'un montant à ce jour de 465 480 frs souscrit au bénéfice de son épouse qui touchera le montant total à son décès » ; qu'il ajoutait « qu'aucune attestation que ce soit ne pourra annuler cette assurance qui ne pourra sous aucun prétexte être transférée sur une autre tête avant le décès de ma femme. J'ajoute qu'un quelconque papier écrit de ma main ne pourrait avoir été rédigé que sous la contrainte ou si j'étais atteint d'une maladie cérébrale sénilité ou alzheimer » ; qu'elle ajoute que, le contrat étant caduc, le défunt a pris de nouvelles dispositions testamentaires le 28 mars 2000, lui léguant la rente viagère de 60 000 Frs par an, correspondant aux 5 000 Frs par mois qu'il lui versait chaque mois de son vivant ; qu'en en déduit qu'en lui consentant par deux fois une libéralité d'abord par le versement d'un contrat d'assurance d'un montant de 465 480 Frs, puis, ce contrat étant caduc, par le versement d'une rente mensuelle de 5000 Frs, son conjointa incontestablement entendu la faire bénéficier de ces libéralités en sus de son usufruit légal ; que le testament du 28 mars 2000 a tiré les conséquences de la caducité du contrat d'assurance-vie n° 895 520 013 dont la bénéficiaire était Mme T... et qui figurait dans le legs de M. Y... H... du 30 avril 1955 pour un montant de 465 480 Frs ; qu'en insérant ledit contrat dans le testament de 1995, il apparait que M. H... n'a pas entendu le rendre imputable sur le droit d'usufruit de son conjoint ; que même s'il serait en effet possible de penser que cette clause du testament de 1995 n'a en effet d'intérêt que dans l'optique de rendre imputable la somme de 465 480 Frs sur le droit en usufruit de Mme T..., puisque, sinon, par principe, un contrat d'assurance-vie échappe à la succession de celui que le souscrit, la suite du testament permet de dire que tel n'a pas été la volonté du de cujus ; qu'il a surtout souhaité faire en sorte que, par une modification du nom du bénéficiaire qui pourrait lui échapper, cette somme de 465 480 Frs revienne en tout état de cause de manière pleine et entière à Mme T... ; que ce contrat étant caduc, ce qui privait son épouse de cette somme, M. Y... H... a pris les dispositions testamentaires objet du présent litige ; qu'en indiquant que la somme de 60 000 Frs avait pour objet d'assurer la subsistance de Mme T... après son décès, M. H... a entendu qu'elle puisse en bénéficier même si son droit d'usufruit d'un quart lui était inférieur ; que le fait qu'il ait entendu assurer sa subsistance pour éviter tout litige avec son fils va également dans ce sens ; qu'il est donc possible de dire qu'il a entendu gratifier sa conjointe au-delà de son droit légal ; qu'il y a donc lieu de dire que la libéralité qui lui a été consentie s'ajoute à son usufruit légal ;
ALORS QUE 1°), les libéralités faites par l'époux prémourant au survivant, même par préciput et hors part, s'imputent sur l'usufruit légal de celui-ci, sauf lorsque le disposant a manifesté la volonté de faire bénéficier son conjoint de ces libéralités en sus de cet usufruit ; que dès lors, la libéralité consentie par l'époux prémourant à son conjoint étant, par principe, imputable sur le droit d'usufruit de celui-ci, le juge, saisi d'une demande sur ce point, doit rechercher si le défunt a manifesté la volonté de faire bénéficier son conjoint de cette libéralité en sus de l'usufruit légal ; qu'en jugeant que la libéralité consentie à Mme T... s'ajoutait à son usufruit légal au motif « qu'en insérant le contrat d'assurance vie dans le testament de 1995, il apparait que M. H... n'a pas entendu le rendre imputable sur le droit d'usufruit de son conjoint » (arrêt, p. 11), sans caractériser ainsi positivement la volonté du défunt de faire bénéficier son conjoint de cette libéralité en sus de l'usufruit légal, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 767 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 ;
ALORS QUE 2°), les libéralités faites par l'époux prémourant au survivant, même par préciput et hors part, s'imputent sur l'usufruit légal de celui-ci, sauf lorsque le disposant a manifesté la volonté de faire bénéficier son conjoint de ces libéralités en sus de cet usufruit ; que le fait qu'une libéralité consentie par l'époux prémourant au survivant excède son droit à usufruit légal n'a pas d'incidence sur le principe d'imputation de ladite libéralité sur l'usufruit légal ; qu'en affirmant, pour juger que la libéralité consentie à Mme T... s'ajoutait à son usufruit légal, que « M. H... a entendu qu'elle puisse en bénéficier même si son droit d'usufruit d'un quart lui était inférieur » et « qu'il a entendu gratifier sa conjointe au-delà de son droit légal » (arrêt, p. 11), cependant que la circonstance que le défunt ait fait bénéficier sa conjointe d'une libéralité plus importante que son droit d'usufruit légal n'a aucune incidence sur le principe d'imputation de ladite libéralité sur l'usufruit légal prévu par l'ancien article 767 du code civil, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 767 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 ;
ALORS QUE 3°), au surplus, le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; qu'en énonçant qu'« il est donc possible de dire qu'il a entendu gratifier sa conjointe au-delà de son droit légal » (arrêt, p. 11, § 6), la cour d'appel a statué par un motif hypothétique et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE 4°) le juge ne doit pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que dans son testament du 28 mars 2000, M. Y... H... avait écrit : « Je soussigné H... Y... K... déclare prendre les dispositions testamentaires suivantes : J'avais souscrit, du temps où j'étais gérant de société une assurance d'invalidité au profit de mon épouse T... G.... Ce contrat est maintenant caduc. C'est pourquoi je lègue à mon épouse afin d'assurer sa subsistance et d'éviter tout litige avec mon fils une rente annuelle de 60 000 frs qui sera payable sans retenue mensuellement à partir du jour de mon décès. Telles sont mes volontés. Fait à Bastia le 28 mars 2000 » (production) ; qu'en jugeant que la libéralité ainsi consentie par M. H... à Mme T... s'ajoute à l'usufruit légal de cette dernière, cependant qu'il ressort des termes clairs et précis dudit testament que M. Y... H... n'a aucunement manifesté la volonté de déroger au principe d'imputation sur l'usufruit légal de la libéralité consentie à son épouse, l'usufruit légal n'étant d'ailleurs même pas évoqué, la cour d'appel a dénaturé ce document et violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les écrits qui lui sont soumis.