La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2020 | FRANCE | N°19-19167

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 12 novembre 2020, 19-19167


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 novembre 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1191 F-P+B+I

Pourvoi n° B 19-19.167

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité social

e et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées, dont le siège est 166 rue Pierre et Marie Curie, Labège Innopole, 31061 Toulouse, a formé ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 12 novembre 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1191 F-P+B+I

Pourvoi n° B 19-19.167

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 NOVEMBRE 2020

L'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Midi-Pyrénées, dont le siège est 166 rue Pierre et Marie Curie, Labège Innopole, 31061 Toulouse, a formé le pourvoi n° B 19-19.167 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2019 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale, section 3), dans le litige l'opposant à la société Blanc transports véhicules (BTV), société par actions simplifiée, dont le siège est 1 avenue de l'Europe, Eurocentre, 31621 Castelnau-d'Estretefonds, défenderesse à la cassation.

La société Blanc transports véhicule a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen de cassation annexé au présent arrêt.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'URSSAF Midi-Pyrénées, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Blanc transports véhicules, après débats en l'audience publique du 30 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Tinchon, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 mai 2019), à la suite d'un contrôle portant sur les années 2013 à 2015, l'URSSAF Midi-Pyrénées (l'URSSAF) a adressé à la société Blanc transports véhicules (la société) une lettre d'observations portant plusieurs chefs de redressement. Après observations de la société et réponse de l'inspecteur du recouvrement, l'URSSAF a ensuite notifié à la société une mise en demeure, puis lui a décerné une contrainte le 3 février 2017.

2. La société a formé opposition à cette contrainte.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi incident, qui est préalable

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande d'annulation de la mise en demeure délivrée par l'URSSAF le 27 décembre 2016, alors « que toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée à peine de nullité de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable ; que cette mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et qu'à cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée à l'employeur débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la mise en demeure doit être adressée à l'attention du représentant légal de la personne morale débitrice et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou, le cas échéant, à celle de son établissement principal ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que « la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir » ; qu'en déboutant cependant la société de sa demande de nullité de cette mise en demeure, motif pris que l'irrégularité purement formelle ainsi caractérisée ne lui aurait causé aucun préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige :

4. Selon ce texte, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée au redevable.

5. La mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée au débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

6. Pour rejeter la demande de nullité de la mise en demeure litigieuse, l'arrêt retient que si la mise en demeure, qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient, est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir, pour autant il s'agit d'une irrégularité de forme, qui n'est susceptible d'affecter la validité de la mise en demeure qu'en cas de grief.

7. En statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

8. La nullité de la mise en demeure privant de fondement l'obligation au paiement des sommes qui en font l'objet, la cassation de l'arrêt, en ce qu'il déboute la société de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la mise en demeure, entraîne par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il statue sur le bien-fondé des chefs de redressement litigieux.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;

Condamne l'URSSAF Midi-Pyrénées aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l'URSSAF Midi-Pyrénées et la condamne à payer à la société Blanc transports véhicules la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze novembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour l'URSSAF Midi-Pyrénées

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé le chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations patronales, d'AVOIR condamné la société Blanc Transports Véhicules à payer à l'URSSAF Midi Pyrénées la somme de 8 243 euros seulement, hors majorations de retard et d'AVOIR débouté l'URSSAF de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « La lettre d'observations en date du 17 novembre 2016 liste cinq chefs de redressement pour un montant total de 110 570 euros ; à la suite des observations de la société Blanc transports véhicules portant uniquement sur les redressements numéros 4 (frais de déplacement) et 5 (réduction générale des cotisations), l'inspecteur du recouvrement a répondu le 23 décembre 2016, ramener le chef de redressement n° 4 à 1 630 euros (au lieu de 1 639 euros), maintenir le chef de redressement n° 5 et ramener en conséquence le redressement total à 110 461 euros ; la mise en demeure comme la contrainte ont été établies pour ce montant de cotisations, outre les majorations de retard ; en cause d'appel, la société Blanc transports véhicules indique s'en remettre sur le chef de redressement des frais de déplacement, qui n'est donc pas contesté pour son montant de cotisations ramené à 1 630 euros ; ainsi, le seul chef de redressement litigieux est le chef de redressement n° 5 : 'réductions générales des cotisations' (réductions des cotisations dites Fillon), d'un montant total de 102 318 euros portant sur les années 2013 (42 777 euros), 2014 (39 904 euros) et 2015 (19 637 euros) ; il résulte de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, dans ses versions applicables, que les cotisations à la charge de l'employeur au titre des assurances sociales et des allocations familiales qui sont assises sur les gains et rémunérations inférieurs au salaire minimum de croissance majoré de 60 % font l'objet d'une réduction dégressive ; le montant de la réduction est calculé par année civile, pour chaque salarié, selon les modalités fixées par décret ; il est égal au produit de la rémunération annuelle, telle que définie par l'article L. 242-1 par un coefficient déterminé par application d'une formule fixée par décret et qui est fonction du rapport entre la rémunération annuelle du salarié telle que définie à l'article L. 242-1, (hors rémunération des temps de pause, d'habillage, et de déshabillage versés en application d'un accord d'entreprise ou collectif, étant précisé que cette exclusion a été supprimée pour l'année 2015) et le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu ; lorsque le salarié est soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré, en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1re janvier 2010, la majoration salariale correspondante est également déduite de la rémunération annuelle du salarié dans la limite d'un taux de 25 % (étant précisé qu'en ce qui concerne l'année 2015, cette condition relative aux heures d'équivalence a été supprimée) ; pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat (avec la précision en 2015 'au titre de la période pendant laquelle ils sont présents dans l'entreprise') ; lorsque les salariés sont soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré, le rapport ou le coefficient est corrigé dans les conditions fixées par l'article D. 241-10 du code de la sécurité sociale ; à partir du 1er janvier 2015, la formule arithmétique du coefficient fixé par cet article D. 241-10 a été modifiée, et en ce qui concerne les entreprises de transport routier de marchandises, lorsque la rémunération versée, hors heures supplémentaires, n'est pas établie sur la base de la durée équivalente à la durée légale, le rapport applicable est ajusté dans la même proportion ; il résulte des dispositions de l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale applicables, qu'en cas de suspension du contrat de travail avec paiement intégral de la rémunération brute du salarié, la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant au mois où le contrat est suspendu est corrigée à proportion de la durée de travail ou de la durée équivalente, hors heures supplémentaires et complémentaires, inscrite à leur contrat de travail au titre de la période où ils sont présents dans l'entreprise et rapportée à celle correspondant à la durée légale du travail ; pour les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu sans paiement de la rémunération ou avec paiement partiel de celle-ci, la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant au mois où a eu lieu l'absence est corrigée selon le rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié avait été présent tout le mois, hors éléments de rémunération qui ne sont pas affectés par l'absence ; la formule arithmétique applicable pour le calcul du coefficient varie selon l'effectif (plus ou moins salariés) ; la société Blanc transports véhicules soutient employer des chauffeurs routiers à la fois en courte et longue distance, avec un horaire contractuel de 169 heures mensuelles dont 17 heures d'équivalence, et que le conducteur en longue distance est celui dont le service lui fait obligation de prendre au moins six repos journaliers par mois hors de son domicile, alors que le chef de redressement ne tient nullement compte de cette situation, l'inspecteur du recouvrement n'ayant pas procédé à l'examen des contrats de travail qui lui aurait permis de le constater ; elle affirme employer régulièrement des chauffeurs 'longue distance' dont la durée de travail est de 186 heures, soit 408 heures d'équivalences annuelles et conteste en outre l'exclusion faite par l'inspecteur du recouvrement lors de la prise en compte du SMIC brut de référence de primes affectées par l'absence du salarié (prime de résultat, indemnités de frais de déplacement, majorations pour heures de travail de nuit, solde d'heures de modulation, heures complémentaires, majorations heures supplémentaires) ; l'URSSAF réplique que l'inspecteur du recouvrement a constaté un calcul erroné de la proratisation en raison de la comptabilisation d'un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de heures pour le calcul de la réduction correspondant à une durée contractuelle mensuelle de 186 heures, alors que les chauffeurs sont employés pour une durée mensuelle de 169 heures, de sorte que le nombre d'heures d'équivalence aurait dû être de 204 heures, la société ne rapportant pas la preuve contraire à ces constatations ; elle soutient que la société Blanc transports véhicules a en outre intégré dans la valeur du SMIC, lors du calcul de la réduction, des primes affectées par l'absence du salarié ainsi que des primes octroyées indépendamment du temps de travail, qui ne sont pas affectées par l'absence (prime de résultat) ou liées au lieu de travail (indemnité de repas et de découcher), ou liées aux horaires particulier de travail (majorations pour heures de nuit), ou enfin le solde des heures de modulations, heures complémentaires, heures supplémentaires qui doivent être considérés comme des éléments non affectés par l'absence lors des mois concernés par celle-ci ; en l'espèce, l'inspecteur du recouvrement après avoir rappelé, de manière détaillée, les dispositions légales et réglementaires applicables aux réductions générales des cotisations, ainsi que les coefficients et rapports applicables en distinguant les années 2013 et 2014 de l'année 2015, précise : * que la société contrôlée emploie des conducteurs routiers qui entrent dans la catégorie 'courte distance' avec un horaire contractuel de 169 heures par mois dont 17 heures d'équivalence, qu'elle est affiliée à une caisse de congés payés pour l'ensemble de ses salariés et que pour le calcul de la variable SMIC de la réduction générale des cotisations, elle a utilisé la méthode de proratisation par rémunération, * avoir procédé à l'examen des bulletins de paie, des états récapitulatifs fournis par l'entreprise, et constaté deux sortes d'anomalies : - 'pour certains chauffeurs la comptabilisation d'un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 408 heures, soit une durée contractuelle de 186 heures, pour le calcul de la fraction neutralisée de la rémunération en 2013 et 2014, alors que la société emploie uniquement des conducteurs pour une durée de travail mensuelle de 169 heures soit un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 204 heures', - 'pour les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu avec maintien partiel du salaire ou sans maintien de salaire, la fraction du montant du SMIC a été corrigée par le rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié avait été présent tout le mois ; la société a considéré tous les éléments de rémunération comme des éléments affectés par l'absence' ; or ce faisant, l'inspecteur du recouvrement en se référant uniquement à la durée légale du travail, n'a pas tenu compte du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires effectivement réalisées par les salariés pour lesquels il dit avoir relevé des anomalies de calcul ; il n'a pas davantage constaté que les salariés concernés auraient été soumis à un régime d'heures d'équivalence payées à un taux majoré, dont l'existence ne pouvait résulter effectivement que de leurs contrats de travail dont il n'a pas sollicité la communication ou de dispositions conventionnelles ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er janvier 2010 qu'il ne vise pas, et il ne résulte pas davantage de la lettre d'observations qu'il aurait constaté que les bulletins de paye de 'certains' chauffeurs feraient état d'heures d'équivalence payées à un taux majoré ; l'examen des contrats de travail de messieurs M... et K..., qui sont les seuls versés aux débats, et qui sont anciens (1994 pour M. M... et 2006 pour M. K...) auquel la cour a procédé, confirme un horaire contractuel de travail mensuel est de 169 heures, avec pour M. M... la précision qu'il exercera les fonctions de chauffeur PL 'sur toutes distances ou destinations nécessitées par le service', élément qui établit que ce salarié était contractuellement tenu, si son employeur le lui demandait, d'effectuer des transports sur de longues distances ; la lettre d'observations ne mentionne pas les noms des chauffeurs routiers pour lesquels le redressement est effectué, alors que le nom de M. M... figure sur l'un des tableaux 'réduction générale des cotisations transport jusqu'à 2014" versé par l'URSSAF aux débats ; dans sa réponse aux observations de la société Blanc transports véhicules, l'inspecteur du recouvrement indique avoir vérifié 'aléatoirement des contrats de travail de chauffeurs' qui mentionnaient une durée de 169 heures, et que celui de M. Y... prévoit 'en son article IV une rémunération pour un travail effectif de 39 heures par semaine, soit 169 heures par mois', tout en s'étonnant que la société ait attendu la période contradictoire pour l'informer de l'emploi de chauffeurs longue distance ; compte tenu de l'absence de constatations de l'inspecteur du recouvrement au regard des critères légaux et réglementaires applicables sur la période concernée par le redressement, qui seules font foi jusqu'à la preuve contraire, il ne peut être considéré que motif du redressement est justifié pour ce qu'il a estimé constituer la première anomalie ; concernant les salariés qui ne sont pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail est suspendu sans paiement de la rémunération ou avec paiement partiel de celle-ci, la lettre d'observations mentionne que pendant le contrôle, chaque rubrique de paie a été explicitée par l'employeur pour comprendre les modalités de versements et calculs de chaque élément ; l'inspecteur du recouvrement indique avoir, pour les années 2013 et 2014, chiffré la régularisation à partir des calculs réalisés par le cabinet d'optimisation sociale mandaté par la société et que pour 2015, ces états détaillés n'ayant pas été communiqués, le chiffrage a été effectué à partir des bulletins de salaire ; pour le calcul du SMIC théorique les dispositions de l'article D. 241-7 faisant référence au mois concerné par la suspension du contrat de travail, la correction de la fraction du montant du salaire minimum de croissance correspondant à ce mois ne peut être corrigée que par les primes dont le montant a été affecté ce mois-là par l'absence du salarié ; si les parties s'accordent sur le fait que la prime de résultat versée semestriellement est fonction du temps de présence avec une franchise de 15 jours d'absence, pour autant il ne résulte pas de la lettre d'observations que l'inspecteur du recouvrement a constaté que, pour les salariés dont les cotisations patronales ont été concernées par le redressement, les bulletins de paye faisaient ressortir que le montant de cette prime a été affecté par son absence ; les indemnités forfaitaires liées aux frais professionnels, les majorations dues pour travail en heures de nuit, le solde des heures de modulation, et les heures complémentaires et heures complémentaires conducteur, sont intrinsèquement liées au travail du salarié. Elles constituent donc bien un élément de la rémunération affecté par l'absence du salarié ; c'est donc à tort que l'inspecteur du recouvrement a considéré que ces primes constituaient des éléments non affectés par l'absence du salarié ; par conséquent, il n'est établi : - ni l'anomalie alléguée liée à la comptabilisation pour les 'certains' chauffeurs d'un nombre théorique d'heures d'équivalence erroné, alors que la société contrôlée justifie employer des chauffeurs en longue distance, - ni l'anomalie de calcul du SMIC théorique liée à des absences ; par conséquent l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'est pas justifiée et il doit être annulé ; la contrainte délivrée est donc partiellement justifiée en ce qui concerne : * le chef de redressement n° 1 'forfait social' d'un montant total de 1 894 euros, * le chef de redressement n° 2 'primes de médaille du travail' d'un montant total de 2 708 euros, * le chef de redressement n° 3 'titres de restaurant' d'un montant total de 2 011 euros, * le chef de redressement n° 4 'frais de déplacement' pour un montant total ramené à 1 630 euros, soit pour un montant total de 8 243 euros en cotisations ; la condamnation de la société Blanc transports véhicules doit en conséquence être prononcée pour un montant 8 243 euros en cotisations » ;

1. ALORS QUE pour les années 2013 et 2014, le montant de la rémunération annuelle à prendre en considération pour le calcul du coefficient de réduction des cotisations est calculé sur la base de la durée effective du travail, en déduisant lorsque le salarié est soumis à un régime d'heures d'équivalences payées à un taux majoré en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 1er janvier 2010, la majoration salariale correspondant aux heures effectuées par équivalence dans la limite d'un taux de 25 % ; qu'en l'espèce, lors de son contrôle, l'inspecteur du recouvrement a constaté que, pour certains chauffeurs, en 2013 et 2014, la société cotisante avait comptabilisé un nombre théorique d'heures d'équivalence annuel de 408 heures correspondant à une durée mensuelle de travail de 186 heures pour le calcul de la fraction neutralisée de la rémunération ; que dans sa réponse faite au cotisant le 23 décembre 2016, ce dernier précisait qu'au terme de ses constatations le salaire était calculé pour tous les chauffeurs sur une durée de 169 heures et aucune heure d'équivalence effectuée au-delà de 169 heures n'apparaissait sur les bulletins de salaire ; qu'en se fondant, pour juger que le redressement n'était pas justifié sur ce point, sur la circonstance que le contrat de travail d'un salarié mentionnait la possibilité d'effectuer des transports longue distance et donc d'être soumis à une durée du travail dérogatoire de heures quand seul le nombre d'heures effectuées par équivalence pouvait être neutralisé, la cour d'appel a violé les articles L. 461-13 et D. 461-10 du code de la sécurité sociale dans leurs versions applicables au litige ;

2. ALORS QUE c'est au débiteur prétendant bénéficier d'une réduction des cotisations sociales dont il est redevable qu'il appartient de démontrer qu'il remplit les conditions de cette réduction ; que s'agissant des réductions Fillon sur les bas salaires, c'est à l'employeur de démontrer qu'il a correctement tenu compte des heures d'équivalence payées aux taux majoré et que ses chauffeurs sont bien des chauffeurs longue distance pouvant bénéficier du mode de calcul spécifique de leur temps de travail ; qu'en reprochant à l'inspecteur du recouvrement de ne pas désigner expressément les contrats de travail ayant donné lieu à des heures d'équivalence payées au taux majoré et de ne pas avoir précisé le nom des chauffeurs routiers éventuellement soumis aux obligations de transport longue distance, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 devenu 1353 du code civil, L. 461-13 et D. 461-10 du code de la sécurité sociale dans leur version applicable au litige ;

3. ALORS QUE pour les salariés absents ou dont le contrat de travail est suspendu avec maintien partiel ou sans maintien de salaire, la fraction du SMIC retenue pour les mois au cours desquels a lieu l'absence est corrigée du rapport entre la rémunération versée et celle qui aurait été versée si le salarié n'avait pas été absent, hors éléments qui ne sont pas affectés par l'absence ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions l'URSSAF soutenait que, pour cette catégorie de salariés, la société cotisante avait, à tort, considéré que la prime de résultat constituait un élément de rémunération affecté par l'absence et intégré le montant de cette prime dans le calcul du SMIC corrigé (conclusions p. 4) ; que la cour d'appel a constaté qu'il ne ressortait pas des constatations de l'inspecteur du recouvrement que pour les salariés concernés par le redressement le montant de la prime de résultat avait été affectée par l'absence des salariés ; qu'en jugeant cependant que l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'était pas justifiée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale ;

4. ALORS QUE les juges doivent répondre aux moyens des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions développées oralement à la barre, l'URSSAF expliquait que, lors du contrôle, l'inspecteur du recouvrement avait constaté que pour le calcul du salaire minimum de croissance des salariés qui n'étaient pas présents toute l'année ou dont le contrat de travail avait été suspendu avec maintien partiel ou sans maintien de salaire, la société cotisante avait, à tort, considéré tous les éléments de rémunération comme des éléments affectés par l'absence puisque les primes de « qualité sécurité » (3165), « spécifique d'objectif » (3170), « polyvalence » (3205), « spécifique conducteur » (3460) et « qualité sécurité » (3570) étaient octroyées indépendamment du temps de travail (conclusions p. 5) ; qu'en jugeant que l'intégralité du chef de redressement n° 5 portant sur la réduction générale des cotisations n'était pas justifiée sans répondre au moyen de l'URSSAF tiré des conditions d'attribution des primes litigieuses, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5. ALORS QUE constitue un élément affecté par l'absence du salarié l'élément de rémunération dont le versement dépend exclusivement de sa présence ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions l'URSSAF Midi Pyrénées, soutenait que les indemnités forfaitaires liées aux frais professionnels, les majorations dues pour le travail aux heures de nuits, les heures complémentaires et heures complémentaires conducteur ne pouvaient être affectées par l'absence du salarié puisque leur versement ne dépendait pas uniquement de la présence du salarié mais de l'existence de sujétions particulières subies, par le salarié, du fait de l'exercice de son activité ; qu'en jugeant, pour annuler le chef de redressement n° 5, que dès lors qu'elles étaient intrinsèquement liées au travail du salarié, les sommes litigieuses était affectées par l'absence des salariés, la cour d'appel a violé l'article D. 241-7 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige ; Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Blanc transports véhicules (BTV)

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la SAS Blanc transports véhicules de sa demande d'annulation de la mise en demeure délivrée par l'urssaf Midi Pyrénées le 27 décembre 2016 ;

AUX MOTIFS QUE « Par applications combinées des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de la sécurité sociale, dans leurs versions applicables au présent litige, la mise en demeure doit permettre à la personne à laquelle elle est notifiée de régulariser impérativement la situation en procédant au paiement des sommes mentionnées, et doit à peine de nullité être motivée, préciser la cause, la nature et le montant des cotisations réclamées, ainsi que la période à laquelle elle se rapporte.
Il résulte de l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable (issue du décret n° 2016-1567 du 21 novembre 2016) que, sauf dans le cas de recherche d'infractions pour travail dissimulé, tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé de l'envoi par l'organisme chargé du recouvrement des cotisations d'un avis adressé à l'employeur, l'informant du droit à se faire assister du conseil de son choix pendant ce contrôle. Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l'avis de contrôle doit être adressé à l'attention de son représentant légal et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou le cas échéant de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.
Ainsi cet avis, comme la lettre d'observations, la mise en demeure et la contrainte subséquentes doivent être adressés exclusivement à la personne qui est tenue, en sa qualité d'employeur, aux obligations afférentes au paiement des cotisations et contributions qui font l'objet du contrôle.

QUE La société Blanc transports véhicules soutient que la mise en demeure est irrégulière pour avoir été adressée à l'adresse du siège du groupe Charles André transports à Montélimar (26), alors que le siège de sa société est à Castelnau d'Estretefonds (31), adresse à laquelle avaient été précédemment adressés l'avis de contrôle, la lettre d'observations ainsi que la réponse de l'inspecteur du recouvrement à ses observations, et que cette irrégularité affecte la validité de la mise en demeure, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.
L'URSSAF lui oppose que si l'adresse postale mentionnée sur la mise en demeure est à Montélimar, celle-ci a bien été réceptionnée par la société Blanc transports véhicules qui a d'ailleurs saisi la commission de recours amiable de sa contestation. Elle soutient que l'intimée n'ayant pas été privée de voie de recours, il n'y a pas eu atteinte au principe du contradictoire et partant aucun grief.

QU'en l'espèce, alors que la société contrôlée, la société Blanc transports véhicules a son siège social à Castelnau d'Estretefonds (31620) où l'URSSAF Midi-Pyrénées lui a adressé par lettre recommandée avec avis de réception en date du 15 avril 2016 un avis de contrôle, puis une lettre d'observations en date du 17 novembre 2016, à laquelle la société Blanc transports véhicules a répondu par lettre recommandée avec avis de réception en date du 20 décembre 2016, dont l'entête rappelle l'adresse de son siège social à Castelnau d'Estretefonds, et alors que l'inspecteur du recouvrement a également répondu par lettre recommandée avec avis de réception en date du 23 décembre 2016, à cette même adresse, force est de constater que la mise en demeure qui a suivi, en date du 27 décembre 2016, a été adressée à la société Blanc transports véhicules à « GCATRANS, ZI de Gourmier, BP 109 26216 Montélimar Cedex ».
Il n'est pas contesté que cette adresse est celle du groupe Charles André transports dont fait partie la société Blanc transports véhicules, qui est une entité juridique et une personne morale distincte, et l'URSSAF ne justifie nullement d'une désignation, par la société contrôlée, du directeur des ressources humaines du groupe auquel elle appartient pour le suivi de la procédure de contrôle.
La cour constate d'ailleurs que la contrainte en date du 3 février 2017, bien que mentionnant la même adresse (soit celle du siège social du groupe à Montélimar) a été signifiée par acte d'huissier en date du 8 février 2017 à l'adresse du siège social de la société Blanc transports véhicules à Castelnau d'Estretefonds.

QUE si la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir, pour autant il s'agit d'une irrégularité de forme, qui n'est susceptible d'affecter la validité de la mise en demeure qu'en cas de grief.
Or effectivement, aucun grief n'est allégué par l'intimée, et il est exact qu'elle a pu exercer ses droits de la défense en saisissant la commission de recours amiable de sa contestation.
Le jugement entrepris qui a jugé, en raison de l'irrégularité affectant la notification de la mise en demeure, irrégulière l'ensemble de la procédure de recouvrement et a annulé la mise en demeure ainsi que la contrainte subséquente, doit donc être intégralement infirmé. »

ALORS QUE toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée à peine de nullité de l'envoi d'une mise en demeure adressée au redevable ; que cette mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et qu' à cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée à l'employeur débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice ; que la mise en demeure doit être adressée à l'attention du représentant légal de la personne morale débitrice et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou, le cas échéant, à celle de son établissement principal ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que « la notification de la mise en demeure qui n'a pas été faite régulièrement au siège social de la société contrôlée mais en réalité au siège social du groupe auquel elle appartient est effectivement irrégulière, puisque nécessairement adressée à un tiers qui n'avait pas qualité pour la recevoir » ; qu'en déboutant cependant la SAS Transports Blanc véhicules de sa demande de nullité de cette mise en demeure, motif pris que l'irrégularité purement formelle ainsi caractérisée ne lui aurait causé aucun préjudice la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-19167
Date de la décision : 12/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Recouvrement - Mise en demeure - Notification - Notification au débiteur des cotisations - Nécessité

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Recouvrement - Mise en demeure - Notification - Notification au débiteur des cotisations - Défaut - Nullité - Preuve d'un préjudice - Nécessité (non)

Aux termes de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action aux fins de recouvrement de cotisations sociales doit être précédée, à peine de nullité, d'une mise en demeure adressée au redevable. Celle-ci, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elle soit, à peine de nullité, notifiée au débiteur des cotisations réclamées, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice


Références :

Article L. 244-2 du code de la sécurité sociale.

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 10 mai 2019

A rapprocher :Soc., 24 novembre 1994, pourvoi n° 92-20508, Bull. 1994, V, n° 313 (cassation) ;Soc., 25 mars 2003, pourvoi n° 00-22002, Bull. 2003, V, n° 110 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 12 nov. 2020, pourvoi n°19-19167, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.19167
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award