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05/11/2020 | FRANCE | N°20-16879

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 05 novembre 2020, 20-16879


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Déchéance et irrecevabilité partielles, Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 796 FS-D

Pourvoi n° K 20-16.879

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

1°/ M. K...

W...,

2°/ Mme Y... D..., épouse W...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° K 20-16.879 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2020 par l...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Déchéance et irrecevabilité partielles, Cassation partielle

Mme BATUT, président

Arrêt n° 796 FS-D

Pourvoi n° K 20-16.879

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

1°/ M. K... W...,

2°/ Mme Y... D..., épouse W...,

domiciliés tous deux [...],

ont formé le pourvoi n° K 20-16.879 contre l'arrêt rendu le 12 mai 2020 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige les opposant :

1°/ à Mme N... O..., domiciliée [...] , prise en ses qualités d'administrateur provisoire de la succession de B... H... et de séquestre de ladite succession au titre du prix de vente des bijoux,

2°/ à la fondation [...], dont le siège est [...] ,

3°/ à Mme M... R..., domiciliée [...] ,

4°/ à M. Q... F... JX... , domicilié [...] ,

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Vigneau, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. et Mme W..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la fondation [...] , de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de Mme O..., ès qualités, et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 novembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Vigneau, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, M. Hascher, Mmes Bozzi, Poinseaux, Guihal, conseillers, Mmes Mouty-Tardieu, Le Cotty, Gargoullaud, Azar, M. Buat-Ménard, Mme Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, Mme Caron-Déglise, avocat général, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Déchéance partielle du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre Mme O..., prise en sa qualité de séquestre de la succession de B... H... au titre du prix de vente des bijoux, soulevée en défense

Vu l'article 978 du code de procédure civile :

1. Le pourvoi est dirigé contre Mme O..., prise en ses qualités d'administrateur provisoire de la succession de B... H... et de séquestre de ladite succession au titre du prix de vente des bijoux, la fondation [...] , Mme R... et M. F... JX... .

2. Le mémoire ampliatif remis au greffe de la Cour de cassation est seulement dirigé contre Mme O..., prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession de B... H..., la fondation [...] , Mme R... et M. F... JX... .

3. La déchéance du pourvoi est dès lors encourue en ce qu'il est formé contre Mme O..., prise en sa qualité de séquestre de la succession de B... H... au titre du prix de vente des bijoux.

Recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre Mme O..., prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession de B... H..., contestée par la défense

Vu l'article 32 du code de procédure civile :

4. Il résulte des productions qu'une ordonnance du 19 juillet 2018 a mis fin à la mission de Mme O... en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession.

5. Le pourvoi en cassation, en tant qu'il est dirigé contre Mme O... en cette qualité, est par conséquent irrecevable pour être formé contre une personne dépourvue du droit d'agir.

Faits et procédure

6. Selon l'arrêt attaqué ( Versailles, 12 mai 2020), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 6 juin 2019, pourvoi n° 18-15.713), B... H... est décédée le 7 avril 1999, en l'état d'un testament du 15 octobre 1990 instituant en qualité de légataire universel la fondation [...] (la fondation) et de divers codicilles, dont deux des 20 et 22 février 1994 désignant M. W... en qualité d'exécuteur testamentaire, deux du 12 avril 1994 léguant à ce dernier le contenu de son appartement et à son épouse des bijoux, et un du 3 décembre 1995 réitérant ce dernier legs.

7. Mme R... et M. F... JX... , petits-neveux de B... H..., ont assigné la fondation pour contester ses droits dans la succession. M. et Mme W... sont intervenus volontairement à l'instance.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches, ci-après annexé

8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur la deuxième branche qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation et la quatrième qui est irrecevable.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. M. et Mme W... font grief à l'arrêt de dire nuls les codicilles des 20 et 22 février 1994 et 3 décembre 1995 et de rejeter leurs demandes tendant à voir juger que M. W... est exécuteur testamentaire et que Mme W... bénéficie d'un legs particulier de bijoux, alors « que l'incapacité de recevoir qui frappe le médecin ayant traité le de cujus pendant la maladie dont celui-ci est mort ne s'applique pas à l'hypothèse dans laquelle l'assistance a été prodiguée, hors tout cadre contractuel, en raison des liens affectifs unissant le médecin et le de cujus ; qu'en affirmant qu'il importait peu que les ordonnances établies par M. W... au profit de B... H... aient été établies en raison des liens d'amitié ayant existé entre ces derniers, quand une telle circonstance était pourtant de nature à exclure l'incapacité de recevoir de M. W..., la cour d'appel a violé l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

10. Après avoir relevé qu'entre le 8 décembre 1993 et le 7 avril 1999, date du décès de B... H..., M. W..., qui était le seul médecin qu'elle voyait régulièrement et avait pris en charge sa santé dans tous ses aspects, avait établi quarante-deux prescriptions médicales afin de ralentir la lente dégradation de son état de santé, la dernière datant du jour de son décès, l'arrêt retient souverainement que celui-ci lui avait prodigué des soins pendant la maladie dont elle est décédée.

11. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que M. W... était frappé d'une incapacité de recevoir au sens de l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 5 mars 2007,de sorte qu'il ne pouvait profiter des dispositions testamentaires faites en sa faveur pendant le cours de cette maladie, et que l'incapacité de recevoir s'étendait à son épouse, en sa qualité de personne interposée au sens de l'article 911 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006, peu important que les soins prodigués à B... H... l'aient été à titre gratuit en raison des liens d'amitié que M. W... lui portait.

12. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

13. M. et Mme W... font le même grief à l'arrêt, alors « que l'incapacité de recevoir qui frappe le médecin ayant traité le de cujus pendant la maladie dont celui-ci est mort ne concerne que les libéralités consenties par le de cujus au profit de son médecin ; qu'en décidant d'annuler, à raison de l'incapacité de recevoir dont serait frappé M. W..., les codicilles des 20 et 22 février 1994 par lesquels B... H... avait désigné M. W... comme exécuteur testamentaire, sans pour autant lui consentir aucune libéralité, la cour d'appel a violé l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable à la cause. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2007-308 du 5 mars 2007 :

14. Aux termes de ce texte, les docteurs en médecine ou en chirurgie, les officiers de santé et les pharmaciens qui auront traité une personne pendant la maladie dont elle meurt, ne pourront profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de cette maladie.

15. Après avoir énoncé que M. W... avait, entre le 8 décembre 1993 et le 7 avril 1999, prodigué à B... H... des soins pendant la maladie dont elle est décédée, l'arrêt retient que les codicilles des 20 et 22 février 1994 doivent être déclarés nuls et que celui-ci ne peut revendiquer la qualité d'exécuteur testamentaire.

16. En statuant ainsi, alors que ces deux codicilles, qui se bornaient à désigner M. W... en qualité d'exécuteur testamentaire, ne contenaient aucune libéralité à son profit, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme O... prise en sa qualité de séquestre de la succession de B... H... au titre du prix de vente des bijoux ;

DECLARE irrecevable le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme O... prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la succession ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il annule les codicilles des 20 et 22 février 1994 et rejette les demandes de M. et Mm W... tendant à ce qu'il soit jugé que M. W... est exécuteur testamentaire de B... H... ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ;

Condamne la fondation [...] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. et Mme W....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 20 octobre 2016 par le Tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a dit nuls les codicilles des 20 et 22 février 1994 et 3 décembre 1995 et en ce qu'il a débouté les époux W... de leurs demandes tendant à voir juger que Monsieur W... est exécuteur testamentaire et que Mme W... bénéficie d'un legs particulier de bijoux, ainsi que d'avoir débouté les époux W... de toutes leurs autres demandes ;

AUX MOTIFS QUE « selon l'article 909 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable au litige, les docteurs en médecine ou en chirurgie, les officiers de santé et les pharmaciens qui auront traité une personne pendant la maladie dont elle meurt, ne pourront profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu'elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de cette maladie ; que selon l'article 911 ancien du même code, toute disposition au profit d'un incapable sera nulle (
) soit qu'on la fasse sur le nom des personnes interposées ; que sont présumées interposées les père et mère, les enfants et descendants, ainsi que l'époux de la personne incapable ; que les incapacités énoncées reposent sur une présomption irréfragable de captation ; que l'application du premier des textes ci-dessus visés est subordonné à deux conditions, que le gratifié ait la qualité de médecin et traite le disposant et que la libéralité ait été consentie au cours du traitement dispensé par le médecin pendant la dernière maladie du disposant ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces produites par la fondation [...] que M. W... a établi pas moins de 42 ordonnances au profit de B... H... entre le 8 décembre 1993 et le 7 avril 1999, date de son décès ; que les ordonnances à en-tête de l'assistance publique des hôpitaux de Paris sont toutes signées du Dr G. W... ; qu'il importe peu qu'elles aient été livrées à titre gratuit, en raison des liens d'amitié alléguées ; que la liste établie par M. W... relative aux autres médecins que B... H... consultait selon lui, ne repose que sur ses affirmations ; qu'elle énonce pour l'essentiel des noms de médecins spécialistes et un seul médecin généraliste, le Dr V..., dont il n'est pas établi qu'il a suivi B... H... après 1993 ; qu'il est établi par un compte-rendu effectué par le Dr J... médecin chef de l'Institut universitaire de gériatrie de Genève que B... H... souffrait depuis 1988 d'un état dépressif réactionnel puis a présenté une pathologie psychiatrique prenant la forme d'une psychose hallucinatoire à tendance paranoïaque ; que les dernières prescriptions d'un neurologue, celle du Dr S..., remontent aux 2 et 6 février 1992 ; que B... H... avait fait un séjour dans la clinique du Dr OC... en Espagne courant mai 1992, dont G... H... a rendu compte à M. W... par lettre du 30 mai 1992 ; que par un autre courrier, daté du 19 juin 1992, G... H... rappelant ses problèmes de santé de l'hiver passé, s'en remettait à M. W... s'il advenait qu'il ne soit plus lui-même apte à prendre une décision concernant sa santé, le remerciant de bien vouloir accepter cette mission et ajoutait que si l'état mental de "U...", prénom d'usage de B..., devait empirer, et qu'il se trouve dans la situation évoquée le concernant, il lui demandait de prendre, "en accord avec ses exécuteurs testamentaires", toute mesure propre à lui assurer une fin de vie convenable ; qu'il est rappelé que [...].. H... est décédé le [...] et que B... H... a ensuite transféré son domicile à Paris ; qu'il s'avère au vu du nombre des ordonnances établies par M. W..., peu important qu'elles l'aient été à titre gratuit et faute pour lui d'établir qu'un autre médecin intervenait pendant la période de prescription, qu'il a été le seul médecin traitant de B... H... à partir de 1993 jusqu'à son décès ; que cette déduction se trouve corroborée par les attestations des employées de maison de B... H... mais également par les procès-verbaux d'audition de M. C..., avocat, et de Mme X..., qui a été dame de compagnie de B... H..., lesquels entretenaient de bonnes relations avec M. W... et ont fait des témoignages en faveur de ce dernier, en ce qui concerne l'information relative à l'abus de faiblesse ; que le premier a bien confirmé que "M. W... étant médecin, quand il fallait s'occuper de sa (celle de B... H...) santé, il s'en occupait" ; que Mme X..., pour sa part, a précisé que "le professeur W... a très bien suivi B... H... en tant que médecin et ami. Il venait au moins une fois par semaine lui rendre visite [
]. Lorsqu'il s'absentait pour des raisons professionnelles ou autres, le professeur W... laissait les coordonnées de médecins à contacter en cas de nécessité urgente" ; qu'enfin, le docteur J..., médecin-chef d'un hôpital de gériatrie à Genève a adressé courant septembre 1993 à M. W..., qu'il remerciait de lui avoir adressé sa patiente, le rapport de son bilan, lui indiquant que l'évaluation psychiatrique de B... H..., confirmait son propre diagnostic. Il résulte du reste du témoignage de Mme L... I..., employée au service de B... H... depuis la fin de l'année 1996, que M. W... est passé le 7 avril 1999, voir B... H... qui était souffrante et que celle-ci est décédée dans l'après-midi à l'arrivée du médecin du E... ; que la dernière ordonnance établie par M. W... est celle datant du jour du décès de B... H..., soit du 7 avril 1999 ; que si comme le fait valoir M. W..., B... H... alors âgée de 95 ans, est décédée de mort naturelle, par opposition à une mort d'origine suspecte, il n'en est pas moins vrai qu'elle est décédée de la lente dégradation de son état, que les prescriptions régulières de M. W... étaient destinées à ralentir et que ce médecin avait pris en charge B... H... tant concernant son état psychiatrique et neurologique que sa santé dans tous ses aspects, ainsi que cela résulte des médicaments prescrits ; qu'il apparaît ainsi incontestable que B... H... a été soignée au cours de sa dernière maladie par M. W..., qui était depuis 1993 le seul praticien qu'elle voyait régulièrement et en qui elle avait placé sa confiance alors que c'est au cours de cette période qu'elle a établi les codicilles des 20 et 22 février 1994 et du 3 décembre 1995 ; que M. W... était en conséquence frappé de l'incapacité de recevoir au sens de l'article 909 du code civil, soit de profiter d'une quelconque disposition testamentaire, laquelle s'étendait à son épouse Mme Y... W... en sa qualité de personne interposée au sens de l'article 911 du code civil précédemment énoncé ; qu'en conséquence les codicilles litigieux doivent être déclarés nuls ; que le jugement entrepris, sera, par ces autres motifs, confirmé sur ce point » ;

1°/ ALORS QUE l'incapacité de recevoir qui frappe le médecin ayant traité le de cujus pendant la maladie dont celui-ci est mort ne s'applique pas à l'hypothèse dans laquelle l'assistance a été prodiguée, hors tout cadre contractuel, en raison des liens affectifs unissant le médecin et le de cujus ; qu'en affirmant qu'il importait peu que les ordonnances établies par M. W... au profit de B... H... aient été établies en raison des liens d'amitié ayant existés entre ces derniers (cf. arrêt p. 15, § 5), quand une telle circonstance était pourtant de nature à exclure l'incapacité de recevoir de M. W..., la cour d'appel a violé l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable à la cause ;

2°/ ALORS QUE l'incapacité de recevoir ne frappe le médecin ayant traité le de cujus que si ce dernier est décédé de la maladie traitée par le médecin ; qu'en retenant que M. W... était frappé de l'incapacité de bénéficier des dispositions testamentaires de B... H..., après avoir pourtant constaté que cette dernière était « décédée de mort naturelle » (cf. arrêt p. 16, § 3), la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable à la cause ;

3°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE l'incapacité de recevoir qui frappe le médecin ayant traité le de cujus pendant la maladie dont celui-ci est mort ne concerne que les libéralités consenties par le de cujus au profit de son médecin ; qu'en décidant d'annuler, à raison de l'incapacité de recevoir dont serait frappé M. W..., les codicilles des 20 et 22 février 1994 par lesquels B... H... avait désigné M. W... comme exécuteur testamentaire, sans pour autant lui consentir aucune libéralité, la cour d'appel a violé l'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle de la loi du 23 juin 2006, applicable à la cause ;

4°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, c'est-à-dire dans des conditions qui ne la désavantagent pas d'une manière appréciable par rapport à la partie adverse ; que toute ingérence à ce droit doit être justifiée, légitime et proportionnée à l'objectif poursuivi ; qu'en s'abstenant de rechercher si la présomption légale de personne interposée, instituée par l'article 911 du code civil en sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006, applicable à l'époux de la personne frappée d'un incapacité de recevoir au sens de l'article 909 du code civil ne portait pas, en raison de son caractère irréfragable (d'ailleurs supprimée par cette loi), une atteinte disproportionnée au droit à un procès équitable de Mme W... dès lors qu'elle la plaçait dans l'impossibilité absolue de démontrer qu'elle avait été personnellement bénéficiaire de la donation consentie par B... H... en raison des liens d'affection qui les unissaient depuis de nombreuses années, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6, § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 20-16879
Date de la décision : 05/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

TESTAMENT - Incapacité de recevoir - Domaine d'application - Médecin ayant traité une personne au cours de sa dernière maladie - Qualité d'exécuteur testamentaire - Compatibilité

L'article 909 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007, ne fait pas obstacle ce que le médecin qui aura traité une personne pendant la maladie dont elle meurt soit désigné en qualité d'exécuteur testamentaire


Références :

article 909 du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 12 mai 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 05 nov. 2020, pourvoi n°20-16879, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Alain Bénabent , SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:20.16879
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