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05/11/2020 | FRANCE | N°19-20237

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 05 novembre 2020, 19-20237


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 774 FS-P+B+I

Pourvoi n° Q 19-20.237

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

La société Aviva assurances, société anonyme, dont le siège

est 13 rue du Moulin Bailly, 92271 Bois-Colombes, a formé le pourvoi n° Q 19-20.237 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel de Col...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 774 FS-P+B+I

Pourvoi n° Q 19-20.237

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

La société Aviva assurances, société anonyme, dont le siège est 13 rue du Moulin Bailly, 92271 Bois-Colombes, a formé le pourvoi n° Q 19-20.237 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2019 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section A), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Lenys concept, société à responsabilité limitée, dont le siège est 1 rue Edighoffen, 68000 Colmar,

2°/ à la société Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est 189 boulevard Malesherbes, 75017 Paris,

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la société Aviva assurances, de la SCP Boulloche, avocat de la société Lenys concept et de la société Mutuelle des architectes français, et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand conseiller doyen, M. Pronier, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, David, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, M. Zedda, Mme Aldigé, conseillers référendaires, et Mme Berdeaux, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 17 mai 2019), la commune de Colmar, ayant entrepris des travaux de voirie, a confié la maîtrise d'oeuvre à la société Edaw France (la société Edaw), assurée auprès de la société Aviva assurances (la société Aviva), la société Lenys concept (la société Lenys), assurée auprès de la société Mutuelle des architectes français (la société MAF) et la société Ecotral, et le lot voirie aux sociétés ISS espaces verts (la société ISS) et Eurovia Alsace Franche-Comté (la société Eurovia).

2. Se plaignant de désordres, la commune de Colmar a obtenu, par un arrêt du 28 mai 2009 d'une cour administrative d'appel, la condamnation solidaire des sociétés Lenys, Ecotral, ISS et Eurovia à lui payer la somme de 727 659,50 euros, des sociétés Lenys, Ecotral et Eurovia à lui payer la somme de 346 295,02 euros et des sociétés Lenys et Ecotral à garantir les autres intervenants à concurrence de 80 %.

3. Les sociétés Lenys et MAF, ayant demandé une répartition de la responsabilité entre les différents maîtres d'oeuvre, ont obtenu, par un jugement du 10 mai 2012, la condamnation de la société Aviva, en sa qualité d'assureur de la société Edaw, en liquidation judiciaire, à leur payer un tiers des sommes déboursées, le tribunal ayant « réservé les droits des sociétés Lenys et MAF dans la mesure où elles seraient dans l'obligation de régler des montants supplémentaires en exécution de l'arrêt du 28 mai 2009 ».

4. Le 4 octobre 2010, la société Eurovia a assigné en paiement la société Aviva et les sociétés Lenys et MAF qui ont, en cours d'instance, le 12 novembre 2014, assigné la société Aviva en paiement des sommes complémentaires versées après le jugement du 10 mai 2012. Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. La société Aviva fait grief à l'arrêt de déclarer recevable l'action complémentaire des sociétés Lenys et MAF et de la condamner à leur payer la somme de 77 500,68 euros, alors « que la prescription de l'action récursoire en garantie ne court à compter de la mise en cause de son auteur que dans la mesure où cette action récursoire a pour cause cette mise en cause ; qu'il résulte en l'espèce de l'arrêt attaqué, que les demandes dirigées par la société Lenys et son assureur à l'encontre de la société Aviva, assureur de la société Edaw, avait pour cause les condamnations prononcées à l'encontre des premières par l'arrêt du 28 mai 2009 de la cour administrative d'appel de Nancy au profit de la ville de Colmar, à l'instar des demandes dirigées par la société Eurovia à l'encontre des sociétés Lenys et MAF ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors juger que le délai de prescription de l'action récursoire exercée par la société Lenys et son assureur à l'encontre de la société Aviva courait à compter de cette dernière mise en cause, sans violer l'article 2224 du code civil. »

Réponse de la Cour

7. La cour d'appel a retenu à bon droit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

8. Elle a relevé que, les sociétés Lenys et MAF exerçaient contre la société Aviva un recours en garantie au titre des sommes réclamées par la société Eurovia et qu'elles avaient eu connaissance de cette réclamation par l'assignation qui leur avait été délivrée le 4 octobre 2010, de sorte qu'il s'était écoulé moins de cinq ans avant l'introduction de l'instance engagée contre la société Aviva.

9. Elle en a exactement déduit que l'action des sociétés Lenys et MAF n'était pas prescrite.

10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Aviva assurances aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Aviva assurances et la condamne à payer à la société MAF la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour la société Aviva assurances.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action de la société Lenys Concept et de la MAF à l'encontre de la société Aviva Assurances pour ce qui excède les sommes de 464 582,36 euros et 4 112,86 euros, et condamné la société Aviva Assurances à payer à la société Lenys Concept et la MAF la somme de 77 500, 68 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 7 août 2017 ;

Aux motifs que, par jugement du 10 mai 2012, le tribunal de grande instance de Colmar a : 1) condamné la société Aviva assurances à payer à la société Lenys Concept la somme de 4 112,35 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2008, et à la Mutuelle des architectes français la somme de 95 201,01 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2009, 2) réservé les droits des demanderesses ; 3) rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires ; 4) partagé les dépens par moitié entre les parties ; que la lecture des motifs du jugement démontre qu'en réservant « les droits des demanderesses », le tribunal a entendu « réserver les droits de Lenys Concept et de la MAF, dans la mesure où elle serait dans l'obligation de régler des montants supplémentaires en exécution de l'arrêt du 28 mai 2009 » ; que le jugement déféré a donc considéré à juste titre que le tribunal avait vidé entièrement sa saisine concernant les sommes déjà payées par la société Lenys Concept et la Mutuelle des architectes français et que ces sociétés étaient irrecevables à solliciter une nouvelle répartition des sommes de 464 582,36 et 4 112,36 euros mentionnées par le jugement du 10 mai 2012 ; que, par ailleurs, la disposition de ce jugement ayant réservé les droits des demanderesses est sans effet sur l'éventuelle prescription de leur action au titre des sommes dont le tribunal n'était pas saisi ; que, conformément à l'article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, la société Lenys Concept et la Mutuelle des architectes français exercent contre la société Aviva assurances, assureur de la société Edaw France, un recours en garantie au titre des sommes réclamées par la société Eurovia ; qu'elles ont eu connaissance de la réclamation de la société Eurovia à leur encontre par l'assignation qui leur a été délivrée, à la demande cette société, le 4 octobre 2010 ; qu'il s'est ensuite écoulé moins de cinq ans avant l'introduction de la présente action à l'encontre de la société Aviva assurances, par acte du 21 novembre 2014 ; que l'action de la société Lenys Concept et de la Mutuelle des architectes français n'est donc pas prescrite ;

Alors, de première part que la prescription de l'action récursoire en garantie ne court à compter de la mise en cause de son auteur que dans la mesure où cette action récursoire a pour cause cette mise en cause ; qu'il résulte en l'espèce de l'arrêt attaqué, que les demandes dirigées par la société Lenys Concept et son assureur à l'encontre de la société Aviva Assurances, assureur de la société Edaw, avait pour cause les condamnations prononcées à l'encontre des premières par l'arrêt du 28 mai 2009 de la cour administrative d'appel de Nancy au profit de la ville de Colmar, à l'instar des demandes dirigées par la société Eurovia à l'encontre de la société Lenys Concept et de MAF ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors juger que le délai de prescription de l'action récursoire exercée par la société Lenys Concept et son assureur à l'encontre de la société Aviva Assurances courait à compter de cette dernière mise en cause, sans violer l'article 2224 du code civil ;

Alors, de deuxième part, subsidiairement et en tout état de cause, qu'il résulte de l'article 1792-4-3 du code civil, dans sa rédaction résultant de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, que l'ensemble des actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés par les articles 1792 et 1792-1 se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux ; qu'il résulte en l'espèce des motifs de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy, qui sont revêtus de l'autorité de chose jugée comme étant le soutien nécessaire de cette décision, que la réception des travaux litigieux est intervenue le 3 décembre 2001 ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que l'action en garantie introduite par la société Lenys Concept et son assureur à l'encontre de la société Aviva Assurances, assureur de la société Edaw, membre du même groupement d'entreprise que la société Lenys Concept, l'a été postérieurement à l'expiration de ce délai ; que la cour d'appel ne pouvait dès lors déclarer ce recours recevable sans violer l'article 1792-4-3 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-20237
Date de la décision : 05/11/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Responsabilité - Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - Préjudice - Réparation - Action en garantie - Recours d'un constructeur ou d'un assureur contre l'assureur d'un autre constructeur - Prescription - Délai - Point de départ - Détermination

Une cour d'appel retient exactement que, si des constructeurs ont eu connaissance d'une décision de justice les obligeant à indemniser le maître de l'ouvrage, le délai de prescription de cinq ans du recours en garantie de l'un des constructeurs et de son assureur contre l'assureur d'un autre constructeur ne commence à courir qu'au jour de leur assignation en paiement


Références :

Article 2224 du code civil.

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 17 mai 2019

A rapprocher : 3e Civ., 16 janvier 2020, pourvoi n° 18-25915, Bull. 2020, (cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 05 nov. 2020, pourvoi n°19-20237, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.20237
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