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05/11/2020 | FRANCE | N°18-25723

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 novembre 2020, 18-25723


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1145 F-D

Pourvoi n° H 18-25.723

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

M. F... H..., domicilié chez M. et Mme E..., [...] , a formé le

pourvoi n° H 18-25.723 contre l'arrêt rendu le 15 octobre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposa...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 novembre 2020

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 1145 F-D

Pourvoi n° H 18-25.723

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 NOVEMBRE 2020

M. F... H..., domicilié chez M. et Mme E..., [...] , a formé le pourvoi n° H 18-25.723 contre l'arrêt rendu le 15 octobre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société GMF assurances, dont le siège est [...] ,

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Landes, dont le siège est [...] ,

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Talabardon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. H..., de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société GMF assurances, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Talabardon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 15 octobre 2018), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 14 avril 2016, pourvoi n° 15-16.625, 15-22.147), M. H..., atteint d'une paraplégie à la suite d'un accident de la circulation, survenu le 8 novembre 2010, a assigné en indemnisation la société GMF assurances (l'assureur), auprès de laquelle il avait souscrit un contrat d'assurance comportant une garantie du conducteur.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

2. M. H... fait grief à l'arrêt de dire y avoir lieu à application de la clause plafonnant la garantie du conducteur à un montant de 1 000 000 d'euros, et de condamner la société GMF assurances à lui payer cette somme, alors « que l'assureur qui invoque une limite de garantie est tenu de rapporter la preuve de sa connaissance et de son acceptation par l'assuré, par la production d'un exemplaire de la police revêtu de sa signature ; qu'en jugeant, pour faire application du plafond de garanti invoqué par la société GMF Assurances, que « M. F... H... a nécessairement reçu un exemplaire des conditions particulières qui font partie du contrat d'assurance et ont pour objet d'adapter les garanties d'assurance définies dans les conditions générales à sa situation spécifique et à celle du risque assuré » (...), la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à démontrer la connaissance effective et l'acceptation de cette clause par M. H..., a privé sa décision de base légale au regard des articles 1316-4, devenu 1367, et 1134, devenu 1103, du code civil, ensemble l'article L. 112-3 du code des assurances. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1103 du même code, et les articles L. 112-2, L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances :

3. En vertu de ces textes, une clause de limitation de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable.

4. Pour dire y avoir lieu de faire application de la clause plafonnant à 1 000 000 euros le montant de la garantie du conducteur souscrite par M. H... et limiter en conséquence à cette somme la condamnation de la société GMF assurances en indemnisation de son préjudice, l'arrêt énonce que les conditions générales du contrat d'assurance, invoquées par les parties, prévoient que la garantie souscrite est limitée à un montant indiqué dans les conditions particulières.

5. L'arrêt ajoute que M. H... a nécessairement reçu un exemplaire de ces conditions particulières, qui font partie du contrat d'assurance et ont pour objet d'adapter les garanties définies dans les conditions générales à sa situation spécifique et à celle du risque assuré, et relève à cet égard que l'intéressé ne produit ni cet exemplaire ni aucun autre document contractuel signé par lui et déterminant le risque assuré, telle la proposition d'assurance sur la base de laquelle le contrat a été conclu, qui viendraient contredire les conditions particulières à effet du 21 septembre 2010 produites par l'assureur, fixant le plafond de la garantie du conducteur à 1 000 000 euros.

6. La décision en déduit que, quand bien même ces conditions particulières, qui ont été éditées le lendemain de l'accident afin de vérifier l'étendue des garanties en vigueur à la date du sinistre, ne sont pas revêtues de la signature de l'assuré, elles lui sont opposables.

7. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'assureur rapportait la preuve, lui incombant, que M. H... avait eu connaissance, avant l'accident dont il a été victime, du montant du plafond dont cet assureur se prévalait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;

Condamne la société GMF assurances aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société GMF assurances et la condamne à payer à M. H... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille vingt et signé par lui et Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 456 et 456 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. H...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'il y avait lieu de faire application de la clause plafonnant la garantie du conducteur à un montant d'un million d'euros, et condamné la société GMF Assurances à payer cette somme à M. H... ;

AUX MOTIFS QU'en matière d'assurance facultative, dont relève la garantie du conducteur en litige, les parties peuvent librement fixer des valeurs garanties, sans que le principe fondamental de la réparation intégrale du préjudice corporel, inapplicable en dehors du domaine de la responsabilité, puisse y faire obstacle ; que l'insertion dans le contrat d'assurance d'une clause de plafonnement de garantie participe de la mise en oeuvre de cette liberté contractuelle et a pour seul effet de limiter le montant de la garantie, sans se confondre avec une exclusion de garantie ; qu'il appartient, toutefois, à l'assureur qui invoque une telle clause de démontrer que l'assuré en a eu connaissance avant la survenance du sinistre ; qu'en l'espèce, le contrat d'assurance automobile dont M. F... H... se prévaut à l'appui de sa demande d'indemnisation relative aux seuls éléments de préjudice couverts par la garantie du conducteur, à savoir les pertes de revenus, les frais médicaux et assimilés, l'incapacité permanente, les frais d'assistance par tierce personne et les frais de logement et/ou de véhicule adapté a été, à ses dires, souscrit en 2007 et modifié par un avenant du 9 octobre 2009 qui constituait sa pièce no142 devant le tribunal de grande instance de Dax et la cour d'appel de PAU, mais n'a pas été communiqué devant la cour de renvoi malgré l'invitation de celle-ci sur l'audience de plaidoirie à y procéder en cours de délibéré ; que les conditions générales de ce contrat, version juin 2006, versées aux débats de part et d'autre prévoient, à l'article 2.4.3 relatif au montant de l'indemnité au titre de la garantie du conducteur, en caractères gras, que "l'indemnisation, tous postes de préjudices confondus et après déduction de la créance des tiers payeurs ou des personnes tenues à indemnisation, intervient dans la limite du montant indiqué sur vos Conditions Particulières qui ne constitue pas un capital forfaitaire" et rappellent, dans le tableau des garanties figurant à l'article 1.4, l'existence pour cette garantie d'un plafond de garantie correspondant au "montant indiqué sur vos Conditions Particulières" ; que ces clauses, indemnes de toute ambiguïté et ne portant pas atteinte à la règle du recours subrogatoire des tiers payeurs poste par poste issue de la loi 2006-1640 du 21 décembre 2006, instituent valablement un plafonnement de la garantie du conducteur et renvoient aux conditions particulières pour la fixation de son montant ; qu'en outre, elles ne constatent pas l'adhésion de l'assuré à des clauses reprises dans un autre document auquel il n'a pas été fait expressément référence lors de la conclusion du contrat d'assurance et dont celui-ci n'a pas eu connaissance avant cette conclusion, de sorte qu'elles ne peuvent être qualifiées de clauses abusives au sens de l'alinéa 1er de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable en la cause ou de les présumer telles de manière irréfragable en application de l'article R. 132-1 1o du même code, au demeurant issu du décret 2009-302 du 18 mars 2009 postérieur à la conclusion du contrat ; qu'en effet, M. F... H... a nécessairement reçu un exemplaire des conditions particulières qui font partie du contrat d'assurance et ont pour objet d'adapter les garanties d'assurance définies dans les conditions générales à sa situation spécifique et à celle du risque assuré ; qu'or il ne produit ni cet exemplaire ni aucun autre document contractuel signé par lui et déterminant le risque assuré, telle la proposition d'assurance sur la base de laquelle le contrat a été conclu, qui viendraient contredire les conditions particulières à effet du 21 septembre 2010 produites par l'assureur, fixant le plafond de la garantie du conducteur à 1 000 000 euros, sans confusion possible avec la garantie responsabilité civile qui est illimitée pour les dommages corporels ; que dès lors, quand bien même ces conditions particulières, qui n'ont pas été établies pour les besoins de la cause, mais simplement éditées le lendemain de l'accident afin de vérifier l'étendue des garanties en vigueur à la date de l'accident, ne sont pas revêtues de la signature de M. F... H..., elles lui sont opposables ; qu'en conséquence, il y a lieu de faire application du plafonnement de garantie contractuel à un montant de 1 000 000 euros, le jugement dont appel étant réformé sur ce point ;

1°) ALORS QUE l'assureur qui invoque une limite de garantie est tenu de rapporter la preuve de sa connaissance et de son acceptation par l'assuré, par la production d'un exemplaire de la police revêtu de sa signature ; qu'en jugeant, pour faire application du plafond de garantie invoqué par la société GMF Assurances, que « M. F... H... a nécessairement reçu un exemplaire des conditions particulières qui font partie du contrat d'assurance et ont pour objet d'adapter les garanties d'assurance définies dans les conditions générales à sa situation spécifique et à celle du risque assuré » (arrêt, p. 5, in fine et p. 6, in limine), la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à démontrer la connaissance effective et l'acceptation de cette clause par M. H..., a privé sa décision de base légale au regard des articles 1316-4, devenu 1367 et 1134, devenu 1103 du code civil, ensemble l'article L. 112-3 du code des assurances ;

2°) ALORS QUE l'assureur qui invoque une limite de garantie est tenu de rapporter la preuve de sa connaissance et de son acceptation par l'assuré, par la production d'un exemplaire de la police revêtu de sa signature ; qu'en jugeant, pour faire application du plafond de garantie invoqué par la société GMF Assurances, que M. H... ne produisait aucun document contractuel revêtu de sa propre signature démontrant l'absence de plafond de garantie (arrêt, p. 6, § 2), quand il appartenait au contraire à la société GMF Assurances, qui entendait opposer à son assuré un plafond de garantie, de produire un tel document, démontrant la connaissance et l'acceptation de ce plafond par l'exposant, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant l'article 1315, devenu 1353 du code civil ;

3°) ALORS QUE l'assureur qui invoque une limite de garantie est tenu de rapporter la preuve de sa connaissance et de son acceptation par l'assuré, par la production d'un exemplaire de la police revêtu de sa signature ; qu'en jugeant, pour faire application du plafond de garantie invoqué par la société GMF Assurances, que celle-ci démontrait la connaissance et l'acceptation de ce plafond par l'assuré par la production de conditions particulières dont il résultait de ses propres constatations qu'éditées « le lendemain de l'accident », elles n'étaient « pas revêtues de la signature de M. F... H... » (arrêt, p. 6, § 3), la cour d'appel a violé les articles 1316-4, devenu 1367 et 1134, devenu 1103 du code civil, ensemble l'article L. 112-3 du code des assurances.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 18-25723
Date de la décision : 05/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 15 octobre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 nov. 2020, pourvoi n°18-25723


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Rousseau et Tapie

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:18.25723
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