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04/11/2020 | FRANCE | N°19-13205

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 novembre 2020, 19-13205


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2020

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 613 F-D

Pourvoi n° W 19-13.205

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 NOVEMBRE 2020

1°/ La société Dyson Technology Limited, don

t le siège est [...],

2°/ la société Dyson, société à associé unique, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

ont formé le po...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 novembre 2020

Cassation

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 613 F-D

Pourvoi n° W 19-13.205

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 NOVEMBRE 2020

1°/ La société Dyson Technology Limited, dont le siège est [...],

2°/ la société Dyson, société à associé unique, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,

ont formé le pourvoi n° W 19-13.205 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige les opposant à la société Babyliss, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Champalaune, conseiller, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Dyson Technology Limited et de la société Dyson, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Babyliss, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 septembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Champalaune, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 janvier 2019), les sociétés Dyson Technology Limited et Dyson (les sociétés Dyson), se plaignant d'agissements constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire et de dénigrement commis par la société Babyliss à l'occasion du lancement, en juillet 2017, d'un produit concurrent du sèche-cheveux qu'elles-mêmes avaient mis sur le marché français en 2016, ont saisi sur requête un président d'un tribunal de commerce aux fins de voir désigner un huissier de justice pour effectuer diverses opérations d'investigation au siège de sa concurrente.

2. La requête ayant été accueillie et les opérations effectuées, la société Babyliss a demandé la rétractation de l'ordonnance et la restitution des pièces saisies.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

3. Les sociétés Dyson font grief à l'arrêt de rétracter l'ordonnance et d'ordonner la restitution à la société Babyliss de l'intégralité des copies réalisées par l'huissier de justice désigné, alors « qu'après avoir exposé, sur plus de dix pages, un contexte laissant craindre une concurrence déloyale, la requête et l'ordonnance justifiaient la dérogation au principe de la contradiction en invoquant l'existence, en cas de débat contradictoire avec la société Babyliss, d'un risque de déperdition des éléments de preuve nécessaires à l'action envisagée, dès lors que la mesure sollicitée avait "pour objet de conserver les preuves des agissements fautifs de cette société", c'est-à-dire des actes de concurrence déloyale dénoncés, et que les éléments de preuve recherchés, constitués de messages électroniques, fichiers informatiques et documents sur support papier, étaient susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits de façon définitive ; qu'en affirmant que les motifs de la requête et de l'ordonnance se contentaient de " faire état d'un risque de dépérissement et de destruction des preuves à travers des formules générales non circonstanciées, sans démonstration ni prise en compte d'éléments propres au cas d'espèce", cependant que la requête et l'ordonnance, qui relevaient que les sociétés Dyson soupçonnaient la société Babyliss d'avoir commis des actes de concurrence déloyale à leur encontre et que les éléments destinés à rapporter la preuve de ces actes étaient susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits, justifiaient que la mesure ne soit pas prise contradictoirement eu égard au risque de déperdition des documents si la société Babyliss venait à être avertie de la mesure ordonnée, la cour d'appel a violé les articles 145, 493 et 875 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 145 et 493 du code de procédure civile :

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

5. Pour estimer qu'il n'était pas justifié de porter atteinte au principe de la contradiction, l'arrêt, après avoir relevé que la requête énonçait que les mesures sollicitées par Dyson devaient sans nul doute être ordonnées à l'insu de la société Babyliss afin de permettre de garantir la préservation des éléments de preuves recherchés, dès lors que ces éléments, ayant pour objet de conserver les preuves des agissements fautifs de la société Babyliss étaient formés de messages électroniques, de fichiers informatiques et documents sur supports papier qui sont susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits de façon définitive, retient que la seule invocation d'un risque de destruction de documents et fichiers sur supports informatiques relève de l'affirmation de principe, constituant un motif de portée générale susceptible d'être appliqué en toutes circonstances et que les motifs de la requête se contentent de faire état d'un risque de dépérissement et de destruction des preuves à travers des formules générales non circonstanciées, sans démonstration ni prise en compte d'éléments propres au cas d'espèce.

6. En statuant ainsi, alors que les sociétés Dyson, qui indiquaient rechercher la preuve de faits constitutifs de concurrence déloyale et parasitaire et d'un dénigrement à l'occasion de la campagne publicitaire effectuée par la société Babyliss pour son nouveau produit et d'actions de formation menées par cette même société, faisaient valoir que les éléments déloyaux recherchés ressortaient par nature des correspondances et documents internes à la société Babyliss ou avec des tiers qui étaient hors de sa portée et que l'ordonnance indiquait que des indices suffisants des faits considérés par les demanderesses comme fautifs étaient produits, qui justifiaient le recours à une procédure non contradictoire eu égard au risque évident de déperdition des éléments de preuve nécessaires à l'action envisagée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le moyen, pris en sa quatrième branche

Enoncé du moyen

7. Les sociétés Dyson font le même grief à l'arrêt, alors « qu'en toute hypothèse, pour justifier d'un motif légitime à conserver ou établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, le demandeur doit simplement établir l'existence d'un litige potentiel mais n'a pas à établir le bien-fondé de l'action envisagée ; qu'en l'espèce, sans nier la réalité des points de similitudes invoqués par les sociétés Dyson entre les éléments de communication du Dyson "Supersonic" et ceux utilisés par la société Babyliss pour son produit "Digital Sensor", la cour d'appel s'est livrée à une analyse détaillée de chacun de ces éléments, au terme de laquelle elle a estimé qu'il s'agirait de "clés de communication usuelles" et que l'utilisation publicitaire de vidéos en noir et blanc avec une présentation du produit en couleur serait également courante ; qu'en déduisant l'absence d'"indices plausibles et suffisants d'un quelconque parasitisme et/ou agissement déloyal" d'un tel examen, la cour d'appel, qui a ainsi jugé du bien-fondé de l'action envisagée par les sociétés Dyson et subordonné la démonstration du motif légitime à la caractérisation du bien-fondé de cette future action, a violé l'article 145 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 145 du code de procédure civile :

8. Pour décider que les sociétés Dyson n'établissaient pas l'existence d'un motif légitime et rétracter l'ordonnance, l'arrêt retient que les éléments présentés par ces sociétés dans leur requête relatifs aux codes de communication utilisés ne constituent pas des indices plausibles et suffisants d'un quelconque parasitisme et/ou agissement déloyal de la part de la société Babyliss et que les éléments invoqués au soutien du dénigrement allégué ne constituent pas plus un indice suffisant d'un comportement déloyal de la société concurrente Babyliss.

9. En statuant ainsi, en exigeant que soit établi au stade de la requête le bien-fondé de l'action en vue de laquelle la mesure d'instruction était sollicitée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Sur le moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

10. Les sociétés Dyson font encore le même grief à l'arrêt, alors « que la mesure d'instruction ordonnée à leur requête visait notamment à établir, dans l'éventualité d'un procès en concurrence déloyale et parasitisme, le dénigrement auquel la société Babyliss était suspectée de s'être livrée en associant le sèche-cheveux "Supersonic " de Dyson à un séchoir de voiture et en critiquant ce sèche-cheveux lors de formations dispensées aux vendeurs conseils de grandes enseignes de distribution ; qu'en affirmant, à supposer les motifs de l'ordonnance adoptés, que "les sociétés Dyson n'ont pas suffisamment explicité en quoi les mots "voiture", "car", et "industrie automobile" étaient pertinents, utiles aux recherches, et s'ils n'allaient pas conduire à des résultats sans rapport avec l'objectif poursuivi voire même à des non sens" et que le choix des noms "Darty", "Boulanger" et "Fnac" était "sans lien avec la conception d'une stratégie publicitaire et de communication pour le lancement d'un nouveau produit, que le risque était trop grand ici de toucher aux rapports commerciaux de la société Babyliss avec les distributeurs, à ses accords de promotion/publicité/référencement", sans rechercher, comme elle y était invitée, si le choix, comme critère de recherche par combinaison de mots clés, de ces termes ne constituait pas le seul moyen d'établir le dénigrement que la société Babyliss était suspectée d'avoir commis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 145 du code de procédure civile :

11. Pour rétracter l'ordonnance, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que les sociétés Dyson n'ont pas suffisamment explicité en quoi les mots « voiture », « car », « industrie automobile » étaient pertinents et utiles aux recherches et s'ils n'allaient pas conduire à des résultats sans rapport avec l'objectif poursuivi, voire à des non-sens tels que celui relevé par la société Babyliss concernant « car » qui se retrouve dans des noms et noms de personnes sans rapport avec l'emballage et la brochure publicitaire de ce sèche-cheveux.

12. En se déterminant ainsi, sans rechercher si le choix des mots-clefs litigieux et leur combinaison n'étaient pas nécessaires à l'établissement des faits de dénigrement, par comparaison de leur produit avec un séchoir de voiture, dont les sociétés Dyson alléguaient avoir été victimes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Et sur le moyen, pris en sa huitième branche

Enoncé du moyen

13. Les sociétés Dyson font toujours le même grief à l'arrêt, alors « que l'instance en rétractation a pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire ; que le juge de la rétractation ne peut donc se fonder sur le résultat des mesures d'instruction ordonnées pour déterminer a posteriori si ces mesures étaient suffisamment circonscrites ; qu'en l'espèce, pour juger que la mesure ordonnée serait disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi, la cour d'appel a retenu que les investigations menées par l'huissier avaient abouti à "la saisie de plus de 3 000 fichiers", qu'elles avaient donné lieu à « des errances dans les systèmes informatiques de la société Babyliss", et qu'elles s'étaient "traduites par des résultats non conformes à l'objectif poursuivi" ; qu'en se fondant ainsi sur des circonstances tenant à l'exécution de la mesure, cependant qu'il lui appartenait seulement de se prononcer sur la régularité de son autorisation, la cour d'appel a violé les articles 496 et 497 du code de procédure civile, ensemble l'article 145 du même code. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 145 du code de procédure civile :

14. Pour rétracter l'ordonnance, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que plus de 3 000 fichiers ont été saisis, que le choix par les sociétés Dyson d'un trop grand nombre de mots clés s'est traduit en errances dans les systèmes informatiques de la société Babyliss, sans qu'elles démontrent l'utilité, notamment pratique, et la pertinence de tels résultats, que ces investigations se sont traduites dans des résultats non conformes à l'objectif poursuivi et que les mesures ordonnées étaient ainsi disproportionnées.

15. En statuant ainsi, alors que les résultats de l'exécution des mesures ordonnées ne peuvent être pris en considération pour apprécier la régularité de leur autorisation, laquelle doit être appréciée au moment de son prononcé, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;

Condamne la société Babyliss aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Babyliss et la condamne à payer à la société Dyson Technology Limited et à la société Dyson la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la société Dyson Technology Limited et la société Dyson.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle avait rétracté l'ordonnance sur requête du 16 novembre 2017 et d'avoir ordonné la restitution à la société Babyliss de l'intégralité des copies réalisées par la SCP Venezia et Associés, huissiers de justice, à l'occasion des mesures réalisées ;

AUX MOTIFS QU'« aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé ;
que l'application des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile suppose que soit constaté qu'il existe un procès "en germe" possible, sur la base d'un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui ;
que le juge, saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile et tenu d'apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s'assurer de l'existence d'un motif légitime, au jour du dépôt de la requête initiale et à la lumière des éléments de preuve produits à l'appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement ;
que l'urgence n'est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d'instruction sur le fondement de l'article 145 ; que l'existence de contestations sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en oeuvre de la mesure sollicitée, l'application de cet article n'impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d'être ultérieurement engagé ;
que sur les circonstances justifiant une dérogation au principe de la contradiction, selon l'article 493 du code de procédure civile, l'ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse ;
qu'en application des dispositions combinées des articles 145 et 493 susvisés, les circonstances propres au cas d'espèce justifiant une dérogation au principe de la contradiction doivent être caractérisées et le juge saisi d'une demande de rétractation doit vérifier, au besoin d'office, si cette exigence est satisfaite ;
qu'en l'espèce, la requête énonce en page 17, après avoir rappelé le texte de l'article 493 susvisé et des éléments de jurisprudence, que "les mesures sollicitées par Dyson doivent sans nul doute être ordonnées à l'insu de Babyliss afin de garantir la préservation des éléments de preuves recherchés, dès lors que ces éléments ont pour objet de conserver les preuves des agissements fautifs de Babyliss. En effet ces éléments de preuve sont formés de messages électroniques, de fichiers informatiques et documents sur supports papier qui sont susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits de façon définitive" ;
que l'ordonnance du 16 novembre 2017 qui vise la requête et les pièces qui y sont jointes, ce qui vaut adoption implicite des motifs figurant dans la requête, mentionne que "la nécessité de solliciter la mesure de façon non contradictoire est justifiée eu égard au risque évident de déperdition des éléments de preuve nécessaires à l'action envisagée, en cas de débat contradictoire avec la société Babyliss" ;
que la seule invocation d'un risque de destruction de documents et fichiers sur supports informatiques relève de l'affirmation de principe et constitue un motif de portée générale susceptible d'être appliqué en toutes circonstances, et contrairement à ce qui est soutenu par les appelantes, la dérogation au principe de la contradiction ne se justifie pas sur le principe dès lors que des actes de concurrence déloyale sont dénoncés et que l'effet de surprise doit être préservé ;
que de même, il est inopérant pour les requérantes de se prévaloir de l'existence des motifs légitimes "détaillés sur dix pages" dans la requête et de la nature des faits invoqués pour en déduire qu'elles ont nécessairement satisfait à la condition requise, alors même qu'il n'appartient pas à la cour de déduire des circonstances de la cause la nécessité de déroger au principe de la contradiction, la requête devant énoncer expressément les motifs justifiant qu'il ne soit pas procédé contradictoirement ;
qu'ainsi dès lors que les motifs susvisés se contentent de faire état d'un risque de dépérissement et de destruction des preuves à travers des formules générales non circonstanciées, sans démonstration ni prise en compte d'éléments propres au cas d'espèce, tant la requête que l'ordonnance rendue le 16 novembre 2017 ne satisfont à l'exigence de motivation telle qu'affirmée par le texte légal ;
que c'est donc à tort que le premier juge a considéré, en se fondant sur l'existence d'indices suffisamment précis et pertinents d'agissements de concurrence déloyale présentés par les sociétés Dyson, que le juge de la requête s'était conformé aux dispositions de l'article 493 du code de procédure civile ;
qu'au demeurant, l'existence d'un motif légitime n'est pas en l'espèce suffisamment caractérisée ;
que sur l'existence d'un motif légitime, il résulte de l'article 145 susvisé que le demandeur à une mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est destinée à les établir, mais qu'il doit justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions ;
qu'au soutien de leur requête visant à rechercher les éléments de preuve nécessaires à une action en responsabilité délictuelle et en indemnisation de leurs préjudices, les sociétés Dyson dénoncent des actes de concurrence déloyale par reprise des éléments essentiels de la communication de leur sèche-cheveux "Supersonic" et par le dénigrement de l'action de ce produit auprès de leurs clients distributeurs et consommateurs ;
qu'elles invoquent ainsi la nécessité de rechercher des preuves dans les documents internes de leur concurrent Babyliss, notamment dans les échanges avec des prestataires tels que des agences de communication ou de publicité pouvant faire référence à leur communication du "Supersonic" et à leur imagerie, dans les présentations internes de cette société pouvant traduire sa volonté de reprendre les éléments évocateurs de la communication Dyson, ou dans les présentations destinées aux commerciaux de Babyliss comme supports de leurs formations faites aux vendeurs-conseils des distributeurs, démontrant encore la volonté de dénigrer le produit Dyson ;
que sur la reprise des codes de communication du Dyson "Supersonic", les sociétés Dyson dénoncent :
- d'une part, la reprise par la société Babyliss sur son emballage "Digital Sensor" de plusieurs éléments caractéristiques de son emballage "Supersonic", soit la présentation du sèche-cheveux de face sur fond blanc, l'allégation relative à l'intelligence du produit, la représentation des flux d'air dans des tonalités roses, et en outre, dans la brochure qu'elle met à disposition des clients, la présentation du moteur entre deux doigts, la représentation de l'intérieur de la machine avec la mise en avant du microprocesseur et l'image d'un ingénieur en blouse,
- d'autre part, la reprise de ces éléments sur le site internet de la société et de ses distributeurs ainsi que l'utilisation du noir et blanc dans les publicités vidéos avec un focus sur une image de microprocesseur ;
qu'il est constant qu'avant le lancement en 2016 du sèche-cheveux Supersonic par Dyson, la société Babyliss utilisait parfois la présentation de ses produits de face et des emballages blancs ; que pas plus l'allégation de sèche-cheveux "intelligent" que celle de sèche-cheveux "réinventé" ou "repensé" ne peut être considérée comme un argument "marketing" spécifique dès lors que ces termes sont utilisés pour de nombreux produits ;
que la société Dyson a mentionné sur son emballage en 2016 que le produit était "repensé" ("The hair dryer re-thought"), revendiquant une communication ancienne autour de cette thématique, mais ce terme a été également utilisé par Babyliss en 2015 pour son sèche-cheveux "Pro Digital" ;
que la représentation des flux d'air chaud dans des tonalités rose, rouge ou orange et celle des flux froids dans des tonalités bleues est habituelle, y compris en matérialisant ces flux par des lignes ;
qu'avant même le lancement du premier sèche-cheveux haut de gamme Dyson, Babyliss présentait le moteur et l'intérieur de son produit, certes sans utiliser une présentation entre les deux doigts de la main, mais en utilisant également une image par transparence permettant d'identifier les différents composants de l'appareil ;
qu'enfin, le recours publicitaire à une démonstration faite par un ingénieur en blouse blanche est une technique largement utilisée par différentes marques pour conforter l'idée d'un produit de haute technologie et innovant ;
que ce éléments de communication, même appréhendés dans leur ensemble, qui reposent largement sur une présentation scientifique du produit pour en valoriser ses performances, constituent désormais des clés de communication usuelles, étant souligné que la société Babyliss, dès 2015, était le seul acteur du marché à proposer des sèche-cheveux à moteur digital sur le marché français, avec ses produits Pro Digital puis Rapido ;
que par ailleurs, l'utilisation publicitaire de vidéos en noir et blanc avec une présentation du produit en couleur est également courante parmi les grandes marques, y compris dans les domaines de la coiffure et de la beauté, peu important que les publicités visées, diffusées notamment sur le site d'hébergement "Youtube", ne le soient pas nécessairement en France, ce qui n'est au demeurant pas démontré et il n'est pas soutenu que la société Babyliss n'aurait jamais utilisé ce procédé, puisqu'il ressort des pièces produites par la société Dyson qu'elle ne l'utiliserait plus depuis 2014 ;
qu'il en résulte que les éléments présentés par les sociétés Dyson dans leur requête relatifs aux codes de communication utilisés ne constituent pas des indices plausibles et suffisants d'un quelconque parasitisme et/ou agissement déloyal de la part de la société Babyliss ;
que s'agissant des faits de dénigrement allégués, ils sont tirés d'une part, du rapprochement qui serait opéré par Babyliss dans sa brochure du sèche-cheveux Digital Sensor entre le Dyson "Supersonic" et l'industrie automobile, et d'autre part, de propos déloyaux et dénigrants tenus à l'égard de Dyson lors d'une formation aux vendeurs-conseils de Darty Montparnasse ;
que toutefois, les explications données par Babyliss dans sa brochure sur le flux d'air simple ou complexe, par référence à l'industrie automobile, en utilisant, selon les appelantes, la forme d'un appareil de type Dyson, en réalité un modèle basique, dès lors qu'elles ne mentionnent nullement la marque Dyson ou l'appareil Supersonic et qu'elles se limitent à des considérations techniques, ne constituent pas un indice plausible d'une volonté de dénigrement de la part de la société concurrente, qui serait destinée à créer une association d'idées défavorable chez le consommateur ;
que de même, l'attestation établie par M. Q... le 10 novembre 2017, vendeur expert Dyson, qui relate avoir assisté au mois de juillet 2017 à une présentation du sèche-cheveux Digital Sensor d'un représentant de la marque Babyliss dans le magasin Darty Montparnasse, lequel aurait construit son argumentaire en procédant par comparaisons avec le modèle Supersonic de Dyson pour le dénigrer, ne constitue pas plus un indice suffisant d'un comportement déloyal de la société concurrente Babyliss, étant relevé que les faits relatés le sont par un salarié de la société Dyson qui précise en outre s'être présenté au représentant de la marque Babyliss pour "participer" à la présentation, ce qui est surprenant, la société Babyliss soulignant que les formations des vendeurs-conseils se font hors la présence de la concurrence ;
qu'en tout état de cause, les argumentaires des commerciaux sont nécessairement construits par référence aux produits de la concurrence pour présenter les avantages des produits qu'ils entendent commercialiser ;
qu'il résulte de l'ensemble de ces constatations et énonciations que les sociétés Dyson qui dénoncent des intentions supposées, ne mettent pas en évidence des indices suffisamment plausibles à l'appui des griefs de concurrence déloyale et de dénigrement présentés ;
qu'en conséquence, la requête des sociétés Dyson ne pouvait être accueillie, ne reposant pas sur un motif légitime au sens des dispositions de l'article 145 du code de procédure civile » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « les sociétés Dyson devaient justifier du caractère utile, proportionné de la mesure sollicitée ;
que s'il a été dit ci-avant que les sociétés Dyson pouvaient avoir intérêt, concernant la stratégie de communication, à rechercher ce qui a présidé à l'élaboration de celle-ci, et comment son concurrent a conçu ses emballages et brochures, il reste que la mesure sollicitée devait avoir un caractère proportionné ;
qu'or si le nombre de personnes concernées par la saisie sur leur poste informatique a été justement calibré et proportionné, il n'en va pas de même des mots clés et combinaison / nombre de mots clés ;
que les sociétés Dyson n'ont pas suffisamment explicité en quoi les mots "voiture", "car", "industrie automobile" étaient pertinents, utiles aux recherches, et s'ils n'allaient pas conduire à des résultats sans rapport avec l'objectif poursuivi, voire même à des non-sens tels que celui relevé par la société Babyliss concernant "car" qui se retrouve dans des noms et noms de personnes sans rapport avec l'emballage et [la] brochure publicitaire dudit sèche-cheveux ;
que de même c'est sans être contredite par les sociétés Dyson que la société Babyliss énonce la saisie de plus de 3 000 fichiers ;
qu'ainsi le choix par les sociétés Dyson d'un trop grand nombre de mots clés s'est ici traduit en errances dans les systèmes informatiques de la société Babyliss, sans qu'elles démontrent l'utilité, notamment pratique, la pertinence de tels résultats ;
qu'en outre, ces investigations se sont traduites dans des résultats non-conformes avec l'objectif poursuivi ;
qu'ainsi, de multiples fichiers apparaissent qui ne concernent pas le marché français (ainsi "management report
Netherlands", "report Germany", "report budget 2018", "Babyliss Middle East 2018 strategy", "benchmarks pour la Suisse", "Babyliss Europe - book budget 2018", "chiffres Allemagne"
. alors que les sociétés Dyson ciblaient le lancement en France ;
que par ailleurs et d'évidence des fichiers ont été saisis plusieurs fois ;
qu'enfin le choix (en second lieu) des noms "Darty", "Boulanger", "Fnac" est sans lien avec la conception d'une stratégie publicitaire de communication pour le lancement d'un nouveau produit ;
que le risque était trop grand ici de toucher aux rapports commerciaux de la société Babyliss avec les distributeurs, à des accords de promotion / publicité / référencement ;
que même des fichiers ont été saisis concernant "Sephora-accord ouverture gamme premium ou non" ;
qu'ici il n'est plus question d'emballages et de brochures
;
qu'alors il sera dit que le nombre de mots clés et combinaison de mots clés a résulté d'un mauvais choix de la part des sociétés Dyson ;
que ce nombre excessif et inapproprié de mots clés ne pouvait se traduire que par une multiplicité de documents saisis, la difficulté à les examiner, ainsi que Me G..., huissier de justice l'a relevé dans son constat ;
qu'en réalité, ce nombre de mots clés a résulté en divagations dans les systèmes informatiques de la société Babyliss, constituant une intrusion insupportable et disproportionnée dans l'activité commerciale de la société Babyliss ;
que dans ces circonstances, les sociétés Dyson n'ont pas démontré les raisons pour lesquelles elles ont demandé la recherche des correspondances électroniques, mails
. avec ces choix de termes et combinaison de mots ;
qu'elles n'ont pas démontré le rapport précis de ces mots clés et combinaison de mots clés avec l'objectif poursuivi ;
qu'en conséquence, la mesure sollicitée sera rétractée pour les motifs ci-avant, car (
) il s'est agi d'une mesure disproportionnée » ;

1°) ALORS QUE les mesures d'instruction destinées à conserver ou à établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige peuvent être ordonnées sur requête lorsque les circonstances exigent qu'elles ne le soient pas contradictoirement ; que lorsque l'adversaire est soupçonné d'avoir commis des actes de concurrence déloyale, la nécessité de ménager un effet de surprise, afin d'éviter qu'il fasse disparaître des preuves pouvant aisément être détruites ou dissimulées, justifie que les mesures visant à conserver ces preuves soient ordonnées sur requête ; que la cour d'appel a constaté que la requête des exposantes, dont l'ordonnance avait adopté les motifs, faisait état de la nécessité d'ordonner les mesures sollicitées à l'insu de la société Babyliss dès lors que ces mesures avaient pour objet de conserver la preuve d'agissements fautifs commis par cette dernière, suspectée de concurrence déloyale, et que les documents recherchés pouvaient aisément être dissimulés ou détruits ; qu'en jugeant néanmoins, pour prononcer la rétractation de l'ordonnance, que l'invocation d'un risque de destruction de documents et fichiers sur supports informatiques relève de l'affirmation de principe et que « la dérogation au principe de la contradiction ne se justifie pas sur le principe dès lors que des actes de concurrence déloyale sont dénoncés et que l'effet de surprise doit être préservé », la cour d'appel a violé les articles 145, 493 et 875 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'après avoir exposé, sur plus de dix pages, un contexte laissant craindre une concurrence déloyale, la requête et l'ordonnance justifiaient la dérogation au principe de la contradiction en invoquant l'existence, en cas de débat contradictoire avec la société Babyliss, d'un risque de déperdition des éléments de preuve nécessaires à l'action envisagée, dès lors que la mesure sollicitée avait « pour objet de conserver les preuves des agissements fautifs de cette société », c'est-à-dire des actes de concurrence déloyale dénoncés, et que les éléments de preuve recherchés, constitués de messages électroniques, fichiers informatiques et documents sur support papier, étaient susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits de façon définitive ; qu'en affirmant que les motifs de la requête et de l'ordonnance se contentaient de « faire état d'un risque de dépérissement et de destruction des preuves à travers des formules générales non circonstanciées, sans démonstration ni prise en compte d'éléments propres au cas d'espèce », cependant que la requête et l'ordonnance, qui relevaient que les sociétés Dyson soupçonnaient la société Babyliss d'avoir commis des actes de concurrence déloyale à leur encontre et que les éléments destinés à rapporter la preuve de ces actes étaient susceptibles d'être aisément dissimulés ou détruits, justifiaient que la mesure ne soit pas prise contradictoirement eu égard au risque de déperdition des documents si la société Babyliss venait à être avertie de la mesure ordonnée, la cour d'appel a violé les articles 145, 493 et 875 du code de procédure civile ;

3°) ALORS QUE le juge ne peut exiger de la partie qui sollicite une mesure d'instruction avant tout procès qu'elle rapporte la preuve des faits que cette mesure a précisément pour objet de conserver ou d'établir ; que pour juger que la demande de mesure d'instruction des exposantes ne reposerait pas sur un motif légitime, la cour d'appel a retenu que les différents éléments de communication utilisés par la société Babyliss dans le cadre de la présentation et de la promotion de son sèche-cheveux « Digital Sensor » constitueraient des « clés de communication usuelles » et que l'utilisation publicitaire de vidéos en noir et blanc avec une présentation du produit en couleurs serait « courante » parmi les grandes marques, en sorte que ces éléments ne pourraient être considérés comme des indices de parasitisme ou d'agissements déloyaux, que les explications données dans la brochure de la société Babyliss par référence à l'industrie automobile ne seraient pas un indice plausible d'une volonté de dénigrement, et que l'attestation du vendeur-expert Dyson ayant assisté à une présentation du sèche-cheveux « Digital Sensor » dispensée par un représentant de la marque Babyliss ne constituerait pas un indice suffisant d'un comportement déloyal ; qu'en se fondant ainsi sur l'absence de preuve des faits de concurrence déloyale que la mesure d'instruction sollicitée avait précisément pour objet d'établir, la cour d'appel a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

4°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE pour justifier d'un motif légitime à conserver ou établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, le demandeur doit simplement établir l'existence d'un litige potentiel mais n'a pas à établir le bien-fondé de l'action envisagée ; qu'en l'espèce, sans nier la réalité des points de similitudes invoqués par les sociétés exposantes entre les éléments de communication du Dyson « Supersonic » et ceux utilisés par la société Babyliss pour son produit « Digital Sensor », la cour d'appel s'est livrée à une analyse détaillée de chacun de ces éléments, au terme de laquelle elle a estimé qu'il s'agirait de « clés de communication usuelles » et que l'utilisation publicitaire de vidéos en noir et blanc avec une présentation du produit en couleur serait également courante ; qu'en déduisant l'absence d'« indices plausibles et suffisants d'un quelconque parasitisme et/ou agissement déloyal » d'un tel examen, la cour d'appel, qui a ainsi jugé du bien-fondé de l'action envisagée par les sociétés exposantes et subordonné la démonstration du motif légitime à la caractérisation du bien-fondé de cette future action, a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

5°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE la reprise d'une combinaison d'éléments usuels est de nature à caractériser des actes de concurrence déloyale ou de parasitisme, s'il en résulte un risque de confusion dans l'esprit du public ou si cette reprise permet à son auteur de se placer dans le sillage d'un autre opérateur économique ; qu'en retenant que les éléments de communication dont la reprise est incriminée par les sociétés exposantes constitueraient des « clés de communication usuelles » et que l'utilisation publicitaire de vidéos en noir et blanc avec une présentation du produit en couleur serait également courante parmi les grandes marques, y compris dans le domaine de la coiffure et de la beauté, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à exclure l'existence d'actes de concurrence déloyale ou de parasitisme et a violé l'article 145 du code de procédure civile ;

6°) ALORS QUE la mesure d'instruction ordonnée à la requête des exposantes visait notamment à établir, dans l'éventualité d'un procès en concurrence déloyale et parasitisme, le dénigrement auquel la société Babyliss était suspectée de s'être livrée en associant le sèche-cheveux « Supersonic » de Dyson à un séchoir de voiture et en critiquant ce sèche-cheveux lors de formations dispensées aux vendeurs conseils de grandes enseignes de distribution ; qu'en affirmant, à supposer les motifs de l'ordonnance adoptés, que « les sociétés Dyson n'ont pas suffisamment explicité en quoi les mots « voiture », « car », et « industrie automobile » étaient pertinents, utiles aux recherches, et s'ils n'allaient pas conduire à des résultats sans rapport avec l'objectif poursuivi voire même à des non-sens » et que le choix des noms « Darty », « Boulanger » et « Fnac » était « sans lien avec la conception d'une stratégie publicitaire et de communication pour le lancement d'un nouveau produit, que le risque était trop grand ici de toucher aux rapports commerciaux de la société Babyliss avec les distributeurs, à ses accords de promotion/publicité/référencement », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le choix, comme critère de recherche par combinaison de mots-clés, de ces termes ne constituait pas le seul moyen d'établir le dénigrement que la société Babyliss était suspectée d'avoir commis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 145 du code de procédure civile ;

7°) ALORS QUE la cour d'appel ne peut accueillir ou rejeter les demandes dont elle est saisie sans examiner tous les éléments de preuve qui lui sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que les exposantes produisaient, pour la première fois en cause d'appel, une note technique du 23 avril 2018 visant à démontrer que, contrairement à ce qu'avait retenu le juge des référés, le mot « car » figurant dans les critères de recherche énumérés dans l'ordonnance sur requête ne pouvait se retrouver dans des noms partiellement constitués de la chaîne de caractères « c.a.r » sans rapport avec l'objet de la mesure ; qu'en adoptant les motifs du jugeant selon lesquels la mesure ordonnée serait disproportionnée sans s'expliquer, même succinctement, sur cet élément de preuve produit pour la première fois devant elle, la cour d'appel a violé les articles 455 et 563 du code de procédure civile ;

8°) ALORS QUE l'instance en rétractation a pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l'initiative d'une partie en l'absence de son adversaire ; que le juge de la rétractation ne peut donc se fonder sur le résultat des mesures d'instruction ordonnées pour déterminer a posteriori si ces mesures étaient suffisamment circonscrites ; qu'en l'espèce, pour juger que la mesure ordonnée serait disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi, la cour d'appel a retenu que les investigations menées par l'huissier avaient abouti à « la saisie de plus de 3 000 fichiers », qu'elles avaient donné lieu à « des errances dans les systèmes informatiques de la société Babyliss », et qu'elles s'étaient « traduites par des résultats non conformes à l'objectif poursuivi » ; qu'en se fondant ainsi sur des circonstances tenant à l'exécution de la mesure, cependant qu'il lui appartenait seulement de se prononcer sur la régularité de son autorisation, la cour d'appel a violé les articles 496 et 497 du code de procédure civile, ensemble l'article 145 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-13205
Date de la décision : 04/11/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 31 janvier 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 nov. 2020, pourvoi n°19-13205


Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard (président)
Avocat(s) : SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.13205
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