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21/10/2020 | FRANCE | N°19-18038

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 octobre 2020, 19-18038


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 633 F-D

Pourvoi n° Z 19-18.038

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 21 OCTOBRE 2020

Mme H... Y..., épouse F..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n°

Z 19-18.038 contre l'arrêt rendu le 7 mai 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la société Le Créd...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 633 F-D

Pourvoi n° Z 19-18.038

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 21 OCTOBRE 2020

Mme H... Y..., épouse F..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° Z 19-18.038 contre l'arrêt rendu le 7 mai 2019 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la société Le Crédit lyonnais, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de Mme Y..., de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Le Crédit lyonnais, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 7 mai 2019), suivant offre acceptée le 4 juillet 2011, la société Le Crédit lyonnais (la banque) a consenti à Mme Y... (l'emprunteur) un prêt destiné à l'acquisition d'un bien immobilier, modifié par avenant du 5 juin 2015.

2. Soutenant que la clause prévoyant un mode de calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile présentait un caractère abusif et que des erreurs affectaient le taux effectif global (TEG) du prêt, l'emprunteur a assigné la banque aux fins de voir ladite clause réputée non écrite et, subsidiairement, la stipulation de l'intérêt conventionnel annulée ou encore la banque déchue de son droit aux intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir déclarer la clause prévoyant un mode de calcul des intérêts sur une base autre que l'année civile abusive et par conséquent réputée non écrite, alors « que la stipulation figurant dans les prêts immobiliers consentis qui fait référence à un calcul d'intérêts sur la base d'une année de trois cent soixante jours et non d'une année civile de trois cent soixante-cinq jours, qui est obscure et crée un déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs puisqu'elle a pour conséquence de priver les intéressés de la possibilité de calculer le coût réel de leur crédit, présente un caractère abusif ; qu'en l'espèce, l'emprunteur faisait valoir que constituait une clause abusive la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année fictive de trois cent soixante jours, faisant l'analogie avec une recommandation de la Commission des clauses abusives qui a considéré qu'« une clause pénale [qui] prévoit le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours (
) qui ne tient pas compte de la durée réelle de l'année civile et qui ne permet pas au consommateur d'évaluer le surcoût qui est susceptible d'en résulter à son détriment, est de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur » ; qu'en disant que la clause qui prévoit que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de trois-cent-soixante jours, chaque mois étant compté pour trente jours rapportés à trois-cent-soixante jours l'an » ne serait pas abusive, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 ancien, désormais L. 212-1, du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date de souscription du prêt. »

Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

5. Il en résulte qu'il incombe aux juges du fond, examinant le caractère abusif d'une clause prévoyant un calcul des intérêts sur la base d'une année de trois-cent-soixante jours, d'un semestre de cent-quatre-vingts jours, d'un trimestre de quatre-vingt-dix jours et d'un mois de trente jours, d'apprécier quels sont ses effets sur le coût du crédit, afin de déterminer si elle entraîne ou non un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

6. Après avoir relevé que la clause litigieuse prévoit que les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de trois-cent-soixante jours, chaque mois étant compté pour trente jours rapportés à trois-cent-soixante jours l'an, et qu'en cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exacts de la période écoulée, rapportés à trois-cent-soixante jours, le TEG des prêts étant indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à trois-cent-soixante cinq jours l'an, l'arrêt énonce que, l'année civile comptant douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentant un douzième de l'intérêt conventionnel, un calcul des intérêts courus entre deux échéances mensuelles sur la base d'un mois de trente jours et d'une année de trois-cent-soixante jours est équivalent à un calcul des intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de trois-cent-soixante cinq jours.

7. De ces énonciations et constatations, la cour d'appel n'a pu que déduire que la clause litigieuse n'entraînait pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et n'était pas abusive.

8. Le moyen n'est dès lors pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

9. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en annulation des stipulations de l'intérêt conventionnel et déchéance du droit aux intérêts, alors :

« 1°/ que la clause d'un contrat de prêt immobilier stipulant un calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de trois cent soixante jours encourt la nullité, cette irrégularité étant sanctionnée par la substitution automatique du taux de l'intérêt légal à celui de l'intérêt conventionnel ; que la cour d'appel a constaté que la clause figurant page 4 de l'offre de prêt stipulait « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de trois-cent-soixante jours, chaque mois étant compté pour trente jours rapportés à trois cent soixante jours l'an » ; qu'en refusant néanmoins d'annuler la clause litigieuse et de substituer les intérêts légaux aux intérêts conventionnels, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 et R. 313-2 du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription des prêts ;

2°/ que la clause d'un contrat de prêt immobilier stipulant un calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de trois cent soixante jours encourt la nullité, cette irrégularité étant sanctionnée par la substitution du taux de l'intérêt légal à celui de l'intérêt conventionnel ; que cette sanction doit être mise en oeuvre dès lors que l'application de la clause litigieuse vient au détriment des emprunteurs ; que la cour d'appel a constaté que la clause figurant page 4 de l'offre de prêt stipulait « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de trois-cent-soixante jours, chaque mois étant compté pour trente jours rapportés à trois-cent-soixante jours l'an » et que « le TEG recalculé est de 4,77553964 % au lieu de 4,71 % comme affiché dans le contrat de prêt » ; qu'en refusant d'annuler la clause litigieuse et de substituer les intérêts légaux aux intérêts conventionnels, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que l'application de la clause litigieuse était préjudiciable à l'emprunteur, la cour d'appel a violé l'article 1907, alinéa 2, du code civil, ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 et R. 313-2 du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription des prêts ;

3°/ que l'erreur affectant le TEG est sanctionnée par la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts, peu important que l'écart entre le TEG mentionné et le TEG effectivement appliqué soit inférieur à une décimale ; qu'en déboutant pourtant l'emprunteur de sa demande de déchéance au prétexte qu'il ne justifiait pas « d'une erreur de plus de 0,1 point d'intérêt annuel, ni dans le calcul du TEG ni dans celui du taux conventionnel », la cour d'appel a violé l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

9. Il résulte des articles L. 312-8 et L. 312-33 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, et R. 313-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2016-607 du 13 mai 2016, que la mention, dans l'offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.

10. Après avoir souverainement estimé que l'emprunteur ne justifiait pas d'une erreur dans le calcul des intérêts affectant la première décimale, la cour d'appel n'a pu que rejeter ses demandes en annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel et en déchéance du droit aux intérêts.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation de la stipulation de l'intérêt conventionnel de l'avenant au contrat de prêt, alors :

« 1°/ que le défaut de mention écrite du taux de période dans l'offre de prêt entraîne la nullité de plein droit de la stipulation d'intérêt, et non la simple déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts ; que cette sanction s'applique à tout contrat de prêt et notamment à l'avenant ; qu'en jugeant qu'aucun texte légal ou réglementaire ne prévoirait « directement ou expressément de sanction de déchéance du droit de la banque aux intérêts en cas de non indication du taux de période dans un avenant », la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

2°/ que le défaut de mention écrite du taux de période dans l'offre de prêt entraîne la nullité de plein droit de la stipulation d'intérêt, que les juges ne sauraient écarter en alléguant que le défaut d'écrit n'aurait causé aucun préjudice à l'emprunteur ; qu'en retenant qu'il résulterait du contrat initial que le taux de période est égal à 1/12e du taux annuel, de sorte qu'il suffisait à l'emprunteur, pour connaître le nouveau taux de période issu de l'avenant, de procéder lui-même à un calcul très simple, sans vérifier si le taux de période avait été expressément communiqué à l'emprunteur, fût-ce dans un document distinct du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

3°/ que la sanction de l'erreur affectant la mention du taux effectif global figurant dans l'avenant à un contrat appelle la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la souscription de cet avenant ; qu'en jugeant que « l'annulation éventuelle de la stipulation d'intérêts figurant dans l'avenant ferait revivre l'intérêt conventionnel au taux du contrat initial », la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

13. En cas de renégociation d'un prêt immobilier, les modifications du contrat initial sont, conformément aux dispositions de l'article L. 312-14-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, apportées sous la seule forme d'un avenant comprenant diverses informations et la communication du taux et de la durée de la période ne sont pas exigées.

14. L'arrêt retient que, si l'avenant du 5 juin 2015 ne mentionne pas le taux de période, cette absence d'indication n'a causé aucun préjudice à l'emprunteur.

15. Il en résulte qu'en l'absence d'exigence d'une telle mention, la demande de l'emprunteur ne pouvait qu'être rejetée.

16. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée de ce chef.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Y... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour Mme Y..., épouse F...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme F... de sa demande tendant à voir déclarer abusive et par conséquent réputer non écrite la clause figurant en page 4 de l'offre de prêt intitulée « Modalités et lieux de paiement – Ajustement du montant de la première échéance » prévoyant le calcul des intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an et de ses demandes subséquentes tendant à voir condamner le Crédit Lyonnais à lui payer une somme de 13 000 euros correspondant aux intérêts indument versés au titre du prêt depuis sa conclusion jusqu'au 15 juin 2015, jour d'entrée en vigueur de l'avenant, sauf à parfaire, et la somme de 3 200 euros correspondant aux intérêts indument versés au titre de l'avenant depuis sa prise d'effet, jusqu'au jour de ses dernières conclusions, sauf à parfaire ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la demande tendant à faire juger certaines stipulations abusives que Mme F... considère comme abusive la clause figurant page 4 de l'offre de prêt qui stipule :
« Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an.
En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exacts de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisions que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an »
A l'appui de son argumentation, elle invoque la Recommandation n°2005-02 de la Commission des clauses abusives ;
que toutefois, cette recommandation concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement, une telle clause ayant des conséquence à chaque calcul d'intérêts, ce qui n'est pas le cas du prêt immobilier de Mme F... ;
qu'en effet, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel : aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéance sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours ;
qu'ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas en soi, contraire aux prescriptions légales susmentionnées ;
qu'il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive » ;

ALORS QUE la stipulation figurant dans les prêts immobiliers consentis qui fait référence à un calcul d'intérêts sur la base d'une année de 360 jours et non d'une année civile de 365 jours, qui est obscure et crée un déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs puisqu'elle a pour conséquence de priver les intéressés de la possibilité de calculer le coût réel de leur crédit, présente un caractère abusif ; qu'en l'espèce, l'exposante faisait valoir que constituait une clause abusive la clause de calcul des intérêts sur la base d'une année fictive de 360 jours, faisant l'analogie avec une recommandation de la Commission des clauses abusives qui a considéré qu'« une clause pénale [qui] prévoit le calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours (
) qui ne tient pas compte de la durée réelle de l'année civile et qui ne permet pas au consommateur d'évaluer le surcoût qui est susceptible d'en résulter à son détriment, est de nature à créer un déséquilibre significatif au détriment du consommateur » (conclusions de l'exposante p. 5) ; qu'en disant que la clause qui prévoit que « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an » ne serait pas abusive, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 ancien, désormais L. 212-1, du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date de souscription du prêt.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme F... de sa demande tendant à voir confirmer le jugement en ce qu'il avait déclaré nulle la stipulation d'intérêts conventionnels contenue dans l'offre de prêt immobilier du 14 juin 2011 acceptée le 4 juillet 2011 et la stipulation d'intérêts conventionnels contenue dans l'avenant entré en vigueur le 15 juin 2015, ordonné la substitution du taux de l'intérêt légal en vigueur au jour de l'acceptation du prêt du 14 juin 2011 au taux conventionnel stipulé dans l'offre de prêt initiale, ainsi que la substitution du taux d'intérêt légal en vigueur le 15 juin 2015 au taux d'intérêt conventionnel stipulé dans l'avenant au contrat de prêt, condamné le Crédit Lyonnais à payer à Mme F... la somme correspondant entre les intérêts au taux conventionnel et ceux calculés au taux légal depuis le début du contrat jusqu'au 14 juin 2015, dans la limite de 13 000 euros et la somme correspondant à la différence entre les intérêts perçus au taux conventionnel et ceux calculés au taux légal depuis le 15 juin 2015 jusqu'au 1er août 2017, date de notification de ses dernières conclusions, dans la limite de 3 200 euros, et ordonné au Crédit Lyonnais de produire un nouveau tableau d'amortissement prenant en compte la substitution au taux d'intérêt conventionnel du taux d'intérêt légal applicable au 15 juin 2015 ;

AUX MOTIFS QUE : « Mme F... considère comme abusive la clause figurant page 4 de l'offre de prêt qui stipule :

« Les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an.
En cas de remboursement anticipé les intérêts courus depuis la dernière échéance seront calculés sur la base du nombre de jours exacts de la période écoulée, rapportés à 360 jours l'an. Nous vous précisions que le taux effectif global des prêts est indiqué sur la base du montant exact des intérêts rapportés à 365 jours l'an » ;
qu'à l'appui de son argumentation, elle invoque la Recommandation n°2005-02 de la Commission des clauses abusives ;
que toutefois, cette recommandation concerne les conventions de comptes de dépôt en application desquelles les intérêts sont calculés quotidiennement, une telle clause ayant des conséquence à chaque calcul d'intérêts, ce qui n'est pas le cas du prêt immobilier de Mme F... ;
qu'en effet, l'année civile compte douze mois et les intérêts dus pour une échéance mensuelle représentent un douzième de l'intérêt conventionnel : aussi, calculer les intérêts courus entre deux échéance sur la base d'un mois de 30 jours et d'une année de 360 jours est équivalent à calculer ces intérêts sur la base d'un douzième de l'intérêt conventionnel ou sur la base d'un mois normalisé de 30,41666 jours et d'une année de 365 jours ;
qu'ainsi, le calcul des intérêts de chaque mensualité, tel que défini par la clause précitée, n'est pas en soi, contraire aux prescriptions légales susmentionnées ;
qu'il en résulte que cette clause ne peut pas créer de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, de sorte qu'elle ne saurait être qualifiée d'abusive ;
Sur la demande d'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels et la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels pour indication d'un TEG erroné
que l'écart entre le taux effectif global mentionné dans le contrat de crédit et le taux réel ne saurait être sanctionné s'il est inférieur à la décimale prescrite par l'article R 313-1 du code de la consommation ;
qu'en l'espèce, l'appelante indique dans ses conclusions que le TEG recalculé par l'établissement « Humania Consultants » est de 4,77553964% au lieu de 4,71% comme affiché dans le contrat de prêt, ce qui présente une différence inférieure au seuil réglementaire prescrit à l'annexe à l'article R 313-1 ancien du code de la consommation, à savoir une décimale ;
qu'en conséquence, la demanderesse ne justifiant pas d'une erreur de plus de 0,1 point d'intérêt annuel, ni dans le calcul du TEG et du taux conventionnel, les griefs faits aux modalités de calcul du TEG et du taux conventionnel, sont sans intérêt » ;

1°/ ALORS QUE la clause d'un contrat de prêt immobilier stipulant un calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours encourt la nullité, cette irrégularité étant sanctionnée par la substitution automatique du taux de l'intérêt légal à celui de l'intérêt conventionnel ; que la cour d'appel a constaté que la clause figurant page 4 de l'offre de prêt stipulait « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an » ; qu'en refusant néanmoins d'annuler la clause litigieuse et de substituer les intérêts légaux aux intérêts conventionnels, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations a violé l'article 1907 alinéa 2 du code civil, ensemble les articles L.313-1, L.313-2 et R.313-1 et R. 313-2 du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription des prêts ;

2°/ ALORS, subsidiairement, QUE la clause d'un contrat de prêt immobilier stipulant un calcul des intérêts conventionnels sur la base d'une année de 360 jours encourt la nullité, cette irrégularité étant sanctionnée par la substitution du taux de l'intérêt légal à celui de l'intérêt conventionnel ; que cette sanction doit être mise en oeuvre dès lors que l'application de la clause litigieuse vient au détriment des emprunteurs ; que la cour d'appel a constaté que la clause figurant page 4 de l'offre de prêt stipulait « les intérêts courus entre deux échéances seront calculés sur la base de 360 jours, chaque mois étant compté pour 30 jours rapportés à 360 jours l'an » et que « le TEG recalculé est de 4,77553964% au lieu de 4,71% comme affiché dans le contrat de prêt » (cf. arrêt p. 9 al. 2) ; qu'en refusant d'annuler la clause litigieuse et de substituer les intérêts légaux aux intérêts conventionnels, cependant qu'il résultait de ses propres constatations que l'application de la clause litigieuse était préjudiciable à l'emprunteuse, la cour d'appel a violé l'article 1907 alinéa 2 du code civil, ensemble les articles L.313-1, L.313-2 et R.313-1 et R. 313-2 du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur à la date de souscription des prêts ;

3°/ ALORS, en toute hypothèse, QUE l'erreur affectant le TEG est sanctionnée par la déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts, peu important que l'écart entre le TEG mentionné et le TEG effectivement appliqué soit inférieur à une décimale ; qu'en déboutant pourtant l'exposante de sa demande de déchéance au prétexte qu'elle ne justifiait pas « d'une erreur de plus de 0,1 point d'intérêt annuel, ni dans le calcul du TEG ni dans celui du taux conventionnel » (arrêt, p. 9, al. 3), la cour d'appel a violé l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable en la cause.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(très subsidiaire)

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme F... de sa demande tendant à voir prononcer la nullité de la clause de stipulation d'intérêts et à voir condamner le Crédit Lyonnais à lui payer la somme de 3 200 euros correspondant aux intérêts indûment versés au titre de l'avenant depuis sa prise d'effet, jusqu'au jour du dépôt de ses conclusions, sauf à parfaire ;

AUX MOTIFS QUE : « sur la régularité de l'avenant
que selon offre acceptée le 5 juin 2015, le Crédit Lyonnais a consenti à Mme F... un avenant ramenant le taux d'intérêts conventionnels à 2,66% au lieu de 3,65% ;

que cet avenant, dont il est précisé qu'il n'emporte pas novation, après avoir rappelé les conditions du prêt initial, mentionne :
- le nouveau TEG : 3,803% (sur échéances à venir)
- la durée : 207 mois
- la date de dernière échéance : 15 septembre 2032
- la périodicité des échéances : « mensuelle »
qu'aucun texte légal ou réglementaire, en particulier les articles L. 312-14 61 ancien du code de la consommation, et R 313-1 du code de la consommation, ne prévoit directement et expressément de sanction de déchéance du droit de la banque aux intérêts en cas de non indication du taux de période dans un avenant ;
qu'il sera d'autre part observé que l'annulation éventuelle de la stipulation d'intérêts figurant sans l'avenant ferait revivre l'intérêt conventionnel au taux du contrat initial ;
que de surcroît, il résulte du contrat initial que le taux de période est égal à 1/12ème du taux annuel (3,65/12 = 0,39), ce dont il résulte qu'il suffisait à Mme F... pour connaitre le nouveau taux de période issu de l'avenant, de procéder au même calcul très simple ;
qu'ainsi, l'absence d'indication du taux de période n'a causé aucun préjudice à Mme F... » ;

1°/ ALORS QUE le défaut de mention écrite du taux de période dans l'offre de prêt entraîne la nullité de plein droit de la stipulation d'intérêt, et non la simple déchéance totale ou partielle du droit aux intérêts ; que cette sanction s'applique à tout contrat de prêt et notamment à l'avenant ; qu'en jugeant qu'aucun texte légal ou réglementaire ne prévoirait « directement ou expressément de sanction de déchéance du droit de la banque aux intérêts en cas de non indication du taux de période dans un avenant », la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

2°/ ALORS QUE le défaut de mention écrite du taux de période dans l'offre de prêt entraîne la nullité de plein droit de la stipulation d'intérêt, que les juges ne sauraient écarter en alléguant que le défaut d'écrit n'aurait causé aucun préjudice à l'emprunteur ; qu'en retenant qu'il résulterait du contrat initial que le taux de période est égal à 1/12ème du taux annuel, de sorte qu'il suffisait à Mme F... pour connaître le nouveau taux de période issu de l'avenant, de procéder elle-même à un calcul très simple, sans vérifier si le taux de période avait été expressément communiqué à l'emprunteur, fût-ce dans un document distinct du contrat de prêt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause ;

3°/ ALORS QUE la sanction de l'erreur affectant la mention du taux effectif global figurant dans l'avenant à un contrat appelle la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la souscription de cet avenant ; qu'en jugeant que « l'annulation éventuelle de la stipulation d'intérêts figurant dans l'avenant ferait revivre l'intérêt conventionnel au taux du contrat initial », la cour d'appel a violé l'article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-8, L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-18038
Date de la décision : 21/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 07 mai 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 oct. 2020, pourvoi n°19-18038


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.18038
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