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21/10/2020 | FRANCE | N°19-12674

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 octobre 2020, 19-12674


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 933 F-D

Pourvoi n° U 19-12.674

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020

La société CDC habitat social, société

anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Efidis, a formé le pourvoi n° U 19-12.674 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 21 octobre 2020

Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 933 F-D

Pourvoi n° U 19-12.674

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 21 OCTOBRE 2020

La société CDC habitat social, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Efidis, a formé le pourvoi n° U 19-12.674 contre l'arrêt rendu le 20 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme V... H..., divorcée D..., domiciliée [...] ,

2°/ au syndicat CGT UES Efidis, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Colin-Stoclet, avocat de la société CDC habitat social, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué, statuant en référé (Paris, 20 décembre 2018), rendu après cassation (Soc., 20 décembre 2017, n° 15-28-367), Mme H..., engagée le 13 octobre 2003 en qualité de gardienne d'immeuble qualifiée par la société Valestis, aux droits de laquelle vient la société Efidis, a été placée en arrêt de travail du 18 septembre 2008 au 20 septembre 2009 à la suite d'un accident du travail.

2. Le médecin du travail l'a déclarée apte à son poste avec restrictions à l'issue d'une visite de reprise du 29 septembre 2009 ; saisie d'un recours formé contre cet avis, l'inspecteur du travail a déclaré, le 6 décembre 2010, l'intéressée inapte à son poste.

3. Le 31 mai 2016, la salariée a été licenciée pour faute grave pour refus réitéré, nonobstant une mise en demeure, de se présenter aux visites médicales de reprise.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée des sommes provisionnelles à titre de rappel de salaire pour la période du 6 janvier 2011 au 31 décembre 2015 et de le débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation ; que l'arrêt rendu par la cour d'appel le 29 octobre 2015 a été annulé en ce qu'il a condamné la société Efidis à payer à la salariée certaines sommes provisionnelles à titre de rappel de salaires pour la période du 29 octobre 2009 au 23 septembre 2015, et que si la cassation a été déterminée par un moyen de droit relatif au point de départ de la reprise du paiement des salaires, le chef de dispositif par lequel le juge des référés avait alloué une provision à la salariée a ainsi été anéanti ; qu'en retenant cependant que la cour de renvoi n'était pas appelée à statuer sur les éléments du litige concernant la compétence de la juridiction de référé et en refusant, en conséquence, d'examiner, comme elle y était invitée, si la demande de Mme D... ne se heurtait pas à une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 624, 625, 631, 632 et 638 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1455-7 du code du travail ;

2°/ que si, durant tout le mois suivant la décision d'inaptitude et encore à l'expiration de ce mois, le salarié déclaré inapte s'est trouvé en arrêt de travail et que son contrat était donc suspendu, l'employeur ne saurait être tenu, à défaut de l'avoir reclassé sur un autre poste ni licencié, de lui verser son salaire ; qu'il est constant qu'à la suite de la reprise du 30 septembre 2009, Mme D... a été placée à nouveau en arrêt de travail le 3 octobre 2009 et qu'elle l'est restée sans interruption jusqu'au 1er août 2011 ; qu'en retenant cependant que l'employeur avait l'obligation de reprendre le paiement du salaire à l'expiration du délai d'un mois suivant la notification de la décision de l'inspecteur du travail, soit le 6 janvier 2011, dès lors qu'à cette date, il n'avait pas procédé au reclassement de Mme D... ni à son licenciement pour inaptitude, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail ;

3°/ qu'en refusant de considérer comme une contestation sérieuse le moyen tiré de ce que la salariée était de nouveau placée en arrêt de travail, à compter du 3 octobre 2009, qu'elle l'était encore à la date à laquelle est intervenue la décision de l'inspecteur du travail, et l'était encore à l'expiration du délai d'un mois suivant la connaissance par l'employeur de cette décision d'inaptitude, soit le 6 janvier 2011, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-7 du code du travail, ensemble les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du même code. »

Réponse de la Cour

6. Ayant constaté que la salariée, à l'issue d'une visite de reprise du 29 septembre 2009, avait été déclarée inapte par une décision de l'inspecteur du travail du 6 décembre 2010, la cour d'appel qui a exactement rappelé que la délivrance de nouveaux arrêts de travail, postérieurs à la déclaration d'inaptitude, n'était pas de nature à ouvrir une nouvelle suspension du contrat de travail et à tenir en échec le régime juridique applicable à l'inaptitude de sorte que l'employeur devait reprendre le paiement des salaires à compter du 6 janvier 2011, en a déduit à bon droit que la demande ne se heurtait à aucune contestation sérieuse.

7. Le moyen, inopérant en sa première branche, n'est donc pas fondé pour le surplus.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement de la salariée est constitutif d'un trouble manifestement illicite et de le condamner à payer à cette dernière des sommes provisionnelles à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2016 au 1er novembre 2018 outre les congés payés, alors :

« 1°/ que la cassation à intervenir sur la base soit du premier moyen soit du deuxième moyen entraînera, en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif déclarant le licenciement illicite ;

2°/ que la société Efidis faisait valoir qu'une visite médicale de reprise était évidemment nécessaire avant de reclasser Mme D... sur un quelconque poste dès lors qu'elle était en arrêt de travail depuis six ans ; qu'en omettant de rechercher si, à supposer que la société Efidis ait été tenue, dès après la décision d'inaptitude prise par l'inspecteur du travail, de proposer un poste de reclassement à la salariée à défaut de l'avoir licenciée pour inaptitude, elle n'était pas, en tout état de cause, fondée en 2016, la salariée n'ayant pas travaillé depuis septembre 2008, à lui faire passer un nouvel examen médical avant toute reprise d'activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;

3°/ que le motif de licenciement tiré d'un refus du salarié de se présenter à une visite médicale de reprise s'assimile à un grief d'insubordination et ne constitue pas, par lui-même, un motif discriminatoire, quelle que soit l'éventuelle légitimité de ce refus ; qu'en retenant que les examens médicaux auxquels il est reproché à Mme D... de ne pas se présenter étaient inutiles en présence d'une décision d'inaptitude connue depuis 2010 et de l'absence de toute offre de reclassement sur un poste administratif à mi-temps ni de reprise du paiement du salaire à défaut d'avoir procédé à son licenciement pour inaptitude, ce qui établirait le caractère discriminatoire de la rupture sans caractériser de lien de causalité entre le licenciement prononcé en mai 2016 et l'état de santé de la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;

4°/ que le licenciement a pour effet, dès lors que sa nullité n'a pas été prononcée, de rompre la relation contractuelle et, par suite, de mettre fin à l'obligation pour l'employeur de verser le salaire ; qu'en condamnant la société Efidis à payer à la salariée une somme provisionnelle à titre de rappel de salaire pour la période postérieure au licenciement qu'elle a seulement considéré comme constitutif d'un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail, ensemble l'article L. 1231-1 du même code. »

Réponse de la Cour

9. Ayant constaté que postérieurement à l'avis d'inaptitude à son poste du 6 décembre 2010, l'employeur n'avait proposé à la salariée aucun poste de reclassement ni procédé à son licenciement pour inaptitude et que le licenciement disciplinaire intervenu le 31 mai 2016 était fondé sur l'inaptitude de la salariée, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'une discrimination en raison de son état de santé.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société CDC habitat social aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société CDC habitat social ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Colin-Stoclet, avocat aux Conseils, pour la société CDC habitat social

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir écarté la fin de non-recevoir soulevée par la société Efidis devenue CDC Habitat social et condamné celle-ci à payer à Mme D... les sommes provisionnelles de 122 522,35 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 6 janvier 2011 au 31 décembre 2015 et 12 252,35 euros au titre des congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE Mme D... a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise le 28 mars 2007 d'une demande en annulation d'une sanction disciplinaire et en paiement d'indemnités et rappels de salaire, puis elle a saisi, le 18 septembre 2014, la formation de référé du conseil de prud'hommes de Paris de demandes fondées sur le non-respect de l'article L. 1226-11 du code du travail, suite à une décision d'inaptitude du 6 décembre 2010 de l'inspecteur du travail ; que la société Efidis invoque le protocole transactionnel signé entre les parties les 14 mars et 30 mai 2011 ; mais que les parties conviennent que l'instance engagée en mars 2007 ne s'est pas terminée par un jugement au fond, une audience étant prévue devant le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise ; que si la société Efidis invoque le non-respect par Mme D... des obligations mises à sa charge par l'accord, ces obligations sont limitées par les termes de l'article 4 de l'accord qui dispose qu'elle renonce à toute action à l'encontre de la société Efidis, au titre du blâme notifié le 21 décembre 2006 et du logement de fonction attribué dans le cadre du contrat de travail du 13 octobre 2003 ; que la transaction a donc une portée limitée à deux points, n'a pas été suivie d'un désistement d'instance formalisé par Mme D... et qu'il appartiendra au conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise de statuer sur une éventuelle demande présentée à ce titre par Efidis ; que d'autre part, les demandes présentées au fond par Mme D... ne font pas obstacle à la saisine postérieure de la formation de référé, le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise n'ayant pas constaté son dessaisissement ; qu'enfin les demandes présentées en référé sont fondées sur l'inexécution du contrat de travail, Mme D... alléguant des manquements de l'employeur à ses obligations découlant du contrat qui s'est poursuivi jusqu'au 31 mai 2016, date de la rupture, dont la nullité est invoquée au titre de l'illicéité de sa cause fondée sur l'état de santé de la salariée ; qu'il s'ensuit que les demandes présentées en référé sont fondées sur des causes distinctes et postérieures à la saisine du conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise qui n'est pas dessaisi de l'affaire, de sorte que la règle de l'unicité de l'instance ne trouve pas son application à l'espèce ; que pour les mêmes motifs, le moyen présenté à titre subsidiaire par Efidis pour les rappels de salaires antérieurs au 14 mai 2011 doit être écarté, la demande étant fondée sur l'inexécution des obligations découlant du contrat de travail qui n'était pas rompu à cette date ;

1) ALORS QUE toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font l'objet d'une seule instance et que si cette règle s'applique lorsque l'instance précédente s'est achevée par un jugement sur le fond, une transaction conclue en cours d'instance produit les mêmes effets qu'un jugement sur le fond, indépendamment du désistement prévu en exécution de la transaction ; qu'en considérant qu'en l'absence du désistement consécutif à la transaction, l'instance devant le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise n'était pas terminée, ce qui empêchait l'application de la règle de l'unicité de l'instance, la cour d'appel a violé les articles 2044 et 2048 du code civil, ensemble l'article R. 1452-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 ;

2) ALORS QUE la poursuite, après la transaction signée les 14 mars et 30 mai 2011, de l'instance engagée devant le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise, résultait uniquement de l'inexécution par Mme D... de l'obligation mise à sa charge par cet accord de se désister de cette instance ; qu'en opposant à la règle de l'unicité de l'instance le fait que le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise ne soit pas dessaisi et en faisant ainsi produire effet au non-respect, par la salariée, de son engagement, la cour d'appel a violé les articles 1103 et 2044 du code civil, ensemble l'article R. 1452-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 ;

3) ALORS QUE toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font l'objet d'une seule instance et qu'une transaction conclue en cours d'instance produit les mêmes effets qu'un jugement sur le fond pour l'application de ce principe, lequel s'oppose à ce qu'une nouvelle instance soit introduite après la signature d'une transaction dès lors qu'elle concerne la même relation contractuelle ; qu'en retenant que ce principe ne pouvait être opposé à Mme D..., laquelle avait saisi un conseil de prud'hommes au fond de certains demandes puis la formation de référé d'un autre conseil de prud'hommes de demandes relatives à l'exécution et à la rupture du même contrat de travail, motif pris de ce que la transaction conclue pour mettre fin au premier litige avait une portée limitée à deux points en litige, la cour d'appel a violé les articles 2044 et 2048 du code civil, ensemble l'article R. 1452-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 ;

4) ALORS QUE toutes les demandes liées au contrat de travail entre les mêmes parties font l'objet d'une seule instance et qu'une nouvelle instance ne peut porter que sur des prétentions dont le fondement est né ou s'est révélé postérieurement au jugement ou à la transaction ayant éteint la première ; que, pour dire recevables les demandes présentées par Mme D... en référé, la cour d'appel a retenu qu'elles étaient fondées sur des manquements de l'employeur à ses obligations découlant du contrat qui s'est poursuivi jusqu'au 31 mai 2016, date de la rupture, dont la nullité est invoquée au titre de l'illicéité de sa cause fondée sur l'état de santé de la salariée ; que la cour d'appel a effectivement apprécié la cause du licenciement au regard du fait que l'employeur, informé de la décision d'inaptitude du 6 décembre 2010, n'avait proposé à la salariée aucun poste de reclassement sur un poste administratif ni repris le paiement de son salaire dans le délai d'un mois, sans procéder à son licenciement pour inaptitude, c'est-à-dire de faits antérieurs à la transaction signée les 14 mars et 30 mai 2011 (cf. 3ème moyen) ; qu'en s'abstenant d'examiner si la nouvelle instance engagée par la salariée ne portait pas sur des prétentions dont le fondement était né ou s'était révélé antérieurement à la transaction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 1452-6 du code du travail dans sa rédaction antérieure au décret n° 2016-660 du 20 mai 2016.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Efidis, devenue CDC Habitat Social à payer à Mme D... les sommes provisionnelles de 122 522,35 euros bruts à titre de rappel de salaire pour la période du 6 janvier 2011 au 31 décembre 2015 et 12 252,35 euros bruts au titre des congés payés afférents, avec intérêts légaux capitalisés à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant la formation de référé du conseil de prud'hommes et d'avoir débouté la société Efidis, devenue CC Habitat Social, de sa demande de restitution des sommes versées à Mme D... et au syndicat en exécution de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 29 octobre 2015 et des salaires versés à Mme D... du 1er janvier au 31 mai 2016 ;

AUX MOTIFS QUE l'essentiel de l'argumentation de la société Efidis est identique à ce qui a été soutenu devant la formation qui a statué par l'arrêt du 29 octobre 2015, s'agissant de la compétence de la juridiction de référé et des conditions d'application de l'article L. 1226-11 du code du travail ; que la Cour de cassation a annulé l'arrêt rendu par la cour d'appel seulement en ce qui concerne le point de départ de la reprise du paiement des salaires par la société Efidis ; que la cour de renvoi n'est donc pas appelée à statuer sur les éléments du litige définitivement jugés par l'arrêt du 29 octobre 2015 concernant la compétence de la juridiction de référé et l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire un mois après la décision d'inaptitude de l'inspecteur du travail ; qu'il résulte en effet des termes de l'arrêt de cassation que la décision d'inaptitude prise le 6 décembre 2010 par l'inspecteur du travail s'est substituée à l'avis d'aptitude avec réserves émis le 29 septembre 2009 par le médecin du travail, la visite médicale ayant été organisée en vue de la reprise du travail le 30 septembre 2009 par Mme D..., qui a été placée à nouveau en arrêt le 3 octobre 2009 pour rechute de l'accident du travail, puis à compter du 18 janvier 2010, pour maladie non professionnelle ; que la décision d'inaptitude est donc consécutive à la reprise du travail le 30 septembre 2009 et la délivrance de nouveaux arrêts de travail ne fait pas obstacle à l'obligation de reprendre le paiement du salaire ; que la société Efidis ne peut donc soutenir qu'elle était tenue d'organiser une nouvelle visite de reprise le 1er août 2011 alors que cette visite a été organisée le 29 septembre 2009 et s'est conclue par la décision d'inaptitude du 6 décembre 2010 ; que s'agissant toutefois du point de départ de la reprise du paiement des salaires, il ressort de l'arrêt de cassation que la substitution de la décision de l'inspecteur du travail ne fait pas naître rétroactivement l'obligation pour l'employeur de reprendre le paiement du salaire ; que cette obligation s'impose à l'issue du délai d'un mois suivant la date à laquelle l'inspecteur du travail prend sa décision ; que la décision de l'inspecteur du travail en vue de reconnaître l'inaptitude de Mme D... à son poste de gardienne d'immeuble et son aptitude à un poste administratif à mi-temps, est datée du 6 novembre 2010 et notifiée à la société Efidis le 6 décembre 2010 ; qu'à cette date, la société n'a procédé ni au reclassement de Mme D... ni à son licenciement pour inaptitude ; que la date de l'obligation de reprise du paiement des salaires est située à l'expiration du délai d'un mois suivant la connaissance par l'employeur de la décision de l'inspecteur du travail, soit le 6 janvier 2011 ; que la demande en paiement présentée par Mme D... au titre d'une provision à valoir sur les salaires du 6 janvier 2011 au 31 décembre 2015, apparaît donc bien fondée ;

1) ALORS QUE la cassation qui atteint un chef de dispositif n'en laisse rien subsister quel que soit le moyen qui a déterminé la cassation ; que l'arrêt rendu par la cour d'appel le 29 octobre 2015 a été annulé en ce qu'il a condamné la société Efidis à payer à la salariée certaines sommes provisionnelles à titre de rappel de salaires pour la période du 29 octobre 2009 au 23 septembre 2015, et que si la cassation a été déterminée par un moyen de droit relatif au point de départ de la reprise du paiement des salaires, le chef de dispositif par lequel le juge des référés avait alloué une provision à la salariée a ainsi été anéanti ; qu'en retenant cependant que la cour de renvoi n'était pas appelée à statuer sur les éléments du litige concernant la compétence de la juridiction de référé et en refusant, en conséquence, d'examiner, comme elle y était invitée, si la demande de Mme D... ne se heurtait pas à une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 624, 625, 631, 632 et 638 du code de procédure civile, ensemble l'article R. 1455-7 du code du travail ;

2) ALORS QUE si, durant tout le mois suivant la décision d'inaptitude et encore à l'expiration de ce mois, le salarié déclaré inapte s'est trouvé en arrêt de travail et que son contrat était donc suspendu, l'employeur ne saurait être tenu, à défaut de l'avoir reclassé sur un autre poste ni licencié, de lui verser son salaire ; qu'il est constant qu'à la suite de la reprise du 30 septembre 2009, Mme D... a été placée à nouveau en arrêt de travail le 3 octobre 2009 et qu'elle l'est restée sans interruption jusqu'au 1er août 2011 ; qu'en retenant cependant que l'employeur avait l'obligation de reprendre le paiement du salaire à l'expiration du délai d'un mois suivant la notification de la décision de l'inspecteur du travail, soit le 6 janvier 2011, dès lors qu'à cette date, il n'avait pas procédé au reclassement de Mme D... ni à son licenciement pour inaptitude, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail ;

3) ALORS, à tout le moins, QU'en refusant de considérer comme une contestation sérieuse le moyen tiré de ce que la salariée était de nouveau placée en arrêt de travail, à compter du 3 octobre 2009, qu'elle l'était encore à la date à laquelle est intervenue la décision de l'inspecteur du travail, et l'était encore à l'expiration du délai d'un mois suivant la connaissance par l'employeur de cette décision d'inaptitude, soit le 6 janvier 2011, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-7 du code du travail, ensemble les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du même code.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Mme D... est constitutif d'un trouble manifestement illicite et d'avoir condamné la société Efidis à payer à la salariée les sommes provisionnelles de 66 061,83 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er juin 2016 au 1er novembre 2018 et 6 606,18 euros au titre des congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE la compétence de la juridiction de référé est fondée sur l'existence d'un trouble manifestement illicite qui résulte de la violation de l'article L. 1132-1 du code du travail ; qu'il convient par suite d'examiner si les éléments de l'espèce laissent présumer l'existence d'une discrimination interdite par la loi ; que la lettre de licenciement du 31 mai 2016 est rédigée dans ces termes : «
vous avez été convoquée, dans la perspective d'une reprise d'activité, à une première visite médicale de reprise le 11 février 2016 pour le 24 février 2016. Vous ne vous y êtes pas présentée sans justifier d'aucun motif. Vous avez dès lors été convoquée de nouveau le 25 février 2016 à une seconde visite médicale de reprise pour le 29 mars 2016. De nouveau, vous ne vous y êtes pas présentée sans justifier de motif. Vous avez en conséquence été convoquée le 6 avril 2016 à une troisième visite médicale de reprise le 21 avril 2016 et nous vous avons mise en demeure de vous y présenter (
) vous avez persisté dans votre comportement et vous ne vous êtes pas présentée à la visite médicale de reprise du 21 avril 2016 sans motif. Votre refus réitéré nonobstant une mise en demeure de vous présenter aux visites médicales de reprise que nous avons organisées caractérise une faute grave
» ; que ces termes montrent que la rupture est fondée sur l'inaptitude de Mme D... à laquelle il est reproché de ne pas se présenter aux visites de reprise ; que la société Efidis doit démontrer que sa décision de rompre le contrat de travail est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que la convocation de la salariée à des visites de reprise n'était pas justifiée dès lors que la société Efidis avait été informée de la décision d'inaptitude à son poste de gardienne prise le 6 décembre 2010 par l'inspecteur du travail ; qu'elle ne lui a proposé aucun poste de reclassement alors que celle-ci a été déclarée apte à un poste administratif à mi-temps, ni repris le paiement de son salaire alors qu'elle n'avait pas procédé à son licenciement pour inaptitude ; que la société a organisé de nouvelles visites de reprise en février, mars et avril 2016, alors qu'elle avait connaissance de l'arrêt rendu le 29 octobre 2015 qui lui a enjoint de reprendre le paiement du salaire ; que les termes de la lettre de licenciement comme la convocation à des visites de reprise, inutiles en présence d'une décision d'inaptitude connue depuis le 6 décembre 2010, et l'absence de toute offre de reclassement sur un poste administratif établissent le caractère discriminatoire de la rupture ;

1) ALORS QUE la cassation à intervenir sur la base soit du premier moyen soit du deuxième moyen entraînera, en application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif déclarant le licenciement illicite ;

2) ALORS QUE la société Efidis faisait valoir qu'une visite médicale de reprise était évidemment nécessaire avant de reclasser Mme D... sur un quelconque poste dès lors qu'elle était en arrêt de travail depuis six ans ; qu'en omettant de rechercher si, à supposer que la société Efidis ait été tenue, dès après la décision d'inaptitude prise par l'inspecteur du travail, de proposer un poste de reclassement à la salariée à défaut de l'avoir licenciée pour inaptitude, elle n'était pas, en tout état de cause, fondée en 2016, la salariée n'ayant pas travaillé depuis septembre 2008, à lui faire passer un nouvel examen médical avant toute reprise d'activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1132-1 du code du travail ;

3) ALORS QUE le motif de licenciement tiré d'un refus du salarié de se présenter à une visite médicale de reprise s'assimile à un grief d'insubordination et ne constitue pas, par lui-même, un motif discriminatoire, quelle que soit l'éventuelle légitimité de ce refus ; qu'en retenant que les examens médicaux auxquels il est reproché à Mme D... de ne pas se présenter étaient inutiles en présence d'une décision d'inaptitude connue depuis 2010 et de l'absence de toute offre de reclassement sur un poste administratif à mi-temps ni de reprise du paiement du salaire à défaut d'avoir procédé à son licenciement pour inaptitude, ce qui établirait le caractère discriminatoire de la rupture sans caractériser de lien de causalité entre le licenciement prononcé en mai 2016 et l'état de santé de la salariée, la cour d'appel a violé l'article L. 1132-1 du code du travail ;

4) ALORS en tout état de cause QUE le licenciement a pour effet, dès lors que sa nullité n'a pas été prononcée, de rompre la relation contractuelle et, par suite, de mettre fin à l'obligation pour l'employeur de verser le salaire ; qu'en condamnant la société Efidis à payer à la salariée une somme provisionnelle à titre de rappel de salaire pour la période postérieure au licenciement qu'elle a seulement considéré comme constitutif d'un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail, ensemble l'article L. 1231-1 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-12674
Date de la décision : 21/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 oct. 2020, pourvoi n°19-12674


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Colin-Stoclet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.12674
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