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14/10/2020 | FRANCE | N°19-14066

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 octobre 2020, 19-14066


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 octobre 2020

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 606 F-D

Pourvoi n° H 19-14.066

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M.L....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 16 juillet 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
____

_____________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 OCTOBRE 2020

Mme N... I..., épouse L..., domiciliée [...] , a ...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 14 octobre 2020

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 606 F-D

Pourvoi n° H 19-14.066

Aide juridictionnelle totale en défense
au profit de M.L....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 16 juillet 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 OCTOBRE 2020

Mme N... I..., épouse L..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° H 19-14.066 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (6e chambre A), dans le litige l'opposant à M. E... L..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poinseaux, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme I..., de Me Bertrand, avocat de M. L..., et l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er septembre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Poinseaux, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 décembre 2018), après une première procédure de divorce n'ayant pas abouti et une ordonnance de non-conciliation du 14 janvier 2013 attribuant le domicile conjugal à l'époux à titre onéreux, un jugement du 28 avril 2016 a notamment prononcé le divorce de M. L... et Mme I..., en a reporté les effets entre époux à la date du 30 novembre 2006 et a statué sur la prestation compensatoire. Un arrêt du 11 janvier 2018 a infirmé le jugement de ce dernier chef, rejeté la demande de Mme I... à ce titre et confirmé le jugement pour le surplus.

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

2. M. L... conteste la recevabilité du pourvoi, aux motifs que Mme I... est dépourvue d'intérêt à agir.

3. Cependant, il résulte des productions qu'il conteste l'attribution rétroactive du domicile conjugal à titre onéreux, caractérisant ainsi l'intérêt à agir de Mme I....

4. Le pourvoi est donc recevable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

5. Mme I... fait grief à l'arrêt de rejeter sa requête en omission de statuer, alors « que, devant le juge du divorce, Mme I... avait formé deux demandes différentes, à savoir le report des effets du divorce entre époux à la date du 30 novembre 2006 et la fixation de la date d'attribution du domicile conjugal à titre onéreux à M. L... à cette même date, soit antérieurement à l'ordonnance de non-conciliation du 14 janvier 2013 rendue dans la procédure ayant abouti au jugement de divorce ; que ni le juge aux affaires familiales, dans le dispositif de son jugement du 28 avril 2016, ni la cour d'appel, dans son arrêt du 11 janvier 2018, ne se sont prononcés sur la date d'attribution du domicile conjugal à titre onéreux ; qu'en rejetant néanmoins la requête en omission de statuer formée par Mme I..., la cour d'appel a violé l'article 463 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 463 du code de procédure civile :

6. La juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut compléter son jugement.

7. Pour rejeter la requête en omission de statuer de Mme I..., la cour d'appel retient qu'il est manifeste que la réponse à la question posée a été apportée par les juges conciliateurs, le juge du divorce et la cour d'appel et qu'il est dès lors constant que, lors des opérations de liquidation du régime matrimonial, M. L... sera redevable à l'égard de Mme I... d'une indemnité d'occupation qui sera calculée à compter du 30 novembre 2006.

8. En statuant ainsi, alors que, dans son précédent arrêt, elle ne s'était pas prononcée sur la demande de Mme I... tendant, sur le fondement de l'article 262-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, à voir conférer un caractère onéreux à la jouissance du logement conjugal par M. L... à compter du 30 novembre 2006, et sur laquelle il n'était pas non plus statué dans le dispositif du jugement qu'elle confirmait, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice ne justifie pas que la Cour de cassation statue au fond, comme le demande Mme I....

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux autres branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 13 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne M. L... aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. L... à payer à Mme I... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme I....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la requête en omission de statuer présentée par Madame N... I... et de l'avoir condamnée aux dépens ;

AUX MOTIFS Qu'aux termes des dispositions de l'article 462 du Code de procédure civile, les erreurs ou omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande ; que l'alinéa 2 de l'article 462 ajoute que le juge peut être saisi sur simple requête de l'une des parties, ou par requête commune, ou se saisir d'office ; qu'en l'espèce, il est constant que les parties ont déposé deux requêtes successives en divorce sur deux fondements différents, avant de voir leur divorce prononcé ; qu'ainsi, Madame I... a déposé une première requête en divorce le 11 août 2006, qui a donné lieu à une ordonnance de non conciliation rendue le 30 novembre 2006 ; qu'aux termes de cette ordonnance, la jouissance du domicile conjugal a été attribuée à l'époux à titre onéreux ; que Madame I... a ensuite fait assigner son époux en divorce sur le fondement de l'article 242 du Code civil et le juge aux affaires familiales d'AIX-EN-PROVENCE a prononcé, par jugement du 24 janvier 2011, le divorce aux torts partagés des époux et a condamné Monsieur L... à payer à Madame I... une prestation compensatoire en capital de 10.000 euros ; que, sur appel interjeté par Monsieur L..., la Cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE a, par arrêt du 9 février 2012, infirmé le jugement entrepris et débouté les deux époux de leur demande en divorce pour faute ; que Madame I... a déposé le 10 mai 2012 une nouvelle requête en divorce devant le Juge aux affaire familiales d'AIX-EN-PROVENCE ; qu'une ordonnance de non-conciliation est intervenue le 14 janvier 2013, aux termes de laquelle le domicile conjugal a été attribué à l'époux à titre onéreux ; que Madame I... a fait assigner son époux en divorce sur le fondement des articles 237 et suivants du Code civil ; que, par jugement en date du 28 avril 2016, le Juge aux affaire familiales d'AIX-EN-PROVENCE a prononcé le divorce pour altération définitive du lien conjugal, ordonné le report des effets du divorce entre époux à la date du 30 novembre 2006 et a condamné Monsieur L... à payer à Madame I... une prestation compensatoire d'un montant de 20.000 euros payable en 96 mensualités de 208,33 euros ; que Monsieur L... a interjeté un appel partiel de ce jugement en limitant son appel aux dispositions relatives à la prestation compensatoire ; que la Cour observe que, dans ses dernières conclusions déposées le 31 janvier 2017 dans le cadre de l'appel interjeté par Monsieur L..., l'intimée demandait simplement à la Cour :

- de faire remonter la date des effets du divorce au 30 novembre 2006,

- et de dire qu'à compter de cette date « l'attribution du domicile conjugal à Monsieur L... se fera à titre onéreux » ;

Que, par arrêt en date du 11 janvier 2018, la Cour de céans a infirmé partiellement le jugement de divorce prononcé le 28 avril 2018 en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire, a confirmé le jugement déféré pour le surplus et débouté les parties de toutes autres demandes ; qu'aux termes de ce rappel des différentes instances engagées, il est manifeste que la réponse à la question posée a été apportée par les juges conciliateurs, le juge du divorce et au final par la Cour d'appel ; que les deux ordonnances de non conciliation rendues en l'espèce le 30 novembre 2006, puis le 14 janvier 2013, ont expressément prévu l'attribution de la jouissance du domicile conjugal à l'époux à titre onéreux ; qu'il est ensuite clairement indiqué dans le jugement de divorce entrepris que la date des effets du divorce entre époux sera fixée au 30 novembre 2016, le juge précisant dans sa motivation (page 4) qu'il est acquis aux débats que les époux ont cessé de collaborer et de cohabiter dès le prononcé de la première ordonnance de non conciliation, soit au 30 novembre 2006 ; que, or, la Cour d'appel a infirmé ce jugement uniquement en ses dispositions relatives à la prestation compensatoire que la Cour a supprimées et la Cour a confirmé le jugement de divorce pour le surplus ; qu'il est dès lors constant que, lors des opérations de liquidation du régime matrimonial, Monsieur E... L... sera redevable à l'égard de Madame N... I... d'une indemnité d'occupation qui sera calculée à compter du 30 novembre 2006 ; qu'il convient en l'état de rejeter la requête en omission de statuer non fondée ;

ALORS, D'UNE PART, QUE, devant le Juge du divorce, Madame I... avait formé deux demandes différentes, à savoir le report des effets du divorce entre époux à la date du 30 novembre 2006 et la fixation de la date d'attribution du domicile conjugal à titre onéreux à Monsieur L... à cette même date, soit antérieurement à l'ordonnance de non-conciliation du 14 janvier 2013 rendue dans la procédure ayant abouti au jugement de divorce ; que ni le Juge aux affaires familiales, dans le dispositif de son jugement du 28 avril 2016, ni la Cour d'appel, dans son arrêt du 11 janvier 2018, ne se sont prononcés sur la date d'attribution du domicile conjugal à titre onéreux ; qu'en rejetant néanmoins la requête en omission de statuer formée par l'exposante, la Cour d'appel a violé l'article 463 du Code de procédure civile ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE, devant le Juge du divorce, Madame I... avait formé deux demandes différentes, à savoir le report des effets du divorce entre époux à la date du 30 novembre 2006 et la fixation de la date d'attribution du domicile conjugal à titre onéreux à Monsieur L... à cette même date, soit antérieurement à l'ordonnance de non-conciliation du 14 janvier 2013 rendue dans la procédure ayant abouti au jugement de divorce ; qu'en considérant, pour rejeter la requête en omission de statuer de l'exposante, que la question avait été tranchée par les précédentes décisions, sans constater que ces décisions s'étaient prononcées sur la date d'attribution à titre onéreux du domicile conjugal, la Cour d'appel a méconnu l'objet du litige et a violé l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN, QUE la décision par laquelle le juge reporte les effets du divorce entre les époux à une date antérieure à celle de l'ordonnance de non conciliation n'a pas pour effet de conférer à l'occupation du logement conjugal par l'un des époux un caractère onéreux avant la date de l'ordonnance rendue dans la procédure ayant abouti au jugement de divorce ; qu'en énonçant, pour rejeter la requête en rectification formée par l'exposante, « qu'il est ensuite clairement indiqué dans le jugement de divorce entrepris que la date des effets du divorce entre époux sera fixée au 30 novembre 2016, le juge précisant dans sa motivation (page 4) qu'il est acquis aux débats que les époux ont cessé de collaborer et de cohabiter dès le prononcé de la première ordonnance de non conciliation, soit au 30 novembre 2006 », la Cour d'appel a violé l'article 262-1 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-14066
Date de la décision : 14/10/2020
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 décembre 2018


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 oct. 2020, pourvoi n°19-14066


Composition du Tribunal
Président : Mme Batut (président)
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14066
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