La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/10/2020 | FRANCE | N°19-14755

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 07 octobre 2020, 19-14755


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 609 FS-P+B

Pourvoi n° F 19-14.755

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

1°/ la société Almendricos, société par act

ions simplifiée, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Nîmotel,

2°/ la société Etude Balincourt, société d'exercice libéral à responsabi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

CH.B

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 octobre 2020

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 609 FS-P+B

Pourvoi n° F 19-14.755

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 7 OCTOBRE 2020

1°/ la société Almendricos, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Nîmotel,

2°/ la société Etude Balincourt, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. Q..., agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la société Almendricos,

ont formé le pourvoi n° F 19-14.755 contre l'arrêt rendu le 28 février 2019 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la société Crédit foncier de France, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Compagnie foncière de crédit, défenderesse à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat des sociétés Almendricos et Etude Balincourt, de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Crédit foncier de France, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 septembre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mmes Vallansan, Graff-Daudret, Vaissette, Bélaval, Fontaine, Fevre, conseillers, M. Guerlot, Mmes Barbot, Brahic-Lambrey, Kass-Danno, Tostain, Bessaud, M. Boutié, Mme Bellino, conseillers référendaires, Mme Henry, avocat général, et Mme Fornarelli, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 28 février 2019), par un acte du 28 mars 2008, la Compagnie foncière de crédit, aux droits de laquelle est venue la société Crédit foncier de France (le CFF), a consenti une ouverture de crédit à la société Nîmotel pour financer l'acquisition d'un ensemble immobilier, la créance du CFF étant garantie par un cautionnement consenti par la société Almendricos, société mère de la société Nîmotel.

2. Le 25 novembre 2011, la société Nîmotel a été mise en sauvegarde. La créance du CFF a été admise et un plan de sauvegarde a été arrêté par un jugement du 30 avril 2013.

3. Par un acte du 30 juillet 2013, la société Almendricos a fait apport, sous le régime de la fusion-absorption, à la société Nîmotel, qui a adopté simultanément la dénomination sociale Almendricos, de la totalité de son actif, à charge pour elle de payer la totalité de son passif. Cette fusion a pris effet le 24 septembre 2013 et la société Almendricos (ancienne) a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 4 octobre 2013.

4. Le CFF a fait opposition à cette fusion sur le fondement de l'article L. 236-14 du code de commerce en se prévalant de sa créance contre la société absorbée au titre du cautionnement que celle-ci lui avait consenti. Un arrêt, devenu irrévocable, du 30 avril 2015, a fait droit à l'opposition du CFF à l'opération de fusion-absorption de la société Almendricos par la société Nîmotel devenue Almendricos, a ordonné le paiement par la société Almendricos, anciennement Nîmotel, de la créance du CFF et dit qu'à défaut de remboursement, la fusion-absorption resterait inopposable au CFF.

5. Le 2 février 2017, la résolution, pour inexécution, du plan de sauvegarde de la société Almendricos a été prononcée. Le 15 février 2017, cette société a été mise en redressement judiciaire.

6. Le 17 mai 2017, le CFF a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes bancaires de la société Almendricos, que celle-ci a contestée.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. La société Almendricos et la société Etude Balincourt, en sa qualité de commissaire à l'exécution de son plan de redressement, font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes tendant à l'annulation de la saisie-attribution, alors « que l'inopposabilité de la fusion au créancier d'une société absorbée ne l'autorise pas à pratiquer une saisie entre les mains de la société absorbante, dès lors qu'une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société absorbante postérieurement à la naissance de la créance contre la société absorbée ; qu'en retenant pourtant que "la procédure collective ouverte contre la nouvelle société Almendricos ne saurait faire échec à l'action du CFF à l'égard duquel la personnalité juridique de la société absorbée n'a pas disparu", la cour d'appel a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

8. En cas de fusion-absorption, un créancier titulaire sur la société absorbée d'une créance antérieure à cette opération et qui bénéficie, en application de l'article L. 236-14 du code de commerce, d'une décision exécutoire lui déclarant la fusion inopposable, conserve le droit de recouvrer sa créance sur le patrimoine de la société absorbée dissoute. Il en résulte qu'il ne peut se voir opposer l'arrêt ou l'interdiction des procédures d'exécution, prévus par l'article L. 622-21, II, du code de commerce, résultant de l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante.

9. Dès lors, abstraction faite du motif erroné mais surabondant selon lequel la personnalité juridique de la société absorbée n'a pas disparu, c'est à bon droit que l'arrêt retient qu'opposer la règle de l'arrêt des procédures d'exécution contre la nouvelle société Almendricos aux créanciers privilégiés antérieurs à l'ouverture de la procédure collective et à la fusion, reviendrait à priver de toute voie d'exécution sur les actifs transmis à la société absorbante le créancier auquel la fusion a été déclarée inopposable, en rendant possible l'utilisation de la procédure de fusion-absorption pour faire disparaître la société caution absorbée et faire obstacle à l'action du créancier sur les actifs ainsi transmis.

10. Le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus.

Et sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

11. La société Almendricos et la société Etude Balincourt, ès qualités, font le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ qu'à supposer même que le créancier de la société absorbée à l'égard duquel la fusion est inopposable puisse pratiquer une saisie en vue d'obtenir paiement d'une dette antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante, c'est à la condition de justifier que l'objet même de la saisie est constitué des seuls actifs de la société absorbée ; qu'en retenant pourtant en l'espèce qu' "eu égard à la fongibilité des comptes bancaires saisis, le CFF peut agir en recouvrement à l'encontre de la société absorbante dans la limite de la créance fixée par arrêt du 30 avril 2015 sans se voir opposer une absence de traçabilité des actifs saisis" la cour d'appel a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce ;

2°/ qu'à supposer même que le créancier de la société absorbée à l'égard duquel la fusion est inopposable puisse pratiquer une saisie en vue d'obtenir paiement d'une dette antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante, c'est à la condition de justifier que l'objet même de la saisie est constitué des seuls actifs de la société absorbée ; que le juge de l'exécution a cependant retenu en l'espèce qu' "afin d'obtenir la nullité de la mesure d'exécution forcée, le demandeur a effectivement la faculté d'établir que les fonds saisis ne peuvent être revendiqués par le créancier en vertu de son titre exécutoire. Or, cette preuve n'est pas rapportée en l'état par la société Almendricos et la société Etude Balincourt" ; qu'en statuant ainsi, à supposer ce motif adopté, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce, ensemble l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

12. Dans le cas d'une saisie-attribution pratiquée sur les comptes bancaires dont est devenue titulaire une société absorbante par un créancier à qui l'opération de fusion-absorption a été déclarée inopposable en application de l'article L. 236-14 du code de commerce, l'effet attributif de la saisie s'étend à la totalité des soldes créditeurs de ces comptes, sauf pour le débiteur saisi, avisé de la saisie dans les conditions prévues par l'article R. 211-3 du code des procédures civiles d'exécution, à établir que ces soldes sont constitués, en tout ou partie, de fonds ne provenant pas de la société absorbée, qui comme tels devraient être exclus de l'assiette de la saisie.

13. C'est dès lors à bon droit et sans inverser la charge de la preuve que l'arrêt retient qu'eu égard à la fongibilité des comptes objet de la saisie-attribution, le CFF peut, dans la limite de la créance constatée par son titre exécutoire, agir en recouvrement contre la société absorbante sans avoir à établir préalablement l'origine des fonds saisis.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Almendricos aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Delamarre et Jehannin, avocat aux Conseils, pour les sociétés Almendricos et Etude Balincourt.

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de la société Almendricos et de la Selarl Etude Balincourt ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE : « en vertu de l'article L 236-14 du code de commerce, « la société absorbante est débitrice des créanciers non-obligataires de la société absorbée au lieu et place de celle-ci, sans que cette substitution emporte novation à leur égard. Les créanciers non-obligataires des sociétés participant à l'opération de fusion et dont la créance est antérieure à la publicité donnée au projet de fusion peuvent former opposition à celui-ci dans le délai fixé par décret en Conseil d'Etat. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne, soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties si la société absorbante en offre et si elles sont jugées suffisantes. A défaut de remboursement des créances ou de constitution des garanties ordonnées, la fusion est inopposable à ce créancier. L'opposition formée par un créancier n'a pas pour effet d'interdire la poursuite des opérations de fusion. Les dispositions du présent article ne mettent pas obstacle à l'application des conventions autorisant le créancier à exiger le remboursement immédiat de sa créance en cas de fusion de la société débitrice avec une autre société » ; qu'aux termes d'un traité de fusion régularisé le 30 juillet 2013, la société Almendricos a fait apport à titre de fusion à la société Nimotel devenue nouvelle Almendricos de la totalité de son actif, à charge de payer la totalité de son passif ; que la fusion a pris effet le 24 septembre 2013 et la société Almendricos a été radiée le 4 octobre 2013 ; que par arrêt définitif du 30 avril 2015 la cour d'appel de Nîmes a déclaré recevable et fondée l'opposition du Crédit Foncier de France à l'opération de fusion-absorption de la SAS Almendricos par la SAS Nîmotel devenue Almendricos, a ordonné le paiement par la SAS Almendricos anciennement Nîmotel de la créance du Crédit Foncier de France de la somme de 2 181 896,68 euros avec intérêts et dit qu'à défaut de remboursement, la fusion absorption restera inopposable au Crédit Foncier de France ; que la créance du Crédit Foncier de France contre la SAS ancienne Almendricos, aux droits de laquelle vient la SAS Nouvelle Almendricos, n'est donc pas éteinte par l'effet de la fusion-absorption ; qu'il n'est pas contesté que la saisie attribution pratiquée le 17 mai 2017 par le Crédit Foncier de France auprès du Crédit agricole sur les comptes appartenant à la SAS Almendricos est fondée sur le titre exécutoire que constitue l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes du 30 avril 2015 qui constate la créance liquide et exigible de la banque, conformément aux exigences de l'article L. 211-1 du code des procédures civiles d'exécution ; qu'il est également admis par les parties que le Crédit Foncier de France, du fait de son opposition à la fusion-absorption bénéficie d'un droit de poursuite propre s'exerçant par priorité sur la société absorbante, par rapport aux autres créanciers de celle-ci ; qu'en vertu de l'article L. 622-21 du code de commerce, « le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant : 1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; 2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent. II.-Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture. III.-Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus » ; que la sas Almendricos nouvelle et la selarl étude Balincourt concluent à la nullité de la saisie motif pris de ce que l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Sas Almendricos nouvelle par jugement du tribunal de commerce de Nîmes du 15 février 2017 fait obstacle à la mesure d'exécution pour toute dette antérieure à cette date, en vertu du principe d'arrêt des poursuites individuelles ; que pour autant l'inopposabilité de la fusion-absorption au Crédit Foncier de France a pour effet de maintenir ce créancier dans une position identique à celle qui était la sienne avant la fusion ; qu'il est observé qu'à la date de la fusion le 30 juillet 2013 la société ancienne Almendricos avait été mise en demeure par le Crédit Foncier de France le 24 juillet 2012 de lui régler la somme de 2 181 896,68 au titre de son engagement de caution, et qu'elle n'a pas déclaré une éventuelle cessation des paiements ; que de plus aucun des éléments qu'elle produit aux débats n'établit qu'elle a déclaré une cessation des paiements au 30 juillet 2013 ou que le Crédit Foncier de France a porté atteinte au droit de la société ancienne Almendricos de déposer le bilan ; qu'appliquer le principe d'arrêt des poursuites individuelles contre la nouvelle société Almendricos pour les créanciers privilégiés antérieurs à l'ouverture de la procédure collective et surtout antérieurs à la fusion, reviendrait à priver de toute voie d'exécution sur les actifs transmis à la société absorbante le créancier auquel la fusion a pourtant été déclarée inopposable, en rendant possible une instrumentalisation de la procédure de fusion-absorption destinée à faire disparaître la caution absorbée en faisant obstacle à l'action du créancier sur les actifs de la société absorbée postérieurement à leur transmission dans le patrimoine de l'absorbante ; que la créance du Crédit Foncier de France est antérieure à la fusion et ne fait pas partie du passif du redressement judiciaire de SAS Almendricos nouvelle ; que la procédure collective ouverte contre la nouvelle société Almendricos ne saurait faire échec à l'action du Crédit Foncier de France à l'égard duquel la personnalité juridique de la société absorbée n'a pas disparu ; qu'eu égard à la fongibilité des comptes bancaires saisis, le Crédit Foncier de France peut agir en recouvrement à l'encontre de la société absorbante dans la limite de sa créance fixée par arrêt du 30 avril 2015 sans se voir opposer une absence de traçabilité des actifs saisis ; que le jugement entrepris sera donc confirmé » ;

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE : « selon l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, « Le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution » ; que selon l'article L. 236-14 du code de commerce, « la société absorbante est débitrice des créanciers non-obligataires de la société absorbée au lieu et place de celle-ci, sans que cette substitution emporte novation à leur égard. Les créanciers non-obligataires des sociétés participant à l'opération de fusion et dont la créance est antérieure à la publicité donnée au projet de fusion peuvent former opposition à celui-ci dans le délai fixé par décret en Conseil d'Etat. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne, soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties si la société absorbante en offre et si elles sont jugées suffisantes. A défaut de remboursement des créances ou de constitution des garanties ordonnées, la fusion est inopposable à ce créancier » ; qu'en l'espèce, il résulte de la décision du 30 avril 2015 que la cour d'appel a « dit que la SAS Almendricos anciennement dénommée Nimotel payera à la SA Crédit Foncier de France la somme de 2 181 896,68 euros arrêtée au 3 juillet 2012 outre les intérêts annuels, commissions, frais et accessoires postérieurs à cette date jusqu'à parfait paiement, ladite créance n'étant pas soumise aux délais du plan de sauvegarde arrêté par jugement du 30 avril 2013 et les intérêts ainsi échus pour une année entière au moins étant capitalisés à compter de la demande qui a été faite en justice » qu'en outre, la juridiction a précisé « qu'à défaut de remboursement, la fusion restera inopposable à la SA Crédit Foncier de France » ; qu'il convient de souligner, en premier lieu, que les contestations invoquées par la société Almendricos et la Selarl Etude Balincourt tendent à contester sur le fond la décision d'inopposabilité de la fusion à l'égard du Crédit Foncier de France alors que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice et surtout en suspendre l'exécution notamment en paralysant l'application de ses conséquences juridiques ; qu'en deuxième lieu, il n'est pas contesté que le Crédit Foncier de France dispose à l'égard de la SAS Almendricos anciennement dénommée Nimotel d'un titre exécutoire en vertu de l'arrêt du 30 avril 2015 et que la saisie-attribution a été exercée sur les comptes de la SAS Almendricos ; que par conséquent, la saisie-attribution est, à ce stade valide ; qu'en dernier lieu, afin d'obtenir la nullité de la mesure d'exécution forcée, le demandeur a effectivement la faculté d'établir que les fonds saisis ne peuvent être revendiqués par le créancier en vertu de son titre exécutoire ; qu'or, cette preuve n'est pas rapportée en l'état par la société Almendricos et la Selarl Etude Balincourt ; que par conséquent, leur demande sera rejetée » ;

1/ ALORS QUE l'inopposabilité de la fusion au créancier d'une société absorbée ne l'autorise pas à pratiquer une saisie entre les mains de la société absorbante, dès lors qu'une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société absorbante postérieurement à la naissance de la créance contre la société absorbée ; qu'en retenant pourtant que « la procédure collective ouverte contre la nouvelle société Almendricos ne saurait faire échec à l'action du Crédit Foncier de France à l'égard duquel la personnalité juridique de la société absorbée n'a pas disparu » (arrêt, p. 5, alinéa 3), la cour d'appel a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce ;

2/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QU'à supposer même que le créancier de la société absorbée à l'égard duquel la fusion est inopposable puisse pratiquer une saisie en vue d'obtenir paiement d'une dette antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante, c'est à la condition de justifier que l'objet même de la saisie est constitué des seuls actifs de la société absorbée ; qu'en retenant pourtant en l'espèce qu' « eu égard à la fongibilité des comptes bancaires saisis, le Crédit Foncier de France peut agir en recouvrement à l'encontre de la société absorbante dans la limite de la créance fixée par arrêt du 30 avril 2015 sans se voir opposer une absence de traçabilité des actifs saisis » (arrêt, p. 5, antépénultième alinéa), la cour d'appel a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce ;

3/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QU'à supposer même que le créancier de la société absorbée à l'égard duquel la fusion est inopposable puisse pratiquer une saisie en vue d'obtenir paiement d'une dette antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société absorbante, c'est à la condition de justifier que l'objet même de la saisie est constitué des seuls actifs de la société absorbée ; que le juge de l'exécution a cependant retenu en l'espèce qu' « afin d'obtenir la nullité de la mesure d'exécution forcée, le demandeur a effectivement la faculté d'établir que les fonds saisis ne peuvent être revendiqués par le créancier en vertu de son titre exécutoire. Or, cette preuve n'est pas rapportée en l'état par la société Almendricos et la Selarl Etude Balincourt » (jugement, p. 3, alinéa 7) ; qu'en statuant ainsi, à supposer ce motif adopté, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et a violé les articles L. 236-14 et L. 622-21 du code de commerce, ensemble l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-14755
Date de la décision : 07/10/2020
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Mesures d'exécution forcée - Saisie-attribution - Comptes bancaires - Fusion-absorption du débiteur saisi - Portée

BANQUE - Compte - Compte courant - Redressement judiciaire du titulaire du compte - Saisie-attribution - Effet attributif - Etendue - Détermination

Dans le cas d'une saisie-attribution pratiquée sur les comptes bancaires dont est devenue titulaire une société absorbante par un créancier à qui l'opération de fusion-absorption a été déclarée inopposable en application de l'article L. 236-14 du code de commerce, l'effet attributif de la saisie s'étend à la totalité des soldes créditeurs de ces comptes, sauf pour le débiteur saisi, avisé de la saisie dans les conditions prévues par l'article R. 211-3 du code des procédures civiles d'exécution, à établir que ces soldes sont constitués, en tout ou partie, de fonds ne provenant pas de la société absorbée, qui comme tels devraient être exclus de l'assiette de la saisie. C'est dès lors à bon droit et sans inverser la charge de la preuve qu'une cour d'appel retient qu'eu égard à la fongibilité des comptes objet de la saisie-attribution, le créancier peut, dans la limite de la créance constatée par son titre exécutoire, agir en recouvrement contre la société absorbante sans avoir à établir préalablement l'origine des fonds saisis


Références :

Sur le numéro 1 : Article L. 236-14 du code de commerce

article L. 622-21, II, du code de commerce
Sur le numéro 2 : article L. 236-14 du code de commerce

article R. 211-3 du code des procédure civiles d'exécution.

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 28 février 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 07 oct. 2020, pourvoi n°19-14755, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat(s) : SCP Delamarre et Jehannin, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.14755
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award